Echec prévisible , mais salutaire?...
"La crise financière actuelle, la plus violente depuis 1929, marque la fin d'une finance massivement «désintermédiée» où la «titrisation», avec son cortège de produits financiers dérivés de moins en moins contrôlables, était la règle. Après les excès, le système bancaire devrait reprendre un rôle plus traditionnel. Mais surtout, les pouvoirs économiques respectifs des pays développés et des pays émergents vont peut-être s'inverser tant le monde occidental aura désormais du mal à trouver les fonds propres nécessaires au financement de ses entreprises et de ses banques. Il va falloir partager. Et dans les pays occidentaux, notamment aux Etats-Unis, il faudra recréer une richesse qui ne sera pas uniquement financière. Bref, redonner de la valeur «manufacturière» à l'économie. Après l'hégémonie de Wall Street, voici peut-être le retour de la Silicon Valley."(J.-H. Lorenzi)
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L’échec du modèle anglo-saxon:
"-Roubini estime que le risque de stag-déflation généralisé n’est toujours pas écarté. D’une part en raison des réticences américaines à nettoyer le système bancaire - y compris par la nationalisation qui est souvent, rappelons-le, la solution la moins coûteuse - et à organiser la réévaluation à la baisse de la valeur nominale des dettes immobilières. D’autre part à cause de l’insuffisance des mesures prises en Europe tant au niveau des Etats que de la BCE. Cette crise d’une ampleur exceptionnelle marque pour lui le constat de décès du modèle anglo-saxon de laisser-faire et de déréglementation, basé sur l’illusion d’un marché efficient et la croyance en la possibilité pour les acteurs de s’auto-réguler. Il convient donc de définir de nouvelles règles du jeu plus strictes, conclut-il, en tirant les leçons de la période précédente, c’est-à-dire en anticipant la capacité du secteur à contourner les règles et transformer par capillarité les organismes de régulations en complices bienveillants."
"...Le processus de socialisation des pertes du secteur privé à l’oeuvre durant cette crise s’est déjà traduit par le transfert dans le bilan des Etats d’un grand nombre de dettes du secteur privé : celles des banques, des autres établissements financiers et bientôt peut-être, de certains ménages et d’entreprises hors secteur financier. À un certain point, un Etat pourrait faire défaut, et dans ce cas, la capacité des gouvernements à s’engager à agir de façon crédible en tant que soutiens pour le système financier - y compris par la garantie des dépôts - pourrait être remise en cause. De ce fait, un scénario de dépression en forme de L est encore tout à fait possible - j’évalue cette probabilité à 30% - à moins que des politiques appropriées et agressives ne soient mises en oeuvre aux États-Unis et ailleurs.Cette grave crise économique et financière provoque également une réaction marquée contre la mondialisation financière, le libre-échange et le modèle économique de libre marché. Mais, pour paraphraser Churchill, l’économie capitaliste de marché ouverte aux échanges et aux flux financiers est peut-être le pire régime économique, à l’exception de tous les autres, car les modèles d’économie hors marché ont échoué.Toutefois, si cette crise ne signifie pas la fin d’une économie de marché capitaliste, elle a montré l’échec d’un modèle particulier de capitalisme : celui du laissez-faire non réglementé (ou agressivement déréglementé), du modèle d’un capitalisme de marché du « far-west » caractérisé par l’absence de réglementation prudentielle, de supervision des marchés financiers et par l’absence de prise en charge adéquate des biens publics par les gouvernements...
Il est clair que le modèle anglo-saxon de supervision et de régulation du système financier a échoué. Il tablait sur une auto-régulation qui dans les faits signifiait une absence de réglementation, sur une discipline de marché qui n’existe pas lorsque s’installent l’euphorie et l’exubérance irrationnelle, et sur des modèles internes de gestion des risques qui ne réussissent pas parce que - comme le disait un ancien dirigeant de la banque Citi : tant que joue l’orchestre, tout le monde danse.
-La banqueroute idéologique des héritiers de Reagan et Thatcher | Mediapart:
"Il ne fait pas bon, ces temps-ci, être un élu républicain aux Etats-Unis. Les fortunes de leurs confrères Tories, en Grande-Bretagne, sont un peu meilleures après douze années d'opposition, mais le parti dirigé par David Cameron ne respire pas la joie non plus. En effet, en cette période de crise financière, de récession et de plans de relance keynésiens, il faut avoir du courage pour s'afficher en héritiers de Ronald Reagan et de Margaret Thatcher.
Et pourtant, malgré l'avis relativement consensuel des économistes occidentaux, dont de nombreux théoriciens néo-libéraux, de la nécessité d'une relance étatique massive par l'investissement, la consommation, la création d'emplois et la sauvegarde des banques, les républicains comme les Tories freinent des quatre fers face à ces plans gouvernementaux.
La "sainte Trinité" conservatrice anglo-saxonne
Aux Etats-Unis, le «stimulus» de près de 800 milliards de dollars échafaudé par Barack Obama a été voté à la Chambre des représentants sans aucune voix républicaine, et au Sénat avec trois voix de droite (sur quarante). Pendant l'élaboration du projet, le leader républicain du Sénat, Mitch McConnell, a manqué de s'étrangler sur Fox News en dénonçant «ce programme socialiste [visant] à transformer l'Amérique en Europe occidentale». Pour ceux qui ne sont pas au fait de la rhétorique de la droite américaine, il faut savoir que l'épouvantail de l'Europe occidentale sert de raccourci verbal pour décrire une forte protection sociale, des impôts élevés, un droit du travail favorable aux salariés, mais aussi un taux de chômage important....
il n'a échappé à personne que la crise financière actuelle est le résultat direct des politiques de dérégulation des banques et du crédit initiées par Ronald Reagan, puis poursuivies par ses trois successeurs (Bush I-Clinton-Bush II) avec l'assentiment de l'inamovible président de la réserve fédérale de 1987 à 2006, l'ultra-libéral Alan Greenspan.Le plus curieux, dans la situation présente, c'est qu'une partie de l'establishment républicain, en dehors des élus, a compris la nécessité de faire évoluer leur pensée, ou au moins de tendre vers une certaine forme de pragmatisme. Greenspan lui-même, devant le Congrès, a reconnu il y a quelques mois «avoir trouvé des failles [dans les théories néo-libérales]. J'en suis très perturbé».
-Gordon Brown, le naufrageur devenu sauveteur | Mediapart:
"...le Royaume-Uni se trouve dans une situation économique encore pire que celle des nations d'Europe continentale. « Quand la crise des "subprimes" a démarré aux Etats-Unis, nous avons regardé quels étaient les pays qui possédaient des caractéristiques similaires et qui étaient susceptibles d'être affectés », se remémore Gilles Moec, économiste en chef à la Bank of America, à Londres. « On est tout de suite tombé sur la Grande-Bretagne, qui possédait un mélange identique de bulle immobilière, de fort endettement des ménages et d'économie reposant sur la consommation à crédit. » La recette toxique par excellence;
Si l'on ajoute à cette situation le fait que la City de Londres est (était ?) la plate-forme financière d'une grande partie des placements pourris qui ont gangrené le système bancaire mondial, les Anglais possédaient effectivement un siège au premier rang de la crise quand elle a éclaté. C'est pour cette raison que Gordon Brown fut le premier dirigeant occidental à jaillir des starting-blocks, avec un plan de relance de l'économie basé sur une forte intervention de l'État et la nationalisation partielle des banques. À l'automne, pendant toute la longue mise en place du plan de relance aux Etats-Unis, durant les dernières semaines du mandat de George W. Bush, les analystes américains n'avaient que le nom de Brown à la bouche....
Les perspectives pour 2009 sont effectivement sombres. Le FMI a prévu un recul de 2,8% de la croissance britannique, et la Banque d'Angleterre table sur un recul de 4%. Le chômage frise la barre des deux millions de demandeurs d'emplois (6,3% de la population active), le plus mauvais chiffre depuis 1997, et il va encore augmenter. Sans oublier la chute de la livre sterling (au plus bas depuis les années 1970) ou la chute des prix immobiliers (-16% en un an)...
Grant Doherty, un syndicaliste de la puissante fédération Unite: « À chaque fois que les banquiers ont demandé davantage de dérégulations, ils les ont obtenues, et c'était Brown qui était aux commandes de l'économie sous Blair. Aujourd'hui, je veux bien croire qu'il est sincère et qu'il a appris de ses erreurs, mais il est quand même l'un des principaux responsables de la situation actuelle. »
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