Ça va jazzer

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jeudi 29 février 2024

Bref point d'histoire

Les Vikings: de braves garçons, en somme.

        Malgré leur réputation sulfureuse.

                      L'Amérique ne leur faisait pas peur. Ni Kiev. Ni la Normandie....

             Bref, c'est un peu plus compliqué que cela....       ______________________

Varia

__ Danger

__ Saignée

__ Etre juif

__ Révolution?

__ Basculement

__ Discordances

__ Catastrophe

__ Solution RG?

__ Autosuffisance

__ Prix planchers

__Ecophyto en berne

__Pesticides et santé           

__ Colonisation intense

__ Langue modèle

__ L'étrange J.Kennedy

__Puissance et oppression

_____      C-News ose tout. C'est explicable.

______    Porno-destruction: Un problème urgent.     ___________________________

mercredi 28 février 2024

Tics à gogo

 Le langage dans tous ses états 

                 Effets de modes. Dans les échanges courants, il est difficile d'échapper à certains tropismes langagiers, ceux que l'air du temps fait circuler de bouche en bouche, le temps d'une saison. Que nous le voulions ou non, nous sommes pris pas certains automatismes, ceux d'expressions toutes faites, qui ne veulent souvent rien dire, mais qui sont là pour combler les vides, pour se caler dans des modes, pour paraître parfois, tout simplement.                                                                                 [ Je ne parlerai pas de la langue de bois, à laquelle on échappe peu, et qu'il est assez facile à identifier, avec un peu de recul et d'expérience, et qui ne fait pas toujours rire.. Mais c'est un autre débat, toujours d'actualité. ] On les trouve dans tous les domaines. Ce sont des mot-béquilles, qui remplissent une fonction pas toujours facile à identifier, mais qui sont de l'ordre du mimétisme, donc destinés à changer ou à ne pas être compris en dehors d'un groupe social donné, à un moment donné.                                                                                                                                  Il ne sont pas toujours bien acceptés. Il y a un qui m'énerve particulièrement, car il est révélateur d'une époque ou d'une tendance trop répandue. Pas d'souci, comme on dit à tous propos, pour des choses banales ou parfois, hélas! plus importantes....La novlangue d'aujourd'hui est particulièrement inventive...     C'est pas faux, comme dirait prudemment mon voisin.

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Où va la psychiatrie aujourd'hui?

Bref état des lieux. 

                          Le moins que l'on puisse dire est que la situation n'est pas bonne. L'hôpital va déjà mal. Mais le domaine des soins en psychiatrie s'est aussi dégradé, surtout depuis plus d'une dizaine d'années, voire plus. Un récent rapport du Sénat le soulignait clairement. Certains vont plus loin dans l'analyse. On peut même parler de délabrement.   Un dehors des aspects économiques et institutionnels, la psychiatrie est touchée dans ses fondements. Un flagrant manque de moyens. Elle a évolué, jusqu'à aboutir aujourd'hui à un excès de scientisme.                    ____ Quelles que soient les avancées des connaissances dans le vaste domaine des désordres mentaux, de sources endogènes et/ou exogènes, il n'en reste pas moins que la psychiatrie est devenue un parent pauvre dans le domaine des soins, alors qu'elle touche de plus en plus de personnes, occasionnellement ou durablement.  Parent pauvre de la médecine, trop souvent soumise à des injonctions contradictoires,.. On parle même d'un état d'urgence. Une surconsommation de psychotropes est souvent dénoncée par des soignants, aux dépends de la relation et de l'accompagnement clinique, humaine. Elle est trop souvent sous influence. Le infirmier-ères n'ont même plus de formation spécifique. Certains résistent.   __Soins ou surveillance?

Lire...

                   __ "...
Psychiatre des hôpitaux honoraire  Daniel Zagury spécialiste de psychopathologie et de psychiatrie légale, expert auprès de la cour d’appel de Paris n'y va pas par quatre chemins, dénonçant les dérives en cours depuis trop longtemps et analyse les causes du déclin de la psychiatrie dans un ouvrage intitulé « Comment on massacre la psychiatrie française ».  » Le livre humaniste d’un psychiatre en colère, ­convaincu qu’on doit toujours tenter de réformer le monde » *. Extrait de l’introduction:   

                 "...La situation de la psychiatrie publique n’a cessé de se dégrader depuis plus de vingt ans (…)Nos cris d’alarmes, nos pétitions, nos protestations, nos mouvements de grèves, nos tribunes, nos livres, n’ont pas eu beaucoup d’effets. Peut-être parce qu’ils se sont souvent adossés à des analyses  politiques ou doctrinales, au nom d’une sensibilité ou d’un courant, et non en celui de la psychiatrie elle-même, dans ses fondements. Il convient de retrouver toute la force du néologisme magnifique d’Henri Ey : c’est parce qu’elles étaient « psychiatricides » qu’il fallait se battre contre ces attaques, et non parce qu’elles relevaient de telle ou telle conception. Peu importe le courant dont on se réclame.                                                                                                                          On a fait croire à ces internes que la psychiatrie biologique, les neurosciences, l’épidémiologie, la recherche, étaient la noblesse de la psychiatrie, le reste relevant de l’obscurantisme et de l’archaïsme.  Toute une génération s’est forgée dans la haine de la psychanalyse, dont l’expression a été largement facilitée par des postures inconséquentes, aveugles, présomptueuses et méprisantes, de psychanalystes prenant leur théorie pour un méta-savoir supérieur à tous les autres et dispensé de toute confronta­tion aux autres disciplines. On a ainsi jeté le bébé de la psychopathologie, de l’intersubjectivité et de la relation avec l’eau du bain de la psychanalyse, et l’on a amputé le champ des connaissances et de l’enseignement d’un pan central de la clinique psychiatrique.  On a dit aux infirmiers en psychiatrie qu’ils étaient « comme les autres», avec la même formation que les autres , et on les a transformés en greffiers de la traçabilité de leurs patients. Les conséquences en termes de prise en charge ont été désastreuses.                                                         A moins de renoncer à l’unité de la discipline et de consacrer son morcellement, tous les chemins mènent à Rome, c’est-à-dire à la clinique intégrative, au soin de qualité et au meilleur dispositif de santé publique. C’est sur ce commun dénominateur que repose l’identité de tous.  Nous nous sommes donc heurtés aux refus de l’Etat, tout juste bon à commander un rapport tous les deux ans, aussitôt rangé dans les tiroirs ; à l’indifférence de l’opinion publique, car les maladies mentales font peur ; à la lâcheté des politiques, qui savent qu’il n’y a pas de gain électoral à escompter de la psychiatrie, sauf à la stigmatiser, dans l’obsession des faits divers violents qui embrasent des médias et qui font espérer quelques voix sur le dos de nos malades.  En reconnaissant en 2019 l’abandon de la psychiatrie depuis trois décennies, l’ancienne ministre de la Santé Agnès Buzyn a au moins permis à l’Etat de sortir de cette posture négationniste et perverse en admettant qu’elle était le « parent pauvre » de la médecine. Pouvait-elle d’ailleurs faire autrement tant les tristes preuves du désastre s’accumulaient !   Ne nous y trompons pas. Ce désastre n’est pas une catastrophe naturelle, la conjonction malheureuse de quelques facteurs. C’est un massacre méthodique, non parce qu’il a été voulu, mais parce que l’on est demeuré aveugle et borné face à un dépérissement maintes fois dénoncé par les praticiens de terrain. C’est au nom de doctrines absurdes, d’ignorances feintes, d’abandons et de lâchetés que ce massacre a été commis. La politique de santé en France et celle de sa spécialité la plus démunie, la psychiatrie, ont été exclusivement circonscrites à la limitation des coûts, sans vision globale, sans autre boussole, en se revendiquant ici ou là de telle ou telle doc­trine opportunément instrumentalisée, en faisant semblant de s’appuyer sur quelques psychiatres qui défendaient leur chapelle et non notre église.                                                                                                                                                                       Qui aurait pu survivre à un tel tir croisé ? On a laissé la catastrophe démographique s’installer : 1200 postes non pourvus, une perte massive d’at­tractivité, des postes en partie occupé ...  des méde­cins étrangers en situation précaire scandaleusement sous-payés.. On a formé des générations d’internes dans l’ignorance de la psychiatrie intégrative, en leur faisant croire que la psychiatrie était née en Amérique, ce pays aux congrès débordant de la richesse des laboratoires pharmaceutiques tandis que leurs malades chroniques vont à la rue, en prison ou prématurément au cimetière.                Ce qui est condamnable, ce n’est évidemment pas les neurosciences, ce qui serait parfaitement idiot, mais la prétention à l’hégémonie et à l’exclusivisme de n’importe lequel des composants du champ psychiatrique;                                                    ___ On a proclamé partout, contre toute évidence, cette absurdité sans nom qui prétend que la psychia­trie est une spécialité comme une autre. Avec l’alibi de la déstigmatisation, on a encore plus stigmatisé les malades mentaux. On a précipité l’effondrement du modèle de la psychiatrie intégrative bio-psycho­sociale, qui a toujours été le meilleur de la psychia­trie, comme aimait à le dire Racamier, au profit de la psychiatrie biologique et des neurosciences.   Ce qui est condamnable, ce n’est évidemment pas les neurosciences, ce qui serait parfaitement idiot, mais la prétention à l’hégémonie et à l’exclusivisme de n’importe lequel des composants du champ psychiatrique.                                Avec la loi HPST et tout le pouvoir confié à des administratifs trompeusement affublés du titre de managers, on a privé le chef de service de tout pouvoir fonctionnel réel sur sa propre équipe. On l’a conjointement sur-responsabilisé, car l’échec des procédures présumées parfaite ne pouvait que lui être imputable.          On a scindé le binôme mythique chef de service-cadre infirmier supérieur qui, depuis Pinel et Pussin , organisait le soin. Les cadres ont été happés par la hiérarchie administrative ; ses modes de pensée, ses manies et ses tics.  On a réduit le médecin chef à être la dernière roue du carrosse dans son propre service. Des tableaux PowerPoint sont supposés transmettre toutes les conduites à tenir en termes de recommandations, de guides de bonnes pratiques, de protocoles, de procédures, de programmes : GPS de la psychiatrie quotidienne. Tandis que les soignants voient la qualité des soins s’effondrer ils sont sans cesse convoqués à des réunions sur les procédures qualité.             C’est peu dire que le même mot ne veut pas dire la même chose.    Comble de la honte, dans les unités psychiatriques hospitalières, on  vu se généraliser des pratiques de contention et d’isolement par des équipes de soins squelettiques, apeurées, sans cesse rappelées à leur responsabilité en cas de drame. Et nous voilà de nouveau pointés du doigt par ceux-là même qui ont organisé le massacre et qui nous donnent des leçons de respect de la dignité du malade.  Et voilà que l’on ordonne aux établissements hospitaliers d’appliquer une nouvelle loi sur la contention et l’isolement  sans jamais s’être soucié de sa faisabilité, sans jamais avoir demandé l’avis des praticiens. Au pays des grands principes, il suffit de commander, l’intelligence suivra. Quel mépris ! Et sans doute également, quelle incompétence !                                         N’en jetez plus. La cour du massacre de la psychiatrie est pleine. Le massacre implique la main de l’homme. Il ne s’agit pas seulement d’un désastre, de la conjonction malheureuse de quelques phénomènes comme ceux qui provoquent une catastrophe naturelle. Mais ce serait une erreur d’y voir nécessairement une intention délibérée. Toute une série de facteurs, parfois indépendants les uns des autres y ont contribué. La seule question qui vaille aujourd’hui est : comment en sortir..." ?                         _______________________

mardi 27 février 2024

Un certain 27 février

 Entre autres événements...

                           On peut signaler en1933: L'incendie du Reichstag

                                              Le dernier marche pied de Hitler 


                                                                                                       ________________________

Mayotte, lourd héritage

Que sommes-nous allés faire dans cette galère?   [notes de lecture]

           Rupture?       ____ Cette île à l'histoire compliquée, posant tant de problèmes, pour certains apparemment insolubles, s'aggravant même depuis quelques années, département français à part entière depuis 2009, mais régi par un statut singulier. Depuis avril 1841, "française par effraction", comme dit un historien....                            Les problèmes d'emballement démographique et de pauvreté (qui vient de loin), se reposent avec acuité. Certains parlent d'"effondrement économique" . Comme un bateau ivre, trop loin de la métropole, longtemps délaissé..                                                                                                       Une remise en question du droit du sol se profile, contesté par certains comme un dangereux précédent... Fabius contre Darmanin. La République est-elle encore une et indivisible?  "... le droit du sol, en lui-même, va plus loin. Il porte cette promesse de libération que contenait, depuis bien avant la Révolution, l’ancien droit français, selon lequel l’esclave qui abordait en France devenait libre de ce fait. Il ne devenait pas français pour autant. Les esclaves de Jefferson, émancipés à leur arrivée à Paris, sont restés américains. Mais le droit français se nimbait malgré tout de cette possibilité émancipatrice à laquelle la Déclaration des droits de l’homme a donné sa forme la plus éclatante. S’éloigner de cette conception, fût-ce à propos d’une île minuscule exposée à une crise des plus graves, est à la fois chimérique et dangereux..."   


                                                                                                  "   
Par la voix de son ministre de l'intérieur en visite à Mayotte
 le président de la République a annoncé, dimanche 11 février, qu’il allait « prendre une décision radicale, qui est l’inscription de la fin du droit du sol à Mayotte ». « Il ne sera plus possible de devenir français si on n’est pas soi-même enfant de parents français et nous couperons ainsi littéralement l’attractivité qu’il peut y avoir dans l’archipel mahorais. Il ne sera donc plus possible de venir à Mayotte de façon régulière ou irrégulière, de mettre un enfant au monde ici et d’espérer devenir français de cette façon », a précisé Gérald Darmanin. Après sa tentative avortée d’instaurer une dose de préférence nationale en France dans la loi immigration votée en décembre, l’exécutif s’en prend désormais frontalement à un autre totem de l’architecture juridique de notre pays, le droit du sol, qui fonde en France le droit de la nationalité depuis 1889. Et pour être certain que cette mesure, à la différence du conditionnement des prestations sociales à la durée de présence sur le territoire, retoqué par le Conseil constitutionnel en janvier 2024, ne soit pas considérée comme inconstitutionnelle, le chef de l’État affirme cette fois-ci vouloir réviser la Constitution, comme Marine Le Pen le lui a demandé à propos de la priorité nationale.  Passer par une simple loi aurait en effet été voué à l’échec. Pour pallier l’incapacité des pouvoirs publics à faire face à l’explosion économique et sociale d’un territoire abandonné par la métropole, Emmanuel Macron est prêt à toucher au cœur du réacteur de notre pays, au risque de mettre en cause deux de nos principes fondamentaux : l’indivisibilité de la République et l’égalité des citoyens et citoyennes. C’est à la fois contraire à notre histoire, dangereux et inefficace....Comme l’anticipait Patrick Weil dans un entretien à Mediapart en 2008, on reviendrait à un « régime colonial » à Mayotte, où le droit de la métropole ne s’appliquerait plus aux outre-mer. « Faire un droit différencié – dans une partie du territoire donnée – en matière de nationalité, c’est tout à fait exceptionnel en République, régime fondé sur l’égalité des citoyens et l’unité du territoire. Mayotte a un statut de département, c’est une rupture très importante que de lui appliquer un statut différent », s’alarme aujourd’hui l’historien auprès l’AFP, tout en doutant de l’efficacité de la mesure.                  « Il faudrait qu’il [Gérald Darmanin – ndlr] prouve aux parlementaires et aux Français que cela va avoir des effets, indique-t-il. Aujourd’hui, quand une femme comorienne arrive et accouche à Mayotte, son enfant n’est pas français. Est-ce qu’une telle mesure la dissuadera de venir ? […] J’en doute et il ne le démontre absolument pas. Vu le différentiel de richesses entre Mayotte et les Comores, les gens viendront […]. Ce sont les conditions de vie qui les attirent. C’est le devoir du président de la République, garant de l’indivisibilité de la République et de son unité, que de chercher d’abord d’autres solutions pour répondre à la crise migratoire qui touche Mayotte. »                ____________________________

lundi 26 février 2024

Salon (suite)

 Les pièges de la célébration rurale.

             Un salon peu confortable.______Quadrature du cercle?...

                                                               



Et nos forêts?

               L'arbre et le capitaliste

                                              On ne soulignera jamais assez que les forêts doivent être protégées, dans leur exploitation (rationnelle) elle-même. Certains se disent vertueux en ce domaine, mais se conduisent comme des prédateurs. La firme IKEA, qu'on ne présente plus, faisant l'objet d'un documentaire approfondi sur Arte, n'a pas beaucoup de scrupules pour se servir abondamment en fonction de ses besoins marchands considérables. Il n'y a pas que la Chine qui vient se servir en France, pour ses industries de transformations du bois, sans qu'on s'en émeuve beaucoup à Paris ou à Bruxelles. A Pékin, on adore les chênes. La gestion technocratique et profitable prime sur les perspectives à long terme, hélas! Le marketing "éthique" de la multinationale suédoise, à l'opacité reconnue, n'a pas cette vision, mais est rivée à l'immense marché qui s'ouvre toujours plus à elle. Business first! La destruction sauvage de certaines forêts primaires semble ne pas poser problème aux responsables de l'enseigne bien connue. Les Roumains en savent quelque chose. Les Brésiliens aussi.Un coût élevé pour la nature. Une stratégie de greenwashing...

                 La France reste un pays où la forêt reste remarquable par sa surface et la diversité de ses essences. Malgré les canicules successives dans certaines régions, qui affectent surtout les conifères par un développement important de scolytes qui force à l'abattage, nous n'en sommes pas comme dans certaines régions du monde où les pics extrêmes de chaleur deviennent extrêmement problématiques.                                                                             Mais les garde forestiers sonnent le tocsin, dénonçant la dérive purement commerciale de la gestion des bois et revendiquant une vision de l'avenir avec d'autres enjeux. "...L’ONF n’est pas en déficit, il est en manque criant de financements, c’est différent ! Le vocabulaire que l’on utilise a un sens. Un service public existe parce qu’il répond à des missions d’intérêt général qui nécessitent des investissements sur le long terme ; il n’a pas pour but premier d’être rentable. L’ONF a un rôle de protection et de police qui ne peut pas répondre à des objectifs purement financiers. Nos forêts ne sont pas des usines à bois. Elles captent le carbone, filtrent l’eau, préservent la biodiversité. Ce sont d’abord et avant tout des biens communsNous devons donc changer le modèle économique de l’ONF. Aujourd’hui, il est clair que nous ne pouvons plus financer un service public principalement avec les recettes issues de la vente du bois des forêts publiques. Depuis plusieurs décennies, les cours du bois sont orientés à la baisse comme la plupart des matières premières agricoles. En trente ans, la récolte en forêts d’État a augmenté de 30 % mais les recettes ont diminué de 30 %. Cela ne peut plus continuer ainsi, d’autant que la situation risque de se dégrader davantage avec le changement climatique, l’augmentation des sécheresses, des tempêtes et des pathogènes. Nous devons rompre avec ce modèle qui pousse au productivisme au détriment des écosystèmes...".                                                                                                                        Un modèle de gestion économique qui coûte cher: nous exportons du bois qui nous revient en meubles que nous ne fabriquons plus chez nous. Et une déforestation accélérée dans d'autres pays.    La France peut se vanter de posséder un domaine forestier parmi les plus importants et les plus variés d'Europe, dont la gestion ne peut être laissée au hasard, aux bons vouloirs des autorités locales et surtout des particuliers, voire des lobbies commerciaux, mais elle suppose surveillance, contrôle, gestion dans le temps avec une vision d'avenir, pour une pérennité garantie dans la diversité des adaptations au cours du temps. 

         Les arbres se développent  au-delà de nos courtes vies, de nos projections limitées et on en connaît mieux l'importance d'un point de vue écologique. Ils ne sont donc pas seulement des éléments "bons à abattre" pour le chauffage ou les scieries, ils nécessitent surveillance, soins, intelligence et souci d'avenir. Les ventes de bois sont nécessaires, de manière raisonnable, souvent dans l'intérêt même de la forêt elle-même.                                                                                                                                      ______ Mais, depuis un certain nombre d'années, le monde des forestiers vit assez mal les différentes réformes qui affectent leur activité et qui se profilent à l'horizon. Certaines les touchent particulièrement, dans la tendance constatée un peu partout, sous la pression libérale, notamment celle consistant à privatiser leur fonction et à réduire drastiquement leur nombre, dans la perspective d'une gestion à court terme et au nom de la rentabilité, qui ne serait pas au rendez-vous.              ___Un grand nombre de forestiers sont en plein désarroi et le font savoir, malgré leur petit  nombre. Les nouvelles tendances gestionnaires, comme la spécificité de leur statut particulier, les mènent à se manifester, à sortir de leur silence traditionnel. Ils dénoncent purement et simplement un démentèlement de l'ONF ainsi que certaines dérives mercantiles, qui ne sont pas propres à leur secteur d'activité.   IL s'agit de la forêt publique, qu'ils estiment en danger, toutes associations réunies. Ils remettent en question une tendance lourde ou insidieuse:               ___ "....En proposant de généraliser les possibilités de recrutement d’agents contractuels de droit privé, cet article acte une dérive qui s’est installée depuis plusieurs années au sein de l’Office : le remplacement de fonctionnaires assermentés par des salariés de droit privé. Depuis trois ans, les concours de recrutement de techniciens forestiers fonctionnaires sont bloqués et les postes de gardes forestiers sont affectés massivement à des contractuels. La conséquence de cette politique est un affaiblissement de la protection des forêts. Au quotidien, les agents forestiers sont soumis à de nombreuses pressions pour couper davantage de bois, fermer les yeux sur des dégâts causés par l’exploitation forestière, sur des dérives liées à la pratique de la chasse ou encore sur des décharges sauvages en forêt. Le fait d’être assermenté leur permet de résister à ces pressions et donc de protéger au mieux la forêt et l’intérêt général. Pourtant, le projet du gouvernement est de confier à des salariés de droit privé l’ensemble des missions actuellement exercées par des fonctionnaires, ce qui inclut, par exemple, la recherche et la constatation des infractions pénales en matière forestière. Une incongruité relevée par le Conseil d’État et corrigée par le Sénat qui a amendé le texte pour préciser que seuls les agents assermentés sont habilités à rechercher et à constater ce type d’infractions. Les amendements apportés par le Sénat ne règlent qu’en apparence le problème car, depuis 30 ans, le nombre de gardes forestiers assermentés est passé de 9000 à 3000 sur l’ensemble des forêts publiques soit 10% du territoire. L’application en l’état de l’article 33 de la loi ASAP permettrait d’en réduire encore fortement le nombre au détriment de la protection des écosystèmes forestiers. Travaillant le plus souvent seuls et avec des surfaces de forêts à gérer toujours plus grandes, les agents assermentés ne sont déjà plus en capacité de remplir les missions de protection qui leur sont confiées par la loi. Alors que les réformes de l’ONF se succèdent depuis 15 ans, ils dénoncent une perte de sens de leur métier. Les liens de confiance qui s’étaient tissés entre l’ONF, les élus et les citoyens s’étiolent peu à peu. Tout ceci a des conséquences dramatiques : depuis 2005, on recense plus de 50 suicides à l’ONF, un taux plus fort qu’à France Télécom (devenu Orange) rapporté à l’effectif...."__

            Les risques de surexploitation ne sont pas un fantasme. Les dégradations sont là, les pressions sont fortes. Le climat est délétère. Nos forêts nous survivront certes, mais dans quel état? Même  si, comme on le dit, la nature reprend ses droits. Les confrontations sont vives entre les purs "marchands" et les partisans d'une saine gestion à long terme d'un patrimoine inestimable...pas seulement financièrement.   Il reste encore trouver un équilibre entre un colbertisme revu et adapté et le nouvel esprit gestionnaire...._______

dimanche 25 février 2024

Regards complices

  L'art du portrait 

       Une riche galerie

                    L'expressivité comme passion


         






    
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Billet dominical

__ Pénuries

__ Recul

__ Révolution?

__ Priorité?                 

__ La jungle

__Fréquentations

__ Sélectivité

__ Fractures

__ Inapproprié

__ Baby-crasch

__ Gaz de schistes

__ Accusé AirBnb

__ Arnaque funèbre

__ Ecole touchée

__ Jours sans pluie

__ Charge mentale  __________________________

samedi 24 février 2024

Attention! culture

 Comme le disait Voltaire 

      La pensée critique n'est pas bienvenue dans l'univers du temps de cerveau disponible....

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Elles tiennent salon...

   ...Les vaches.

                        Comme tous les ans. A Versailles. Enfin, à la porte...Tranquillement. Mais cette année, c'est un peu agité, un peu beaucoup même... La colère est manifeste. les raisons en ont été partiellement données. Question de normes. De prix aussi, dans la concurrence devenue internationale de produits de base. Une autre politique agricole commune s'impose, pour reconquérir un minimum de souveraineté alimentaire an matière de quantité, de qualité et d'exigences environnementales. L'agriculture n'est pas une production comme une autre, soumise plus que jamais à des injonctions contradictoires.                                                    On parle peu de la diversité du monde paysan, selon les activités et les régions. Peu aussi des inégalités. Toutes les vaches ne vivent pas dans les mêmes conditions ou ne doivent pas répondre aux mêmes exigences. En Bretagne, par exemple, berceau de l'élevage intensif voulu par Pisani, pour des raisons historiques, tout le monde n'est pas logé à la même enseigne et l'agriculture de firme tend à s'étendre. Ce que vise à décrire R. Legendre, ce qui ne plaît pas à tous.;;; 


                                                                                                                                                                 ___       "...François Purseigle et Bertrand Hervieu, sociologues, qui ont publié en 2022 l’ouvrage Une agriculture sans agriculteurs (Les Presses de Sciences Po), font ce constat : « Sept exploitations sur dix en élevage porcin sont des exploitations de grande taille économique. Alors que les exploitations de taille moyenne étaient, il y a encore dix ans, majoritaires en Bretagne, les exploitations dites “grandes” représentent aujourd’hui 37 % des exploitations bretonnes. »                                                                                                                                     "...    Les chercheurs relèvent également que la filière porcine est celle où l’on recense le plus de holdings, des sociétés de gestion de patrimoine financier qui abritent des dizaines d’entreprises agricoles aux formes juridiques variées. Ce qu’incarnent les Le Bihan, Dartois, Kerdoncuff, Crespel. Tous producteurs de porcs. « Cette réalité, souvent niée, illustre l’émergence d’agricultures sans agriculteurs ou dirigées par des chefs d’entreprise éloignés de la figure traditionnelle du chef d’exploitation familiale », expliquent les sociologues. « Dans certaines régions comme la Bretagne, où des filières d’élevage se sont engagées dans un processus de concentration particulièrement net, le nombre d’exploitations de taille moyenne s’est même réduit de près de 40 % entre les deux derniers recensements [ceux de 2010 et 2020 – ndlr] », ajoutent-ils.                                                                                                 Des fermes de plus en plus grandes, aux montages juridiques de plus en plus complexes. Et comme dans un jeu de vases communicants, les exploitations individuelles, elles, sont de moins en moins nombreuses. « Le scénario actuellement à l’œuvre est bien celui d’un accaparement des terres au détriment de candidats à l’installation », estime le rapport Sempastous, consacré à la régulation du foncier agricole.   La fédération nationale des Safer confirme une tendance « vers l’agrandissement d’exploitations existantes plutôt que l’installation de nouveaux agriculteurs. Si ce mouvement se poursuit dans le cadre de l’accélération des départs en retraite, c’est le visage de l’agriculture française [et] la vitalité même des territoires ruraux qui sont en jeu ».   
Les entreprises agricoles de plus en plus importantes deviennent aussi trop grosses et trop chères à transmettre à un agriculteur ou même à un binôme d’agriculteurs. L’organisation du travail au sein des exploitations s’en ressent. La sous-traitance se développe à travers l’essor des entreprises de travaux agricoles (ETA). La Bretagne en compte 850 en 2023, soit près de 6 000 salarié·es. Les éleveurs ont de plus en plus besoin de déléguer des cultures pour se concentrer sur l’élevage...."                                           La Fnsea n'est pas étrangère à cette évolution vers une agro-industrie à courte vue. Une impasse?...Changer de paradigme est un impératif. ___ Pratiques de rupture.___________________

vendredi 23 février 2024

Un certain 23 février 1455

       Une avancée majeure

                       Première impression de la Bible (voir Gallica)

                             Le début d'une ère nouvelle.  Toute une histoire...

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Vers l'abîme?

    Une éradication en cours.

     Après Mona Chollet qui évoquait sa stupeur et son accablement peu de temps après les événements du 7 octobre, après les analyses critiques de l'historien Shlomo Sand à l'égard de la ligne politique de son pays et les points de vue de Filiu et de bien d'autres, dont Local Coll, Sans manichéisme.  Israëliens ou non, beaucoup d'observateurs et de connaisseurs décrivent la radicalité tragique des opérations en cours à Gaza, qui arrivent à un moment peut-être décisif, sans perspective aucune, Netanyahou évoquant la volonté de rayer l'enclave de la carte. Une terrifiante opération table rase en quelque sorte, sans proportion aucune par rapport aux buts de guerre assignés au début. La pire catastrophe humanitaire est sous nos yeux, qui regardent souvent déjà ailleurs. La cécité finit par devenir la règle. Les interventions, même mesurées, de certaines chancelleries ne sont pas prises en compte. L'esprit de vengeance est destructeur.  


                                                                                                                                         Le point de vue de Dominique Eddé mérite qu'on s'y attarde
:

                         " Plusieurs dizaines de milliers de morts à Gaza, en l’espace de quatre mois, sur un territoire de 360 km2. 50 à 60 % de bâtiments détruits. Un nombre incalculable de cadavres sous les décombres. Des milliers de blessés privés d’hôpitaux, amputés sans anesthésie, parfois sur des trottoirs. Des dizaines de médecins de tous pays, tous horizons, affirmant qu’il ne s’agit pas d’une guerre mais d’un projet d’anéantissement. Des centaines de milliers de Gazaouis sur les routes. Ces chiffres ahurissants n’agissent pas. Les images non plus. Il suffit pourtant de les voir trembler de peur, de froid, de faim, se traîner hagards, en troupeaux – comme des animaux, on nous avait prévenus – d’une zone, d’une tente à l’autre, de les écouter supplier Dieu, de lire dans leurs yeux le peu qu’ils peuvent encore, pour comprendre qu’il y a pire que de perdre la vie, c’est de continuer à vivre sans elle. Ajoutez à leur deuil et à leur effroi le poids de leurs mémoires. Pour les plus vieux : soixante-quinze ans d’exil, de dépossession, d’humiliations. De promesses non tenues. Pour les jeunes : les wagons des ans accrochés au même train. Au même déni, à la même solitude. Pourquoi, comment cela est-il de l’ordre du possible ? Quel esprit informé peut encore supposer un instant qu’il s’agit d’une guerre contre le Hamas ? A-t-on conscience en Europe, en France en particulier, que l’on est en train de pousser l’humanité dans le vide ?                                                                                                                         Revenons, pour essayer de réfléchir, à la date funeste du 7 octobre. Sur le territoire d’Israël qui était, rappelons-le, la Palestine au début du siècle dernier, une troupe de Palestiniens armés, enragés, ont perpétré un effroyable massacre. Selon les estimations, 700 à 1 290 Israéliens ont été tués, parmi lesquels des centaines de soldats, policiers, secouristes. Du jamais vu dans l’histoire d’Israël. Deux cent quarante personnes ont été prises en otage. Les familles, les proches des otages vivent un calvaire sans nom. Le pays est sous le choc. Le monde entier. L’horreur de cette journée sanglante est vécue par les Israéliens et par un bon nombre de juifs dans le monde comme « le plus grand pogrom » depuis la Seconde Guerre mondiale. Compte tenu de l’histoire abominable qui habite et hante les mémoires, cela se comprend. Cela ne doit pas nous empêcher de voir autre chose.                                                    ___Les pogroms du passé étaient menés par des communautés dominantes, avec l’assentiment des autorités, contre des populations juives, minoritaires et dominées. Ce cas de figure n’est pas applicable au 7 octobre. Les auteurs du carnage n’étaient pas en position dominante et ne savaient sans doute pas ce qu’est un pogrom. Ils sont d’ailleurs nombreux à y avoir laissé leur peau. Selon « Times of Israël » le 11 novembre 2023, « 1 500 terroristes auraient été tués par les forces de l’attaque et de la riposte qui a suivi ». Ces hommes se sont déchaînés contre ceux qu’ils appellent tantôt « les forces occupantes », tantôt « les Israéliens », tantôt « les juifs ». Cette dernière appellation est insupportable. Il faut tout de même l’interroger. A partir du moment où l’on crée un « Etat pour les Juifs », on crée fatalement de la confusion au plan du langage et de la pensée. Il ne s’agit pas d’entériner l’amalgame, il s’agit de le comprendre si on veut l’affronter et un jour le résoudre.                                                                                                                                       Plusieurs dizaines de milliers de morts à Gaza, en l’espace de quatre mois, sur un territoire de 360 km2. 50 à 60 % de bâtiments détruits. Un nombre incalculable de cadavres sous les décombres. Des milliers de blessés privés d’hôpitaux, amputés sans anesthésie, parfois sur des trottoirs. Des dizaines de médecins de tous pays, tous horizons, affirmant qu’il ne s’agit pas d’une guerre mais d’un projet d’anéantissement. Des centaines de milliers de Gazaouis sur les routes. Ces chiffres ahurissants n’agissent pas. Les images non plus. Il suffit pourtant de les voir trembler de peur, de froid, de faim, se traîner hagards, en troupeaux – comme des animaux, on nous avait prévenus – d’une zone, d’une tente à l’autre, de les écouter supplier Dieu, de lire dans leurs yeux le peu qu’ils peuvent encore, pour comprendre qu’il y a pire que de perdre la vie, c’est de continuer à vivre sans elle.                                                                                                                          Ajoutez à leur deuil et à leur effroi le poids de leurs mémoires. Pour les plus vieux : soixante-quinze ans d’exil, de dépossession, d’humiliations. De promesses non tenues. Pour les jeunes : les wagons des ans accrochés au même train. Au même déni, à la même solitude. Pourquoi, comment cela est-il de l’ordre du possible ? Quel esprit informé peut encore supposer un instant qu’il s’agit d’une guerre contre le Hamas ? A-t-on conscience en Europe, en France en particulier, que l’on est en train de pousser l’humanité dans le vide ?                                                                                     Prenons, pour gagner en visibilité, des dates lointaines : 1948. Le massacre de Deir Yassin perpétré par des combattants de l’Irgoun de Menahem Begin. Le village est vidé de ses habitants palestiniens. Hannah Arendt, Albert Einstein et bien d’autres s’en indignent dans le « New York Times » du 4 décembre 1948. 1953 : c’est l’année où des Palestiniens armés entrent dans le kibboutz Mishmar Ayalon et lancent une grenade sur une maison, tuant une femme et ses deux fils. Quatre mois plus tard, Ariel Sharon lance l’opération Shoshana, dite de représailles, contre le village de Qibya, en Cisjordanie. Soixante-dix civils y sont tués. Les deux tiers sont des femmes et des enfants. Les séquences et leur cruauté ne sont pas sans rappeler la tragédie du mois d’octobre dernier. Avec une même constante : les victimes sont innocentes de part et d’autre. Aucune consolation n’est à trouver dans la rivalité de la douleur. C’est la même. Ni dans le vocabulaire : les formes et les degrés de la haine sont sans mesures. La seule mesure qui vaille, c’est l’humanité. L’universelle. Celle qui ne connaît ni couleur de peau, ni frontière. Celle qui n’argumente ni ne détourne les yeux face au regard terrifié d’un enfant.                                                                       L’issue, nul ne sait, à l’heure qu’il est, où la trouver. Nous savons toutefois qu’elle passe par le principe de la distinction. Un occupant et un occupé, un colon et un colonisé, ce n’est pas la même chose. Pour aller vers la paix, il faut faire la différence. Et faire la différence, c’est combattre la fusion, de part et d’autre, y compris dans les mémoires, c’est faire cohabiter les récits. C’est renoncer à occuper le centre, c’est créer de la place pour l’autre. Dans « Haaretz » le 10 février dernier, Amira Hass écrit à propos de l’attaque de Rafah annoncée par Netanyahou : « Si près d’un million de Palestiniens doivent fuir pour la troisième ou quatrième fois vers Al Mawasi – le lieu déjà plein de Gazaouis réfugiés – la densité sera d’à peu près 62 500 personnes par kilomètre carré.  » Cela signifiera, précise-t-elle que les gens, parqués à la frontière avec l’Egypte, ne pourront se tenir que debout ou à genoux, condamnés à dormir à tour de rôle. C’est dire si la question de la « place » a viré au cauchemar. C’est dire si le « terrorisme » voyage tragiquement bien d’un individu, d’un peuple, d’une communauté à l’autre. C’est dire s’il peut prendre ou s’éteindre comme un feu, selon les rapports de forces politiques. C’est ce potentiel d’extinction qu’il faut imaginer pour faire avancer les pions de la paix. Revenons donc au débat tel qu’il s’enlise depuis des décennies.....                                                     Revenons, pour essayer de réfléchir, à la date funeste du 7 octobre. Sur le territoire d’Israël qui était, rappelons-le, la Palestine au début du siècle dernier, une troupe de Palestiniens armés, enragés, ont perpétré un effroyable massacre. Selon les estimations, 700 à 1 290 Israéliens ont été tués, parmi lesquels des centaines de soldats, policiers, secouristes. Du jamais vu dans l’histoire d’Israël. Deux cent quarante personnes ont été prises en otage. Les familles, les proches des otages vivent un calvaire sans nom. Le pays est sous le choc. Le monde entier. L’horreur de cette journée sanglante est vécue par les Israéliens et par un bon nombre de juifs dans le monde comme « le plus grand pogrom » depuis la Seconde Guerre mondiale. Compte tenu de l’histoire abominable qui habite et hante les mémoires, cela se comprend. Cela ne doit pas nous empêcher de voir autre chose.                                                                                                                                         Les pogroms du passé étaient menés par des communautés dominantes, avec l’assentiment des autorités, contre des populations juives, minoritaires et dominées. Ce cas de figure n’est pas applicable au 7 octobre. Les auteurs du carnage n’étaient pas en position dominante et ne savaient sans doute pas ce qu’est un pogrom. Ils sont d’ailleurs nombreux à y avoir laissé leur peau. Selon « Times of Israël » le 11 novembre 2023« 1 500 terroristes auraient été tués par les forces de l’attaque et de la riposte qui a suivi ». Ces hommes se sont déchaînés contre ceux qu’ils appellent tantôt « les forces occupantes », tantôt « les Israéliens », tantôt « les juifs ». Cette dernière appellation est insupportable. Il faut tout de même l’interroger. A partir du moment où l’on crée un « Etat pour les Juifs », on crée fatalement de la confusion au plan du langage et de la pensée. Il ne s’agit pas d’entériner l’amalgame, il s’agit de le comprendre si on veut l’affronter et un jour le résoudre....                          Le 7 octobre s’inscrit dans le cadre d’une effroyable dégradation régionale. Puisqu’il est impossible de tous les citer ici, en voici un déroulé succinct sur deux espaces limités : le Liban et la Palestine. Le massacre de Damour commis le 20 janvier 1976 par des milices palestiniennes contre des Libanais chrétiens. Pour la plupart des civils. Plusieurs centaines, parmi lesquels une trentaine de femmes et d’enfants égorgés. Celui de la Quarantaine, commis durant les mêmes quarante-huit heures par des milices chrétiennes contre des populations civiles palestiniennes, kurdes, bédouines ainsi que libanaises. En ont résulté des milliers de morts. Le quartier fut rasé.                                                                  Huit mois plus tard, en août 1976, des miliciens chrétiens détruisent le camp de Tall el-Zaatar, faisant à nouveau plus de 1 000 morts. Les oreilles des cadavres étaient collectées par des malades. Six ans plus tard, du 16 au 18 septembre 1982, le massacre de Sabra et Chatila, commis contre des réfugiés palestiniens par des milices chrétiennes dans une région sous pleine autorité israélienne, aurait fait entre 700 et 3 500 victimes. Femmes, enfants, vieillards, tout y passe.                              Prenons, pour gagner en visibilité, des dates lointaines : 1948. Le massacre de Deir Yassin perpétré par des combattants de l’Irgoun de Menahem Begin. Le village est vidé de ses habitants palestiniens. Hannah Arendt, Albert Einstein et bien d’autres s’en indignent dans le « New York Times » du 4 décembre 1948. 1953 : c’est l’année où des Palestiniens armés entrent dans le kibboutz Mishmar Ayalon et lancent une grenade sur une maison, tuant une femme et ses deux fils. Quatre mois plus tard, Ariel Sharon lance l’opération Shoshana, dite de représailles, contre le village de Qibya, en Cisjordanie. Soixante-dix civils y sont tués. Les deux tiers sont des femmes et des enfants. Les séquences et leur cruauté ne sont pas sans rappeler la tragédie du mois d’octobre dernier. Avec une même constante : les victimes sont innocentes de part et d’autre. Aucune consolation n’est à trouver dans la rivalité de la douleur. C’est la même. Ni dans le vocabulaire : les formes et les degrés de la haine sont sans mesures. La seule mesure qui vaille, c’est l’humanité. L’universelle. Celle qui ne connaît ni couleur de peau, ni frontière. Celle qui n’argumente ni ne détourne les yeux face au regard terrifié d’un enfant.                                                                                                                                               L’issue, nul ne sait, à l’heure qu’il est, où la trouver. Nous savons toutefois qu’elle passe par le principe de la distinction. Un occupant et un occupé, un colon et un colonisé, ce n’est pas la même chose. Pour aller vers la paix, il faut faire la différence. Et faire la différence, c’est combattre la fusion, de part et d’autre, y compris dans les mémoires, c’est faire cohabiter les récits. C’est renoncer à occuper le centre, c’est créer de la place pour l’autre. Dans « Haaretz » le 10 février dernier, Amira Hass écrit à propos de l’attaque de Rafah annoncée par Netanyahou : « Si près d’un million de Palestiniens doivent fuir pour la troisième ou quatrième fois vers Al Mawasi – le lieu déjà plein de Gazaouis réfugiés – la densité sera d’à peu près 62 500 personnes par kilomètre carré.  » Cela signifiera, précise-t-elle que les gens, parqués à la frontière avec l’Egypte, ne pourront se tenir que debout ou à genoux, condamnés à dormir à tour de rôle. C’est dire si la question de la « place » a viré au cauchemar. C’est dire si le « terrorisme » voyage tragiquement bien d’un individu, d’un peuple, d’une communauté à l’autre. C’est dire s’il peut prendre ou s’éteindre comme un feu, selon les rapports de forces politiques. C’est ce potentiel d’extinction qu’il faut imaginer pour faire avancer les pions de la paix. Revenons donc au débat tel qu’il s’enlise depuis des décennies. Plus exactement : depuis 1948. Beaucoup de juifs s’inquiétaient, avant et après cette date, de la création d’un Etat pour leur peuple dans un environnement étranger, voire hostile. Einstein, Freud, Aron, Benjamin et bien d’autres l’ont écrit en toutes lettres. Je crois pouvoir dire que si j’avais été juive, j’aurais pensé comme eux. Comment faire à présent pour que le peuple israélien puisse vivre en sécurité ? Comment faire pour que cette sécurité ne confie pas son sort aux seuls intérêts communs des régimes des monarchies pétrolières, de leurs clients et de l’économie israélienne ?  Le fond du problème, on le voit et à quel prix, ne se règle ni par les armes ni par l’argent. Si l’on veut traiter efficacement – c’est-à-dire sans intimidations et sans tabous – de cette plaie ouverte qu’est devenue « la terre sainte » et, autour d’elle, la région tout entière, il est indispensable d’en finir avec la rhétorique du déni. La méthode qui consiste notamment à qualifier d’antisémite quiconque s’oppose à la politique d’Israël est un mode de terrorisme intellectuel qui ne cesse d’épaissir la haine et de flinguer le dialogue.                                                                                                                                                             Infliger la même insulte à quiconque ose évoquer le pouvoir de lobbys pro-israéliens, tel que AIPAC aux Etats-Unis, relève de la même incohérence. On ne peut pas disposer de si considérables moyens de pression et demander à ceux qui en subissent les effets d’en ignorer la provenance. Quelle est la logique qui consiste à investir des millions dans des entreprises de propagande et à interdire qu’il en soit fait état ? Pourquoi le mot lobby serait-il présent dans le dictionnaire s’il est interdit de s’en servir dans une phrase ? Toutes ces descentes de police dans le langage font l’affaire des antisémites – leur nombre grandit de jour en jour – et frappent de censure, donc de lâcheté, plus d’un intellectuel.                                                                            Le sionisme et l’antisionisme sont par ailleurs des mots qui ne veulent plus rien dire. Cette page de l’histoire est tournée. Les Israéliens sont face au défi d’une nouvelle représentation de leur présence dans la région. Les Etats sont des solutions techniques. Il en faut. C’est une évidence. Mais la survie des peuples dans cette région brûlée ne passera pas par le rapport de force militaire. Il a prouvé son échec à répétition. Elle passe désormais par la découverte de nouveaux signaux de reconnaissance. Ceux-ci ne pourront émerger que dans le cadre d’un vaste mouvement de refondation au sein duquel nier l’existence de l’autre, rêver sa mort, cessera de ressembler à un exutoire.                                                                                                   Le Palestinien, Bassam Aramin, et l’Israélien, Rami Elhanan, ayant chacun perdu une fille dans le conflit, ont beaucoup à nous apprendre à ce sujet. Ils ont vécu et formulé, à eux deux, le vrai processus de la paix. Celui qui parvient à créer de l’altérité à partir d’un deuil inconsolable. Voilà, en peu de mots, ce que nous sommes tous appelés à faire dans cette partie du monde si nous voulons que nos malheurs et nos pertes servent d’engrais à l’avenir.   L’atrocité du 7 octobre ne constitue pas un événement isolable, sur le plan de l’histoire régionale. Elle est le résultat abominable de deux phénomènes : 1) la cécité d’une majorité d’Israéliens, entretenue par le vieil allié américain et par les nouveaux amis arabes qui, au mépris des faits, se sont tranquillement abrités derrière le diktat du fait accompli. Les Israéliens ont cru dans leur majorité qu’ils pouvaient vivre, commercer et danser normalement pendant qu’à leur porte un peuple nié par eux, écrasé, spolié de tous ses droits, n’y trouverait rien à redire ; 2) la Palestine n’a pas mieux réussi que les pays arabes voisins à se doter de pouvoirs capables de penser la libération des peuples. Ils ont choisi la corruption, l’abus, la violence.                                                              Nous en sommes maintenant au point où avoir peur et faire peur ne fait plus qu’un dans toutes les têtes. Deux urgences concrètes s’imposent : arrêter le feu et renverser les pouvoirs en place de part et d’autre. Non par les armes, mais par une pression massive du dedans et du dehors. Il faut pour cela que les consciences anesthésiées se réveillent. A commencer par les plus décisives : les israéliennes. Qu’elles cessent d’avaliser, ne serait-ce qu’au nom de leur survie et de la libération des otages, un régime barbare ; qu’elles réclament sa chute, qu’elles entendent les appels au secours désespérés de ceux qui vivent et travaillent à Gaza. Il n’y est plus seulement question d’hécatombe et d’intolérables souffrances, il y est question de l’enfer." [Par Dominique Eddé _ souligné par moi.]                        _____________