Surveiller et punir ?
«En amalgamant la folie à une pure dangerosité sociale, en assimilant la maladie mentale à la délinquance, est justifié un plan de mesures sécuritaires inacceptables», selon les psychiatres. Ils refusent ainsi des mesures qui laisseraient croire «que les personnes atteintes de troubles psychiatriques font bien plus souffrir la société que celle-ci ne les aliène ».
Les psychiatres vers la désobéissance civile ?:
"Les psychiatres qui sont à l’initiative de ce rassemblement(de Montreuil) à « La Parole Errante à la Maison de l’Arbre », dirigé par Armand et Stéphane Gatti, peuvent se dire satisfaits de cette journée. Ils ont réussi leur coup. Ils sont entrés en dissidence et se préparent désormais à la désobéissance civile. Ils ont commencé par réagir avec dignité au discours de Nicolas Sarkozy à Antony le 2 décembre 2008 et ils se croient aujourd’hui assez mûrs pour entamer une longue marche qui les conduira à faire reculer le gouvernement sur la nouvelle loi de santé mentale qui sera présentée au parlement au printemps. La pétition de l’« Appel des 39 » lancée mi-décembre par par le psychiatre Hervé Bokobza, l’un des organisateurs des États généraux de la psychiatrie en 2003, contre la politique de santé mentale du gouvernement, fut le point de départ de ce mouvement. D’autres pétitions toutes aussi hostiles à une politique qui tend à faire de la psychiatrie la gardienne de l’ordre social circulent sur le net.
"« Des mesures en totale contradiction avec les finalités du soin »
Face à une telle effervescence, le rassemblement de Montreuil marque une étape importante dans la prise de conscience qui se fait jour depuis trois mois parmi le personnel soignant. Mais il serait injuste de le réduire à un simple réflexe corporatiste, voir à de l’anti-sarkozysme primaire. Le président, comme Dieu chez Malebranche, a fourni l’« occasion » d’un réveil, il n’en est pas le seul agent. Jean Oury a fait rire la salle en le comparant à une puce, mais il a mis en garde les participants contre la tentation du fétichisme. Car à trop s’occuper de son cas, on en oublie les raisons qui ont conduit à l’augmentation du nombre de demandes de soins en même temps qu’à une politique tendant à éliminer du corps social les individus qui ne correspondent pas aux normes prescrites par une administration de plus en plus normalisatrice.
« Cet appel, je l’attendais depuis longtemps, souligne le psychanalyste Jean-Pierre Winter, il est le symptôme positif de l’entreprise de destruction du tissu social qui est à l’œuvre depuis trente ans, Sarkozy n’est que la pointe immergée de l’iceberg. Dans nombre de cités, on supprime tous les lieux de parole, du simple bar au commerce de proximité, on supprime les lieux d’hébergement, les centres d’accueil, pour les jeunes et les anciens taulards, on réduit le temps du suivi, qui était autrefois de six mois, pour ne répondre aux situations de détresse que dans l’urgence. On détruit le temps nécessaire à l’échange ».
Il n’est pas étonnant que dans cette enceinte, le beau mot de parole ait été aussi souvent prononcé. Le mouvement qui est en train de naître n’est pas un simple mouvement de protestation, il est surtout un mouvement de réappropriation.
Les psychiatres présents à Montreuil ne veulent pas de ces mesures qui entrent en totale contradiction avec les finalités du soin. « Or on leur demande aujourd’hui de répondre à trois objectifs: prédisez l’avenir, expertisez, enfermez. J’oubliais, évaluez vous, avec des questionnaires issus de l’industrie. En instrumentalisant les faits-divers, en annonçant qu’une loi va être votée au printemps, l’État risque de parachever cet immense gâchis : nous couper de notre histoire et dénier celle des patients, dont il souhaite réduire la maladie à des symptômes qu’il faudrait traiter soit en les enfermant à vie, soit en trouvant le médicament « adéquat », les transformant ainsi en individus transparents, homogènes, et enfin maîtrisés », s’insurge Hervé Bokobza."
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"...À chaque fois qu'une personne atteinte de troubles mentaux défraye la chronique, la machine politique s'emballe, remuant les peurs de la société. L'enchaînement fait divers, discours sécuritaire, durcissement législatif, fonctionne à plein régime, renforçant l'amalgame entre délinquance et maladie mentale. Faut-il le rappeler, l'écrasante majorité des 300.000 à 500.000 schizophrènes vivant en France n'ont jamais mis en danger qui que ce soit.Les homicides sont massivement le fait d'individus ne présentant pas de perturbations psychiatriques graves (entre 80 et 85% selon les études épidémiologiques), même si celles-ci augmentent le risque de comportements violents. Les évasions et tentatives d'évasion d'UMD sont rares. Les statistiques manquent, mais le directeur de l'hôpital psychiatrique de Montfavet estime qu'elles sont inférieures à 3 ou 4% pour les patients hospitalisés d'office, rapporte Jean-Marc Quintana, secrétaire général de la CGT de cet établissement du Vaucluse. Alors qu'ils révèlent les failles de l'hôpital public et des parcours de soins psychiatriques, les passages à l'acte criminels sont instrumentalisés par les pouvoirs publics pour légitimer une politique d'enfermement.Que faire des fous violents? Aux lendemains du meurtre de Grenoble, en novembre 2008, Nicolas Sarkozy répond par plus de chambres d'isolement, plus d'unités fermées, plus de vidéosurveillance et plus... d'UMD. Et cela, sans se douter des effets dévastateurs de son discours sur les malades eux-mêmes.Psychiatre à la prison des Baumettes à Marseille, Catherine Paulet se souvient du «stress intense» ayant envahi ses patients schizophrènes après avoir vu, à la télé, les comptes-rendus de l'intervention du chef de l'État à l'hôpital d'Antony, «ils voulaient tous savoir s'ils étaient dangereux ou s'ils risquaient de le devenir parce qu'ils étaient malades».Sans attendre le ou les projets de loi en préparation au ministère de la santé (réforme des hospitalisations sous contrainte et réorganisation territoriale de la prise en charge), les pouvoirs publics construisent des murs (cinq nouvelles UMD sont déjà sur les rails), comme pour s'assurer que les malades difficiles restent durablement en marge de la société. Érigée au rang de priorité, la lutte contre la récidive incite de plus en plus de médecins de secteur à se défausser de leurs responsabilités en orientant des malades «turbulents» vers des services fermés, de peur qu'ils ne «fuguent».L'Élysée compte sur les préfets pour relayer ses messages. Le directeur de l'hôpital psychiatrique de Monfavet, dans le Vaucluse, vient de «supprimer les arbres et le mobilier de jardin des unités d'accueil de crise», indique Jean-Marc Quintana, après avoir été «mis en demeure par le préfet de veiller à ce qu'il n'y ait plus aucune fugue». À Villejuif, en 2005, le personnel s'est mis en grève pour dénoncer une procédure disciplinaire engagée par la direction à l'encontre d'infirmiers de l'UMD, à la suite d'une tentative d'évasion.."(Mediapart).--------------------------------------------
-Psychiatrie sous influence
j'ai l'infr Psy 35 années
RépondreSupprimerje suis retraité je constate qu'après quelques espoirs dans
les années 70 à 90 env la machine
a enfermer repart de plus belle !
courage amicalement
Merci!
RépondreSupprimerTout cela fait partie d'une logique d'ensemble...logique sécuritaire et poids des firmes pharmaceutiques , asservies à la pression du marché us et à la perception qu'on a là-bas de la maladie mentale
Cordialement