lundi 21 juillet 2025

La potion de l'abbé Bayrou

Il va falloir faire pénitence

            Culpabilisation  et injonctions                                                                                                                                                                               La fête et finie. Nous voilà prévenus.  La "vérité" sort de la bouche notre provisoire Premier Ministre. Comme s'il n'y avait pas amplement matière à débattre. Dette et culpabilité ont partie liée  (Schuld  en allemand...) Que vient faire ici la morale?          __ Comme si en ce domaine les constats étaient clairs, les solutions, évidentes. Comme s'il n'y avait pas de présupposés. Notre donneur de leçon fait comme s'il n'avait pas été depuis longtemps conseiller du Prince, ayant ses entées à l'Elysée en toutes circonstances. " Voici donc un homme politique qui, disposant d’un accès sans doute privilégié à la vérité, se décidait à éclairer des Français inconscients, abrutis par leur dépendance à l’argent public et à la redistribution sociale. La France serait « accro » à la dépense publique et si indolente que ses habitants refuseraient de travailler suffisamment. Alors, la dette augmenterait, tenez-vous bien, de « 5 000 euros par seconde ». Un chiffre illustré par un inquiétant sablier menant inexorablement à un scénario à la Grèce, longuement – mais confusément – rappelé par le premier ministre.François Bayrou s’est comporté comme un père de la nation sage faisant la leçon à des enfants se vautrant dans les délices de Capoue. Dans un long et pénible exposé, il a expliqué comment les Français devaient se montrer plus disciplinés dans leur consommation de médicaments, de scanners ou d’avis médicaux ou comment il leur fallait travailler davantage...."   


                             Il y a lieu sans aucun doute de remettre beaucoup beaucoup de choses à plat, mais avec mesure et circonspection, sans compromettre l'avenir. Pénaliser la santé ou l'éducation, par exemple, c'est préparer un avenir encore plus sombre. 
Une austérité  aurait forcément des effets forcément récessifs. Le risque est à prendre en compte. On a vu après la crise de 2008....les effets pendant plusieurs années. L'obsession de la dette masque de nombreuses analyses sur ses causes profondes et anciennes, qu'il importe de faire. La désindustrialisation organisée de notre pays n'est pas une cause mineure. Les dépenses sociales sont surtout mises en cause, ce qui n'étonne guère. Une   chute de consommation drastique ne serait pas sans conséquences sur les caisses de l'Etat, enclenchant un cercle vicieux L'urgence est dans l'investissement..           Les causes de cette "faillite" mérite examen, même si les choses sont complexes. Mais il importe d'arrêter d'affoler un public qu'il faudrait d'abord éduquer en cs matières complexes. L'économie n'est pas une science. Si "les caisses sont vides", il faudrait s'interroger sur les causses profondes.                                                                                                     Le testament est amer. Il faut éteindre les lampions. Lfalaise serait devant nous... Mais comment sortir du grand paradoxe?                                                                                                                                             La dictature des marchés  existe aussi.     François Bayrou, agrégé de lettres classiques, aurait été bien inspiré de relire son ouvrage « Du Contrat social », publié en 1762. Que nous dit l’illustre Genevois ? Que l’un des maux des hommes en société est l’inégalité sociale – qu’il traite longuement dans son « Discours sur l’origine de l’inégalité » (1755). Et que pour y remédier, il faut conclure un « contrat », une sorte de pacte, donc, entre les citoyens qui leur permette de mettre sur pied un régime jugé légitime.

     Que signifie « légitime » ? Qu’il soit jugé suffisamment juste, précisément, pour mériter quelques efforts. Rousseau croit que l’homme à l’état de nature (non gouverné par un Etat, donc) est plus libre qu’en société. Pour qu’une société soit par lui acceptable et acceptée, il faut donc que certaines conditions soient réunies. Ce sont elles qui le convaincront d’abandonner la poursuite de son seul bien-être au profit de l’intérêt général – Rousseau parle de passer sous la « suprême direction de la volonté générale ».     Parmi ces conditions, l’une est majeure : le sentiment de travailler à l’égalité entre les hommes. Pas une égalité strictement comptable ou mathématique, mais une égalité de droit, qui donne le sentiment que tous les citoyens contribuent équitablement devant la loi. « Chacun se donnant tout entier, la condition est égale pour tous », écrit Rousseau.  Or, dans son discours d’austérité François Bayrou n’a pas donné le sentiment que « la condition est égale pour tous ». Il a certes évoqué une « contribution de solidarité » qui serait acquittée par les Français « les plus fortunés ». Mais pas un réel accroissement de leur fiscalité, qui pourrait passer par une taxe, comme celle proposée par l’économiste Gabriel Zucman et soutenue par pas moins de sept prix Nobel d’économie.                                    A un moment où l’on apprend que le taux de pauvreté en France n’a jamais été aussi élevé depuis trente ans, au moment où notre pays ressemble de plus en plus à un pays d’héritiers, comment est-il possible qu’un Premier ministre pense acceptable de supprimer deux jours fériés quand les plus privilégiés sont épargnés ? Que quelqu’un offre « Du Contrat social » à François Bayrou comme lecture d’été !       


                                                                                                                                                                   
  Point de vue:  "...François Bayrou avait décidé de sortir les grands mots pour ses annonces budgétaires attendues depuis plusieurs semaines. Les Français auraient « rendez-vous avec eux-mêmes ». Son intervention, soigneusement préparée par une salve de fuites dans les médias, était ainsi présentée comme un « moment de vérité ».   Voici donc un homme politique qui, disposant d’un accès sans doute privilégié à la vérité, se décidait à éclairer des Français inconscients, abrutis par leur dépendance à l’argent public et à la redistribution sociale. La France serait « accro » à la dépense publique et si indolente que ses habitants refuseraient de travailler suffisamment. Alors, la dette augmenterait, tenez-vous bien, de « 5 000 euros par seconde ». Un chiffre illustré par un inquiétant sablier menant inexorablement à un scénario à la Grèce, longuement – mais confusément – rappelé par le premier ministre.   François Bayrou s’est comporté comme un père de la nation sage faisant la leçon à des enfants se vautrant dans les délices de Capoue. Dans un long et pénible exposé, il a expliqué comment les Français devaient se montrer plus disciplinés dans leur consommation de médicaments, de scanners ou d’avis médicaux ou comment il leur fallait travailler davantage.                                                                                                                    François Bayrou faisait comme s’il n’était responsable de rien. C’était le retour de la fameuse « pédagogie » qui était jadis l’obsession du macronisme lorsqu’il fustigeait les anciens gouvernements. Mais le problème, c’est que François Bayrou ne peut pas faire comme si lui et son parti n’avaient pas été membres de la majorité présidentielle qui exerce le pouvoir depuis 2017.                                                   Et c’est bien pour cela que ce « moment de vérité » n’était qu’une gigantesque supercherie. Un tour de passe-passe qui vise à culpabiliser les Français pour effacer la responsabilité des politiques menées jusqu’ici. Aussi la vérité prononcée par François Bayrou avait-elle un goût de mensonge.       Amélie de Montchalin, ministre déléguée au budget, avait, dans Les Échos du 14 juillet, vendu la mèche en donnant aux ministères contraints de faire face aux coupes budgétaires ce conseil pour faire passer la pilule : « Il y a une histoire à raconter. » Loin de l’exigence de vérité, le premier ministre s’est bien employé avant tout à raconter une histoire. Celle d’un pays vivant sur le budget public dans l’insouciance sous le regard effrayé des politiques « responsables » désireux de redresser les comptes publics.                         Mais cette histoire ne résiste pas à l’analyse, même la plus hâtive. Le macronisme, dont François Bayrou n’est plus que la queue de comète, est au pouvoir depuis 2017. Lui-même recyclage des politiques précédentes, il ne peut plus aujourd’hui échapper à son bilan. D’ailleurs, l’ironie était qu’en faisant la leçon au pays, le maire de Pau décrivait l’échec de la politique qu’il avait jusqu’ici soutenue.                                                                                                                      Lors de son entrée à l’Élysée, Emmanuel Macron avait promis d’en finir avec les déficits par une recette miracle : les réformes. Celles que, prétendument, la France avait si longtemps refusé de mettre en œuvre allaient donner un coup de fouet à la croissance en relançant la productivité. Grâce à la baisse des impôts et à l’affaiblissement des travailleurs, les entreprises françaises allaient enfin être compétitives, faire des bénéfices, les investir dans les nouvelles technologies, réaliser des gains de productivité, créer des emplois bien payés. Alors, les caisses de l’État allaient se remplir et le déficit se réduire.                                                                                 Huit ans plus tard, le bilan est que la croissance française stagne. Le PIB devrait, si tout se passe comme prévu par la Banque de France, augmenter de 0,6 % cette année. Les prévisionnistes de l’hôtel de Toulouse prévoient un « rebond » vers le potentiel de croissance, c’est-à-dire vers 1,2 %, en 2027. Ce niveau potentiel n’a pas bougé depuis huit ans, malgré les réformes au pas de charge et les baisses d’impôts sur le capital. Et pour cause : la productivité du pays s’est affaissée depuis cinq ans.                                                                                                                       La vérité, c’est donc que tous les objectifs fixés par Emmanuel Macron ont été manqués. La baisse du chômage a été acquise non par de nouveaux gains de productivité, mais par des emplois subventionnés et peu productifs. Le produit de l’érosion des salaires et des baisses d’impôts n’est pas venu alimenter la croissance. Bref, le rêve de ruissellement a échoué.    Résultat : la réalité est inverse de celle rêvée par le macronisme. Ce n’est pas l’activité qui est venue remplir les caisses de l’État, ce sont les caisses de l’État qui soutiennent à bout de bras un capitalisme français défaillant. Le récent rapport du Sénat a évalué ce soutien à 211 milliards d’euros par an, soit davantage que les 170 milliards d’euros de déficit public en 2024. Et ce sont les plus fragiles qui ont payé ce soutien : c’est ce que traduisent les chiffres alarmants de l’Insee sur la croissance des inégalités et de la pauvreté.                                               Et c’est là l’éléphant dans la pièce, que les discours moralisateurs du premier ministre visent à cacher : la politique d’aide aux entreprises n’est pas rentable, elle ne permet pas de générer une croissance suffisante pour combler le déficit public. Dès lors, ces aides creusent les déficits.                   À côté de ce manque à gagner, le « trou » de la Sécurité sociale (15 milliards d’euros) est un détail insignifiant. Ce dont François Bayrou ne parle pas, c’est que le même pays qui est censé être devenu le plus attractif du monde sous les applaudissements de la majorité est aussi celui qui est dans une situation financière critique. Ces deux faits ne sont pas indépendants : ils sont liés. Pour obtenir cette attractivité qui ne sert à rien, on a réduit la croissance potentielle du pays.                                                           La bonne politique, celle qui s’appuierait sur la « vérité », consisterait donc à modifier cette politique défaillante. Mais il n’en est pas question. Les réactions au rapport du Sénat ont montré que cette dépense publique était considérée comme intouchable. Le capital français a réussi à faire du budget sa propriété et toute remise en cause est jugée dangereuse et impensable, alors même que les résultats de cette politique sont un désastre.                                                                                                           En réalité, l’État a été capté par les intérêts privés qui, pour préserver cette manne, dirigent la responsabilité des déficits sur la redistribution sociale. C’est bien pour cette raison que cette politique n’est jamais remise en cause : c’est une politique de classe qui dirige l’argent vers le capital. Aussi François Bayrou a-t-il un peu lourdement évincé l’obstacle en proposant « moins de subventions » contre « plus de liberté ». Mais comme il n’y a rien de concret sur la baisse des subventions (il n’y a pas de chiffrage annoncé), et comme la « liberté » ne créera pas de profits, alors il n’y aura surtout que davantage de pouvoir pour le capital. Et cela sera fait par ordonnances.                                                                                                              La vérité, c’est que le premier ministre a repris les vieilles rengaines de sa génération politique, celle qui a si évidemment échoué sur tout et créé la situation dans laquelle le pays se trouve. Les mesures annoncées sont navrantes. « L’année blanche » est le niveau zéro de l’action publique, c’est transformer en loi l’inexistence de la politique économique ; le non-remplacement d’un fonctionnaire sur trois est un retour à l’ère Sarkozy, les économies sur les collectivités locales un retour au quinquennat Hollande. Et, pour faire bonne mesure, on a retrouvé les vieilles chansons macronistes, façon café du commerce : l’innovation, l’intelligence artificielle et la « simplification ».                                                                                                     Et toujours, le travail, par ailleurs célébré comme une « valeur centrale », est ciblé. L’annonce d’une énième réforme de l’assurance-chômage, de la suppression de deux jours fériés est un nouveau mauvais coup pour les travailleurs. Ce n’est pas un détail. Un des points de l’échec des politiques menées jusqu’ici est qu’on a subventionné les emplois les moins qualifiés : on a donc favorisé une production moins productive et moins rémunératrice. Plus le chômage baisse, plus la pauvreté augmente, puisque la croissance des profits doit dépasser celle du PIB. Voilà la source du « désenchantement »
 des travailleurs dont le premier ministre s’est lamenté. Et sa réponse a été d’aggraver encore la situation.   "     ______________

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