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samedi 14 mai 2011

Tous des assistés?

Haro sur des "privilégiés"

"J'ai entendu dire que, quand on avait le RSA, on pouvait gagner autant que des gens qui travaillent et sont au smic : faux, faux, faux. Ce sont des vieilles lunes... On a donné des aides aussi aux gens qui travaillaient parce qu'il y a quelques années les gens qui reprenaient le travail perdaient de l'argent" (Martin Hirsch)

__Monsieur Wauquiez est apparemment un brave garçon.
Mais issu d'une famille où l'on ignorait le besoin, sorti des grandes écoles où il fut "assisté" (surtout l'ENS), il a sans doute très peu fréquenté les milieux moins favorisés, le monde du travail et n'a qu'une idée vague de la précarité et une notion toute théorique du chômage et de l'exclusion, de la difficulté de trouver un travail, parfois même de l'impossibilité de le faire dans certains lieux et dans certains cas...
Pourtant, il s'érige en expert en médecine sociale, évoquant la notion de "cancer", en jouant habilement sur l'argument facile des (assez minoritaires) petits tricheurs profitant du système _ on en trouvera toujours_, en donnant de mauvais exemples.
Il est assez intelligent pour comprendre que la plupart des intéressés souffrent d'une situation subie, parfois durablement...Mais l'intelligence n'est pas en cause dans ce problème.

Il est vrai qu'il s'est fait reprendre par Mr Fillon pour avoir dit "
tout haut ce que tout le monde pense tout bas". Mais uniquement sur la forme, vu les réactions au sein même de sa propre famille politique et du père du RSA, Martin Hirsh.
_Le but de l'opération paraît claire: grapiller des voix au concurrent FN et déstabiliser le PS .
Enjeux électoralistes donc, démarche sans doute téléguidée de l'Elysée.
Proposition aussi démagogique qu'inapplicable , destinée à tester l'opinion et créer des clivages électoralement profitables: diviser pour régner...
La droite sait bien que sans minima sociaux, la situation sociale serait explosive, quand près de 8 millions de Français sont sous le seuil de pauvreté, quand le chômage atteint de tels sommets, que travailler bénévolement, même cinq heures, met en péril de petits boulots déjà gérés par des collectivités locales, par exemple.
"C'est illogique : le RSA implique déjà l'obligation de suivre un parcours d'insertion dans l'emploi, sous peine de radiation." De plus, souligne la responsable, les travaux proposés par le ministre, qu'il s'agisse de "l'accueil de service public" ou de la surveillance des sorties d'école, sont déjà le plus souvent des postes en contrats aidés, justement proposés à des publics en réinsertion. Remplacer ces personnes – généralement rémunérées sur des contrats d'une vingtaine d'heures – par des allocataires du RSA reviendrait à substituer un public de travailleurs "bénévoles" à des salariés bénéficiant de contrats aidés qui ouvrent droit à des cotisations retraite et chômage. Donc à aggraver la précarité globale." (A.Brassens-Le Monde)

______Mais pourquoi ne parle-t-on pas des assistés privilégiés comme Mr Dassaut ou Tapie et tous ces « assistés » qui payent l'ISF? L'impôt sur le revenu pèse de moins en moins lourd ...
Le vrai cancer de la France, ce n'est pas l'assistanat, terme humiliant, mais le chômage,le chômage de longue durée.

___"L'assistance, c'est une des réponses à ce cancer-là, un palliatif. Si l'assistance se développe, c'est parce que le chômage reste massif et que son indemnisation n'a cessé de baisser depuis le milieu des années 1990...L'assisté, c'est celui qui est pauvre, qui doit être aidé par la solidarité nationale. Utiliser le terme d'assistanat plutôt que d'assistance relève d'une volonté politique de stigmatiser une population très hétérogène. Parler d'assistanat, c'est aussi une façon de cibler les immigrer, sans les nommer. Le terme est si péjoratif qu'une majorité - les deux tiers - de ceux qui pourraient bénéficier du RSA activité ne le demandent pas, de peur d'être stigmatisés...La collectivité a le droit d'exiger des contreparties de son assistance, mais cette idée permet surtout d'éviter de se poser la question de l'efficacité de l'action publique pour les personnes éloignées de l'emploi. Le RSA a été conçu pour rendre incitatif le travail. C'est un échec. Car le problème n'est pas d'inciter les gens à travailler mais de les rendre "employables", c'est-à-dire de les former et de les accompagner dans leur démarche.... Contrairement à une idée reçue, les minima sociaux sont relativement bas en France, en comparaison d'autres pays européens. Le montant des minimas sociaux est deux fois plus important dans les pays d'Europe du Nord. Le RMI a perdu 34% par rapport au revenu médian des Français depuis le début des années 1990. Aujourd'hui, le RSA s'élève à 467 euros pour un célibataire et 980 euros pour un couple. C'est à peine la moitié du seuil de pauvreté. L'idée que les personnes assistées vivent dans une situation confortable est complètement fausse."(Nicolas Duvoux)
__La France, un «pays d'assistés»?:
"... pour beaucoup de Français, «assistés» est évidemment péjoratif: «Ce terme évoque des gens en situation de dépendance par rapport à la collectivité, comme si, derrière la protection sociale institutionnalisée, se masquait une déliquescence morale», dit Duvoux.
Avec le flot d'images qui s'y rapportent: les pauvres (ou les Roms) qui roulent en BMWun thème cher à Nicolas Sarkozy –, les journées passées à jouer à la console au lieu de chercher du travail, le travail au noir, ou encore les «allocations-braguette» – l'idée selon laquelle les pauvres, souvent étrangers, font des enfants pour toucher les allocations familiales.
«Ces représentations ont émergé dès la fin des années 1970 aux Etats-Unis», à la fin de l'âge d'or économique de l'après-guerre, raconte Hélène Périvier, économiste à l'OFCE (Sciences-Po). «Le républicain Ronald Reagan (président de 1981 à 1989) truffait ces discours sociaux de références à la “Welfare Queen”», cette femme pauvre de la banlieue de Chicago qui roulait prétendument en Cadillac, adorait le champagne, et aurait fraudé 150.000 dollars à diverses caisses sociales en s'inventant 80 noms, 30 adresses, et quatre maris décédés.

Un personnage inventé, comme l'a prouvé le livre du journaliste américain David Zucchino, Myth of the Welfare Queen (ci-contre). N'empêche: le cliché du pauvre oisif et fraudeur a fait florès. Y compris en Europe, où il a largement inspiré les politiques, de droite mais aussi de gauche à partir du milieu des années 1990.

Dans l'inconscient collectif des Blancs américains, la «Welfare Queen» était bien souvent noire. «Les programmes sociaux sont faits pour aider les plus pauvres, et les plus pauvres sont aussi généralement les populations dominées, des femmes ou des personnes issues des minorités ethniques», rappelle Hélène Périvier, de l'OFCE. «Mentionner l'assistanat dans le débat politique, c'est utiliser un langage codé, insiste Nicolas Duvoux. Ce terme évoque souvent, sans qu'il soit besoin de les nommer, les étrangers.» On saisit mieux pourquoi Patrick Buisson, le conseiller de Nicolas Sarkozy, place la «lutte contre l'assistanat» sur le même plan que l'immigration ou l'identité nationale..." Les Français qui tancent les «assistés» sont-ils pour autant tous racistes? «De plus en plus de gens, notamment les classes moyennes inférieuses et les jeunes, se sentent floués dans le jeu de la solidarité», admet Danièle Karniewicz, la présidente de la Caisse nationale d'assurance-retraites. Notamment toute une France des classes moyennes inférieures gagnées par l'«extension du désavantage social», selon le sociologue Olivier Schwartz: les salariés au Smic ou à peine plus, les jeunes, ou ces «petits-moyens» fragilisés qui pensent qu'ils «paient pour tout le monde», pour les plus riches mais également pour les plus pauvres qui bénéficient des aides. Dans L'Autonomie des assistés, Nicolas Duvoux montre d'ailleurs que même les bénéficiaires du RSA refusent le terme d'«assistés» pour eux-mêmes, alors qu'ils l'emploient volontiers pour les autres..." (Mediapart)

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