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vendredi 18 juillet 2014

Politique du livre

Lire et vivre
                     Primum vivere, ça va de soi, deinde legere, c'est mieux...
      Lire est sans doute l'activité culturelle la moins spontanée qui soit.
Elle semble n'être que purement privée.
        Elle l'est, mais elle suppose des conditions qui dépassent largement  le strict cadre individuel.
      Sans incitations culturelles, directes et indirectes, familiales, scolaires  et périscolaires, elle peine à se développer ou reste lettre morte.
     Savoir lire n'entraine pas automatiquement le plaisir de lire, le développement de cette activité étrange, qui ne sert à rien, où l'esprit se frotte à d'autres esprits pour tirer une jouissance et une expérience dont il tirera un profit le plus souvent invisible mais profonde. Une osmose mystérieuse. « Chaque homme porte la forme entière de l’humaine condition. » (Montaigne)   Des rencontres parfois improbables, surprenantes, stimulantes,parfois décevantes par rapport aux attentes. Mais une lecture peut changer une vie.
    De Cicéron à Montaigne, de Diderot à Proust, les grands auteurs ont été aussi de grands lecteurs.
 Même s'il peut arriver que des conditions culturelles défavorables incitent paradoxalement à la lecture, comme  J.Sorel, cherchant à fuir et à défier son milieu, comme Edouard Louis, pour sortir de l'humiliation sociale et pour mieux la penser.  La demande peut parfois être stimulée paradoxalement par des conditions défavorables, mais ce n'est pas la règle.
       La politique de l'offre est une donnée déterminante. Le livre doit être présent ou proche pour susciter l'envie.
De ce point de vue, tous les pays n'offrent pas les même chances d'abondance et de choix.
             Lire est un engagement à dimension politique, au sens où il suscite éveil,curiosité et esprit critique. La peur des livres ou la chasse au livre se retrouve dans tous les régimes où la liberté de l'esprit est considérée comme une menace politique. Les autodafés en sont pas d'hier...

  ____________________ On peut considérer qu'acheter un livre est un acte politique
                      Mais quel livre? 
   Une américaine à Paris (même  si Paris n'est pas Guéret ou Fourmies) peut s'étonner de la diversité éditoriale et de l'abondance d'une offre qui ne passe pas pour l'essentiel par Amazon, sa politique low cost, et son quasi monopole.
    Le prix unique du livre, impensable ailleurs, favorise le maintien de librairies indépendantes permettant une offre ouverte, un espace d'échanges, des conseils personnalisés.
      Même si ce n'est pas suffisant, la France (au contraire) vient de voter à l'unanimité une loi dite anti-Amazon, interdisant aux vendeurs en ligne de proposer la livraison gratuite sur les livres bénéficiant déjà d'une réduction [la TVA à 5 %]. Cette nouvelle décision s'inscrit dans un effort de préserver la "biblio-diversité" et d'aider les libraires indépendants à concurrencer la vente en ligne. Ici aucun libraire n'a le pouvoir de faire pression sur les éditeurs. Selon les estimations, Amazon s'arrogerait seulement 10 à 12 % des ventes de livres neufs en France et si le géant du net accapare 70 % du commerce de livres en ligne, seulement 18 % des livres sont vendus sur Internet en France.
      Aux USA, les librairies indépendantes meurent, tuées par le géant Amazon et ses pressions sur les éditeurs.  Sans parade internationale concertée, la France pourra-t-elle résister au géant, qui dictera sa loi, même peut-être sur les genres et les contenus?
                 Mais l'avenir du livre n'est pas scellé. Le lectorat est en chute libre, pour diverses raisons, qui ne tiennent pas seulement au développement du numérique.
     Le défi du numérique est plus que jamais présent, d'où l'importance des soutiens variés à l'économie si particulière du livre, qui n'est pas un produit comme un autre.
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