samedi 5 septembre 2020

Deux mots sur un mot

Le retour des sauvages?
                                Il est des mots qui sont loin d'être innocents, qui sont chargés de sous-entendus et de présupposés, conscients ou non. Les arrières pensées qui les accompagnent ne manquent pas de produire des effets et des polémiques parfois passionnelles.

   C'est le cas du mot sauvage, exclu maintenant du vocabulaire des ethnologues, mais qui refait surface de temps en temps pour désigner certains peuples qui ne vivent pas comme nous ou des comportements qui sortent de la norme, qui peuvent choquer par leur aspect jugés parfois excessifs ou violents. La notion de barbarie, qui est associée à ensauvagement, exclut celle de culture. Ce qui est un non-sens.
   La notion d'ensauvagement revient sur le devant de la scène, de certains discours politiques, visant à produire un certain effet passionnel, voire racoleur. 
  Selon certains milieux, ce serait devenu "orange mécanique" dans le beau pays de France. La violence exploserait comme jamais. L'ensauvagement fait le tour du PAF et circule dans certains milieux depuis longtemps, mais revient au premier plan comme une évidence pour qualifier un certains nombre de comportement individuels ou sociaux souvent amalgamés. 
   De "sages", des Français seraient devenus "sauvages"? Comme si les "blousons noirs", comme si la "pègre" n'avaient pas existé Il faudrait s'interroger sur l'emploi de ce mot qui n'est pas nouveau, depuis la chienlit de De Gaulle jusqu'aux sauvageons de Chevènement. Un mot qui a une histoire.
« Il prend en 1806 le sens de “personne qui par ses actes de sauvagerie évoque les peuplades primitives” et finalement celui “qui échappe aux règles établies”, depuis 1960. C’est à partir de ces derniers sens que le substantif “ensauvagement”, dans son emploi actuel, a été forgé », relève Aude-Wirth-Jaillard.
   C'est mal connaître l'histoire et avoir peu de notions de ce que sont les statistiques et de la manière dont elles sont produites. C'est aussi confondre l'insécurité et le sentiment d'insécurité, qui peut être aisément instrumentalisé dans certaines circonstances. Non pas que certaines formes de violence ne posent  pas problème, ne méritent pas d'être analysées et sanctionnées, malgré le manque de présence policière  dans les endroits sensibles et les défaillances de notre justice qui manque notoirement de moyens. Ne parlons pas de la prévention, la laissée pour compte.
   L'effet loupe de certains comportements fait illusion et donne à croire à une montée en puissance d'un phénomène sans cesse croissant. Il est sûr que le civisme n'est pas en progrès, que l'individualisme prend souvent le dessus, que l'éducation a souvent failli.     Mais est-ce seulement un phénomène d'aujourd'hui? Et puis, il faudrait s'interroger sur les causes de ces dérives. Se demander aussi si du côté de ceux qui utilisent l'ensauvagement comme une arme, ils ne sont pas eux-mêmes à désigner par le même vocable. On connaît les comportements d'une droite décomplexée (le kärcher de Sarkozy) ou d'une extrême droite sans états d'âme dans certaines circonstances trop connues...
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