Permanences et vicissitudes
Notes sur des lobbies en voie de transformation vis à vis d'un pays en constante mutation.
Retour de bâton prévisible: la colonisation, souvent masquée, toujours déniée, mais toujours continuée, ne pouvait que se retourner contre l'extrême droite israëlienne et sa ligne politique constante, quelles que soient ses promesses.
"Le gouvernement israélien est embarrassé parce que la plupart de ses
membres refusent la position de la communauté internationale sur la
colonisation. Pour l’ONU et pour la quasi-totalité de ses membres,
Israël occupe la Cisjordanie et Jérusalem-Est, conquis durant la guerre
des Six Jours en 1967. En construisant des villes, des places fortes,
des quartiers, qui abritent aujourd’hui 7 % de sa population – 350 000
habitants en Cisjordanie, 200 000 à Jérusalem-Est, l’État hébreu viole
le droit international. Le gouvernement Netanyahou accepte
d’autant plus difficilement ce point de vue qu’il compte plusieurs
ministres issus de ces localités. Les colons ont en effet de nombreux
relais dans différents partis de droite ainsi que dans l’armée et dans
l’administration, qui affecte chaque année des dizaines de millions
d’euros aux implantations. Or, à leurs yeux, dénoncer le droit d’Israël à
la terre de Judée-Samarie – la Cisjordanie –, c’est porter atteinte au
droit à l’existence de leur pays, c’est faire preuve d’antisémitisme. Le
hiatus sur cette question cruciale est sans doute davantage perceptible
aujourd’hui qu’hier du fait de la forte baisse de la violence en
Cisjordanie. Le silence des armes permet de mieux appréhender d’autres
formes de contrainte et de violations du droit..."
L'antisémitisme, reste toujours l'argument instrumentalisé par le pouvoir. Comme le souligne Esther Benbassa: "La thèse de l’antisémitisme a été utilisée comme une arme pour rehausser l’image d’Israël et défendre sa politique"
A l'heure même où Amnesty International dénonce l’impunité d'Israël, les relations sont de plus en plus problématiques entre l'Union européenne et Tel-Aviv, ce qui constitue une certaine nouveauté par rapport au passé..
Même des tensions commencent à se manifester avec l'Allemagne, généralement plus bienveillante à l'égard d'Israël.(1)
Mais le travail des lobbies toujours actifs de par le monde, en France comme au Canada et aux USA surtout, ne cesse pas (même s'il est encore discuté parmi les spécialistes américains).
L'alliance solide et profonde qui unit les
États-Unis et Israël depuis plus de soixante ans est communément
attribuée à l'influence d'un lobby juif tout-puissant qui tirerait les
ficelles de la politique étrangère américaine au Moyen-Orient. Or cette
vision réductrice néglige un aspect essentiel de la question :
aujourd'hui, aux États-Unis, les supporters d'Israël les plus fervents
et les plus nombreux sont issus de la droite chrétienne. (1)
Les mouvements plutôt de gauche aux USA se désinvestissent de plus en plus d’Israël et le gouvernement montre son irritation.
La société israëlienne, elle, tend à se diversifier toujours plus, sous l'effet de nouveaux migrants, russophones surtout, constituant peu à peu une nouvelle mosaïque.
"...Ce qui caractérise la société israélienne en effet, c’est un
multiculturalisme de nature antagoniste et engagée en vertu duquel
chaque communauté ethnique, linguistique ou religieuse est détentrice
d’une vision, d’un rêve et surtout d’une exigence sur la totalité de la
collectivité politique. Ainsi, loin de se dissoudre dans l’indifférence
de ses parties les unes aux autres, la mosaïque hébraïque demeure à
présent cimentée par la force centrifuge de sa conflictualité..."
Une mosaïque qui ne va pas sans conflits, sans tensions internes parfois. (2)
Des intellectuels israëliens ne ménagent pas leur critiques par rapport au sionisme revendiqué et les nouveaux penseurs et historiens postsionistes, comme Finkelstein ou Shlomo Sand ne se privernt pas de démystifier certains mythes, pour faire d' Israël un Etat normal, répondant au droit international.
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(2) Comme l'avoue le cinéaste israëlien Nadav Lapid (« Le policier »),
sorti il y a deux ans, et qui, lui aussi, radiographiait les
bouleversements de la société israélienne:« À l’étranger, on a souvent une image idéalisée de ce
qui se passe en Israël et les films n’y sont pas pour rien… Les
Israéliens ne passent pas leur journée à parler de l’Etat palestinien.
De façon assez tragique, pour la majorité d’entre eux, le conflit
appartient au passé. Une idée basique et terriblement primaire s’est
imposée : le camp palestinien est une bonne fois pour toutes celui des
méchants. » Il ajoutait :
« Le mythe fondateur du “ Tous ensemble contre les autres
”, ressemble à la façade d’un immeuble. Au fil des années, les failles
se voient de plus en plus. Et, progressivement, il n’existe plus qu’une
gigantesque faille, qu’il faut tenter de masquer par tous les moyens..."
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