lundi 1 juillet 2024

Parcours erratique

1.  Résistance en Israel.

           Une population pas comme les autres.

                               Un vieux problème.

 2.   Gaza vu par une presse critique israëlienne (traduction; clic droit)

3.    Numérisition forcée

4    Que faire

   "Face au danger imminent et effrayant de voir la France basculer dans un régime d’extrême droite, et la perte de repères d’une partie des élites politiques, économiques et médiatiques, la nécessité réconfortante de lire les analyses d’historiens, philosophes, sociologues et écrivains. Une dissolution surprise par un Emmanuel Macron ahuri et sûr de lui, une gauche unie en moins de 48 heures face à un Rassemblement national donné favori, un bloc du centre et de la «raison unique» renvoyant dos à dos «les deux extrêmes», la question de l’antisémitisme au sein de la France insoumise qui rattrape le nouveau Front populaire, le racisme contre les noirs et les musulmans, la menace de «guerre civile» brandie par le Président de la République, l’omniprésence médiatique de Jean-Luc Mélenchon aussi «capable» d’aller Matignon que d’exaspérer à gauche, la petite phrase sur «les Français d’origine étrangère» de Bardella et le ciblage des «Français binationaux», et surtout, donc la possibilité de voir une majorité d’extrême droite gouverner le 8 juillet : en quinze jours de campagne éclair nos cortex de gauche ont été soumis à une pression politique et morale intense sur fond d’une radicalisation du débat, d’une escalade des peurs et d’un discrédit généralisé de tous les discours autorisés, politiques, médiatiques, scientifiques qui propulse et progage le populisme d’extrême droite. Nous avons été tour à tour sidérés, effrayés, résignés, indignés. Et la facho-anxiété a pris le pas sur l’éco-anxiété chez beaucoup d’entre nous. D’où la nécessité de prendre du champ. Et de se tourner vers celles et ceux, sociologues, historiens, écrivains, dont la profession consiste à documenter et enraciner le présent pour mieux le cerner. Au service Idées, une fois l’état de choc passé, des intellectuels ont rallumé leurs portables, leurs claviers, et notre boîte mail a crépité.A peine trois jours après le choc de la dissolution, l’examen de conscience d’Ariane Mnouchkine. «Qu’est-ce qu’on n’a pas fait ? Ou fait que nous n’aurions pas dû faire ? se demande la fondatrice du Théâtre du SoleilMacron est bien trop petit pour porter, à lui seul, la totalité du désastre. Je nous pense, en partie, responsables, nous, gens de gauche, nous, gens de culture. On a lâché le peuple, on n’a pas voulu écouter les peurs, les angoisses.»                                                                                                                                                                                                                           L’historien Patrick Boucheron se plonge dans l’instant et le juge «historique». Le professeur au Collège de France invite à sortir de cette torpeur qui précède l’orage. Il faut «des voix politiques entraînantes et rassurantes, afin d’enrayer cette mécanique suicidaire qui consiste à cliver en permanence, en confondant radicalité et véhémence.» écrit-il. Car en face, les électeurs du Rassemblement national «savent ce qu’ils font, et l’on a longtemps eu tort de ne pas prendre en considération la rationalité de leur volonté politique. Mais il faut alors avoir le courage de la décrire pour ce qu’elle est : une vision raciste du monde, dans laquelle on considère comme rien ceux qui ne sont pas comme nous.»   Le Nouveau Front populaire, pourquoi ça résonne à gauche ? Si François Ruffin reprend vite ce sigle au lendemain de l’annonce de la dissolution, c’est parce qu’il est parlant. Plus que feu la Nupes. Et résonne dans l’imaginaire de gauche. L’histoire ne se répète jamais, les comparaisons sont casse-gueule. Mais rien n’interdit de tirer quelques enseignements du passé. Dans la nausée brune dont nous accable le pouvoir, notre chroniqueur, l’historien Johann Chapoutot, nous propose des leçons à retenir des années 30. D’un côté, la possibilité d’une union des gauches que beaucoup croyaient irréconciliables. De l’autre, le compromis dangereux entre libéralisme autoritaire et fascisme, un classique du XXe siècle «qui se tisse sous nos yeux depuis 2017, dans des médias qui nous imposent les cadrages et les thèmes de l’extrême droite, chez un pouvoir qui a fait alliance avec elle (pour installer un duel-duo exclusif, voire pour voter avec elle), et au détriment d’une population dont tous les sondages montrent qu’elle imagine, désire et rêve autre chose que l’individualisme forcené, la toxicité managériale, la compétition permanente et la dévastation du monde». «Le Front populaire de 1936 était d’abord un front républicain : la gauche devra s’en souvenir dans l’entre-deux-tours»alerte de son côté le philosophe Milo Lévy-Bruhl, qui a consacré sa thèse de philosophie politique à la pensée de Léon Blum (1872-1950).  Mais qu’est-ce qu’il (nous) a fait Emmanuel Macron avec sa dissolution ? Revenir au peuple avec des accents gaulliens, appeler à une clarification. En théorie, pourquoi pas. Pourtant les constitutionnalistes sont formels : cette dissolution est la plus hyperprésidentielle de la Ve République. Et depuis le 9 juin, Emmanuel Macron en campagne continue de brouiller les repères. «En renvoyant dos à dos le RN et le Nouveau Front populaire, Emmanuel Macron nourrit une forme de confusion des esprits», observe Pierre Rosanvallon, historien, sociologue et professeur honoraire au Collège de France. Pire, sa rhétorique contre «les extrêmes» durant la très courte campagne électorale ont conduit à «inverser de façon perverse la notion de front républicain». Enfin en évoquant la menace d’une «guerre civile» ou en faisant sienne la sémantique lepéniste, en parlant de la vision «immigrationniste» de la gauche, Emmanuel Macron a participé à la radicalisation des termes du débat. Il a pris part à la brutalisation de la vie publique qu’il déplore par ailleurs, et alimenté une escalade des peurs qui risque de profiter au RN.  Ensemble, c’est tout. Après la dissolution, la nécessité de l’union, l’urgence de la mobilisation surgit. Quand Macron et Bardella prennent l’électorat comme une femme qu’il faut conquérir, la gauche doit «renoncer aux postures hégémoniques, choisir l’union plutôt que la force, le groupe plutôt que le chef, la souplesse plutôt que la puissance verticale», invite la journaliste Hélène Devynck. Comment faire renaître du «nous» face au triste cirque des politiques ? s’interroge notre chroniqueuse, l’écrivaine Lola Lafon. Macron joue notre futur à pile ou face : ne restons pas spectateurs d’un show risquant de transformer les isoloirs en défouloirs. La frondeuse des insoumis Clémentine Autain appelle aussi ce «nous» à se mettre en mouvement : «Maintenant, c’est eux ou nous». Défenseurs des droits et libertés, syndicalistes, activistes pour le climat, les mouvements féministes et LGBTQIA +, collectifs de sans-papiers et de sans-abri, militants antiracistes, sauveteurs de migrants en mer, artistes, gilets jaunes, les fonctionnaires dont le statut est menacé, familles monoparentales en colère. «Ce “Nous”, c’est chacune, chacun» qui doit «se mobiliser partout, dans les rues, à la machine à café, dans les cages d’escalier, aux dîners en famille…»    Comment convaincre les classes populaires de voter à gauche ? La gauche et les écologistes les avaient délaissées, au profit des classes moyennes urbaines. Il s’agit non pas de convertir des électeurs pour qui le bulletin RN est un antidote au mépris culturel, à la peur du déclassement, une garantie de ne pas être du côté des plus stigmatisés, un motif de fierté, une expression de colère, de rejet des élites politiques et médiatiques, comme l’explique le sociologue Benoît Coquart. Mais de s’adresser fissa aux abstentionnistes. Pour espérer remporter les élections, le Nouveau Front populaire doit se confronter à son impopularité parmi les abstentionnistes. Et renouer le dialogue en un temps record, en allant au contact des électeurs avec quelques promesses crédibles de progrès social. Sur le vote des classes populaires pour le RN : «On est passé de “nous les ouvriers” à “nous les Français”» : dans un entretien, le sociologue Didier Eribon, qui avait décrit dans ses livres le lent basculement du vote communiste des ouvriers vers un vote d’extrême droite depuis les années 90, analyse le «nouvel espoir» suscité par l’alliance de la gauche. De son côté le sociologue Vincent Tiberj rappelle que «les citoyens dans leur ensemble sont bien moins droitisés que les seuls électeurs».                                                                                                 Derrière la force tranquille de Bardella, le racisme du RN… Des Français binationaux barrés des postes sensibles dans l’administration. Le «M. Education» du RN qui estime que Najat Vallaud-Belkacem n’aurait jamais dû être ministre car franco marocaine. Et des «Français d’origine étrangère» qui n’ont «rien à craindre» tant qu’ils respectent les valeurs tricolores : dans la dernière ligne droite, quelques raptus de dirigeants du RN ont fait voler en éclat la vitrine lepéniste ripolinée. Et une séquence du magazine envoyé spécial où l’on voit une aide-soignante noire, Divine Kinkela, se faire agonir d’injures racistes par ses voisins, a été largement diffusée sur les réseaux. «Aux cadors du RN : écoutez-moi bien, ici, c’est chez moi !» leur lance l’écrivain Nadir Dendoune. «Si le RN devait accéder au pouvoir, je quitterais mes fonctions de diplomate», s’engage de son coté avec courage dans une tribune Ines Ben Kraiem, cadre d’Orient au ministère de l’Europe et des Affaires étrangères. «Déloyale car double nationale ? Je n’incarnerai pas cette France qui ne me ressemble pas. Née d’une mère française et d’un père tunisien, tous deux fils d’agriculteurs, tous deux boursiers et purs produits de la méritocratie républicaine dans leurs pays de naissance respectifs, qui ont grâce à cet ascenseur social pu devenir médecin pour l’une, ingénieur physicien pour l’autre, je sors aujourd’hui de ma réserve de haute fonctionnaire pour partager ma profonde inquiétude face à ce que j’observe du débat politique en France. En reprenant le terme lepéniste de gauche «immigrationiste», Emmanuel Macron a participé à banaliser «l’ethno-différentialisme» de l’extrême droite, analyse de son côté l’anthropologue Michel Agier.  C’est un philosophe, Marc Crépon qui effectue la piqûre de rappel. Avant de se rendre aux urnes pour les législatives, il est urgent de prendre la mesure des violences qui vont toucher l’ensemble de la population en cas de victoire du RN. «Nous nous sommes tellement habitués à la rhétorique du Rassemblement national, ses façons de dire, de penser et de faire se sont tellement installées dans le paysage politique, gagnant le cœur et l’esprit d’un nombre croissant d’électeurs et d’élus de tous bords à sa véhémence vindicative, à son désir de revanche sur la société, à son ressentiment contre la modernité, l’évolution des mœurs, les avancées du droit, à sa désignation de boucs émissaires, que nous avons fini par oublier ce que signifie la “révolution nationale“» écrit Crépon. «Leur désir de rupture avec la société libre et égalitaire qu’ils détestent depuis toujours est si essentiel à leur appétit de puissance qu’ils l’imposeront à marche forcée. Et comme rien de tel n’arrive jamais sans la brutalité d’une «mise au pas» et sans que l’ensemble de la population soit exposée, individuellement et collectivement, communément et différemment, à de grandes violences, c’est de celles qui s’annoncent qu’il est urgent de prendre la mesure».

Face à ce danger, se (re) mobiliser. Et combattre les lâchetés. Entretenir la peur de l’autre    La façon dont un parti se propose d’aborder celles et ceux qu’il identifie comme étrangers en dit long sur la façon dont il entend, en réalité, traiter tout le monde, y compris les plus vulnérables. A cela, une seule issue : s’opposer, lance l’écrivaine Jakuta Alikavazovic dans une adresse à sa France indécise. «Comment ne pas penser à l’Etrange Défaite de Marc Bloch en ces heures fiévreuses, où notre pays semble avoir perdu sa boussole politique et se diriger tout droit vers le naufrage ? Ecrit en 1940, son témoignage indépassable sur la faillite des élites, économiques, politiques et militaires françaises, qui a conduit à l’Occupation et au régime de Vichy, retrouve toute sa force», écrit dans un texte inspirant l’ancien député Vert Noël Mamère, avant de dénoncer la lâcheté dont une partie de nos élites politiques, intellectuelles et économiques, notamment dans les rangs de la droite et des macronistes, qui, en martelant le parallèle erroné et honteux entre «les deux extrêmes» respectabilisent légitiment le RN, quand ils ne le rallient pas. Et sapent les fondations du barrage républicain qu’il sera pourtant impératif d’ériger entre les deux tours.   Faire front poétique et front trans. Dans le marasme, deux très beaux textes nous permettent de nous décentrer et de respirer. En cette angoisse où l’extrême droite se rapproche du pouvoir, il est utile que toute conscience progressiste ajoute à l’idée du Faire Front populaire celle d’un Faire Front poétique, écrit Patrick Chamoiseau. Pour l’auteur antillais, il s’agit de se mettre poétiquement du côté de la vie, dans un monde de culture et de beauté que les fascistes ne peuvent même pas imaginer. Une société multiculturelle et multiethnique qui existe à côté, en face à l’intérieur de la France rance de l’extrême droite. Une société dont la personne trans est le fer de lance. «Monsieur le Président, la démocratie est et sera trans», lance Paul B. Preciado notre chroniqueur. Si la «transsexualité» est devenue ces dernières années un signifiant central dans les discours conservateurs, c’est parce que l’expérience de la transition de genre, autant que l’expérience migratoire, met en question la définition identitaire du corps et de l’Etat-nation..."      [Presse étrangère]

5.  Fractures intimes

       Comme dans l'affaire Dreyfus?

                     Jusque dans les familles


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