samedi 7 août 2010

Sécurité d'abord ?


Le tout-sécuritaire: une dérive et un mythe

Un retour aux années 30 ?


«On va faire que ces quartiers puissent vivre, que les gens qui travaillent et qui se lèvent tôt le matin puissent vivre sans avoir la vie empoisonnée par les voyous, les trafiquants
Nicolas Sarkozy, ministre de l'Intérieur, 25 octobre 2005.

«Aucune commune, aucun quartier, aucun hall d'immeuble de Seine-Saint-Denis n'échappera à l'autorité de la loi.»
Nicolas Sarkozy, président de la République, 20 avril 2010
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_______Que la sécurité des personnes soit une condition nécessaire à l'expression de certaines libertés fondamentales, voilà qui ne fait pas problème, même si l'équilibre entre les deux exigences est toujours difficile à construire et si la notion de sécurité absolue relève du fantasme.
["Un peuple prêt à sacrifier un peu de liberté pour un peu de sécurité ne mérite ni l'un ni l'autre et finit par perdre les deux » écrivait le troisième président des États-Unis d'Amérique Thomas Jefferson (1743–1826). Cette réflexion sur la nature de la relation qu'entretiennent ces deux valeurs fondatrices de la République française reflète toute la complexité de l'action étatique pour assumer son rôle principal : garantir les libertés fondamentales des citoyens tout en assurant leur sécurité].
_Qu'il existe de nouvelles formes d'insécurité parfois inquiétantes dans certains secteurs du paysage urbain français semble indiscutable. Qu'il faille prendre les moyens adéquats pour en comprendre les causes, la contenir, la sanctionner et la faire régresser ne peut être contesté.
____________Le problème est dans la manière de jauger et d'analyser ces nouvelles (ou anciennes) formes de délinquance, de la mesurer, d'en donner une image publique adéquate, de fournir les moyens adaptés, efficaces et mesurés pour la réprimer et surtout en comprendre les causes, pour privilégier les mesures de prévention, sans l'instrumentaliser, sans en faire un enjeu politico-électoral, sans entretenir la xénophobie ,les confusions démagogiques(en cultivant l'équation étranger=délinquant, par exemple), sans jouer sur des peurs malsaines et amplifiées à l'usage des populations fragilisées par l'insécurité sociale, sans en faire l'alibi d'une absence de politique économique cohérente et efficace.
___________________Nous sommes dans une période où des dérapages graves peuvent se produire du fait de la montée du chômage, renforcée par la crise présente,de la cristallisation de tous les problèmes existant depuis une trentaine d'année-dans certaines banlieues notamment-, des ruptures de liens sociaux (J.Généreux). Du fait aussi de l'absence de solutions réelles, malgré les promesses, et des mesures à dominante ultra-sécuritaire, purement réactionnelles (réactionnaires?) et spectaculaires, ultra-médiatisées, propres à susciter l'inquiétude dans de larges couches de la population. L'absence de politique urbaine suivie, le retrait d'une police de proximité, le traitement ponctuels des effets et non des causes,l'abandon de certains secteurs laissés à leurs dérives,etc...ont produit des effets prévisibles.
_______________Notre Président, Place Beauvau, avait déjà préparé le terrain par sa politique du Karcher, qui avait fait grand bruit et préparé les esprits. Confronté, à l'approche d'élections décisives, à une impopularité rare, cherchant à mordre sur l'électorat du FN, qu'il avait habilement annexé, mais qui reprend ses marques, à des échecs économiques révélant une quasi-impuissance face à la crise et à ses conséquences, il joue de nouveau sur ce thème, surfant sur la vague d'affaires crapuleuses récentes.
On est en droit de s'interroger sur l'accent quasi-exclusif mis sur l'insécurité, ultra-dramatisée et médiatisée, qui produit quelques "sondages" (toujours ambigüs) provisoirement encourageants pour le pouvoir, mais qui risquent de se retourner contre son instigateur. Même
certains organes de la presse internationale soulignent parfois l'excès et le risque d'un discours qui s'enferme dans le tout-sécuritaire , les confusions et les manipulations entretenues (qui suscite même un "malaise" chez certains membres de l'UMP et du Centre), l'échec programmée d'actions coups-de-poing, qui n'ont pour effet que de déplacer les problèmes (comme pour l' affaire des roms) et d'exacerber les tensions sociales, dressant des catégories sociales les unes contre les autres
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La France n'a pas d'équivalent au 14e amendement [de la Constitution des Etats-Unis, qui garantit l'égalité entre les citoyens, ndlr], mais le président français, Nicolas Sarkozy, qui aime se faire appeler “Sarko l'Américain”, est en train d'alimenter des sentiments anti-immigrés dangereux pour des gains politiques à court terme. »(Après avoir fait la liste des annonces concernant la déchéance de nationalité française, la fin de l'automaticité de la nationalité française pour les jeunes délinquants d'origine étrangère, ou les mesures anti-Roms, des derniers jours, l'éditorialiste du New-York Times conclut :)« Tout cela dans un pays qui a longtemps défendu le principe que tous les citoyens français -qu'ils soient nés dans le pays ou naturalisés- ont droit au même traitement face à la loi. Cela s'applique au père, né hongrois, de M. Sarkozy, ou à sa femme née italienne, et qui ont été naturalisés français, et devrait s'appliquer à n'importe qui d'autre.Mais taper sur les immigrants est populaire parmi les électeurs non-immigrés, et M. Sarkozy n'a jamais hésité à le faire. Il a bâti sa campagne présidentielle de 2007 sur son bilan sévère (et ses paroles incendiaires) en tant que ministre de l'Intérieur.Au début de l'année, il a mené une campagne porteuse de division sur le thème de l'identité nationale, parce qu'il voulait marginaliser le Front national d'extrême droite anti-immigrés aux élections régionales. Ça n'a pas marché.Aujourd'hui, alors que sa popularité est au plus bas, et que le Front national remonte avec des dirigeants plus jeunes, il va encore plus loin, inquiétant même la droite classique qui partage les valeurs des droits de l'homme et de l'égalité entre les citoyens.Ils ont raison d'être inquiets, et il a tort, de manière irresponsable, d'ignorer leurs conseils de prudence. »
...La recherche à tout prix d'un "ordre" (largement fictif) risque de finir par de plus grands désordres.
La focale, dirigée sur des faits divers bien mis en scène, a pour vertu de faire (un peu?) oublier les désordres économico-financiers qui condamnent les Etats à l'impuissance et à l'abandon de l'intérêt général et l'indignation suscitée par des "affaires" où des responsables politiques, et non des moindres, semblent scandaleusement compromis.
Un voile commode, mais fragile et contre-performant...
En tous cas, pour le moins, un bilan difficile à lire et une présidence inaudible pour le commun des mortels
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