Il y a guerre et guerre.
Il n'y a pas que les guerres dites classiques qui font des victimes.
Victimes dans leur chair et victimes de la misère qui les accompagnent et les suivent.
Il y a des formes de guerres, d'affrontements, qui ne disent pas leur nom, qui ne se manifestent pas seulement par des conquêtes territoriales, provisoires ou durables.
Il y a les guerres économiques, parfois souterraines, visant à conquérir des marchés, comme la Guerre de l'Opium, à gagner des débouchés, comme la plupart des guerres coloniales au 19° siècle, ou à acquérir la maîtrise sur des sources d'énergie, comme celles qui tournent autour du pétrole, surtout depuis le début du 20° siècle.
Bien rares sont les guerres dites classiques qui ne comportent pas une dimension économique ouverte ou masquée. Les Romains convoitaient déjà les riches terres agricoles du Bassin méditerranéen jusqu'à l'invasion de l'Irak, dont l'enjeu finalement reconnu était et reste essentiellement pétrolier (comme en Syrie d'ailleurs), en passant par les visées hitlériennes sur les terres à blé ukrainiennes et le pétrole caucasien.
Mais la guerre prend aussi des formes moins classiques, sans déclaration assumée, sans lutte armée, sans enjeu de domination territoriale ou énergétique.
La guerre économique produit aussi des effets dévastateurs, sur les personnes et les biens. Elle n'est pas forcément avouée et visible. La concurrence parfois féroce entre pays pour l'hégémonie économique peut avoir des aspects peu apparents, parfois insoupçonnés du commun des mortels qui est poussé à y voir un certain "ordre des choses"
Les guerres financières existent aussi et en sont un aspect. Plus que jamais, au sein d'une mondialisation sans règles, de systèmes financiers non régulés, de monnaies outrageusement dominantes et d'instances sans scrupules qui les promeuvent.
Déjà J.Stiglitz avait montré comment le FMI s'était évertué à promouvoir dans certains pays en difficulté une dépendance financière par la dette, ainsi qu' une paupérisation des services aux populations comme aux économies locales, sous prétexte d'ouverture au marchés mondiaux, au nom d'une concurrence jugée a priori bénéfique, comme l'OMC le déclarait..
Beaucoup d'économistes ont souligné les actions souterraines de la puissance financière de Wall Street et le jeu parfois délictueux des banques, too big to jail, dans la généalogie de la crise, La Grèce, pour ne parler que d'elle, de son délabrement économique et sanitaire, en témoigne. Le niveau moyen de mortalité y a augmenté, faute de soins, sacrifiés sur l'autel d'une dette impitoyable, au nom de l'intérêt des banques..Les blessures sont toujours vives dans maints pays, qui ont vu se développer précarité et pauvreté tandis que monte en puissance l'opulente richesse amassée par quelques-uns.
C'est tout l'art de la guerre financière, dont parle Jean-François Gayraud, engendrant des formes de capitalisme criminel, sous des aspects avenants ou avantageux, le plus souvent inaperçus.
Les guerres financières existent.
Ce sont de vraies guerres qui tuent et paupérisent les peuples, comme
on l’a vu en Grèce. Cette situation stratégique inédite s’explique par
la nouvelle puissance des acteurs financiers : banques d’affaires, fonds
d’investissements, milliardaires de Wall Street.
Depuis les années 1980, une finance dérégulée, mondialisée et en
partie toxique s’est bâti de vastes principautés immatérielles,
surplombant les économies et lançant des raids sur des États captifs et
des populations tétanisées. Malgré sa responsabilité dans la crise de
2008, la finance-puissance continue d’étendre son emprise, dans l’ombre,
usant de stratégies empruntant à l’art de la guerre....
Plus que jamais, la
finance impose désormais un rapport de force – feutré en apparence mais
violent en coulisse - aux pouvoirs politiques contemporains. Nombre d’Etats sont littéralement « capturés » par les puissances financières.
Et ce phénomène ne touche pas que les seuls « paradis fiscaux et
bancaires » ! Le phénomène est central aux Etats-Unis. Par exemple, qui
est le premier employeur en France des inspecteurs des finances ? Bercy
ou les quatre grandes banques universelles qui font habituellement notre
fierté ? Cela crée sans nul doute possible, de manière mécanique, de
subtiles convergences de vues aux conséquences profondes....
La capture des intérêts collectifs par les intérêts privés est un des aspects de cet affrontement. We won!, disait Buffet.
Malgré quelques frémissements, peut-être annonciateurs de changements à venir, la logique de la guerre financière, qui est d'abord politique, se poursuit...
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