vendredi 2 novembre 2018

Toussaint

Ces morts qui nous habitent
                                  Chaque année, chez nous, c'est le même rituel. On vient fleurir les tombes.
        Par habitude ou par conviction. Par convention ou choix.
  Chacun avec ses propres souvenirs, qui aident souvent à exister, même s'ils peuvent longtemps peser ou parfois paralyser.
En bière, oui, mais pas s'importe laquelle..

    On a beau savoir que la mort est nécessaire, incontournable, elle restera toujours une expérience existentielle spécifique, suscitant par anticipation appréhension sourde et parfois angoissée. La crainte de la mort peut être atténuée, mais elle est rarement domestiquée, abolie.
  Même si on se répète, comme Brel, la belle affaire!, si on suit Epicure, pour qui la mort n'est rien pour nous, puisqu'elle est par définition absence d'expérience vécue, si on lit Montaigne.
    Il n' empêche, la mort fait de la résistance.
     Elle ne se laisse pas facilement et d'emblée maîtriser', même quand son parti est pris, même dans la sérénité affichée, la rationalité affirmée. Il restera toujours non pas la mort en soi, mais les conditions d'une mort que la nature ou les circonstances nous imposent.. Même si certains choisissent avec détermination et paix intérieure, dans certaines situations, de l'anticiper pour mourir dans la dignité.
    Le problème est le morbide, pathologique ou culturellement entretenu. qui par anticipation compromet l'instant et sa possible jouissance.
  L'ambiguïté à l'égard de l'échéance suprême perdure et ce qu'il est convenu d'appeler chez nous le travail du deuil est diversement perçu:
           "En France, le deuil est encouragé par les institutions et les professionnels, un phénomène que décrit la sociologue Dominique Memmi dans La Revanche de la Chair. Elle montre comment la mort est cadrée, notamment matérialisée dans les corps, les lieux, les objets. ...
Dans l'enquête que j'ai menée et qui a donné lieu à l'ouvrage Au bonheur des morts , les personnes m’ont raconté des histoires qui ne semblent pas, en fait, tellement affectées par cette matérialisation. Les histoires étant plutôt focalisées sur des présences plus immatérielles, ou dont la matérialité procède par « détournements », comme lorsque des signes prennent des formes émanant du monde naturel ou des En revanche, ces récits s’accordent plutôt à ce que Dominique Memmi décrit comme une obligation au « travail du deuil », et cela au moins de deux façons, relativement contradictoires.         D’une part, du côté des pratiques, les personnes endeuillées affirment leur opposition à ce qu’elles vivent comme une éradication des morts, leur mise à l’écart sociale. Non seulement elles s’y opposent mais elles affirment clairement leur volonté de faire autrement à l’égard de ceux qui ne sont plus.     En ce sens, on pourrait penser qu’elles manifestent une sensibilité ou une adhésion au discours bien décrit par Memmi, discours enjoignant le fait de « prendre soin » des morts.  Mais d’autre part, ces personnes disent ne pas se sentir en accord avec la théorie du deuil, telle qu’elle circule dans les discours des institutions autour de la mort....
Comme l'ont montré les travaux de Jean Allouch et de Magali Molinié au sujet du travail du deuil), cette « réalité » s’est trouvée imposée, parmi d'autres réalités possibles, par le concours de circonstances comme les luttes contre le pouvoir de l’église et les « croyances populaires »...
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