Une notion qui pose problème
Pleine d'ambiguïtés. Tout dépend dans quel sens on la prend Pout Tocqueville, elle constitue le fondement de la démocratie, qui doit être idéalement au service des individus, pour garantir les libertés particulières, assurer les conditions de leur développement. Un projet qui est toujours un idéal, un projet à construire et à améliorer. Comme il le dit à sa manière et à son époque: « L’individualisme est une expression récente qu’une idée nouvelle a fait naître. Nos pères ne connaissaient que l’égoïsme. L’égoïsme est un amour passionné et exagéré de soi-même, qui porte l’homme à ne rien rapporter qu’à lui seul et à se préférer à tout. L’individualisme est un sentiment réfléchi et paisible qui dispose chaque citoyen à s’isoler de la masse de ses semblables et à se retirer à l’écart avec sa famille et ses amis ; de telle sorte que, après s’être ainsi créé une petite société à son usage, il abandonne volontiers la grande société à elle-même. » Moi ou les autres?..Etre soi avec les autres ou aux dépends des autres? Liberté individuelle ou contraintes sociales et légales?...Faux problèmes, dans la mesure où les deux dimensions sont interdépendantes.v L'individu est à la fois le produit d'un héritage culturel et le producteur des relations qui le conditionnent. Se démarquer du milieu est à la fois une nécessité et un risque. La liberté est toujours à construire, entre acceptation et refus, entre obéissance et révolte, entre tradition et innovation, dans une histoire où les relations entre individus et société sont instables. ______ Le nomadisme d'aujourd'hui est un problème
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« Devenez vous-même en huit leçons ; réussissez votre vie en quinze… » L’individu est désormais sommé de s’épanouir. Mais l’injonction ne mérite-t-elle pas d’être questionnée à l’heure où les gens ne se sont jamais montrés si inquiets d’eux-mêmes ? D’où sort cet impératif qui oblige chacun à « réussir sa vie » ? Nos ancêtres ne vivaient pas avec ce poids là. Ils enduraient un autre joug, celui des obligations plus concrètement violentes, commandées par leur dépendance au collectif..." ( M. GAUCHET)
Les désarrois de l'individu-sujet, par Dany-Robert Dufour
"...A notre époque, celle des démocraties libérales, tout repose, en fin de compte, sur le sujet - sur l’autonomie économique, juridique, politique et symbolique du sujet. Or c’est dans le même temps que se rencontre, à côté des expressions les plus infatuées d’être soi, la plus grande difficulté d’être soi. Les formes de la destitution subjective qui envahissent nos sociétés se révèlent par de multiples symptômes : l’apparition de défaillances psychiques, l’éclosion d’un malaise dans la culture, la multiplication des actes de violence et l’émergence de formes d’exploitation à grande échelle. Tous ces éléments sont vecteurs de nouvelles formes d’aliénation et d’inégalité.
Ces phénomènes sont fondamentalement liés à la transformation de la condition du sujet qui s’accomplit sous nos yeux dans nos « démocraties de marché ». « Etre sujet », c’est-à-dire « être-soi » et « être-ensemble », se présente selon des modalités sensiblement différentes de ce qu’elles furent pour les générations précédentes..."
Alain Ehrenberg : La fatigue d'être soi : dépression et sociétéL'individualisme - Hansen- love philosophie
"...Il ne fait pas de doute qu'une des pentes des sociétés marquées par l'éclatement des encadrements familiaux et religieux ainsi que par l'argent-roi ne conduise à l'affaiblissement de la force d'obligation de tout un ensemble de devoirs, au primat des intérêts privés, au « après moi le déluge », autrement dit un individualisme sans frein, sans souci des autres, sans respect de la loi. Tout simplement un individualisme irresponsable.
Néanmoins comment ne pas voir qu'une autre pente existe qui mène les individus à combattre les turpitudes et le racisme, à se soucier des autres, prendre en compte l'avenir de la planète, lutter pour plus de justice et de solidarité ? C'est ainsi que l'individualisation extrême de nos sociétés n'a nullement empêché la multiplication des associations et des bénévoles. C'est ainsi que les individus sont toujours capables de s'indigner, de faire acte de générosité pour les plus mal lotis de la planète. Tel est l'individualisme responsable, individualisme que l'on peut qualifier de raisonnable, autolimité, respectueux du droit des autres. Ne diabolisons pas en bloc l'individualisme qui constitue le fondement d'une société de liberté et d'innovation. S'il y a un individualisme négatif, il existe aussi un individualisme positif qui signifie indépendance d'esprit, affirmation de la personnalité singulière, esprit d'initiative et de recherche. Et aussi respect de la loi et
des droits de l'Homme. L'individualisme n'est pas une malédiction, c'est aussi la chance d'une société plus humaniste, plus tolérante, plus inventive de l'avenir. L'école doit se proposer pour but non l'effacement de l'individualisme, mais le combat contre l'individualisme irresponsable afin de faire progresser l'individu libre et responsable. Aucune tâche n'est plus grande, plus cruciale pour l'avenir de nos sociétés que celle-là".(Lipovetsky) )
L'individu hypermoderne"...La société hypermoderne est une société où tout est exacerbé, poussé à l’excès, à l’outrance même : la consommation (Gilles Lipovetsky parle d’hyperconsommation), la concurrence, le profit, la recherche de jouissance, la violence, le terrorisme (on parle d’hyperterrorisme), le capitalisme (Laurent Fabius parlait récemment d’ « hypercapitalisme »). Elle est le produit de la mondialisation de l’économie et de la flexibilité généralisée qu’elle entraîne, avec ses exigences de performance, d’adaptabilité et de réactivité toujours plus grandes, induisant une modification profonde de nos comportements, une impossibilité de vivre des valeurs de long terme. La révolution survenue dans les technologies de la communication y joue un rôle essentiel, impliquant une mutation de notre rapport au temps et une obligation de réagir dans l’immédiat. Enfin, c’est une société marquée par le triomphe de la logique marchande et par l’éclatement de toutes les limites ayant jusque-là structuré la construction des identités individuelles, une société où, apparemment, tout est possible mais qui rejette impitoyablement ceux qui ne parviennent plus à suivre le rythme de ses exigences...."(Nicole Aubert)
Consommateurs ou/et citoyens ?
Individualisme de masse en Californie
"...Lorsque la production du particularisme devient la norme d’action, l’individualisme sous-jacent apparaît paradoxal, qu’il s’inscrive dans une logique de profit ou non. A San Francisco, les efforts faits pour se distinguer se rapportent à un système de valeurs prônant la différence partagé par les congénères. Du coup, dans les lieux où l’expression des différences est généralisée, elle devient presque insignifiante. L’indifférence envers les différences exprimées par d’autres devient elle aussi une norme de comportement..."
Christopher Lash : La culture du narcissisme (Climats)
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