mercredi 9 juin 2021

Reforme fiscale mondiale

 Fiscalité des entreprises: un triomphe? 

               Dans le sillage novateur des orientations politiques et économiques de Joe Biden, une bonne surprise se fait jour pour ceux qui attendaient depuis longtemps une certaine égalité de traitement entre les économies mondiales, les pays étant le plus souvent en concurrence les uns avec les autres par le biais de la fiscalité affectant surtout les grandes entreprises et les multinationales, quittant un pays pour un autre plus avantageux ou trouvant refuge dans des paradis fiscaux sur l'origine desquels on fermait les yeux ou on se lamentait.. Une concurrence déloyale qui appauvrissait des pays même à l'intérieur de l'Europe, constituant un manque à gagner parfois problématique: par exemple, l'Irlande pour attirer des grands groupes pratiquait les taux les plus bas, comme le Luxembourg.                         C'est une avancée, certes, saluée comme telle, mais partielle et équivoque, pas complètement désintéressée. Les mesures restent limitées. Et il y a encore du pain sur la planche..On verra ce qu'il en restera à la fin d'une négociation qui s'annonce longue, surtout au niveau du G20. L'enthousiasme ne s'impose pas malgré cette initiative dont Biden a surtout besoin.

                                                       ".....Après avoir multiplié les engagements ces derniers jours, ils ne pouvaient se dérober aux attentes. Samedi dans l’après-midi, les ministres des finances du G7 ont annoncé un accord qu’ils n’hésitent pas à qualifier « d’historique » sur la taxation des multinationales. À l’issue de leur sommet à Londres, les responsables des sept économies occidentales (États-Unis, Canada, Allemagne, France, Italie, Grande-Bretagne et Japon) se sont entendus pour engager un projet de réforme de la fiscalité mondiale visant à fixer un taux d’impôt minimal mondial sur les sociétés de 15 %.      Tous les participants y sont allés d’un communiqué triomphal. « Cet impôt minimum mondial va mettre fin à la course vers le bas de la taxation des entreprises et apporter de la justice pour la classe moyenne et les travailleurs aux États-Unis et à travers le monde », s’est félicitée Janet Yellen, secrétaire américaine au Trésor. « C’est un accord historique et je suis fier que le G7 fasse preuve d’une direction collective en cette période cruciale pour le redressement de l’économie mondiale », a poursuivi le chancelier de l’Échiquier britannique, Rishi Sunak, hôte de ce sommet. Il s’agit d’une « très bonne nouvelle pour la justice et la solidarité fiscales, et d’une mauvaise nouvelle pour les paradis fiscaux du monde entier », a enchaîné le ministre des finances allemand, Olaf Scholz. « Nous sommes parvenus à un accord sur la taxation internationale du XXIe siècle », qui doit permettre notamment une « juste taxation des géants du digital », a ponctué le ministre des finances Bruno Le Maire.                 La satisfaction affichée par les uns et les autres est à la mesure de leurs appréhensions passées : le multilatéralisme vit encore. Après les années Trump, les conflits et sanctions commerciales à répétition des uns contre les autres, le gouvernement américain est prêt à renouer le dialogue avec ses alliés. Et pour leur première rencontre depuis plus d’un an en raison du Covid, les ministres des finances sont parvenus à trouver un début de terrain d’entente sur un sujet de discorde qui les divise depuis des années : la fiscalité des multinationales.               Alors que les discussions menées par l’OCDE font du surplace depuis près d’une décennie, l’annonce de ce projet d’une taxation minimale des multinationales, fixée en fonction des ventes réalisées dans les pays et non plus de l’emplacement du siège, marque un tournant. Poussés par des opinions publiques qui ne supportent plus l’évasion fiscale et le règne des paradis fiscaux, les responsables acceptent de donner un coup d’arrêt à la concurrence fiscale entre les pays, devenue la règle internationale.              ___Le projet est porteur de lourdes menaces pour les paradis fiscaux. Ils risquent d'être asphyxiés car ils  perdent tout intérêt puisque le lieu d'imposition n'est plus le siège -souvent factice- des grands groupes mais le lieu où ces derniers réalisent leurs ventes.  Ce qui devrait susciter nombre d'oppositions notamment en Europe: l'Irlande, le Luxembourg et les Pays-Bas  qui ont bâti une partie de leur prospérité en attirant les grands groupes grâce à une fiscalité très compréhensive, ne sont pas prêts à renoncer facilement à un tel avantage.              ___Bien que réelle, cette avancée cependant est à nuancer. À l’origine, le président américain avait évoqué un taux minimal de 21 % pour la taxation des bénéfices des grands groupes, avant de faire marche arrière sous la poussée du Congrès et des lobbies. L’administration américaine s’est finalement arrêtée sur le chiffre de 15 %. Un seuil qui n’a pas été choisi au hasard : il correspond à la fiscalité moyenne payée par les géants américains du numérique, qui ont tant pesé dans ce dossier.                                     D’une certaine façon, on peut même dire que cet accord est fait pour eux. Tout au long des discussions, Janet Yellen a bataillé pour obtenir que la France, la Grande-Bretagne, l’Italie, qui ont adopté des mesures de taxation contre les Gafam (Google – devenu Alphabet –, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft), les abandonnent sur-le-champ en réponse à l’accord obtenu. Les Européens ont refusé, indiquant qu’ils ne renonceraient à ces dispositifs qu’une fois l’accord sur une taxation minimale scellé et ratifié.    Pour le gouvernement américain, il importe de régler au plus vite ce différend sur les Gafam qui l’oppose à l’Europe. La bataille contre l’évasion fiscale des géants du numérique ne cesse de prospérer. Après la France, qui a instauré une taxation minimum, d’autres pays sont en train de suivre le même chemin. La semaine dernière encore, le gouvernement américain a menacé d’imposer des sanctions douanières évaluées à 2 milliards de dollars contre la Grande-Bretagne, l’Espagne, l’Italie, l’Autriche, la Turquie et l’Inde, accusées d’adopter des mesures discriminatoires contre Amazon ou Google.               Surtout, les États-Unis redoutent les textes en préparation à la Commission européenne. Une directive sur la transparence des multinationales est en cours d’adoption : elle vise à obliger l’ensemble des groupes travaillant en Europe à déclarer pays par pays leurs activités, leurs implantations, leurs salariés, leurs chiffres d’affaires et leurs profits. Ce texte, qui doit encore être adopté par le Parlement européen et les différents pays, constitue une avancée majeure dans la lutte contre l’évasion fiscale.    De son côté, la direction européenne de la concurrence n’a pas caché ses intentions d’adopter des règles draconiennes contre les Gafam, pouvant aller jusqu’à pousser au démantèlement de ces géants. Une perspective inadmissible pour le gouvernement américain. Même si de nombreux responsables outre-Atlantique commencent à s’inquiéter de la puissance acquise par ces empires du digital et demandent une révision des lois antitrust pour mieux encadrer leur pouvoir, l’administration américaine n’est pas prête à laisser à d’autres le soin de lui dicter ses règles.                        ____Mais face aux tensions grandissantes avec la Chine, le gouvernement américain a besoin aussi de resserrer les liens avec ses alliés et ne peut rester sourd à leurs récriminations et leurs accusations de pillage fiscal. D’où la proposition de taxer désormais les bénéfices des multinationales en fonction des pays de vente.     Les règles sont encore très floues....."          __________________________

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