vendredi 18 août 2017

Faiblesses de l’ euro fort

L'euro se renforce, dit-on.
                            Dans le climat d'une certaine reprise des affaires.
          Bonne nouvelle ou feu de paille?
   La force de la monnaie unique aurait de quoi rendre optimistes les gouvernants de l'euro-zone.
Dans le contexte d'une certaine embellie, très différentiée.
   Mais les choses ne sont pas si simples.
      Deux logiques monétaires s'affrontent et l'Allemagne s'oppose à la politique dite "laxiste" de Mario Draghi, pour éviter la récession. La politique de la chancelière, arc-boutée sur un euro-mark trop fort pour ses partenaires voisins,  l'obsession de l'épargne pour des raisons démographiques mais aussi électorales, tétanisée  par la crainte irraisonnée d'une inflation même minime, n'est guère cohérente avec le principe de l' autonomie de la banque centrale, qui s'efforce d'injecter des liquidité pour éviter une déflation dangereuse, mais sans relancer vraiment la croissance.
    Depuis 2014, Super-Mario s'efforce de colmater les brèches, pour combler les écarts,  mais ce jeu de pompier monétaire ne pourra plus durer très longtemps, tant que les disparités entre pays de l'euro-zones seront si marquées et que les effets de la crise seront encore si prégnantes, l'Allemagne s'arrangeant d'un euro très fort.
    L'argent peu cher et même les taux négatifs sont alléchants, mais cela n'est pas sans risques. L'Allemagne a sans doute raison dans certaines de ses mises en garde, même si sa crainte d'une certaine inflation est quasi-pathologique, mais que fait-elle pour  aider à bâtir une solidarité réelle et investir chez elle au lieu de continuer sa fuite mercantile en avant vers des surplus astronomiques, des excédents si critiqués.?
   On le voit une fois de plus, la monnaie unique pose problème. A quand une monnaie commune négociée?
______________Fin décembre 2016, l’euro était à 1,04 dollar et beaucoup pariaient sur une parité totale avec le dollar. Mais depuis, la monnaie européenne est prise dans un courant ascensionnel qui semble sans fin. En huit mois, elle a gagné 13,4 % par rapport à la monnaie américaine, pour revenir à 1,18 dollar, comme fin 2015. Dans le même temps, l’euro s’est apprécié de plus de 10 % par rapport à un panier de devises étrangères.
Depuis le début de l'année, l'euro a gagné plus de 13 % par rapport au dollarDepuis le début de l'année, l'euro a gagné plus de 13 % par rapport au dollar
Pour certains analystes des marchés des changes, ces corrections sont juste le reflet de la situation mondiale actuelle. Alors que le dollar paie lourdement les débuts désastreux de la présidence Trump et les incertitudes économiques du pays – la monnaie américaine baisse par rapport à toutes les devises étrangères de référence –, la montée de l’euro traduit le retour de la croissance dans la zone euro, marquée par une baisse du chômage et un excédent commercial record. « Les perspectives de croissance en Europe se sont améliorées de façon impressionnante. L’économie croît très fortement », assure un analyste de BMO Capital cité par Bloomberg.    ___
Mais les choses sont moins simples:
Pour d’autres, ces mouvements sur les changes sont en fait les premières adaptations à un resserrement de la politique monétaire européenne, attendu au début de 2018. Pressé par les Allemands d’en finir au plus vite avec son programme de rachat d’obligations (quantitative easing) qui amène 60 milliards d’euros supplémentaires dans le système monétaire chaque mois, Mario Draghi avait lui-même esquissé en juin un changement prochain de la politique monétaire européenne dans un discours à Sintra (Portugal). Il avait évoqué alors la fin des forces déflationnistes en Europe et le retour de la croissance. Tous en avaient conclu que la BCE allait suivre le chemin de la Réserve fédérale et abandonner graduellement son programme de rachat et de taux zéro pour revenir à une politique monétaire plus normale.... Le président de la BCE va-t-il ou non fermer le robinet à liquidités qu’il a ouvert sans retenue pour sortir la zone euro de la crise ?  Avant même la remontée de l’euro, la question de la sortie de cette politique ultra-accommodante était déjà compliquée. Les marchés financiers, drogués à l’argent gratuit des banques centrales depuis le début de la crise financière de 2008, ont du mal à imaginer un avenir sans. Les liquidités qui tournent désormais sur les marchés de capitaux ont atteint des montants considérables. Le moindre changement risque de provoquer des mouvements de capitaux d’une ampleur impressionnante, des centaines de milliards se déplaçant en quelques clics sur les marchés des changes mais aussi sur les marchés obligataires et d’actions.
Mais l'optimisme n'est que de façade.
   Comme dit  Martine Orange:   ...trois trimestres de croissance ne suffissent pas pour assurer que l’économie européenne a retrouvé son cours normal, contrairement à ce que soutiennent certains observateurs et politiques, qui pensent qu’en quelques mois les traces d’une crise de près de dix ans ont été effacées. D’autant que ce rebond a pu avoir lieu grâce à des circonstances exceptionnelles : par crainte de la montée des populismes en Europe et d’un rejet de l’Europe après le Brexit, les responsables européens ont accepté, le temps des élections néerlandaises et françaises, d’accompagner la politique monétaire très accommodante de la BCE, en relâchant leur politique d’austérité et d’ajustement budgétaire sur les États. Mais maintenant que tout danger leur semble écarté, ils entendent revenir au plus vite au strict respect des règles des traités. Au risque de bloquer à nouveau toute l’économie européenne par des politiques récessionnistes, comme ce fut le cas en 2008 et 2011. Une éventualité que ne semblent même pas envisager les responsables européens, à commencer par ceux de la France....
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