lundi 2 mars 2009

Capitalisme dérégulé : le glas ?

Nous assistons en direct à la faillite accélérée d'un système parvenu à son terme
Moraliser ce système est illusoire , il faut en changer les règles...
Qui le fera ?











-"Il s'agit moins de moralisation que de régulation. L'affaire de la Société Générale est la preuve que l'implication des pouvoirs publics est indispensable pour que les marchés ne deviennent pas fous. Cette implication se situe d'ailleurs davantage sur les plans européens et mondiaux que sur le plan national."(M.Sapin)

-"Ce n’est qu’en créant ainsi les conditions démocratiques réelles et concrètes que suppose le fonctionnement d’un capitalisme différent que nous parviendrons à appréhender dans toute sa complexité le problème de la « moralisation du capitalisme "(C.Arnsperger)
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Le glas a sonné pour le libéralisme sauvage, par Robert Castel:

"Ce que nous sommes en mesure de comprendre à travers la crise qui nous affecte actuellement ne devrait pas constituer un scoop. Elle rend manifeste le fait que, laissé à lui-même, le marché conduit à la catastrophe. Déjà dans son analyse de l'implantation du capitalisme industriel, La Grande Transformation (Gallimard, 1983), paru en 1944, Karl Polanyi a montré que ce qu'il appelle le "marché autorégulé", c'est-à-dire laissé à sa propre dynamique, détruit les anciennes formes de régulation qui structuraient les sociétés préindustrielles et empêche d'en constituer de nouvelles...

Cependant, le marché "autorégulé" n'était pas parvenu à imposer son hégémonie, du moins dans les démocraties d'Europe occidentale, parce que s'y sont construits des systèmes de protection sociale assez forts pour lui faire contrepoids. C'est la substance du "compromis social" du capitalisme industriel. Sous l'égide de l'Etat, il limitait la juridiction du marché en l'équilibrant par des droits, droit du travail et protection sociale, afin d'assurer une sécurité minimale pour les travailleurs et les citoyens au nom de la solidarité et de la paix sociale.Mais depuis une trentaine d'années, nous sommes entrés dans un nouveau régime du capitalisme qui entend faire fi de tous ces obstacles au libre déploiement du marché. On nous répète inlassablement que les régulations sociales plombent la compétitivité des entreprises et que, pour jouer pleinement le jeu de la concurrence dans une économie mondialisée, il faut reconquérir la liberté du travail contre les servitudes du droit.Ce ne sont pas là de purs discours portés par les chantres du libéralisme. On assiste à une remarchandisation rampante de larges secteurs de la société et, au premier chef, du monde du travail. Elle entraîne le chômage de masse (car ce capitalisme est incapable d'assurer le plein-emploi), la précarisation des relations de travail, le retour sur le devant de la scène de la vieille figure du travailleur pauvre, la multiplication de situations bâtardes comme celle des bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) ou des "contrats aidés", qui sont à moitié des travailleurs, mais, parce qu'ils travaillent sous des formes dégradées et mal rémunérées, doivent être en même temps à moitié des assistés dépendant des secours...La crise actuelle nous montre comment et pourquoi on est dévoré par le marché : en le laissant s'emballer lui-même. En ce sens, le rôle joué par le capital financier dans le déclenchement de la tempête est hautement significatif, mais il faut se garder de l'autonomiser. Le capital financier est la pointe avancée du nouveau régime du capitalisme, et les graves dysfonctionnements produits à ce niveau entraînent la dégradation de l'"économie réelle"...."

-Nous sommes devenus les gestionnaires de nos propres jouissances:
"Il aura fallu un véritable tsunami financier pour qu'enfin on le comprenne : le capitalisme crée davantage de problèmes qu'il n'en résout. A l'instar des nombres naturels du théorème de Gödel, le capitalisme est un système qui ne peut être à la fois cohérent et complet. S'il reste cohérent avec ses principes, il se heurte à des problèmes insolubles ; s'il essaie de les résoudre, il doit renier ses propres fondements...
La logique capitaliste n'est viable qu'à condition de s'appliquer toujours à de nouvelles "terres vierges" ; mais en les exploitant, elle entame leur virginité précapitaliste et épuise par là même les ressources nécessaires à sa perpétuation. C'est le serpent qui se mord la queue : un vrai festin, jusqu'à ce que la nourriture finisse par manquer et qu'il ne reste plus personne pour la manger...Le capitalisme est par définition un système parasitaire. Comme tout parasite, il s'attache à un organisme encore sain et prospère à ses dépens. Mais à mesure qu'il le grignote, il voit s'anéantir les conditions mêmes de sa survie. Au stade des conquêtes impérialistes, Rosa Luxemburg ne pouvait guère prévoir que le capitalisme irait puiser sa subsistance bien au-delà des territoires exotiques de la prémodernité.Depuis, il a prouvé son habileté à changer de cible dès que l'organisme parasité commençait à s'épuiser. Une fois annexées toutes les terres vierges précapitalistes, le capitalisme s'est mis en quête d'une "nouvelle virginité". Il s'est lancé à l'assaut d'un territoire inexploité jusqu'alors : les millions d'épargnants qui n'avaient pas encore accès à l'endettement. La carte de crédit a enclenché le processus, avec ce slogan racoleur : "Qu'attendez-vous pour vous faire plaisir ?". Vous avez envie de quelque chose qui est au-dessus de vos moyens ?...
...profitez-en maintenant, vous paierez plus tard ! Elle a fait de nous les gestionnaires de notre propre jouissance : désormais, les fins ne dépendent plus des moyens.Pour que le système du crédit déploie sa pleine rentabilité, il faut que la dette se transforme en actif générant des profits permanents. Vous n'arrivez pas à rembourser ? Pas de souci : les implacables usuriers d'antan ont laissé place à une nouvelle génération de banquiers. Ils sont tout disposés à vous accorder un répit, à vous ouvrir un nouveau crédit pour rembourser la dette initiale et vous laisser un peu d'argent d'avance (encore une dette) afin d'acheter de nouveaux plaisirs. Votre banque aime vous dire "oui". Votre banque vous accompagne. Votre banque vous sourit, comme l'affichent certaines publicités...
Le credit crunch, ce resserrement du crédit auquel nous assistons aujourd'hui, ne témoigne pas d'un échec des banques. Au contraire, c'est une preuve éclatante de leur réussite. Elles ont tenu le pari de transformer une immense majorité d'hommes et de femmes de tous âges en une race d'emprunteurs chroniques, pour qui la seule issue est le surendettement...
Hector Sants, directeur de la Finances Services Authority (FSA), a ainsi été contraint d'admettre que "malheureusement, les modèles financiers ne sont pas programmés pour résister aux secousses ". Commentaire de Simon Jenkins, éditorialiste du Guardian : "C'est comme si un pilote affirmait qu'à part les turbines, son avion est en parfait état de vol." Pour autant, Jenkins ne perd pas tout espoir : une fois que la culture du fric aura été poussée jusqu'à l'absurde, on reviendra à une définition non économique de "la vie bonne", aussi bien dans notre quotidien que dans la politique..."
> Z.Bauman : L'autre face de la mondialisation
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