_________________Entre exigence de rationalité et incontournable incertitude
" Tout ce qui peut se compter ne compte pas ; tout ce qui compte ne peut pas se compter " (Einstein)
_____Une nouvelle forme de médecine s'avance masquée, se réclamant de la rationalité, de l'efficacité et de la "Preuve".
A première vue, rien à redire, au contraire. Depuis Claude Bernard notamment, héritier des Lumières, et la mise en évidence de la notion de déterminisme complexe, la médecine n'a pu faire les progrès que l'on connaît que parce qu'elle a suivi la voie de la méthode scientifique, avec son esprit, ses exigences, ses procédures et ses méthodes.
__Mais la médecine n'est pas qu'une connaissance rigoureuse reposant sur les sciences dures: chimie, physique et biologie, elle est aussi une pratique, c'est à dire qu'elle inclut un rapport clinique, individuel, avec un malade particulier, avec ses symptômes propres relevant d'une histoire spécifique, lié à un psychisme singulier (la médecine est psychosomatique dans beaucoup de ses aspects). Le corps du malade est un corps-propre, intégré à une conscience et une culture, non un objet inerte et aucun malade ne peut être comparé totalement à un autre, malgré les similitudes Par exemple, chacun développe un cancer de manière unique et en guérit ou non de manière souvent imprévisible, comme le savent les médecins qui savent rester modestes.
Ce qui est en question et qui fait problème, c'est une tendance venue du monde anglo-saxon, un néopositivisme discutable, une idéologie normative, qui au nom de la preuve, rigidement invoquée, d'une vision étriquée de LA science, sans réel esprit critique et recul épistémologique, est commandée in fine par des normes surtout financières: la pratique EBM, détournée de son sens premier.
____ L'esprit critique en médecine est fondamentale, comme la formation permanente, qui rend à la fois éclairé et modeste. Des organes médicaux prônent une médecine moins formatée, mieux formée, moins dépendante des labos, moins colonisée par l'industrie pharmaceutique dans la formation, l'information reçue et les prescriptions recommandées.
Les médecins expérimentés le savent: leur discipline est pleine d'incertitudes, de limites, qui existeront toujours, frontières du savoir qui reculent sans cesse dans l'éclairage progressif de l'hypercomplexité organique, toujours partiel, soulevant toujours plus de questions ardues au fur et à mesure que s'éclairent de nouvelles pistes. Et
chaque malade est partiellement une énigme, chaque maladie est spécifique. Pourtant une certaine médecine, dites de pointe,
entretient des mythes;
___" La pratique EBM ambitionne de se fonder sur les preuves disponibles à un
moment donné ( preuve aujourd'hui, erreur demain ), et témoigne de la
résurgence inquiétante d'une vieillerie idéologique : le néo-positivisme
ou scientisme, qui invente des CODES de bonne ( au sens moral ?)
pratique, début d'un formatage international à base américaine, délivré
par des GUIDES ou RÉFÉRENTIELS élaborés par des experts : la médecine
normative code-barrée, légitimée par LA science. Ces livres de recettes,
concoctés par de " bons médecins " à l'usage de ceux qui ont de
mauvaises pratiques, ne parlent que d'actes, d'agir ( définition même de
la pragmatique ), car ils proposent bien un raccourci de la pensée. Un
digest pour informati-que. Médecine, technique, marchandise, ou magie ?
L'EBM participe du retour de l'obscurantisme.
Dans tous les cas, LA PREUVE est le socle des arguments d'autorité, elle
définit un espace de pouvoir, ici, idéologique...
Le paradoxe de l'EBM, telle que sacralisée chez nous, c'est qu'elle
contient indiscutablement de bons outils : les conférences de consensus,
la méta-analyse, certains guides de pratiques, l'épidémiologie quand
elle consent à être aussi quali-tative, et accepte un contre regard des
sciences sociales et humaines.
Mais nous ne maîtrisons sa sémantique, quand on constate effaré, le
bredouillage approximatif que les français utilisent pour en parler, à
coup d'euphémismes, ou de litotes honteuses ( médecine " factuelle "-
évidences…) très éloignés des sciences exactes.
Quant à l'absence totale
de toute référence à l'éthique, elle devrait nous alerter.
Mais le package idéologique dont elle est enrobée, et que certains
refusent de voir, constitue un repoussoir, car il dénote une volonté de
globalisation de toutes les dimensions de la santé, proche du
totalitarisme.
L'EBM est le moteur de la mondialisation en santé, si justement dénoncée
par J.P.DESCHAMPS dans Santé Publique N°3- sept 2003. C'est aussi la
mort programmée de la promotion de la santé et de la démocratie
sanitaire.
Il est donc important pour les acteurs français de faire l'effort
d'aller aux sources de ce nouvel obscurantisme, pour mieux en percevoir
les enjeux, et juger par eux-mêmes si nous en avons vraiment besoin.
Quand la pseudo modernité s'irrigue au vieux positivisme français,
réécrit par les protestants d'Oxford, il y a problème…et risque grave
pour la liberté, constitué par cette pensée opératoire si éloignée de la
relation avec le patient.
Les pays qui pratiquent cette doctrine ont tous un état de santé publique plus mauvais que le nôtre : pourquoi faudrait-il les imiter ? Parce qu'ils sont anglo-saxons, efficaces, pragmatiques, rentables, intrinsèquement supérieurs ?
Notre culture clinique a fait ses preuves. Pourquoi en importer une qui ne les fait pas ? Parce que s'exerce une DOMINATION idéologique insurmontable ?
Aurions-nous les médecins que nous méritons ? Hier, les Milliez, Bernard, Debré, Minkowski, Schwartzenberg, ou Koupernik, hommes de l'art et humanistes engagés ; aujourd'hui des MDEBM, rustiques applicateurs de recettes-guidelines. Après les artistes, les scientistes ?
Seraient-ce les " fameuses contraintes économiques " jamais explicitées ?
Est-ce le hasard si les chevaux de Troie français de l'EBM ont tous reçu une formation anglo-saxonne, et que la plupart sont des chercheurs ou des médecins de santé publique sans patients ? Qu'en pensent les généralistes qu'on aimerait formater en GROUPE HOMOGÈNE DE SOIGNANTS" ?...Les supports conceptuels de cette pseudoscience et vrai scientisme sans conscience, sont issus des think tanks des universités anglo-saxonnes, financés par les géants pharmaceutiques, qui contrôlent la production mondiale de molécules, ET DONC DE PENSÉE universitaire, et participent, par la vente même des médicaments et la formation des chercheurs, à la diffusion de cette idéologie pragmatique libérale."
Les pays qui pratiquent cette doctrine ont tous un état de santé publique plus mauvais que le nôtre : pourquoi faudrait-il les imiter ? Parce qu'ils sont anglo-saxons, efficaces, pragmatiques, rentables, intrinsèquement supérieurs ?
Notre culture clinique a fait ses preuves. Pourquoi en importer une qui ne les fait pas ? Parce que s'exerce une DOMINATION idéologique insurmontable ?
Aurions-nous les médecins que nous méritons ? Hier, les Milliez, Bernard, Debré, Minkowski, Schwartzenberg, ou Koupernik, hommes de l'art et humanistes engagés ; aujourd'hui des MDEBM, rustiques applicateurs de recettes-guidelines. Après les artistes, les scientistes ?
Seraient-ce les " fameuses contraintes économiques " jamais explicitées ?
Est-ce le hasard si les chevaux de Troie français de l'EBM ont tous reçu une formation anglo-saxonne, et que la plupart sont des chercheurs ou des médecins de santé publique sans patients ? Qu'en pensent les généralistes qu'on aimerait formater en GROUPE HOMOGÈNE DE SOIGNANTS" ?...Les supports conceptuels de cette pseudoscience et vrai scientisme sans conscience, sont issus des think tanks des universités anglo-saxonnes, financés par les géants pharmaceutiques, qui contrôlent la production mondiale de molécules, ET DONC DE PENSÉE universitaire, et participent, par la vente même des médicaments et la formation des chercheurs, à la diffusion de cette idéologie pragmatique libérale."
______________________Face à la standardisation du soin médical, les médecins doit conserver ou retrouver bon sens, ouverture critique et autocritique contre une "médecine de plus en plus procédurale, une pratique du soin de plus en plus encadrée par des
protocoles, répondant à une volonté explicite des
autorités de tutelle et des organismes assureurs, publics ou privés, de
rationaliser les pratiques médicales par le biais de leur
standardisation. Il apparaît aujourd’hui assez clairement que les
objectifs n’étaient autres que la mise en place de dispositifs de
gestion de la santé d’inspiration néolibérale empruntés au secteur
industriel et aux théories du New Public Management .
Pour gérer la santé au même titre que tout processus industriel, il
fallait être en mesure de standardiser les pratiques en instaurant une
approche procédurale du soin, et pour ce faire de disposer, vis-à-vis
des soignants, d’une base solide et convaincante. Face à un système
procédural reposant uniquement sur les données scientifiques validées
très loin de couvrir l’ensemble du champ des pratiques soignantes, il
fallait minimiser voire organiser la négation de l’incertitude attachée à
l’utilisation du savoir scientifique en pratique clinique..."
________________________ La pure gestion comptable de la médecine,voire la mercantilisation des soins, fait fausse route et une certaine forme de normativité imposée est discutable
" À vouloir évincer l’artisan qui existe en chaque soignant pour ne garder de lui que l’agent evidence based,
on change radicalement le visage du soin. Ce n’est plus d’un rapport
entre deux individus qui cherchent ensemble l’option médicale la plus
adaptée à une situation toujours singulière dont il est question, mais
du rapport entre un soignant interchangeable transformé, suivant
l’expression d’Amartya Sen, en « un idiot rationnel » qui applique des
protocoles, et un malade réduit à des paramètres cliniques et
paracliniques objectifs, et eux aussi standardisés, en somme à un point
sur une courbe de Gauss..."
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T2A en question
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-Merci à Faujour
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T2A en question
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-Merci à Faujour
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