L'ampleur du désastre turco-syrien sidère
Ce n'est pas une guerre mais çà y ressemble par ses effets. Comme si Alep avait besoin de ça! Comme toujours, l'heure est à la détermination des responsabilités. La nature n'est pas seule en cause dans les effets terrifiants du séisme. Comme quand le même phénomène avait détruit une partie de l'île de Haïti. La nature a bon dos... La réflexion amère d'une citoyenne turque fait un bilan terrible des défaillances humaines, politiques (*). Sans concession. Elle condamne un système politique qui a failli. Pourtant, dans cette zône à risque, on aurait pu anticiper et prendre les mesures qui s'imposaient, comme dans certains ouvrages d'Istambul, qui connaîtra aussi un jour un grand ébranlement. La corruption a joué un rôle qui n'est pas mineur, alors que la Turquie s'impose comme un puissance du BTP jusqu'en Afrique. Peu importe que Erdogan soit défait aux prochaines élections. Le désastre est là avec ses conséquences pour longtemps. La puissance du séisme ne saurait servir d'excuse. Il y en aura d'autres, qui risquent de toucher les zônes les plus urbanisées. Istambul est en première ligne et sera touchée un jour, comme elle le fut déjà par le passé...Géologiquement, c'est une certitude. Et comme Ankara est un mauvais élève en matière de constructions parasismiques...
(*) Après plusieurs séismes, "... de grandes promesses ont été faites à la population. Les autorités ont prononcé des discours enflammés sur le fait que les règles de construction seraient dorénavant plus strictes. Il est vrai que les réglementations ont été renforcées, mais tout cela n’est resté que sur le papier, sans jamais être pleinement appliqué. Ce n’était que des paroles en l’air. Les fissures ont été masquées, les fentes recouvertes de «maquillage» et les bâtiments endommagés remis en fonction. Ceux qui critiquaient étaient traités de «traîtres». La triste vérité est qu’un nombre alarmant de bâtiments dans mon pays natal ne sont pas conformes aux normes. Des pâtés de maisons entiers ont été détruits dans ce tremblement de terre; pour plus de profit et de gain, de privilèges personnels et de népotisme, des vies ont été sacrifiées. Le gouvernement va probablement rejeter la faute sur les entrepreneurs individuels. Beaucoup sont directement responsables de la calamité, mais les autorités ne peuvent pas se défausser aussi facilement. Des autorisations officielles ont été accordées là où elles n’auraient jamais dû l’être. Ce ne sont pas seulement les immeubles résidentiels qui se sont effondrés dans ce que les experts appellent «l’effondrement en crêpe», mais aussi les bâtiments municipaux, y compris les hôpitaux qui avaient été ouverts en grande pompe. La Turquie compte un nombre étonnant de scientifiques et d’ingénieurs. Nombre d’entre eux ont supplié les responsables de prêter attention au danger imminent, mais leurs voix n’ont jamais été entendues par les dirigeants. Bien au contraire, ils ont été accusés de «susciter la peur». Le parti au pouvoir, le Parti de la justice et du développement (AKP), accordait périodiquement des «permissions de construction» aux bâtiments qui défiaient de manière flagrante les règles parasismiques. Jusqu’à 75 000 bâtiments ont bénéficié de telles permissions dans la seule zone sismique, selon Pelin Pinar Giritlioglu, responsable à Istanbul de l’Union des chambres des ingénieurs et architectes turcs. Le géologue Celâl Sengör affirme à juste titre que l’octroi de telles permissions générales dans un pays qui est déchiré par des lignes de faille n’est rien d’autre qu’un crime. Il est douloureusement ironique que le gouvernement ait été sur le point d’adopter une nouvelle dérogation générale quelques jours seulement avant la catastrophe. Ils n’ont jamais appris des souffrances et des erreurs du passé. Ils ne se sont jamais débarrassés de leur orgueil démesuré. La cupidité et le clientélisme [deux traits exacerbés par la logique imparable de la rente foncière urbaine qui assure une accumulation rapide de capital financier – réd.] ont constitué les orientations directrices de ceux qui dominent..." _____________
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