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mercredi 2 décembre 2009

Les minarets de la discorde

Minorer les minarets...
[-Mises en perspectives sur un vote contesté-]

Comment faire peur sur des détails , en escamotant les vrais débats de fond et la complexité.
>-"On n’aime pas les musulmans en Suisse, mais on veut bien leur vendre des armes ou accueillir leurs avoirs…"(J.Q.)-
>-
« On est en droit de se dire que ce vote suisse risque d'inspirer des partis peu scrupuleux à la recherche désespérée des voix de l'extrême droite », a déploré Noël Mamère. Le FN qui en a profité pour demander l'organisation d'un « référendum sur le communautarisme » en France.

Une campagne haineuse, savamment orchestrée depuis des mois:

[A part lorsqu'il s'agit de riches touristes venus des émirats, la Suisse ne connait pas le problème de la burqa, ce qui n'a pas empêché les anti-minarets d'agiter le chiffon rouge par le biais d'affiches où l'on voyait une musulmane voilée devant un drapeau suisse transpercé de minarets en forme d'obus !]-En Suisse, l'UDC affiche son racisme sans complexe-

"... Les affiches de la campagne n’y vont pas par quatre chemins. On y voit des minarets sombres dressés, comme autant de dangereux missiles, sur un drapeau suisse. Ils sont accompagnés d’une femme en burqa, noire, invisible. Des affiches racistes, interdites dans certaines villes du pays (Lausanne, Zurich), mais pas partout, puisque leur censure relève de compétences communales.___Cette communication politique ultra-agressive est la marque de fabrique de l’UDC : il y a deux ans, à l’occasion des dernières élections législatives, les étrangers étaient stylisés en moutons noirs sur les affiches, venant disputer la croix blanche sur fond rouge à d’innocents moutons blancs « nationaux », sous ce slogan : « Qualité suisse ». Auparavant, on avait aussi eu droit à un montage photo douteux montrant un passeport suisse au nom d’un certain Oussama ben Laden, manière d’indiquer qu’en ne fermant pas à double tour les portes du réduit alpin, le risque est de les ouvrir aux pires terroristes islamistes.__Certes ultraminoritaire dans le pays, cette islamophobie est en totale contradiction avec le pedigree des musulmans de Suisse, très éloigné de l’extrémisme d’Al-Qaeda. Car qui sont-ils, au fond ? Pour l’écrasante majorité, ce sont des Européens en provenance des Balkans, ou des Turcs .... Ils sont bien intégrés dans la société, ne vivent pas dans des ghettos ethniques. Ainsi les Kosovars font partie du paysage helvétique depuis plus de deux décennies, filière d’immigration bien utile quand le secteur du bâtiment avait besoin de bras sur les chantiers. Du fait des regroupements familiaux, ils sont désormais près de 200 000 dans le pays : 10% de la population totale du Kosovo ! Mais avant l’initiative antiminarets, personne ne parlait d’eux en tant que « musulmans ». Pragmatisme helvétique ou ignorance de l’autre ? Un peu des deux. Dans un récent sondage publié par le quotidien romand 24 Heures, 68% des personnes interrogées considèrent que l’on peut « être un vrai Suisse en étant musulman ». Ils sont 63% à estimer que les communautés musulmanes ne constituent pas une menace pour la stabilité et la sécurité de l’Etat. Mais ils sont 49% à penser que l’islam mène plus facilement à l’extrémisme qu’une autre des religions pratiquées en Suisse. Un sondage qui fait écrire à l’éditorialiste du journal qu’il y a, en Suisse, un paradoxe avec la chose musulmane : « Une grande acceptation des musulmans, mais une certaine méfiance envers l’islam. En somme, c’est de cohérence qu’il s’agit. Les Suisses sont tolérants envers les individus et les communautés, mais ils se méfient des doctrines. »..(.Serge Enderlin- Nouvel Obs-)_______________________

-Jean Ziegler:" Il s’agit d’un vote raciste qui fait honte à la Suisse. C’est une insulte à 1,5 milliard de musulmans et particulièrement aux 400 000 d’entre eux résidant en Suisse, qui sont pour la plupart d’honnêtes travailleurs obéissant aux lois et faisant tout pour être bien intégrés. Le problème est encore aggravé ici par l’argumentation utilisée par les partisans de l’initiative, pour qui l’islam est une religion par essence violente, antidémocratique, dangereuse, et avec laquelle on ne peut cohabiter. Le minaret devenant ainsi le symbole de cette agressivité inhérente à cette religion… C’est une diffamation collective d’une communauté et, en cela, elle touche au fascisme. C’est un argument fasciste que de dire que tel type d’homme est par essence dangereux et criminel  !Quant à la Suisse, par son aura de neutralité et sa politique équilibrée dans les instances internationales et l’ONU (comme dernièrement sur le rapport Goldstone, sur les crimes de guerre à Gaza), elle avait gagné une crédibilité internationale qui lui permettait d’agir au plan diplomatique et humanitaire. Tout cela est parti en fumée.."

______________.

-Suisse, une victoire de l'islamophobie, une défaite de la raison:

" Tandis que les Suisses rejetaient, par près de 70 %, une proposition visant à bannir les exportations de matériel de guerre, ils votaient massivement en faveur de l’interdiction des minarets. Comme le note le site du quotidien suisse Le Temps le 29 novembre : « Contrairement à ce qu’avaient prédit les sondages, l’initiative contre la construction des minarets est acceptée à une large majorité, avec 57,5% des voix (résultats officiels). La majorité des cantons est acquise. Dix-neuf et demi d’entre eux sont en faveur de l’initiative, la palme revenant à Appenzell Rhodes-Extérieures (71,5%) et Glaris (68,8%). Seules exceptions, à Genève (59,7%), Bâle-Ville (51,6%), Vaud (53%) et Neuchâtel, le Non l’emporte. Le Conseil fédéral prend acte du résultat dans un communiqué qui tend la main aux musulmans. »__________Dans son éditorial « La peur et l’ignorance », sur ce site, François Modoux écrit :« L’image maudite qui colle à l’islam depuis de nombreuses années – un intégrisme religieux qui se décline dans des formes aussi choquantes que le terrorisme, la charia, la burka, la lapidation des femmes infidèles, etc. - est certes en total décalage avec la réalité de l’islam vécu par la très grande majorité des musulmans en Suisse. La campagne l’a très bien démontré, elle qui a amené les musulmans du pays à se présenter au grand jour et à s’expliquer sur leurs valeurs, lesquelles puisent à un islam européen, très éloigné d’un islam conquérant et intégriste. Mais c’est pourtant bien cette image négative de l’islam, ancrée dans les esprits de Suisses désécurisés, qui a tout emporté. »_____Le conseil fédéral a publié un communiqué stipulant qu’il acceptait le résultat et que, désormais, il était interdit de construire des minarets en Suisse et qu’il fallait prendre les craintes qui s’exprimaient au sérieux.« Les quatre minarets existants ne sont pas touchés par cette interdiction. Les mosquées et autres lieux de prière musulmans peuvent toujours être construits et utilisés en Suisse. Mme Widmer-Schlumpf souligne que la décision prise par le peuple ce dimanche ne vise que la construction de nouveaux minarets et ne constitue pas l’expression d’un rejet de la communauté musulmane, de sa religion ou de sa culture ; le Conseil fédéral s’y engagera. La paix religieuse est un élément essentiel du modèle qui a fait le succès de la Suisse. »Les Verts, pour leur part, annonçaient qu’ils pourraient saisir la Cour européenne des droits de l’homme. « Les musulmans de Suisse n’ont pas reçu une claque, mais un coup de poing en pleine figure », a déclaré Ueli Leuenberger qui s’est dit consterné par la décision du peuple suisse. C’est le résultat d’« une propagande extrêmement bien faite, qui a joué sur les préjugés ».

Il y a trois ans, dans un texte intitulé « Peut-on encore critiquer l’islam », je notais :« Car la vraie question est là. Pourquoi certains journalistes, certains éditeurs, certains intellectuels se plaisent-ils à jeter de l’huile sur le feu ? Pourquoi l’incompétence est-elle une clef pour pouvoir publier des pamphlets approximatifs, non étayés, schématiques ? Les exemples sont multiples de ces nouveaux spécialistes de l’islam intronisés par les médias. On pourrait citer, parmi d’autres, Caroline Fourest ou Mohamed Sifaoui, dont les travaux d’“enquête” sont à la vérité, pour reprendre une formule du chanteur Renaud, “ce que le diable est au bon dieu”. Il suffit de se promener dans n’importe quelle librairie pour mesurer le nombre de livres consacrés aux musulman ou à l’islam. La grande majorité sont très critiques (ce qui est parfois tout à fait légitime, quand cette critique s’appuie sur un vrai savoir). »« Le débat autour de l’islam est-il impossible ? inutile ? nuisible ? Sûrement pas. De nombreuses questions se posent sur l’islam, le monde dit musulman, à condition de toujours utiliser le “pluriel” : les musulmans sont au nombre de plus de 1 milliard, ils sont majoritaires dans une soixantaine de pays de plusieurs continents : ils vivent sous des dictatures, des régimes autoritaires, des démocraties ; ils pratiquent leur foi de manière différente et les musulmans ne se réduisent sûrement pas à une foi dont les interprétations sont multiples. »En novembre 2001, dans Le Monde diplomatique, j’écrivais un article intitulé « Islamophobie ». Nombre de lecteurs semblaient alors sceptiques face à ce concept. Depuis, de l’eau a coulé sous les ponts, et la Suisse montre à quel point l’islamophobie est désormais présente dans les sociétés européennes.Et tous nous en portons la responsabilité. Une partie de la gauche a agité le chiffon rouge de la menace islamique, pour avoir fait croire que la laïcité était ébranlée, que « nos » valeurs étaient menacées. Elle a participé, avec nombre d’éditorialistes, à la création d’un climat qui permet à la droite de triompher et aux idées du choc des civilisations de progresser.Les médias aussi qui utilisent n’importe quel prétexte, d’une burqa dans une banlieue à un foulard dans le public de l’Assemblée, pour « faire événement », pour créer les amalgames entre islam, immigration, identité nationale, délinquance et terrorisme.Désormais, il n’est plus possible de discuter sereinement des musulmans en Europe et de leur place dans notre société. Il est ironique de constater que les Suisses, par leur vote, ont infligé une terrible défaite à la raison elle-même..."

Pour la droite populiste, l'islam permet un processus de mobilisation
-Les minarets suisses se fracassent sur la démocratie directe - Coulisses de Bruxelles, UE: "on n’aime pas les musulmans en Suisse, mais on veut bien leur vendre des armes ou accueillir leurs avoirs…"
-Les minarets interdits en Suisse par votation populaire : le choc !
-L'UDC préfère "résilier" les traités internationaux que plier sur l'interdiction des minarets
-Du Bloc identitaire au FN, l'extrême droite française se concentre sur la peur de l'islam
-Au delà de l'interdiction des Minarets en Suisse
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2 commentaires:

BiBi a dit…

Résident sur les bords du Léman ( côté France), BiBi est plutôt d'accord avec votre analyse. Il vous invite à venir faire un tour sur son blog ( il a fait un lien sur le vôtre... A charge de réciprocité si l'humour politique de BiBi vous agrée...)

Etienne Celmar a dit…

Bonjour
Merci pour la visite et l'appréciation
Un lien vers votre blog?
Cordialement