Contrôler les banques
Depuis les années 1990, quelques dizaines de banques ont conquis le vrai pouvoir de régulation monétaire : ce sont elles désormais qui dictent effectivement l’évolution des taux d’intérêt, et non plus les banques centrales. En raison de leur petit nombre d’une part et de leurs profits financiers considérables d’autre part, nous défendons l’idée que ces banques forment aujourd’hui un oligopole particulièrement puissant à l’échelle internationale. Reléguant les banques centrales au second plan, c’est-à-dire les cantonnant à de simples pourvoyeuses de la liquidité dont il a besoin, cet oligopole est le véritable régulateur des marchés monétaires et financiers mondiaux. C’est lui qui est le maître d’ouvrage du mur de l’argent qui se bâtit sous nos yeux.Cet oligopole n’est évidemment soumis ni à un contrôle politique, ni a fortiori à un contrôle démocratique. Tout juste est-il contraint par des règlements prudentiels de portée limitée et élaborés pragmatiquement a posteriori, ou encore par des normes issues d’une autorégulation professionnelle, une fois que les difficultés ou les catastrophes ont été malheureusement constatées..."(Attac)
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___Des règles et des principes existent. Mais leur trop grande généralité et le manque d'une instance régulatrice fait le plus souvent défaut ou manque d'impartialité, de pouvoir d'action et de sanction.
_En France, des outils de contrôle sont disponibles, apparemment efficaces en régime normal, mais qu'en est-il en période d'échanges planétaires constants,d'euphorie financière, de fabrication illimitée de produits financiers sophistiqués parfois obscurs, de dérives spéculatives subies ou provoquées?
_L'affaire Kerviel a montré comment un système pouvait se laisser emporter par les pires pratiques financières, jusqu'à se mettre en danger.
_Un contrôle bancaire digne de ce nom et efficace ne peut être strictement technique
car on vu comment on pouvait "s'arranger avec les comptes" , avec le complicité d'autres banques et des agences de notation, à la fois juges et parties. Le cas de la Fed est exemplaire, qui a couvert maintes dérives.
"Quand les crises financières sont des crises strictement boursières, elles peuvent avoir des conséquences mais celles-ci sont assez vite absorbées par le système. Mais quand les crises financières débouchent sur des crises bancaires, elles deviennent graves, voire très graves. Si la crise des années trente a commencé par une crise boursière, c’était d’abord une crise bancaire imputable à une erreur de politique monétaire de la Banque fédérale de réserve américaine qui n’a pas refinancé les banques alors qu’elles en avaient besoin pour faire face aux demandes de retraits. C’est alors que la crise bancaire s’est enclenchée et c’est devenu une catastrophe mondiale. Si la crise des subprimes suscite un peu plus d’inquiétude que les précédentes, c’est parce que, avant d’être une crise boursière, c’est une crise bancaire dont les conséquences pourraient être, outre des faillites bancaires, le resserrement du crédit par les banques, c’est-à-dire, d’une certaine manière, l’assèchement du financement du système productif et des difficultés pour ceux qui ont beaucoup emprunté et comptent sur le renouvellement de leurs emprunts pour vivre..."
__Comme on a pu le voir, le pouvoir des banques peut être redoutable, surtout quand elles sont assez grosses pour pouvoir espérer un renflouement public en cas de malheur (too big to fall).(-1-)
L'ampleur du danger, qui est loin d'être circonscrit, est tel que maintes voix s'élèvent pour réclamer plus que des contrôles souvent formels et insuffisants, voire impossibles, mais une mise sous tutelle des organismes bancaires, surtout de dépôts, pour les remettre sur les rails et leur imposer des pratiques conformes à l'intérêt général.
_______________Comme Susan George, qui prône une mise sous tutelle des banques , une tutelle non pas médiatique, mais réelle, ce qui ne signifie pas pour elle une nationalisation au sens strict.
"...Goldman Sachs…Et d'autres (qui ont fait dans la démesure, la plus totale opacité et l'absence absoluede contrôle, parfois politiquement appuyés, encouragsé par la Fed)... Ce marché est colossal. C'est 600 000 milliards par an. L'investissement va dans les produits financiers sans passer par l'économie réelle. Il faut instaurer une loi Glass-Steagall[adoptée aux Etats-Unis après la crise de 1929, ndlr] pour les banques, pour séparer les activités de crédit et d'investissement.Dans un pays, on peut aussi dire aux banques : « Vous allez prêter en priorité aux PME-PMI, surtout celles qui ont un projet écologique ou social. » C'est un contrôle du crédit, dans le sens où il y aurait des bénéficiaires prioritaires ; mais on ne va pas nationaliser toute l'économie..."
______Arnaud Montebourg pointe aussi la passivité des institutions, qui prépare objectivement de nouvelles crises
"Maintenant ce sont les institutions publiques qui sont attaquées par le système bancaire qu’on a renfloué avec l’argent des contribuables. Nous avons un paradoxe. Sur le plan structurel, nous avons fait des progrès vers le féféralisme, ce qui est un bien. Mais sur le plan de la régulation des marchés, nous faisons une politique de sur-place depuis deux ans. Toutes les déclarations dans les G20, les déclarations européennes de transformation du système financier sont restées lettre morte. Il n’y a pas eu une seule mesure prise..."
______F.Lordon va plus loin, jugeant la crise financière non réglée et la situation gravissime. Il y a nécessité de saisir les banques , pour arrêter leur pouvoir intrinsèque de nuisance et leur imposer une régulation publique.
"La faillite technique des banques a au moins un effet intéressant : elle permet de leur mettre la main dessus. Et à pas cher en plus. Les arguments de principe pour une recommunalisation du système du crédit abondent ; la situation de faillite leur offre leurs conditions de réalisation – et même de réalisation modique. Car si la nationalisation intégrale est la première étape du processus de recommunalisation du bien commun bancaire, avant la mutation ultérieure en système socialisé du crédit , la situation critique de la faillite générale offre la possibilité d’opérer cette nationalisation par simple saisie.__A l’inverse des pratiques ordinaires du redressement des entreprises en difficulté, il n’y a pas de solution privée à l’effondrement global des institutions bancaires qui condamne dès lors irrémédiablement leurs actionnaires à la vitrification. Le sauvetage public, quelle qu’en soit la modalité, n’a donc aucun compte à tenir de cette population spéciale qu’on peut d’ores et déjà tenir pour annihilée, conformément d’ailleurs à l’esprit même du capitalisme des sociétés par actions : les apports en fonds propres ne sont pas récupérables et les actionnaires n’acquièrent leur part de propriété (et les droits afférents aux dividendes) qu’en contrepartie d’accepter une perte définitive en cas de faillite – nous y sommes. Saisir les banques faillies n’a donc aucun caractère d’attentat à la propriété puisque la propriété a été anéantie par la faillite même, la faillite étant de ce point de vue l’équivalent capitaliste de la bombe à neutrons qui tue les droits de propriété en laissant intacts les bâtiments, les équipements et même, quoique pendant un temps relativement court, les humains salariés capables de les faire marcher. C’est tout cela qu’il faut récupérer..."
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