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jeudi 7 mars 2013

Israël: l'impasse

 "Nous gagnons chaque bataille, mais nous perdons la guerre..."

_____Ce constat critique adressée aux gouvernements successifs d'Israël, surtout depuis l'époque Rabin, n'émane pas de quelque antisémite borné ou de quelque anti-israëlien notoire, ou même d'un journaliste de Haaretz, souvent critique à l'égard de la politique du Likoud et de ses alliances avec les sionistes les plus radicaux.
Non.Il émane d' un ancien haut représentant du Shin Beth, le pendant israëlien du FBI américain, aux méthodes discutées, qui, avec d'autres membres, plus que perplexes, s'en prend à la politique suicidaire menée par les différents gouvernements d'Israël, du Likoud en particulier, qui ont mené la politique du pire en prétendant défendre l'intérêt du pays, au mépris d'une démocratie pourtant revendiquée.
Un courageux plaidoyer pour la paix, un peu acide et parfois désespéré. La nostalgie de l'époque Rabin, assassiné pour ses efforts de paix, plane sur ces évocations, faisant allusion aux dégradations de la vie politique qui s'en suivit à l'égard du problème palestinien.
Le documentaire, diffusé par Arte, ravageur pour les dirigeants israéliens, ne manque pas de surprendre, étant donné la nature et l'activité passées des témoins. Six anciens chefs de service du service de sécurité parlent et ce qu’ils disent est terrible pour Israël et la politique de ses dirigeants. Extraits :
- « Les premiers ministres d’Israël se sont succédés sans jamais prendre en considération le peuple palestinien, ni en deça des frontières de 1967, ni au-delà. » Avraham Shalom (patron du Shin Bet de 1980 à 1986)
- « Nous rendons la vie de millions de gens insupportables. Leurs souffrances sont permanentes. Et nous laissons un soldat qui n’est à l’armée que depuis quelques mois décider de ce qui est admissible ou non. Dans le meilleur des cas, il a passé son bac l’année précédente. Il est là devant un père avec un bébé dans les bras et il doit décider s’il le fouille ou non, s’il le laisse passer ou non. Ça me rend malade. » Carmi Gillon (patron du Shin Bet de 1994 à 1996)
- « Le futur est sombre. Noir est l’avenir. (…) Nous sommes devenus cruels envers nous-mêmes mais surtout envers la population que nous contrôlons sous prétexte de lutter contre le terrorisme. » Avraham Shalom
- « On ne fait pas la paix avec des méthodes militaires. La paix se construit sur la confiance. Moi qui connaît bien les Palestiniens, je pense que ça ne devrait pas être difficile d’instaurer avec eux une véritable relation de confiance. » Avi Dichter (patron du Shin Bet de 2000 à 2005)
- « Je suis prêt à tous les interlocuteurs possibles. Il n’y a pas d’alternative au fait de se parler. Il faut parler avec tout le monde, ça inclut même Ahmadinejad, n’importe qui.» Avraham Shalom
- « La tragédie du débat public sur la sécurité est que nous ne comprenons pas que nous sommes dans une situation frustrante où nous gagnons chaque bataille, mais nous perdons la guerre. » Ami Ayalon (patron du Shin Bet de 1996 à 2000).
_____________Le film  'Caméras brisées' (1) va dans le sens de ces témoignages.
Les dernières mesures concernant les bus réservés aux Palestiniens confortent les propos, enfermant un peu plus la société israëlienne dans une sorte d'apartheid, cherchant à justifier des actions contre des situations créées par ses propres excès.
"Le sionisme ne peut se légitimer lui-même dans ses outrances que par l’entretien d’une paranoïa dans laquelle la menace de l’antisémitisme a une place centrale.Si nul ne peut nier l’abomination qu’a pu représenter ce péril dans le passé, ceux qui luttent contre sa résurgence ou son entretien,sont désarmés par le sionisme lui-même, ses crimes, sa mauvaise foi et l’impunité qu’il revendique autant que son mépris des lois internationales ou résolutions onusiennes.Le camp de la paix, le vrai, qui existe du coté palestinien et du côté israélien, doit se battre contre ses propres frères acquis à une logique haineuse de part et d’autre, qui ne peut que favoriser le camp le plus fort d’un conflit aussi asymétrique...."
  L’instrumentalisation de la Shoah, qui paralyse la diplomatie européenne, sommée d’aider les infrastructures palestiniennes, ce qui arrange le colonisateur, est régulièrement condamnée par des Juifs, israëliens ou non. Burg, Finkelstein (qui connaît des problèmes au sein de l’université US), entre autres, sont de ceux-là.
Dans son livre, « La démocratie maintenant », le professeur Avi Shlaim de l’université d’Oxford, expert reconnu du conflit israélo-palestinien a déclaré que : «  Israël n’a pas d’immunité contre la critique, il n’a d’immunité morale contre la critique en raison de l’holocauste. Israël est une Etat-nation souverain, il devrait être jugé sur les mêmes critères que n’importe quel autre Etat. Norman Finkelstein est quelqu’un de très sérieux, quelqu’un de bien informé et un critique sévère des pratiques israéliennes d’occupation des territoires et de dépossession des Palestiniens »
Tant qu’Israël ne sera pas considéré comme un Etat comme un autre, soumis au droit commun international, le problème perdurera...
____Une spirale suicidaire est en marche, le fondamentalisme religieux gagnant droit de cité
 Pour sortir de cet enfermement mortifère, beaucoup d'Israëliens pensent qu'il est temps, dans leur propre intérêt, de passer à une autre stratégie.
 L'UE condamne la colonisation, mais reste soumise in fine aux volontés de Washington, malgré les critiques dans ce pays et les trop nombreuses résolutions de l'ONU.
 Son aide humanitaire est l'argent du silence, qui donne objectivement carte blanche à Netanyahou.
Le conflit israélo-palestinien n'est pas  dépassé et nous concerne aussi.

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