Deutschland unter alles?
Absolument pas, mais rien ne va plus in Deutschland. Ce sont les élites politiques qui n'hésitent pas à le reconnaître. Le pays, souvent qualifié déjà de colosse aux pieds d'argile à l'époque récente de sa spectaculaire envolée économique. doit se réinventer à la suite des crises plurifactorielles qu'il traverse. IL n'y pas de quoi nous en réjouir. Toute Schadenfreude serait déplacée et absurde. Nous avons intérêt à ce que notre voisin retrouve la voie de la "normalité", étant donnés les liens tissés avec Berlin et la place déterminante qu'il tient au coeur de L'UE. Même si le dit couple franco-allemand va de moins en moins bien.
________Ça tangue même vraiment au pays de Goethe: "...Derrière la « première économie d’Europe », une crise en gestation ? Longtemps, l’hégémonie allemande sur le continent a reposé sur deux piliers : un excédent commercial permis par le marché commun et une énergie à bas prix, qu’autorisaient notamment les importations de gaz russe. Depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie, ce second pilier a été brutalement renversé....Rarement un chancelier allemand avait dû faire face à de tels défis. Un temps, Olaf Scholz avait entretenu l’illusion qu’à la tête du SPD, il allait rompre avec les fragilités évidentes du « modèle allemand » et remettre en question les fameuses « lois Hartz IV » de dérégulation salariale. La décision de la Cour met un coup d’arrêt définitif à ces velléités. À présent, tous les budgets des ministères sont revus à la baisse. Seul celui de la Défense est épargné, et l’aide apportée à l’Ukraine a même doublé, passant à 8 milliards d’euros… Dans la perspective d’un nouvel accroissement, Olaf Scholz n’a pas exclu d’utiliser à nouveau l’article 115. Et de créer, ex-nihilo, un énième « fonds »…Cette fois, les louanges de la presse européenne et des milieux bancaires n’auront pas raison de la réalité. Les réussites en termes d’excédents commerciaux ne parviennent plus à masquer les sacrifices exorbitants imposés à toute une frange de la population. L’arrivée au parlement fédéral du parti d’extrême droite AFD (Alternative für Deutschland) avec 94 députés en 2017 – premier groupe parlementaire d’opposition – a bien provoqué un électrochoc dans la société allemande. Aucune réponse politique n’y a cependant été apportée. La présence du parti libéral FDP dans la coalition actuelle, le plus grand défenseur des politiques austéritaires et de la règle des 0,35%, est la garantie qu’aucun changement d’ampleur ne surviendra – si tant est que le SPD ait une quelconque velléité d’en impulser…" C'est la panne du naguère réputé moteur de l'UE. Mais à quel prix! « L'économie allemande va dramatiquement mal. » ose un responsable. L'AfD pousse ses pions. Outre- Rhin, la nouvelle donne économique , énergétique et militaire ne cesse d'inquiéter. Avant quel rebond possible? Das ist die Frage....
" ,,,,,,Le changement de décor est impressionnant. Dans les années 2010, l’Allemagne pouvait se présenter comme un modèle pour le reste de la zone euro. Les gouvernements néolibéraux européens étaient d’ailleurs fort heureux de pouvoir calquer leurs décisions et leurs politiques économiques sur les désirs et les actes des dirigeants allemands qui prétendaient tracer le chemin de la croissance et de la réussite de l’union monétaire .On se souvient, pour le seul cas français que, de Nicolas Sarkozy à Emmanuel Macron, en passant par François Hollande, le « modèle allemand » était le Saint Graal permettant de justifier les « réformes structurelles ». L’histoire est souvent pleine d’ironie. Voici qu’à présent, ces mêmes dirigeants prétendent que suivre le modèle allemand aurait permis de faire mieux que l’Allemagne qui s’enfonce dans la crise. La réalité est bien différente. Les « réformes » n’ont pas permis le décollage promis de la croissance, qui s’affaiblit partout en Europe. Mais les pays qui sont le plus alignés sur l’Allemagne, dont le modèle est le plus proche du mercantilisme allemand et qui dépendent le plus des commandes de ce pays en paient clairement le prix aujourd’hui..... Les « satellites » de l’Allemagne font grise mine. En 2023, le PIB néerlandais n’a augmenté que de 0,1 %, celui de la République tchèque de 0,4 %, celui de l’Autriche de 0,7 %, et celui de la Finlande de 0,5 %… La France, qui s’est engagée dans une forme de « germanisation » de sa politique économique, résiste un peu mieux, mais elle a aussi décroché au regard de la tendance d’avant la crise sanitaire. Le « génie » économique allemand est devenu une faiblesse et la « locomotive » de la zone euro est devenue sa voiture-balai. Ce retournement de situation n’est pas le fruit du hasard, mais bien de la stratégie mise en place outre-Rhin depuis un quart de siècle. Le modèle était fondé sur des faiblesses majeures qui se sont retournées contre lui-même, et c’est ce que ses défenseurs acharnés en France ou ailleurs ont refusé obstinément de voir, trop occupés qu’ils étaient à « discipliner » la force de travail nationale. Qu’était-ce donc que ce « modèle allemand » ? À la fin des années 1990 et au début des années 2000, le pays, qui doit digérer la réunification, est déjà qualifié par le président de l’Ifo de l’époque, Hans-Werner Sinn, « d’homme malade de l’Europe ». Pour redresser la barre, le capital industriel allemand impose alors une stratégie mercantiliste, c’est-à-dire une stratégie fondée sur la priorisation de l’excédent commercial. Pour cela, la priorité est de comprimer les salaires et donc la demande intérieure. L’effet est non seulement d’améliorer la compétitivité-coût des produits allemands, mais aussi de réduire la demande d’importations. En améliorant l’excédent extérieur, on améliore à la fois les profits et le solde budgétaire. C’est là la clé de la pensée ordolibérale qui domine outre-Rhin depuis les années 1950 : la volonté de l’excédent budgétaire et celle de l’excédent commercial vont de pair. La modération salariale est donc imposée dès la fin des années 1990, tandis qu’entre 2002 et 2004, les réformes Hartz de Gerhard Schröder permettent d’assurer le maintien de salaires faibles dans les services, tout en limitant la croissance des dépenses publiques sociales. L’effet sur la compétitivité de la production allemande va être rapide dans les années 2000. De bonne qualité et désormais plutôt bon marché, l’industrie allemande gagne d’immenses parts de marché. Mais l’équation est facilitée par trois éléments conjoncturels qui ont été, en réalité, les vrais moteurs du « modèle allemand » : la création de la zone euro en 1999, qui empêche toute dévaluation compétitive des concurrents européens, l’apport de gaz russe bon marché pour assurer une énergie à moindre coût et l’immense croissance chinoise qui assure des débouchés massifs aux produits allemands...." Au milieu des années 2010, les piliers du modèle allemand sont fragilisés. Les salariés allemands finissent par demander une part des immenses profits réalisés par les entreprises à l’exportation et la croissance chinoise commence à ralentir, tandis que la demande européenne n’en finit plus de stagner. Pendant quelques années, l’économie allemande résiste grâce à l’énergie bon marché, qui permet d’encaisser en partie la hausse des salaires réels, et grâce à la politique de taux bas de la Banque centrale européenne (BCE), qui lance une vague d’achats immobiliers assez inédit dans un pays où la culture était plutôt de rester locataire. L’Allemagne connaît alors un boom immobilier qui permet de compenser en partie les premières difficultés de l’industrie. Mais l’illusion ne va pas durer longtemps. Après la poussée inflationniste et la remontée des taux de la BCE, la croissance du secteur de la construction est stoppée net. En 2023, l’investissement dans la construction a reculé de 2,1 %, la troisième baisse annuelle consécutive après − 1,8 % en 2022 et − 2,6 % en 2021. La martingale ne fonctionne plus, l’économie allemande ne peut plus cacher sa crise industrielle. Le 22 février 2024, le constructeur automobile allemand Mercedes-Benz, fleuron d’un des principaux secteurs exportateurs allemands, annonce que l’on doit s’attendre à une baisse de sa rentabilité de près de trois points cette année. Le groupe doit faire face à deux défis qu’il peine à relever : un marché chinois décisif pour lui mais qui devient très concurrentiel, avec des prix en baisse et une inadéquation de son offre sur le marché des véhicules électriques, où la marque ne propose que du haut de gamme, alors que le marché se développe surtout sur le bas de gamme. L’exemple de Mercedes-Benz est un bon résumé des maux actuels de l’industrie allemande. La stratégie mercantiliste est, on l’aura compris, une stratégie du moindre coût et, partant, du moindre investissement. Dans les années 2000 et 2010, les profits industriels n’ont été réinvestis qu’au minimum outre-Rhin, tandis que l’État fédéral, lui, faisaient des économies sur l’entretien et le renouvellement des infrastructures pour afficher avec fierté le « Schwarze Null », l’équilibre budgétaire. Ce sous-investissement chronique a aussi été un élément clé de la rentabilité du « made in Germany » : il permettait d’afficher des profits importants en jouant sur un quasi-monopole acquis dans certains domaines de pointe, notamment les machines-outils ou les voitures haut de gamme. Mais la situation n’a duré qu’un temps. Dès la fin des années 2010, le patronat allemand commence à s’alarmer de l’état de délabrement des infrastructures publiques, qui finit par peser sur la compétitivité de l’économie. En parallèle, l’industrie allemande doit faire face à de nouveaux concurrents et à de nouveaux marchés. Et son sous-investissement chronique ne l’a pas préparée à cela. ....... La situation allemande est par conséquent bien aussi mauvaise que ce que décrit Robert Habeck. Les chiffres de l’emploi ne doivent pas faire illusion, ils sont une partie même du problème puisqu’ils sont le fruit de la fragmentation de l’emploi et de la baisse globale de la productivité du travail (− 1 % en 2023). ... Le capital industriel allemand semble incapable de répondre à la situation, sauf en prenant des mesures qui l’aggravent au prétexte de tenter de sauvegarder les profits immédiats : pression sur les salaires qui réduit la demande intérieure et désinvestissement dans l’outil productif qui accroît son retard. Dans une telle situation, le seul recours ne peut être que l’État qui, dépassant le besoin de rentabilité immédiate, peut investir dans l’avenir. Mais, en Allemagne, l’obsession de l’orthodoxie budgétaire rend ce levier inopérant. Bien sûr, ce tableau ne doit pas laisser penser que l’industrie allemande est en voie d’effondrement. Elle dispose encore de solides positions, notamment en Europe, où la concurrence a disparu. Il ne faut pas oublier que la base industrielle allemande est évidemment bien plus diversifiée et importante que celle de la France, par exemple. Mais il n’empêche, la puissance industrielle allemande s’effrite et commence à se déliter, sans qu’aucune solution ne semble en mesure d’être apportée en réponse. Le risque d’une longue crise industrielle allemande se dessine donc, qui, si elle se confirme, aura inévitablement des répercussions économiques et politiques sur le reste de la zone euro."[ Romaric Godin __ Souligné par moi_ ] _______________
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