L'institution est à bout de souffle.
Le système, tel qu'il va (mal), tel qu'il a été pensé et organisé, est au bout du rouleau.
Ce ne sont pas quelques morceaux de sparadrap qui vont soigner le malade, quelques rustines qui vont le mettre sur pied.
Installé depuis des années dans une logique libérale, l'hôpital est devenu le lieu d'une violence institutionnelle, avec des injonctions contradictoires de plus en plus patentes; en gros, faire mieux et plus avec..moins de moyens.
Mais ce ne sont pas seulement les investissements qui font défaut, bien moindre qu'aux USA, c'est toute une organisation qui faut repenser, son système voulu d'autofinancement qui débouche sur la multiplication d'actes parfois redondants et inutiles. Une organisation depuis longtemps mise en cause par des connaisseurs du milieu, médecins en tête.
A un moment donné, le vase déborde.Ce qui explique la forte mobilisation à tous les niveaux.
Tous les personnels sont concernés. Même les médecins. dont beaucoup dénoncent l'absurdité d'une institution qui dysfonctionne. Même, fait rare, des chefs de service, des directeurs d'hôpitaux.
Le point de rupture est atteint à bien des niveaux. Epuisement et culpabilité sont mis en avant comme les effets d'une gestion de plus en plus technocratique, purement comptable et administrative. La difficulté de remplir une mission qui ait du sens se manifeste parfois cruellement.
... La bureaucratie croissante crée (également) de nouvelles contraintes qui dégradent les conditions de travail : par exemple, l’intensification ne tient pas compte des transmissions essentielles qui s’effectuent quand les soignants se rencontrent. En supprimant peu à peu ces moments d’échanges, elle se traduit en un épuisement des soignants et une mise sous tension des personnels. Devenus interchangeables, les soignants appartiennent à des « pool de remplacements » : ils deviennent flexibles et polyvalents. Pour mieux répartir les effectifs, les directions des hôpitaux multiplient les réorganisations du travail. Les journées de 12h se généralisent pour faire face à l’intensification du travail tout en permettant au personnel hospitalier de réduire, en contrepartie, le nombre de jours travaillés et de mettre à distance son travail : « la logique gestionnaire se nourrit des dysfonctionnements qu’elle engendre et parvient, du fait de la précarisation des soignants, à les faire adhérer à des dispositifs qui tirent profit de leur travail » . La réduction du temps de travail n’est donc pas compensée par des créations de postes en raison des gains de productivité attendus des réorganisations. Ces derniers ne sont bien sûr pas propres à l’hôpital mais ils s’accordent d’autant moins aux enjeux de santé que ceux-ci ont pour objet l’humain, les singularités des situations, des vulnérabilités diverses, accompagnées parfois d’enjeux d’urgence vitale....
La crise et les dérives couvaient depuis longtemps. L'hôpital, devenu variable d'ajustement, est malade du marché. Il faut en finir avec l'hôpital entreprise, la dictature du chiffre.
Les investissements annoncés suffiront-ils, du moins à redresser la barre?
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