Une histoire fluctuante
L'impôt direct en France, sous la forme que nous connaissons, avec ses variations, a une histoire assez récente. Déjà débattu à la fin du XIX° siècle, il ne connaît sa forme "moderne" qu'au début de la guerre de 14, pour financer l'effort de guerre et plus tard la reconstruction. L'impôt indirect (dit TVA), auquel personne n'échappe, peut êtes considéré comme un des plus injuste, quoiqu'apparemment indolore. Mais l'impôt direct peut être lui-même sujet à de multiples variations, avec des injustices mettant en cause la notion de proportionnalité et souvent soutenu par un pouvoir favorisant les plus hauts revenus et l' "optimisation fiscale" pour les motifs les plus divers, si bien que échapper à l'impôt est devenu parfois un sport national, toléré ou encouragé par le "verrou de Bercy", aux dépends de la redistribution nationale.
Depuis des décennies, des économistes notamment, comme Thomas Piketty, prêchent pour une révision, voire une révolution fiscale. Le libéralisme lié à la financiarisation de l'économie, s'accompagne d'une tendance à une baisse des impôts en faveur des plus favorisés, dans l'optique d'un prétendu "ruissellement" attendu pour la collectivité. Aux USA comme chez nous. Au point que certaines grandes fortunes font mine de réclamer régulièrement un prélèvement plus important, comme à Davos, bien conscients de leurs privilèges. Imposer les plus riches est aujourd'hui comme hier une nécessité impérative, surtout quand se creusent autant les inégalités. Comme Roosevelt en son temps avait osé le faire. La plus grande fortune de France est loin de participer à l'effort fiscal, qui est un effort de dolidarité national?La révolution fiscale promise, qui devait revoir complètement un système aussi complexe qu'illisible, n'a pas eu lieu.
Aujourd'hui, le ras le bol fical semble atteindre un sommet.
En fait, la France ne détient pas le niveau le plus élevé de l'impôt sur le revenu. Si l'inégalité dans l'effort collectif est bien réel, si des réformes de fond n'ont pas eu lieu, si l'impôt indirect reste le plus injuste des impôts, il y a une certaine démagogie à proclamer que l'impôt est confiscatoire par nature, d'autant plus que les voix les plus fortes, criant à la spoliation, viennent de ceux que le système fiscal épargne le plus, voire absout, de ceux qui échappent à l'impôt par l'exil fiscal, qui profitent de cadeaux fiscaux, qui ne sont pas pour rien dans la dette. L'optimisation fiscale reste un des fléaux majeurs de notre temps.
Il y a une part de matraquage médiatique, en cette période, qui s'inscrit dans cette critique généralisée de l'impôt, qui fait partie de la machine de guerre néolibérale depuis une quarantaine d'années, pour qui "l'Etat est le problème", alors que "L'impôt est la base matérielle de l'Etat" (J.Schumpeter)
Réhabiliter l'impôt est toujours nécessaire, mais l'acceptation de cette charge ne peut fonctionner que si le système, qui ne peut être parfait, se réforme sans cesse en se rééquilibrant. Le problème de l'égalité devant l'impôt reste entier, comme celui de la résolution de la crise, qui enrichit les plus grandes fortunes et dont les conséquences ont peu ou pas d'effets sur le train de vie des plus favorisés.
Ce n'est pas parce que notre système est devenu brouillé et souvent injuste qu'il faut jeter le bébé avec l'eau du bain. L'urgence de réformes de fond n'en est que plus forte et plus urgente, à l'heure où les plus favorisés le sont aussi par le système fiscal en vigueur.
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- TVA : 32 milliards d'euros perdus par la France chaque année
- Ce n'est pas d'une pause fiscale dont la France a besoin mais d'une véritable réforme de la fiscalité dans son ensemble. __________________________________________________________
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