Sortons de l’économie casino!
"Actuellement, le monde riche est au milieu de la crise la plus grave depuis la Grande Dépression de 1929. Le krach de Wall Street, en septembre 2008, marque la fin d’une époque : le système du capitalisme financier, un système mû par la recherche du profit maximum, s’est écroulé. Il s’est détruit par ses propres contradictions. Les ondes de choc viennent d’atteindre l’économie réelle. Les États-Unis sont entrés en récession, suivis par l’Union européenne. En fin de compte, c’est l’économie mondiale qui en subira les conséquences.La contraction de l’activité économique va entraîner davantage de chômage et d’inégalité. De nouvelles pressions vont être exercées sur les salariés pour qu’ils acceptent davantage de “flexibilité sur le marché du travail”, une diminution des salaires et de la protection sociale. La diminution de la demande globale provenant des pays riches aura des répercussions sur les économies vulnérables des pays en développement et augmentera la pauvreté. Les Objectifs du Millénaire, comme les objectifs d’un développement planétaire qui soit durable et respectueux de conditions sociales et de protection de l’environnement, deviennent tout à fait impossibles à atteindre.Crise financière et récession coïncident avec de brutales variations du prix du pétrole et de la nourriture, qui ont débouché sur une grave crise sociale et des émeutes de la faim dans plusieurs pays du Sud. Les variations des prix des matières premières et de la nourriture ont des causes multiples. Mais à nouveau, comme pour les différentes crises financières, la spéculation par des fonds de placement et autres investisseurs institutionnels a largement contribué à l’instabilité des prix.Le déclencheur de la crise fut les prêts hypothécaires excessifs consentis à des ménages en situation précaire aux États-Unis et la procédure de titrisation qui a permis de vendre ces créances douteuses à des institutions financières et à des ménages, tant aux États-Unis qu’ailleurs dans le monde. La vague de ruptures de paiement a eu des conséquences dramatiques pour les institutions financières (banques d’affaires et d’investissement, hedge funds, et maintenant les grandes banques traditionnelles). Maintenant c’est même le secteur non financier qui est affecté. La perspective économique, sociale et environnementale pour 2009 est sombre pour la plus grande partie de la planète.
Nous aurions dû nous y attendre. Le krach confirme malheureusement les prévisions d’économistes hétérodoxes comme le prix Nobel Joseph Stiglitz, Attac, les mouvements sociaux et d’autres voix critiques. Même les superviseurs savaient que le système était au bord du gouffre, mais il n’y avait pas de volonté d’agir à cause de la croyance dominante dans les capacités autorégulatrices du marché.Aujourd’hui, sous la pression de la crise, même la communauté financière réclame des réformes. >Mais les réformes proposées ne vont pas assez loin, puisqu’elles ne s’en prennent pas aux problèmes systémiques qui expliquent la crise. Elles concernent surtout le secteur financier et visent la stabilité. Ce n’est pas suffisant. Le capitalisme financier a également des conséquences désastreuses sur la distribution de la richesse et la démocratie. Si les banquiers réclament une intervention de l’État, ce qu’ils veulent c’est socialiser les pertes et garder les bénéfices dans des poches résolument privées. L’opération de sauvetage menée par le gouvernement des États-Unis pour 700 milliards de dollars (la plus importante qui ait jamais eu lieu), les interventions au Royaume-Uni, en Allemagne et dans d’autres pays européens relèvent de cette logique. Quand la communauté financière parle de réforme, il s’agit au mieux d’une (re)réglementation ponctuelle et de gestion de crise à court terme, histoire de sauver le néolibéralisme et de retrouver les bonnes vieilles habitudes une fois le danger passé.
Ce qu’il nous faut, dans l’intérêt de la grande majorité de la population, ce sont de véritables changements vers un autre paradigme, où la finance doit être un instrument au service de la justice sociale, de la stabilité économique et du développement durable. Nous ne devons pas accepter un retour au statu quo dans les années qui viennent.
La crise n’est pas le résultat d’un malheureux concours de circonstances, pas plus qu’elle ne peut se réduire à quelque défaillance d’un système de contrôle, des agences de notation ou à des erreurs d’acteurs individuels. Ses racines sont systémiques et c’est donc la structure et les mécanismes du système lui-même qui sont en cause.Les marchés financiers représentent le centre et le moteur de la mondialisation néolibérale. La domination du secteur financier sur l’économie réelle remonte à l’introduction de taux de change flottants entre les principales devises en 1973, en même temps qu’était aboli tout contrôle sur les mouvements de capitaux et qu’étaient libéralisés et dérégulés les marchés financiers, y compris des firmes d’audit soi-disant indépendantes mais en fait directement soumises à la pression du secteur financier. Depuis, les institutions financières et les mécanismes qu’elles mettent en place ont connu une expansion rapide ; la masse des actifs financiers, les dettes et la recherche de bénéfices se développent de concert. Il est important de garder à l’esprit la brutale accélération de ce processus après 2001, quand l’économie américaine se remettait de la crise des nouvelles technologies, en particulier l’augmentation spectaculaire de la dette intérieure des États-Unis (notamment l’endettement des ménages) et de son déficit extérieur, financé par le reste du monde.Ces tendances combinées ont mené au développement d’un nouveau modèle économique, une nouvelle forme de capitalisme, que certains appellent mondialisation,capitalisme financier et d’autres encore capitalisme actionnarial. Peu importe le nom, un fait est clair : alors qu’auparavant les marchés financiers avaient un rôle subordonné à l’économie réelle, ce rapport a été inversé. La priorité donnée aux « intérêts financiers » sur l’économie « réelle » fait que toutes les activités économiques servent à créer des bénéfices sur les marchés financiers et que des instruments financiers sont inventés pour faire des bénéfices uniquement sur les marchés financiers, sans se préoccuper de préserver une production et une agriculture durables ni d’ailleurs de l’épargne des clients « normaux ». La logique et la dynamique de maximisation des profits immédiats pénètrent tous les pores de la vie économique et sociale. La mobilité parfaite du capital financier, résultat des politiques néolibérales, joue un rôle crucial dans l’économie mondiale actuelle. Elle crée une concurrence planétaire non seulement entre entreprises multinationales, mais entre États, entre leurs systèmes sociaux et fiscaux, entre les travailleurs de différentes parties du monde. En créant un rapport de pouvoir favorable au patronat et défavorable aux travailleurs, cette domination du capital a mené à des inégalités croissantes, à une diminution des normes sociales et environnementales ainsi que des conditions de travail, et à la privatisation des biens fondamentaux et des services publics.Bref, la « liberté » des acteurs financiers s’est étendue au détriment de la vaste majorité des gens et a développé des activités économiques qui détériorent l’environnement ; l’échec de ce modèle n’a jamais été aussi évident qu’aujourd’hui, comme l’attestent la crise alimentaire, la crise énergétique et les changements climatiques. Ce modèle, soutenu par les gouvernements partout dans le monde, est complètement discrédité. Il faut donc en tirer les conséquences afin que les décideurs politiques et économiques inversent complètement ce système financier inéquitable et incompatible avec un développement durable, afin de mettre l’économie au service de l’équité, du développement durable et des besoins de la population.Une occasion historique s’est créée. Il dépendra de la pression de l’opinion publique de la transformer en une politique radicalement différente."
La crise n’est pas le résultat d’un malheureux concours de circonstances, pas plus qu’elle ne peut se réduire à quelque défaillance d’un système de contrôle, des agences de notation ou à des erreurs d’acteurs individuels. Ses racines sont systémiques et c’est donc la structure et les mécanismes du système lui-même qui sont en cause.Les marchés financiers représentent le centre et le moteur de la mondialisation néolibérale. La domination du secteur financier sur l’économie réelle remonte à l’introduction de taux de change flottants entre les principales devises en 1973, en même temps qu’était aboli tout contrôle sur les mouvements de capitaux et qu’étaient libéralisés et dérégulés les marchés financiers, y compris des firmes d’audit soi-disant indépendantes mais en fait directement soumises à la pression du secteur financier. Depuis, les institutions financières et les mécanismes qu’elles mettent en place ont connu une expansion rapide ; la masse des actifs financiers, les dettes et la recherche de bénéfices se développent de concert. Il est important de garder à l’esprit la brutale accélération de ce processus après 2001, quand l’économie américaine se remettait de la crise des nouvelles technologies, en particulier l’augmentation spectaculaire de la dette intérieure des États-Unis (notamment l’endettement des ménages) et de son déficit extérieur, financé par le reste du monde.Ces tendances combinées ont mené au développement d’un nouveau modèle économique, une nouvelle forme de capitalisme, que certains appellent mondialisation,capitalisme financier et d’autres encore capitalisme actionnarial. Peu importe le nom, un fait est clair : alors qu’auparavant les marchés financiers avaient un rôle subordonné à l’économie réelle, ce rapport a été inversé. La priorité donnée aux « intérêts financiers » sur l’économie « réelle » fait que toutes les activités économiques servent à créer des bénéfices sur les marchés financiers et que des instruments financiers sont inventés pour faire des bénéfices uniquement sur les marchés financiers, sans se préoccuper de préserver une production et une agriculture durables ni d’ailleurs de l’épargne des clients « normaux ». La logique et la dynamique de maximisation des profits immédiats pénètrent tous les pores de la vie économique et sociale. La mobilité parfaite du capital financier, résultat des politiques néolibérales, joue un rôle crucial dans l’économie mondiale actuelle. Elle crée une concurrence planétaire non seulement entre entreprises multinationales, mais entre États, entre leurs systèmes sociaux et fiscaux, entre les travailleurs de différentes parties du monde. En créant un rapport de pouvoir favorable au patronat et défavorable aux travailleurs, cette domination du capital a mené à des inégalités croissantes, à une diminution des normes sociales et environnementales ainsi que des conditions de travail, et à la privatisation des biens fondamentaux et des services publics.Bref, la « liberté » des acteurs financiers s’est étendue au détriment de la vaste majorité des gens et a développé des activités économiques qui détériorent l’environnement ; l’échec de ce modèle n’a jamais été aussi évident qu’aujourd’hui, comme l’attestent la crise alimentaire, la crise énergétique et les changements climatiques. Ce modèle, soutenu par les gouvernements partout dans le monde, est complètement discrédité. Il faut donc en tirer les conséquences afin que les décideurs politiques et économiques inversent complètement ce système financier inéquitable et incompatible avec un développement durable, afin de mettre l’économie au service de l’équité, du développement durable et des besoins de la population.Une occasion historique s’est créée. Il dépendra de la pression de l’opinion publique de la transformer en une politique radicalement différente."
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Un autre système financier est possible : stabilité et solidarité avant le profit
La complexité du système financier actuel rend impossible la résolution des problèmes par une quelconque solution miracle. Il n’y a pas de solution miracle. Il faut toute une boîte à outils. Cependant, si nous pensons aux centaines de propositions qui vont être formulées et faire l’objet de controverses, nous pouvons définir quelques exigences élémentaires qui doivent être satisfaites pour qu’une proposition soit acceptable en tant que réforme émancipatrice.
A. Des changements systémiques et non des réparations d’urgence : C’est l’ensemble du système financier sous sa forme néolibérale qui s’est avéré économiquement instable, inefficace et dommageable pour l’égalité, le bien-être général et la démocratie. Ce sont donc des changements systémiques qui s’imposent. Un de nos objectifs est de briser les piliers du néolibéralisme, en particulier la mobilité planétaire du capital. Quelques mesures de régulation visant à sauvegarder la richesse et l’accumulation d’actifs financiers ou des réformes cosmétiques visant par exemple à davantage de « transparence » ne sont pas acceptables.
B. Un nouveau Bretton Woods plutôt que des forces du marché autorégulées :La crise démontre que les marchés non réglementés par le politique produisent des résultats catastrophiques. Un contrôle démocratique est donc nécessaire, ainsi qu’une coopération internationale plutôt qu’une concurrence délétère entre économies nationales. Dans les décisions économiques, il faut donner la priorité au développement durable et aux droits humains de toutes les générations.Il convient de créer un contexte institutionnel approprié, sous les auspices des Nations unies, afin de réguler et réorienter le système financier. Il faut que cette instance soit démocratiquement responsable et prenne des mesures visant l’équité et le développement durable. Elle doit pouvoir empêcher des crises financières (et pas seulement y réagir). Ainsi ce n’est pas au FMI qu’il faut donner mandat de contrôler le lien entre marchés financiers et économie réelle, mais aux Nations unies, qui devraient également établir le lien entre marchés financiers, pauvreté et développement durable. Une telle agence des Nations unies devrait soutenir une intervention internationale vigoureuse pour empêcher la constitution d’énormes excédents commerciaux ou excédents en liquidités dans certains pays à côté d’énormes déficits commerciaux ou déficits en liquidités dans d’autres (comme aujourd’hui entre la Chine et les États-Unis). Elle devrait également être le lieu où se débattent des décisions comme la limitation de la libre circulation des capitaux et le degré de libéralisation d’entreprises financières, de produits et de services financiers. Cela signifie que ces décisions ne se prendraient pas dans le cadre de l’OMC/AGCS comme c’est actuellement le cas.Le contrôle national et la coopération internationale entre instances de contrôle et de régulation doivent être renforcés, particulièrement au niveau européen, démocratisés et élargis à la mission de servir les besoins sociétaux. Il faut assurer la participation des syndicats, des consommateurs et d’autres parties prenantes dans cette régulation. Les agences de notation doivent être des entreprises publiques indépendantes qui examinent l’impact sur la société (en évitant par exemple que des produits financiers ou des prêts ne détruisent l’environnement).Dans le contexte de la crise actuelle, il faut une coopération internationale renforcée. Il faut imposer des limites au libre-échange et à la libre circulation des capitaux. Une approche plus complexe et différenciée doit venir se substituer au dogme de la libre circulation des capitaux et des biens comme clé de la prospérité. De nouveaux accords internationaux doivent définir d’autres objectifs – comme la stabilité financière, la justice fiscale, la justice sociale – plutôt que la libre circulation des capitaux et des biens. Les droits sociaux et les conquêtes historiques des travailleurs ne doivent pas être mis en péril par ces accords, qui doivent au contraire favoriser la solidarité internationale et non la concurrence.
-------------C. Briser la domination des marchés financiers : Pour réaliser un véritable changement, il faut commencer par briser la domination des marchés financiers sur l’économie réelle. Voici quelques instruments qui peuvent y contribuer :>> Il faut introduire, y compris une taxe sur toute forme de transfert financiers les transactions sur les devises, afin de réduire la spéculation, de ralentir la vitesse des marchés et de réduire la tendance à penser à court terme, tout en stimulant un commerce, une production et une consommation équitables et soutenables. Cela comprend une taxe multilatérale sur toutes les transactions sur les monnaies pour décourager la spéculation à court terme. Les autorités nationales devraient imposer unilatéralement une taxe appropriée sur les transactions boursières pour arrêter la spéculation. >> Il faut interdire la création de géants financiers qui ne peuvent plus gérer les risques potentiels et sont trop grands et trop ramifiés pour être mis en faillite.>> Il faut introduire une imposition progressive des revenus du capital. Un facteur important qui contribue au gonflement des marchés financiers est la concentration de la richesse. Pour ralentir et stabiliser les marchés financiers, il convient donc de redistribuer revenus et richesse, de réduire les incitations à la recherche de bénéfices excessifs et les mécanismes d’évasion fiscale utilisés par les riches et par le secteur financier.>> Avant de penser en terme de redistribution, la politique économique doit assurer une distribution équitable des revenus : le supplément de richesse qui va aux travailleurs (salaires, temps de travail, protection sociale, besoins sociaux, etc.) ne doit jamais être inférieur aux gains de productivité. De plus, le travail doit être réparti équitablement. La privatisation des systèmes sociaux et d’infrastructures essentielles comme l’énergie et les chemins de fer doit être arrêtée et il faut déprivatiser ce qui l’a déjà été.
-----------D. Réduire les effets de la crise sur l’économie réelle et le « principe du pays spéculateur »Maintenant que la crise touche la société et l’économie réelle, il nous faut des programmes d’urgence pour en diminuer les conséquences sur la société et l’économie réelle.Vu la profondeur de la crise, des opérations de renflouement sont peut-être inévitables si l’on veut éviter l’effondrement total du système financier. Cependant, ces opérations doivent être menées avec des conditions très strictes, sans aucun risque de dérapage moral. Si elles ont lieu en dehors de toute nationalisation, il faut que leur coût (principal et intérêts) soit remboursé par les actionnaires. Si ce n’est pas possible, l’État acquiert des parts ou nationalise complètement l’entreprise.Les coûts globaux des injections de liquidités, renflouages et mesures de sauvegarde doivent être supportés par ceux qui sont responsables de la crise et ont amassé des fortunes. C’est pourquoi il faut créer un fonds spécial de crise dans tous les pays. Il sera alimenté par une imposition exceptionnelle sur tous les revenus mobiliers dépassant 50 000 euros et un impôt supplémentaire de 1% sur tous les bénéfices d’entreprises financières.Une partie de ce fonds doit être utilisée pour aider les pays pauvres qui subissent le contrecoup de la crise et sont touchés par la crise alimentaire et celle des prix des matières premières.De plus, des investissements publics considérables doivent être consentis pour des infrastructures sociales, l’enseignement, la culture et l’environnement car ces secteurs ont souffert d’un sous-investissement chronique, sont porteurs d’emplois et favorables au développement durable.
---------E. Réformer l’UE, contrôler la Banque centrale européenne (BCE) :Il nous faut prêter une attention particulière à l’UE. Les aspects financiers des traités, dont celui de Lisbonne, sont déterminés par le dogme néolibéral. Il faut modifier l’article 63 du TFUE (ancien art. 56 du TCE) qui interdit toute restriction à la circulation des capitaux, pas seulement à l’intérieur de l‘UE mais aussi avec des pays tiers, créant les conditions idéales pour une emprise de la finance sur la société. Il y a de bonnes raisons pour limiter les mouvements de capitaux : garantir la stabilité financière ; éviter la concurrence et l’évasion fiscales ; déployer une politique monétaire favorable à l’emploi sans risquer de faire fuir les capitaux. Nous demandons aussi que soit limitée la liberté d’établissement (art. 49), qui laisse tout loisir au capital d’aller se fixer là où les conditions sont les plus favorables et permet aux institutions financières de chercher refuge à la City ou n’importe où ailleurs.Il faut revoir de fond en comble la façon dont sont prises les décisions en matière de contrôle et de réglementations financières au niveau européen et dans les États membres. Un système commun de contrôle et de réglementation doit être mis en place, qui respectera des critères éthiques irréprochables au lieu de se laisser entraîner dans une logique de nivellement vers le bas. Les décideurs ne doivent plus se laisser obnubiler par la croissance et la compétitivité.Les parlements doivent s’assurer régulièrement que les marchés financiers et le secteur financier dans son ensemble sont correctement régulés. Le ¨Parlement européen doit avoir le droit d’introduire de nouvelles réglementations. Les réglementations de l’UE doivent définir tous les critères de l’activité financière (prêts, couverture de risques, investissement, émission de titres, etc.) en sorte que des services et moyens financiers ne soient fournis qu’à des activités durables et à la lutte contre la pauvreté.De plus, il faut changer la politique monétaire de la BCE. Cette banque est l’épicentre du néolibéralisme en Europe. Elle repose sur l’idéologie monétariste, recherchant la stabilité des prix au détriment de l’emploi, de la justice sociale et de la stabilité économique. Elle est indépendante et pas du tout soumise à un quelconque contrôle démocratique. Nous exigeons un contrôle démocratique sur cette institution dont les politiques ont une influence directe sur la vie des citoyens. Nous désapprouvons le souci obsessionnel de la BCE de maintenir la hausse des prix à la consommation en dessous de 2 %, politique typiquement néolibérale. Nous voulons qu’au contraire elle favorise l’emploi et une répartition juste. Même le rapport annuel de la Banque des règlements internationaux (BRI, juin 2008) est d’avis que les banques centrales ne devraient pas seulement se préoccuper du taux de l’inflation, mais s’inquiéter aussi de l’impact des taux d’intérêt soit sur l’emploi, soit sur « une croissance du crédit excessive et imprudente », la création de bulles spéculatives et un productivisme excessif.L’augmentation des taux d’intérêt par la BCE en réaction à la flambée du prix du pétrole est tout à fait dans la ligne du dogme néolibéral. Alors que l’augmentation relative de certains prix, comme dans le cas du pétrole, ne doit pas être confondue avec l’inflation (où tous les prix augmentent), la BCE menaçait du spectre de l’inflation. Mais dans la conjoncture actuelle, ce n’est pas l’inflation qui est le problème principal, mais la récession et le chômage. La politique de la BCE accélère et approfondit la crise à laquelle l’UE est confrontée.Le contrôle et la transparence de l’action des groupes de pression dans le secteur financier et auprès des grandes entreprises entraîneront une amélioration du mode de prise de décision économique, financière et monétaire, qui sera plus soucieux de la société.
-------------F. Réformes dans les parties centrales du système
À la lumière de la crise actuelle, des points nodaux du système financier réclament une attention particulière.a. Exigences en capitaux et pratiques prudentielles dans le secteur bancaireIl faut renforcer les exigences de fonds propres des banques. À cet égard, l’accord de Bâle II (2005) va dans la mauvaise direction. Il nous faut donc un Bâle III qui tire les conséquences de la crise. Les opérations hors bilan qui sont au cœur de la crise actuelle doivent être interdites.Les procédures de titrisation doivent être limitées à des institutions sous contrôle gouvernemental strict, comme c’était le cas naguère aux États-Unis. Il faut évidemment interdire des titrisations de dettes (titres adossés à des créances obligataires), dont le but est de revendre des prêts risqués.Les produits financiers spéculatifs devraient être interdits, surtout dans l’alimentaire et là où ils ont un effet déstabilisateur. Un strict minimum : plus l’entreprise financière est importante, moins elle pourra vendre ou échanger des produits spéculatifs.L’impact sur la société et la stabilité financière de tout nouveau produit financier doit être évalué avant autorisation.Les banques d’investissement doivent être réduites à un volume qui ne constitue plus un risque systémique. Ce qui reste du secteur doit être strictement contrôlé et séparé des autres services financiers. Tout le secteur bancaire de l’investissement doit obéir à des normes favorables au développement durable des sociétés, par exemple en prenant des actions dans des entreprises qui produisent des produits écologiques.Tous les holdings bancaires, qui regroupent banques d’investissement et au détail, assurance et échange de titres, doivent être restructurés ou divisés et le contrôle doit être parfaitement adapté aux structures restantes.Le système des primes élevées devrait être interdit car il incite à la prise de risques jusque dans les plus hauts échelons de la hiérarchie, sans véritable sanction lorsque l’entreprise, c’est-à-dire finalement ses clients subissent de lourdes pertes.
___b. Renforcement d’un secteur bancaire public coopératif: Après la Seconde Guerre mondiale, en Europe, le secteur bancaire public à ancrage local et ne cherchant pas le profit a fait du bon travail. En revanche, ces deux dernières décennies, les banques, qui ont fusionné en énormes entités financières, se sont transformées en banques commerciales à la recherche du profit maximum, suivant le modèle du système financier anglo-saxon. Il faut inverser cette tendance ; il faut renforcer les banques publiques qui ne cherchent pas le profit et les soustraire à l’obligation de concurrence. Des banques importantes devraient être publiques pour assurer des finances stables permettant un développement durable et équitable.Les banques re-nationalisées ou celles où l’État a pris des parts doivent être restructurées au service des besoins de la société, y compris des prêts abordables pour des entreprises et projets soutenables, l’accès universel aux services financiers, etc.
_____c. Contrôle public sur les agences de notation: Les agences de notation – dont l’échec est retentissant dans la crise actuelle comme en fait dans presque toutes les crises des décennies passées – doivent passer sous contrôle public. Ainsi du moins ne seraient-elles plus payées par les entreprises qu’elles ont mission d’évaluer, mais par un fonds commun alimenté par ceux qui utilisent ces agences et ceux qui émettent des produits financiers. Elles ne devraient pas envisager uniquement l’aspect financier, mais aussi les risques sociaux et environnementaux.Les systèmes comptables n’ont pas pu mettre en lumière les faiblesses du système de contrôle de risques dans le secteur financier. Ils ont permis des activités hors bilan sur le marché des hypothèques à risques, pour des produits dérivés et autres actifs. Il faut que l’établissement des règles comptables soit à nouveau de la compétence des gouvernements, si possible de façon coordonnée.
________d. Régulation des fonds d’investissement, spécialement des hedge funds et des private equity funds : Qui a besoin de ces fonds de placement aux politiques tortueuses ? Qu’apportent-ils à l’économie ? Quand les Allemands ont réclamé davantage de transparence dans la gestion des hedge funds lors du sommet du G8 de 2007, il leur a été répondu que ces fonds remplissent une fonction bien utile, car ils prennent des risques que d’autres ne sont pas prêts à supporter. En fait, ce sont les risques d’une spéculation à la recherche de profit maximum. Ces opérations n’apportent rien à l’économie, au contraire elles déstabilisent le système. A cause des pratiques de rachat par endettement, le risque est transféré aux banques. De telles opérations ne devraient donc tout simplement pas exister. Dire que les hedge funds sont un instrument de prévention des risques, c’est comme demander à un pyromane d’empêcher les incendies. Il faut qu’une instance de contrôle empêche les banques de faire affaire avec les hedge funds. Personne n’en a besoin, sinon une poignée de riches et des investisseurs institutionnels qui cherchent un profit maximum par une prise de risque élevée.À quelques exceptions près, les private equity funds eux aussi se sont révélés être un risque pour la stabilité et ont servi de courroie de transmission entre le capitalisme d’actionnariat et l’économie réelle. Il faut mettre un terme à ce modèle non soutenable. Cette façon de procéder, et tout d’abord le rachat par endettement, doit être limitée à un niveau soutenable.L’UE doit émettre une directive sur la régulation de tous les fonds de placement : ils doivent rendre publiques leurs stratégies d’investissement et les revenus des gestionnaires. Certaines stratégies d’investissement seront interdites, l’emprunt de crédit (rachat par endettement) doit être limité. Les bénéfices engrangés par ces fonds doivent être imposés autant que les revenus du travail. Des fonds dont le siège social n’est pas dans l’UE (mais par exemple dans des centres offshore) ou qui ne satisfont pas les normes de l’UE doivent être interdits sur le marché européen.
__e. Des limites strictes sur les produits dérivés:Les produits financiers dérivés ne doivent être l’objet de transaction qu’en Bourse, sous la supervision d’un organisme responsable, tout comme les produits pharmaceutiques. Il faut interdire les échanges hors marché (over the counter).
_______f. : Qui a besoin de centres offshore et de paradis fiscaux ? Seulement les riches et des investisseurs institutionnels qui veulent cacher leurs actifs au fisc, la mafia, les terroristes, des marchands d’armes et autres groupes criminels qui veulent blanchir leur argent. Il n’y a pas d’argument économique qui tienne pour préserver le statut de ces territoires.Tant qu’il n’est pas possible de les neutraliser complètement, parce que quelques pays riches prétendent rester des centres offshore et protéger les autres, il faut au moins mettre en place une série de mesures unilatérales, allant de la levée du secret bancaire à des taxes importantes sur les transactions passées avec ces centres, en passant par l’obligation pour les banques d’y fermer leurs agences.Il faut étendre la directive sur l’épargne à tous les revenus financiers (jusqu’à présent elle concerne uniquement les intérêts encaissés), à des personnes morales (jusqu’à présent elle ne concerne que des personnes physiques) et exiger que les trois pays de l’UE qui ne communiquent pas automatiquement les informations sur les revenus de ressortissants étrangers (l’Autriche, la Belgique et le Luxembourg) le fassent au plus tôt. Ces mesures sont une condition pour exercer une pression crédible sur d’autres paradis fiscaux comme la Suisse ou le Liechtenstein afin qu’ils renoncent au secret bancaire et qu’ils participent à un système d’échange de données.
______g. Mesures contre des politiques actionnariales à court terme ; John Maynard Keynes recommandait de “marier les investisseurs à leurs actifs” afin d’encourager les investissements à long terme et d’empêcher la spéculation à court terme. Le pouvoir que détiennent des actionnaires orientés vers le court terme pourrait être limité en décidant que le droit de vote est lié à une période de détention des actions minimum (par exemple 5 ou 10 ans) et en interdisant les stock-options (qui incitent les gestionnaires à ne se préoccuper que du cours de l’action). La rétribution des gestionnaires doit être plafonnée et liée à un indice de bien-être général. De plus, les syndicats, les consommateurs et d’autres groupes concernés doivent avoir un droit de regard sur les décisions des entreprises.
________h. Contrôle de l’endettement des ménages: Il faut fixer des limites à l’endettement, d’abord pour les ménages, en imposant, dans chaque pays, une proportion maximale des remboursements et intérêts par rapport au revenu. Le logement de couches de la population défavorisées doit faire partie des programmes sociaux des gouvernements, au lieu de constituer une proie facile pour les requins de la finance. Nous soutenons résolument les propositions visant à mettre en place un système de faillite permettant à des propriétaires surendettés de devenir locataires. Cependant, l’accès à la propriété d’une maison individuelle ne doit pas être un objectif principal dans les programmes sociaux. Nous demandons de véritables projets de logements sociaux qui favorisent la diversité sociale et soient respectueux de critères écologiques".(Attac Allemagne, Attac Autriche, Attac Belgique, Attac Hongrie, Attac Espagne, Attac Finlande, Attac France , Attac Grèce, Attac Italie, Attac Maroc, Attac Norvege, Attac Pays-Bas, Attac Pologne, Attac Suède, Attac Suisse, Attac Togo)
-Ne laissons pas Keynes aux émules du libéralisme !
"...Keynes s’illustre enfin par sa critique des marchés financiers : il parle à ce propos « d’économie casino » (Marx dénonçait quant à lui le « capital fictif »). Keynes s’attaque aux rentiers, cette catégorie de personnes qui n’investissent pas réellement et captent les richesses créées. Il parle « d’euthanasier les rentiers » car ce sont eux qui paralysent l’économie, freinent les investissements productifs...">>Retour à Keynes ?
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