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mardi 29 juillet 2014

Et Bouvines?

   Il y a 800 ans...C'était le 27 juillet 1214
                                                                La célébration de1914 éclipse Bouvines.
       Ce n'était certes qu'un événement, un événement qui se perd dans notre imaginaire, éveillant le souvenir d'une certaine page de l'ancien manuel Lavisse jauni de l'école primaire d'autrefois.
     Un événement presque oublié de nos jours.
Mais un événement d'importance, un événement fondateur de la nation française en gestation, selon Duby, une bataille pas comme les autres,  remportée par une armée essentiellement composée de miliciens des villes françaises contre une armée de nobles et de féodaux spécialistes de la guerre, (qui )a été décrite entre autres par Georges Duby comme un des événements fondateurs et constitutifs de la nation française et du sentiment d'appartenance à la France, au moins pour les habitants du bassin parisien. Si l'on en croit les sources, cette victoire a été chaudement fêtée par le peuple, réuni autour du roi, ce qui a contribué à son prestige. C'est peut-être là le début du mythe populaire du bon roi, qui ne s'effondre qu'avec la Révolution.
Un événement qui fut cependant quelque peu instrumentalisé:
     « Il est abusif de parler d’unité nationale à cette époque, puisque le roi ne domine pas tout le royaume, et encore moins le territoire français actuel. Mais dès le XIIIe siècle, on est déjà dans cette mythologie de Bouvines : Guillaume le Breton, le chroniqueur du règne de Philippe Auguste, consacre un bon passage de ses vers à décrire le triomphe du roi devant le peuple, avec beaucoup de références bibliques et antiques. C’est cet extrait, avec la présence des communes dans l’armée royale, qui sera repris dans les manuels de la IIIe République, pour montrer l’unité du peuple et la préfiguration de la démocratie. »
  Philippe ramène ses prisonniers
 
      Cette instrumentalisation de l’histoire nationale est ce qui tend l’ensemble de l’historiographie de la IIIe République, rappelle Olivier Le Trocquer, membre du Comité de vigilance face aux Usages publics de l’Histoire (CVUH) :
     « Ernest Lavisse, l’auteur du principal manuel scolaire de l’époque, refuse d’envisager Bouvines comme un évènement précurseur de 1789. Mais il parle bien d’une sorte de “conscience nationale”, attachée à la personne du roi. Et surtout, il voit dans Bouvines le premier avatar de la gloire de la France. »
                   Même le FN récupère l'événement, sans grande finesse historique. Pauvre Philippe Auguste!
          Toute commémoration est un choix politique, dépendant des régimes politiques, des idéologies et des circonstances:
Alors que les Allemands se sont souvenus de leur unité sur le champ de bataille de Leipzig en 1813, et que les Anglais vont célébrer le bicentenaire de la bataille de Waterloo, les Français se concentreront en 2014 sur le début de la Première Guerre mondiale et le débarquement en Normandie. Nicolas Offenstadt explique cette décision :
E. Lavisse
      « Toute commémoration est un choix politique : le pouvoir fait des choix, découpe le passé pour justifier l’unité nationale et, dans le cas de cette double manifestation, le souvenir douloureux des deux guerres et la réconciliation franco-allemande. C’est le gouvernement qui incarne cette continuité nationale, et il n’y a pas à s’indigner de la mise en valeur faite de l’histoire. De plus, l’idéologie seule ne dicte pas le calendrier des commémorations, même si les débats sont légitimes. Le Millénaire capétien a été fêté en 1987 sous une présidence socialiste, le baptême de Clovis en 1996 sous une présidence de droite. » 
   C'était un certain Nicolas.
                 Il importe de prendre souvent ses distances par rapport à l'histoire revisitée...dans un sens ou dans un autre.
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