samedi 23 mai 2020

Revers de la médaille

Une médaille pour les infirmières?
                                        C'est promis. Leur dévouement exceptionnel mérite bien cette distinction.           Pas seulement les applaudissements du public au balcon.
 Mais ce n'est pas cela qui les intéresse. Elles ne veulent pas passer pour de veilles combattantes, soulignant avec justesse que ce ne fut pas une guerre et qu'elles  ne furent pas les seules en première ligne. Tout le monde fut en action et joua un rôle essentiel, jusqu'au brancardier et à la dame de salle. Ce fut, et c'est toujours, une longue chaîne de solidarité. Ça continue...
    Elles refusent donc. De la reconnaissance certes, mais ni distinction, particulière. ni décoration.   Des crédits pour l''hôpital et des salaires décents, voilà leur demande. Cela fait si longtemps qu'elles travaillent dans une institution malade, qui les rend de plus incapables de remplir avec professionnalisme et humanité leur métier. Tant pis si le patron se vexe.
          Comme dit mon copain Cabanel:
                "...Il faut reconnaitre ici que la réaction du personnel soignant est plus que légitime quand l’on songe à ce que ce gouvernement lui a fait subir, l’envoyant au front du coronavirus, le plus souvent sans protection...    On a même pu voir des soignants remplaçant les vêtements de protection par des sacs poubelles.   C’est ce qui s’est effectivement passé par exemple à Montélimar, (et ailleurs) au mois de mars dernier, ou infirmières et aides à domicile, lassées d’attendre leurs sur-blouses, lunettes de protections et leurs masques, ont décidé de se rabattre sur des sacs poubelles pour tenter de se protéger. lien
Ajoutons que la promesse du versement d’une prime, faite fin mars, (lien) n’a finalement été effective que quasi 2 mois après, ce qui manque singulièrement de sérieux, d’autant que les concernés ne veulent pas de charité, mais d’une véritable revalorisation de leurs salaires, promise, mais toujours pas actée.    La CARMF (Caisse de Retraite des Médecins Libéraux) a dénombré à la fin avril, une vingtaine de décès parmi ses cotisants ou ses bénéficiaires, mais le chiffre doit être autrement plus important, car l’administration refuse de divulguer le décompte officiel, ce qui a provoqué la juste indignation du Docteur Philippe Vermesch lequel a déclaré : « le gouvernement s’est refusé à tenir une comptabilisation des professionnels de santé libéraux contaminés par le Covid-19 au contact des patients, puis décédés des suites de cette contamination. Le faire aurait été l’aveu public du grand mensonge d’Etat sur les masques, et d’une manière plus générale, les équipements de protection personnelle mis à leur disposition ». lien      Il apparait clairement que les autorités ne veulent pas de décompte des contaminations des personnels soignants.       D’ailleurs, Jérôme Salomon, se dit « mal à l’aise  » sur le sujet, justifiant que « des professionnels de santé (...) ne souhaitent pas que l’on tienne un décompte, un peu macabre, du nombre d’infirmières, d’aides-soignants, de médecins qui sont infectés  ».     Sur quoi base-t-il pareille affirmation ?     Et puis, SPF (Santé Publique France) assure que ce recensement n’est pas accessible à tous...    Un travail de recherche serait en cours...lien     Précisons que la colère du personnel hospitalier est d’autant plus justifiée que le versement de la prime est à vitesses : dans 60 départements, cette prime n’a été que de 500 €, alors que tous les fonctionnaires de l’Etat ou de la fonction publique recevront 1000 €, et que les soignants du privé ou du domaine libéral pourront se serrer la ceinture. lien
Et quid des petites mains, éboueurs, caissiers/ères de supermarché, routiers et livreurs en tout genre ?...Ils ont eux aussi risqué leur vie mais aucune médaille, aucune prime, ni augmentation de salaire n’est prévue à ce jour pour les remercier.    Cette colère du monde de la santé a été particulièrement visible récemment, lorsque Macron, s’invitant, sans prévenir, à la Salpêtrière, en a entendu des vertes et des pas mures.      Devant la médiocre défense présidentielle, qui s’est réfugié derrière des décisions collectives : « On a sans doute fait une erreur dans la stratégie annoncée », a-t-il commencé, et s’est vu très vite rabroué par les infirmiers-ères présents.
La rencontre a fatalement été assez agitée.    Une infirmière : « on veut du flouze, du pèze de la fraîche, on veut de l’argent »...lien   « Quand vous pourrez payer votre loyer avec une médaille, vous nous préviendrez. Et les soignants ne sont pas des militaires, la différence est pourtant évidente ». lien   Une autre enchaîne : « avant le Covid, on était désespérées depuis des années. C’est gentil la prime, on la prendra quand même, mais ce qu’on veut, c’est la revalorisation de nos salaires.   Une autre ajoute :    Sur chaque promesse, vous nous rajoutez des conditions, on ne croit plus en vous (...) il a fallu le Covid pour que vous réagissiez, ce n’est quand même pas normal (...) on est la honte de l’Europe. On n’a pas de matériel »... « Ce n’est pas vrai  » avait rétorqué Macron, tentant maladroitement de se défendre, ajoutant : « je n’ai jamais fait de promesses », assurant vouloir « mettre fin » à la « paupérisation  » des personnels soignants, admettant « sans doute » une « erreur » dans la réforme du système de santé engagée il y a 2 ans (lien), déclenchant la colère de 2 infirmières : « nos salaires, on n’y voit pas la différence (...) on est en France, on n’a pas de matériel, pourquoi on travaille avec un masque périmé depuis mars alors qu’on est en mai ! »...vidéo   Hélas, il semble que la censure existe encore dans notre beau pays, puisque la vidéo intégrale de cet échange musclé a disparu des réseaux sociaux, et il n’en reste plus que des lambeaux.    Il faut préciser que le salaire des infirmiers/ères français est l’un des plus bas, la France occupant la 26ème place sur 29.
   Ajoutons pour la bonne bouche que l’âge de leur retraite a été repoussé de 7 ans, en échange d’une modeste augmentation de 150 € par mois, alors qu’une infirmière vit en moyenne 6 ans de moins qu’une femme française. lien   Pour terminer sur le sujet, il serait dommage de ne pas évoquer la courageuse action du personnel soignant de nos voisins Belges, en écho à la « prise de bec » de la Salpêtrière.   En effet, nos voisins outre-Quiévrain ont accueilli leur gouvernement, venu les visiter avec tambour et fanfare, d’une étrange manière.    Lorsque le convoi des limousines s’est engouffré dans l’allée qui mène à l’entrée de l’hôpital, la haie d’honneur d’infirmières et infirmiers qui se trouvaient sur le passage a fait volte-face en tournant délibérément le dos aux ministres et consorts, formant une glaciale haie de déshonneur. vidéo       Nul doute, l’état sera chaud... (Merci à Cabanel)
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