__Tous les jours, c'est le drame en Syrie...
Mais on n’interviendra pas en enfer … alors qu'on avait été si prompt en Lybie, malgré les critiques et les mises en garde. Il est vrai que l'opération était relativement aisée et les intérêts puissants.
Que pourra la Ligue arabe?
Beaucoup d'agitations diplomatiques.
Pourquoi cette non action ou cette inertie? Veut-on empêcher le pire, en estimant qu'un pouvoir fort, même cruel, vaut mieux qu'un désordre durable intercommunautaire et interconfessionnel, dans cette zône sensible, point névralgique du monde arabe, "meilleur ennemi d'Israël", où toute déstabilisation violente d'un régime ne manquerait pas d'avoir des conséquences funestes dans les pays voisins: Liban, Jordanie, Israël... pouvant créer des réactions en chaîne incontrôlables....
Les grands problèmes n'auraient-ils pas de solutions, comme le disait De Gaulle? Faudrait-il appliquer le pire machiavelisme là où la morale est impuissante et l'interventionnisme risqué? Peut-on, au nom des grands principes, pratiquer une ingérence qui semble aller de soi pour beaucoup, au vu de ce que nous pouvons savoir des massacres pratiqués tous les jours, des événements dont nous ne comprenons guère le sens.
_Si l'on en croit certaines sources,"le choc des photos n’épuise pas la barbarie syrienne. Une autre réalité, en grande partie occultée, participe hélas d’une violence tout aussi mortifère mais moins spectaculaire : le début de guerre civile qui couve depuis des mois. Certes, le régime a une responsabilité certaine dans cette situation, soit en encourageant des assassinats ciblés (dont le fils du Mufti de la République, mystérieusement tué à Alep), soit en tenant un discours auto-réalisateur (« Moi ou le déluge ») qui ne fait qu’accentuer la guerre entre communautés. Il n’empêche, certains faits méritent d’être rappelés. Dès le début du mouvement de révolte syrien, des manifestants scandaient dans la banlieue de Damas : « Les Chrétiens à Beyrouth, les Alaouites au cimetière ! ». On peut s’en désoler, mais la propagande officielle syrienne qui dénonce le confessionnalisme et le sectarisme de larges pans de l’opposition et qualifie les ennemis du régime de « terroristes » n’est pas entièrement dénuée de vérité. A la faveur du chaos qui s’installe un peu plus chaque semaine, des groupes armés salafistes mènent une croisade contre le pouvoir « impie » de l’alaouite Assad. Et si le Conseil transitoire syrien, construit sur le modèle du CNT libyen, se défend de tout ancrage confessionnel, puisque des alaouites et des chrétiens y cohabitent avec des Frères Musulmans, ce gouvernement de l’ombre aurait fort à faire en arrivant au pouvoir. "
__Ce document permet de mieux comprendre les raisons de la non-intervention .
Les effets d'annonce sans suite ont surtout pour but de calmer les opinions publiques traumatisées par les images télévisées et à de provoquer un effet d'intimidation sur les proches du régime.
La paralysie est manifeste. Trop d'intérêts, parfois contradictoires, sont en jeu. Serait-ce aussi que les Occidentaux ont d'autres soucis et que la Syrie n'a pas de pétrole? La Syrie n'est pas la Lybie, et l'Iran est si proche...
Ce qui est sûr, c'est que le régime syrien arrive au bout de ses ressources:
"...Les ressources du régime sont moindres que le discours officiel et la surenchère sécuritaire ne le laissent entendre.Habitué à survivre dans la confrontation et dans un environnement stratégique hostile, le régime ba’thiste résiste sans rien céder, excluant toute négociation. Les dirigeants syriens comptent encore des ressources dans le système international et régional : le soutien de ses alliés (principalement la Russie, l’Iran, l’Irak et le Liban) et les réticences de ses adversaires à s’embarquer dans une aventure syrienne. Ces dernières pourraient néanmoins s’éroder face aux coups de force répétés de Damas et à son autisme. Or, c’est en s’appuyant sur ces alliances alternatives que le régime a l’habitude de renverser le rapport de force lorsqu’il lui est défavorable. Ces succès en politique étrangère lui ont permis d’imposer sa domination sur la société, lui procurant les ressources économiques pour alimenter sa rente et son appareil coercitif.
Or, pour la première fois de son histoire, le combat se situe simultanément sur son front intérieur et extérieur. «Dans le passé, le régime a su bien gérer l’isolement, disposant de suffisamment de ressources dans les relations internationales, mais obsédé par la contestation, il la réprime en recourant à des méthodes de plus en plus brutales au détriment des éléments de sa capacité de survie», analyse Peter Harling, responsable à l’International Crisis Group (ICG) du bureau Irak-Syrie-Liban (son dernier rapport est à consulter ici).
De fait, à l’issue de neuf mois de contestations, les ressources du régime s’épuisent dans le domaine sécuritaire. La cohésion de la machine militaro-sécuritaire qui a résisté jusque-là est un élément clé de sa résilience. Mais cette machine sécuritaire est mise à l’épreuve. Sans parvenir à écraser le soulèvement, elle enregistre des pertes de plus en plus nombreuses, sous les coups de l’Armée syrienne libre. «Le bilan officiel dépasse les 1.000 morts, mais il pourrait être plus élevé, estime un intellectuel à Damas, car cette insurrection est amenée à s’amplifier.» Le développement sur l’ensemble du territoire de ce mouvement de résistance, peu armé mais de plus en plus organisé, et disposant d’un soutien populaire, oblige le régime à revoir son dispositif répressif. L’armée, qui intervenait de manière ponctuelle, doit être déployée en première ligne, un ordre de bataille qui est de nature à générer davantage de défections. L’allégeance de ces forces armées, composées majoritairement de sunnites, à la différence des unités d’élite et des services de renseignement contrôlés par des alaouites fidèles au clan Assad, ne résiste pas à l’épreuve de la réalité...
«Le régime a des ressources considérables, l’état policier s’est déployé sur le terrain d’une manière spectaculaire et s’est développé en recrutant de nombreux supplétifs recrutés dans diverses catégories de la société, mais ces ressources sont inadaptées, ajoute Peter Harling. Le régime, en réprimant toute contestation pacifique, a forcé l’émergence de groupes armés et a créé les conditions d’une conspiration internationale, mais il n’a aucune réponse à la crise.»
L’échec de la solution sécuritaire et la brutalité de la répression en viennent à ébranler la forteresse alaouite, clé du verrouillage sécuritaire. «Il y a un nombre important d’officiers et de soldats qui estiment que cette politique ne donne aucun résultat et qui s’inquiètent des pertes croissantes au sein de l’armée», observe un intellectuel alaouite sous couvert de l’anonymat. L’absence de défections significatives dans les rangs alaouites ne vaut pas adhésion, en dépit de la solidarité communautaire sur laquelle s’appuie le pouvoir. L’escalade dans la répression s’adresse aussi à ceux qui seraient tentés de déposer les armes ou qui aspirent tout simplement à regagner leur village pour ne plus avoir à combattre ni à être associés à cette répression brutale. Ils se trouvent en quelque sorte pris en otages, à l’instar d’autres minoritaires, sur lesquels on exerce des pressions considérables pour les empêcher de rejoindre le soulèvement. «En tant que chrétiens, nous sommes exposés à davantage de pressions, comme l’ensemble des minoritaires», explique l’un d’eux, qui a cessé du jour au lendemain ses activités d’opposant pour cette raison.
«La préoccupation principale des soldats alaouites demeure leur avenir en cas de changement de régime: garderont-ils un salaire, et seront-ils menacés? poursuit l’intellectuel. Quant à ceux qui sont derrière les ordres, ils savent qu’ils ne peuvent avoir aucune garantie», ajoute-t-il. Mieux rémunérés, les hauts gradés qui sont aux commandes de la répression ont pleinement conscience qu’ils ont déjà hypothéqué leur avenir et «tuent pour ne pas être tués». D’autres éléments des services de renseignement s’achètent une certaine immunité en collaborant avec les opposants.
À l’issue de neuf mois de soulèvement, la base du régime se réduit et se radicalise. «Le régime s’est recentré sur la famille, entourée de forces loyalistes, disposées à se battre jusqu’au bout», analyse Peter Harling. Ces jusqu’au-boutistes sont formés des centaines de supplétifs désignés sous le vocable de Chabiha, en référence aux gangs alaouites constitués dans les années 80 et qui semaient la terreur sur le littoral côtier. L’émergence de ces nouvelles recrues, qui tiennent en joue à la fois la société et l’armée régulière, est le signe manifeste d’un délitement du régime et de sa machine coercitive. L’appareil sécuritaire produit des milices qui s’autonomisent. Et développent leurs propres ressources financières à travers le racket des populations locales et les enlèvements crapuleux. «À Homs, des notables ont été enlevés dès cet été, non pas parce qu’ils étaient impliqués dans le soulèvement mais pour être libérés en échange d’une rançon», témoigne un représentant des comités de coordination locale de Homs.
Prêtant renforts aux forces de sécurité, l’armée régulière tend à devenir une armée d’occupation
Homs, Bab Amro, destruction d’un tank par l’Armée syrienne libre. 22 décembre 2011
Cette économie de la violence s’installe parallèlement à l’effondrement de l’économie du pays...
Si le régime perd du terrain, il conserve néanmoins de redoutables capacités de combattre, qu’il met en œuvre au fur et à mesure qu’il se trouve acculé. «L’escalade de la répression confirme a contrario l’érosion de ses soutiens et laisse pressentir une plus grande violence», estime un analyste en poste à Damas. Ce qui relève d’une fuite en avant pourrait mettre à nu les capacités de nuisance qui ont établi le régime. Il n’est pas sûr que le temps que les dirigeants gagnent aujourd’hui leur permette de se maintenir au pouvoir demain, mais il aura un coût élevé, surtout si leurs adversaires ne parviennent pas à contenir la régionalisation de la révolution syrienne. Plus le temps passe et plus la machine policière diffuse cette violence milicienne, accélérant le délitement de l’État. " (C.Donati_Mediapart)Cette économie de la violence s’installe parallèlement à l’effondrement de l’économie du pays...
Au point où en sont les choses, qui va trouver les bases du moins mauvais compromis possible?
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- La Syrie un an après
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