La question ne cesse de rebondir
Les promesses faites envers l'Ukraine ravive la question de l'élargissement de l'Europe, qui n'a jamais cessé de faire périodiquement problème. A l'époque du "Bénélux", aucun souci: les échanges entre petits pays voisins furent envisagés comme une solution logique, surtout à le suite d'un guerre dont il fallait se relever en commun. PH Spaak en fut un ardent défenseur. Mais l'idée des pionniers étaient d'aller beaucoup plus loin, sous l'instigation de J. Monnet, avec l'impulsion de Schuman, de de De Gasperi, encouragés par le grand frère d'Outre-Atlantique, dans le contexte de la Guerre froide. Toute une histoire assez tortueuse, une évolution que contestait au début De Gaulle, qui y voyait une possible dilution de souveraineté, l'intégration trop marquée aux désiderata de Washington, le risque d'un simple marché sans entraves où la finance deviendrait la norme. Il caressait le rêve d'une autre Europe, "de l'Atlantique à l'Oural" L'histoire a parlé et nous vivons au coeur d'une autre logique, dans une histoire assez chaotique. Une Europe à plusieurs vitesses, qui se redéfinit en se faisant, dans un processus dont on ne voit pas la fin, dans un affaiblissement politique régulièrement contesté. Nous sommes loin d'en avoir fini avec ce stop and go parfois un peu aveugle où la cohérence est défaillante et où les promesses à géométrie variable sont liées à des capitales qui ont en arrière-plan des objectifs différents t où la question de l'Otan vient embrouiller les débats. Ne parlons pas de la bureaucratie envahissante, souvent hors sol. Les nouveaux arrivants ne sont parfois pas dans les clous, comme la Pologne et la Hongrie, qui jouent leur jeu propre. Qu'en sera-t-il du Kosovo, et, mieux, de la Turquie, toujours théoriquement candidate. On se prend légitimement à douter d'une possible conduite commune dans l'avenir, vu que c'est déjà une cacophonie périodique sur divers sujets et chaque pays tire la couverture à lui en matière de solidarité, de fiscalité, etc...Le cas récent de la gestion de la crise grecque a été un exemple révélateur des défaut d'une élargissement qui s'est fait sans analyse sérieuse des situations concrètes
D'élargissements en élargissements, on peut se demander combien de décennies un terme (et lequel?) sera atteint et de quelle nature il sera. La question se pose régulièrement, avec ses crises, ses échecs, son Brexit, ses relances et ses incohérences. Il y a dix ans déjà, on se posait des questions qui restent toujours en suspens: Les illusions d'une Europe sans limites géographiques claires sont tenaces.___Est-ce vraiment une bonne nouvelle pour la Croatie? Certains Croates ne sont pas enthousiastes, c'est un euphémisme. Le pays risque de déchanter, si on la mène à marche forcée selon le catéchisme bruxellois, vers l'ordre néolibéral en vigueur.__ "...La Serbie espère ouvrir des négociations d'adhésion en janvier ou encore le Kosovo obtenir un accord de stabilisation et d'association, première étape vers l'adhésion. La Macédoine, la Bosnie-Herzégovine, le Monténégro sont aussi dans les starting-blocks, comme l'Albanie. Au-delà, l'Islande a entamé des négociations pour son adhésion et la Géorgie, l'Ukraine ou encore l'Arménie rêvent un jour de faire partie de l'Union. Sans parler de la Turquie. Or pour l'Union européenne, ces élargissements risquent de devenir de véritables pièges. A 27, l'Europe est déjà largement ingouvernable. Toute décision, comme en témoignent celle sur le budget de l'Europe ou celle sur le mandat du commissaire européen pour négocier - enfin - un accord de libre échange avec les Etats-Unis, donne lieu à de longues palabres, des querelles sans fin entre Etats membres. L'Union européenne n'a toujours pas non plus été capable d'adopter une position commune face à la guerre civile en Syrie. Comment, à plus de 30, demain, parviendra-t-elle à faire entendre une seule voix face à l'Amérique, à la Chine, à la Russie, voire à l'Inde ? Certes, en termes comptables, l'intégration de tous les pays de l'ex-fédération de Yougoslavie ne coûtera au budget européen qu'à peine 10 milliards d'euros. Mais il reste encore d'immenses écarts de niveau de vie entre ces pays et le reste de l'Union. Pour beaucoup de nouveaux membres et de candidats, l'adhésion à l'Union européenne est perçue avant tout comme une prolongation de leur engagement vers l'Alliance atlantique, et non pas comme la reconnaissance d'une véritable identité européenne. On s'achemine donc de plus en plus vers une Europe à géométrie variable, avec des pays censés être intégrés comme les 17 dans l'euro - cette intégration étant elle-même source de très grandes difficultés -, les 22 de l'espace Schengen - espace au fonctionnement imparfait lui aussi - et les autres. L'Union européenne doit se décider, enfin, à fixer ses frontières et à redéfinir sa raison d'être. Même si aujourd'hui, avec l'arrivée de la Croatie, elle peut se vanter d'atteindre à nouveau l'objectif de ses pères fondateurs : « faire régner la paix en Europe ».Ce processus arrange tout à fait les partisans d'une Europe simple zône de libre échange, telle que le Royaume-Uni qui a réussi à l'imposer, rendant maintenant impossible la création d'une future entité politique cohérente et indépendante ou même une éventuelle et problématique structure fédéraliste... The Economist avance que l'élargissement a été une des réalisations les plus réussies de l'UE et qu'il faut continuer à intégrer de nouveaux pays...la puissance des USA a besoin d'un grand marché européen mais certainement pas d'une puissance européenne concurrente... _Les négociations pour un grand marché transatlantique sont la dernière manifestation de cette volonté d'hégémonie économique, dictée par les multinationales. On peut aller jusqu'à dire que l'entrée de la Croatie va permettre de rendre l'Union européenne encore plus ingérable. Et donc à Washington de mieux diriger l'ensemble. ___ Objectif bientôt atteint?...Entre deux chaises..______Quant au fédéralisme... __________________
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