Ça va, ça vient...
Ça monte, ça descend.
Chants de victoire ou de déploration..
Curieusement plus souvent dans les périodes pré-électorales.
Une courbe pas très nette, qui donne le tournis.
Elle s'inverse claironne-t-on. Elle redescend, se lamente-t-on. Mais ce n'est que circonstanciel, se rassure-t-on. C'est comme la ligne bleue des Vosges, dans un combat incertain, plus long et plus rude que prévu. Sans doute perdu d'avance si on ne repense pas au plus vite le partage du travail sous diverses formes, qu'il reste à inventer.
Mais tous n'ont pas les mêmes lunettes et oublient parfois que les petites ou grandes oscillations, saisonnières ou non, sectorielles ou pas, ne sont que l'expression d'un problème de fond rarement analysé depuis les années 70: essentiellement, la financiarisation de l'économie, la mondialisation prônée pas l' OMC et la mise en concurrence de la main d'oeuvre au niveau;planètaire.
Tout le monde n'est pas également touché, mais beaucoup plus qu'on ne croit sont menacés, dans un état de précarité qui peut demain basculer, ou se trouvent hors statistiques. Missing. Perdus de vue.
Au poste de vigie, l'Insee scrute l'horizon, sur des données partielles et révisables et, comme Soeur Anne, ne voit rien venir. Des îlots, par ci par là. Mais de terre ferme, point. Les vents restent défavorables ou la bourrasque menace. Le ciel est toujours changeant, les données météo peu fiables, les vents s'inversent vite... Déjà en 2013, on nous annonçait la croissance pour Noël. Le Sapin serait beau. Mais on se ravisa peu après. La boule de cristal aurait perdu...la boule.
Car les chiffres sont aussi des faire-valoir politiques, instrumentalisés.
Que valent-ils donc, eux qui donnent l'impression d'être sur une terre mouvante?
Que sait-on des "vrais chiffres", ou des plus fiables, derrière toutes les approximations, les traficotages et les manipulations? Quelle part au chômage invisible, ici comme ailleurs?
Sans parler du nombre croissant de travailleurs pauvres et précarisés.
Il est bon de regarder par-delà la courbe fluente et magique et de ne pas céder aux leurres (*)
Et de dépasser les polémiques de surface.
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__(*)...Le chômage et les controverses relatives à l’évaluation de son ampleur et la véracité des données fournis sont des phénomènes planétaires. Les débats et polémiques ainsi engendrées présupposent qu’il existe un chiffre objectif du nombre de chômeurs, que le découpage statistique entre chômeurs, population active occupée et population inactive est facilement définissable et, surtout, que les hommes et femmes politiques jouent un rôle déterminant dans sa gestion et sa réduction. Au contraire, les économistes expliquent aujourd’hui que « l’essentiel du phénomène tient dans l’hétérogénéité de son contenu, dans l’indétermination de ses frontières, dans la diversité des statuts des chômeurs et de l’impact qu’exerce le passage par le chômage sur leur destin individuel. » Pourtant, d’aucuns s’accordent que son évaluation est cruciale pour l’analyse de la politique macroéconomique.
Dans ces conditions, que penser des annonces des différents gouvernements ? En septembre 2016, les Etats-Unis disent avoir un taux de chômage de 5%, l’Allemagne 6.1%, la Grande-Bretagne 4.9%. Les chiffres français du mois dernier ne sont pas encore disponibles mais nous savons qu’en août, ils repassés au-dessus de la barre des 10% (10.3%), juste en-deca de la moyenne de l’Europe à 28 (10.1%). Selon l’agence Eurostat, les deux pays les moins affectés de l’Union Européenne (U.E.) en juillet étaient la République Tchèque (3.7%) et l’Allemagne (4.2%) alors que les deux pays les plus touchés étaient la Grèce (23.4%) et l’Espagne (19.5%). 1
Jusque-là, rien de bien nouveau. Ce sont les chiffres récités ad nauseam dans la presse, souvent sans aucune explication. Ces articles donnent cependant deux fausses impressions : ils laissent supposer que, premièrement, les chiffres fournis par les différents pays sont directement comparables et que, deuxièmement, les statistiques sont fiables et objectives. Il ne s’agit généralement pas d’un problème de fiabilité mais plutôt de l’imperfection des instruments de mesure et de la multiplication des définitions et des indicateurs, ce qui constitue inévitablement « une source de tentation pur les gouvernements...
Les français les mieux informés savent bien que les statistiques nationales peuvent être manipulées ou, pour être plus précis, utilisées de manière malhonnête ou mystificatrice. L’économiste Jacques Sapir rappelle par exemple que les données hexagonales ne sont pas celles du « chômage » mais celles des « demandeurs d’emploi », c’est-à-dire la ‘’catégorie A’’ qui recense le nombre de « demandeurs d’emploi tenus de faire des actes positifs de recherche d’emploi, sans emploi. » Manquent ainsi à l’appel les travailleurs à activité réduite plus ou moins longue ainsi que ceux non tenus de rechercher activement un emploi (en raison d’un stage, d’une formation, d’une maladie, d’un contrat aidé, etc.). Ainsi, si cette catégorie A peut en effet servir de référence, on ne peut que regretter qu’elle ne soit pas plus inclusive....
...La quasi-totalité des medias semble s’accorder sur un fait : l’économie américaine est repartie ! Un des indicateurs souvent cités est le chiffre du chômage qui, d’un point haut à quasiment 10% en 2009 est retombé à 4.9% en 2016. Comme en France, il faut regarder de plus près les méthodes de catégorisation des demandeurs d’emploi. Les chiffres ci-dessus ne comptent que les citoyens américains classés U3, c’est-à-dire les individus ayant activement recherché un emploi durant les quatre dernières semaines avant l’enquête gouvernementale. Le taux de chômage U3 est défini de manière relativement étroite et ne prend en compte ni les demandeurs d’emploi découragés, ni les travailleurs à temps partiels qui n’arrivent pas à trouver d’emploi à plein temps. C’est pourquoi le bureau américain des statistiques utilise aussi la catégorie U6, plus large, et qui, stable depuis la mi-2015, s’élevait le mois dernier à 9.7%.
Cependant, cet indicateur a ses propres limites. D’abord, il n’intègre pas les découragés longue durée. Le site Shadowstats, géré par un consultant en économie publique, estime que si ces derniers étaient recensés, le taux de chômage américain serait depuis 2010 aux alentours de 23%. C’est d’ailleurs un chiffre parfois cité par Donald Trump pendant sa campagne présidentielle. 3
La raison principale est qu’aux Etats-Unis, l’assurance chômage est distribuée pendant une période de temps bien plus courte qu’en Europe : en général, 26 semaines (6 mois). Deux états seulement, le Montana (28 semaines) et le Massachussetts (30 semaines) se montrent plus généreux. Plusieurs états du sud-est, comme la Floride, la Géorgie ou la Caroline du Nord, limitent l’allocation à environ 3 mois. Ainsi, nombreux sont ceux qui, après l’expiration de leurs droits, ne se présentent plus mensuellement au bureau pour l’emploi local et se trouvent radiés de ses listes.... (Merci à A. de Saint-Denis)
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