samedi 2 novembre 2013

Juifs et Musulmans: histoires mêlées


De l'osmose aux déchirements                                                                          
                                                                 Arte a diffusé hier soir une émission très intéressante sur un sujet généralement peu abordé au niveau du grand public, qui est pourtant la toile de fond de certains problèmes aigüs toujours présents au Moyen-Orient.
    Une plongée assez méconnue et troublante dans l'histoire souvent commune des communautés arabes et juives depuis le 7° siècle, d'abord dans la péninsule arabique puis une grande partie du bassin méditerranéen jusqu'au milieu du 20° siècle.
      Document qui coïncide avec la sortie d'un important ouvrage collectif sur l' Histoire des relations entre Juifs et Musulmans, un livre à plusieurs voix, pas toujours forcément convergentes sur tout, qui va " à l’histoire réelle, tout en ne lâchant pas les mythes qui ont influencé les comportements."
    L'histoire y est rendue dans sa complexité et son dynamisme. On comprend mieux l'intrication des deux cultures et des destins, des relations parfois apaisées, parfois conflictuelles.
   L'objectif des auteurs est ambitieux: "A l'heure où les conflits perdurent au Moyen-Orient, que les relations se durcissent entre communautés, tout porterait à croire, pour des esprits myopes historiquement, que l'animosité entre Musulmans et Juifs existerait depuis les origines, comme entre des extrêmes. Les tensions actuelles observables ici et là, faussent notre jugement et trouble notre vision d'un passé, où les deux religions se sont fécondées mutuellement et culturellement pendant des siècles et ont coexisté plus ou moins harmonieusement dans diverses parties du bassin méditerranéen..."
____Les auteurs parlent d' ennemis intimes pour désigner l'ambivalence de ces relations à travers les siècles. Quatorze siècles d'histoire commune tout de même, pendant lesquels les influences réciproqques furent multiples... 
   Aujourd'hui, tout est brouillé, surtout depuis la montée des nationalismes européens puis arabes, suite à la dissolution de l'empire ottoman, les nouvelles formes d'antisémitisme en Europe, exportées dans le bassin méditerranéen, la gestation du sionisme depuis T.Herzl et sa concrétisation tragique en 1947, par l' expulsion des Palestiniens.
[Tous les juifs ne sont pas sionistes (certains en refusent encore l'idée et ses funestes conséquences) et tous les arabes ne sont pas musulmans, comme tous les musulmans ne sont pas arabes et il y a des arabes chrétiens et athées et des juifs incroyants... La réalité est moins simple que les schémas simplistes qui circulent.]
    Le recul historique permet de comprendre un peu mieux la complexité et les tension repérables encore en partie aujourd'hui
       Si loin, si proche.... A-t-on affaire à ce que Freud appelait le paradoxe des petites différences? Ce serait trop simple...
A la naissance de Mahomet, en 570, «on pouvait trouver des juifs dans toutes les sphères de la société arabe, nous apprend le chercheur américain Gordon D. Newby, ils étaient marchands, nomades, fermiers, poètes, artisans et guerriers. Ils vivaient dans des forteresses, en ville, ou sous la tente, dans le désert. Ils parlaient l'arabe classique, le judéo-arabe et l'araméen...»
Que l'islam soit né dans un milieu largement irrigué de judaïsme, aucun texte islamique des origines ne le nie. Le premier rédacteur de la vie de Mahomet, Ibn Ishaq, qui écrit sa biographie, la Sira, un siècle après la mort du prophète de l'islam, a même interviewé les juifs quittant Médine pour la Terre sainte au fur et à mesure que les musulmans acquéraient les terres des non-musulmans. Que le Coran reflète une ambivalence vis-à-vis des juifs - de la reprise admirative de leur héritage à la détestation et aux massacres des tribus -, c'est tout aussi indéniable. Mahomet a observé et étudié les juifs, puis tenté de les gagner à lui en reprenant clairement la plupart de leurs rituels et légendes : la prière vers Jérusalem (abolie après la rupture), les interdits culinaires, les jeûnes, les prophètes, la saga biblique..."

   Les  échanges culturels furent très nombreux et très riches, malgré les tensions, perceptibles dès le début. Tensions d'abord peu marquées, parfois plus manifestes, jusqu'aux ruptures parfois brutales [1]
           Les Juifs sont d'abord des arabes comme les autres
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        Hier, la coexistence relativement harmonieuse des Juifs de très ancienne implantation et des Palestiniens était bien visible à Jaffa, avant que la discorde ne s'installe, pour les raisons que l'on sait.
Mais l'israëlisation à marche forcée et la résurgence des mythes, notamment celui de l'exil, les dérives de la militarisation et de la colonisation, qui ont exacerbé des formes d'islamisme intransigeant, ont contribué à créer un fossé, une déchirure, les extrêmes s'attisant, au coeur même du monde juif et de la société israëlienne, dont on voit mal comment elle pourrait être réparée dans un avenir proche. Rompre l'engrenage paraît de plus en plus difficile. Hébron en est le témoin tragique.
_____Espérons que ces documents, à approfondir, contribueront à raviver les mémoires d'un côté comme de l'autre...pour retrouver le meilleur d'un passé, qui n'est pas tout à fait passé.
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