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mercredi 29 novembre 2023

L'ami incontournable

Echec de la solution militaire.

      L'auteure québecoise de La Stratégie du choc s'exprime sur le conflit proche- oriental:                         Elle le souligne avec force:  La solution ne sera pas militaire dans le conflit actuel. Sous peine d'embrasement incontrôlable.

       ___Les USA sont, depuis le début, des partenaires privilégiés de l'Etat d'Israël. Malgré des pressions et des tensions passagères. Des relations spéciales se sont installées et l'aide économique et militaire est profonde et durable.  C'est pour cela que l'on peut attendre de Washington qu'il pèse d'un poids spécial sur la politique de Tel Aviv et sur le dossier épineux de la constitution de deux Etats, objectif toujours proclamé, mais devenu dans les faits de moins en moins crédible, surtout avec le développement de l'extrême-droitisation du Likoud en Israël. En tenant compte du lobbysme pro-israêlien aux USA, très actif,  où l'AIPAC a toujours pignon sur rue. L'aide US est considérable. Mais des signes montrent que de plus en plus de jeunes Juifs américains ne sont en phase avec la ligne officielle du pays.___ En tout cas, la position de l'oncle Sam sera décisive dans les temps qui viennent pour contraindre Israël( il en a les moyens) à respecter ses engagements et ses promesses, comme les multiples résolutions de l'ONU, à condition que les objectifs et intérêts à court terme dans la région soient mis de côté.                                     _______ Le papier d'un journaliste israëlien.__ Le point de vue de Dominique de Villepin. __ Voix dissidentes.__ Faits "divers" __ Divergences.________________


Point de vue:             « Concernant le Proche-Orient, la seule chose que le Congrès sache faire c’est d’augmenter l’aide à Israël. » M. Lee Hamilton, auteur de cette remarque, sait à quoi s’en tenir : il siège à la commission des affaires étrangères de la Chambre des représentants et, comme presque tous ses collègues, vote cette aide sans discuter. Aujourd’hui, plus de 3 milliards de dollars par an sont alloués à Israël, sous forme de dons, à titre d’aide économique et militaire. Ce qui représente près du quart de l’aide américaine à l’étranger et correspond à 700 dollars par Israélien et par an (l’Afrique, à l’exception de l’Egypte, reçoit 2 dollars par personne et par an). L’économie israélienne dépend très largement de cette aide qui couvre le prix de presque toutes les importations du pays et lui permet de continuer à vivre avec le beurre, les canons et les magnétoscopes....                                                       En ces temps difficiles, la solidarité est un des remèdes. Il y a eu un rassemblement en faveur d’un cessez-le-feu et d’une aide humanitaire immédiate, organisé par Jewish Voice for Peace et If Not Now, deux organisations juives qui sont en quelque sorte l’autre lobby juif et qui apportent un point de vue beaucoup plus jeune et progressiste. Il s’agissait de la plus grande manifestation de solidarité avec les Palestiniens organisée par des Juifs dans l’histoire des États-Unis. Il y avait des milliers et des milliers de gens rassemblés devant le Congrès.   ____Mais ce qui a été plus important encore, c’est la désobéissance civile : cinq cents personnes se sont rendues dans la rotonde du Capitole et ont été arrêtées, parmi lesquelles de nombreux rabbins et beaucoup, beaucoup de jeunes gens. Il s’agissait d’une véritable démonstration de solidarité. Le message en était : « Chaque vie est précieuse. » Il s’agissait véritablement d’un message de rejet total des attaques ciblées contre les civils, quel que soit l’endroit où ils vivent. Il ne s’agissait pas de ce double langage que l’on entend au Congrès, à savoir : « C’est l’horreur absolue quand les civils israéliens sont pris pour cible (oui, je suis d’accord avec ça), mais bombardez-les sans aucune distinction s’il s’agit de Palestiniens. » Je crois vraiment que c’était un jour historique. Ce fut un honneur pour moi d’y assister.____Il s’agissait également de soutenir une résolution de cessez-le-feu déposée par la Représentante Cori Bush [Démocrate Montana], mais signée par de nombreux autres membres de ce que l’on appelle le Squad [The Squad est le nom informel d’un groupe composé à l’origine de quatre femmes démocrates élues aux élections de 2018 à la Chambre des représentants des États-Unis, ils sont actuellement 8, 6 femmes et 2 hommes]. J’ai également consacré beaucoup de temps à des réunions avec différents membres du Congrès pour tenter d’obtenir l’adhésion d’un plus grand nombre à cette résolution de cessez-le-feu, ce qui a permis d’obtenir davantage de signatures. La pression a donc vraiment porté ses fruits. Mais c’est encore trop peu. Et l’appel à verser le sang est très, très fort ici. Ce fut une journée riche en émotions.....Cette année, 250 Palestiniens ont été tués, majoritairement en Cisjordanie, en raison de décisions du gouvernement israélien et des attaques des colons. Les médias grand public n’en font pratiquement pas état et Washington n’émet pratiquement aucun commentaire à ce sujet. Et puis nous avons eu cette attaque absolument horrible lancée par le Hamas. Résultat, on nous montre, en boucle, la profonde humanité israélienne – on nous montre des parents longuement interviewés, qui témoignent avec émotion de qui étaient leurs enfants et de la douleur que représente leur perte. Ils ont fermé toutes les voies pacifiques possibles qui auraient permis aux Palestiniens de revendiquer politiquement leur liberté, alors même que la rhétorique politique israélienne devenait de plus en plus sauvagement anti-palestinienne.  Mais ce contraste avec le mépris total pour la vie des Palestiniens est franchement grotesque. Et cela s’est poursuivi même lorsqu’Israël commençait son assaut massif dans toute la bande de Gaza, alors que nous décrivons des bombardements aveugles de zones civiles. Nous parlons de crimes de guerre. Et pire encore, franchement, je pense que le mot « terrorisme » est celui qui vient à l’esprit.               Il y a eu beaucoup, beaucoup, beaucoup de bombardements de Gaza par Israël auparavant, et lorsque les organisations de défense des droits humains mènent des enquêtes concernant ces bombardements, la conclusion à laquelle elles parviennent est qu’Israël s’est livré à des bombardements irresponsables, délibérés et aveugles, sur des zones civiles. Dans certains cas, y compris lors de la grande Marche du retour à Gaza en 2018, des tireurs d’élite israéliens visaient des journalistes, des médecins et des militants qui, de toute évidence, n’étaient pas armés. Le comportement d’Israël témoigne de son mépris pour la vie des Palestiniens.   Et pourtant, le narratif qui prévaut est que lorsque les Palestiniens tuent des civils, c’est parce qu’ils sont des monstres barbares. Et quand Israël le fait, « Oh, ça doit vraiment être un accident parce qu’Israël est bien trop gentil et civilisé pour faire cela intentionnellement. » Cette attitude traduit un niveau de racisme et de déshumanisation des Palestiniens qui, je pense, est très, très choquant pour beaucoup de téléspectateurs et, plus important encore que le seul impact émotionnel, cela nous empêche d’élaborer de meilleures politiques et de faire avancer les choses dans une meilleure voie parce que nous estimons qu’il existe une disparité fondamentale dans l’humanité des personnes des deux camps.  _____Parce qu’en fin de compte, au-delà de cette seule crise, je ne pense pas que nous trouverons une solution militaire à quoi que ce soit. Depuis de nombreuses décennies, Israël pense qu’il suffit de frapper les Palestiniens avec suffisamment de force, de les pressurer et de les confiner avec suffisamment de rigueur pour résoudre le problème, et qu’alors l’Etat d’Israël pourra vivre heureux à tout jamais. À maintes reprises, on a pu constater que cette approche ne fonctionnait pas. Elle ne fait qu’engendrer du côté palestinien le degré de désespoir qui conduit ensuite à une explosion comme celle à laquelle nous venons d’assister.____Ce dont nous avons réellement besoin, c’est d’un changement d’approche de la part d’Israël. Cela ne peut se faire que si les Américains font pression pour que l’on accepte le fait que la seule véritable issue à cette situation est celle qui permet aux Palestiniens et aux Israéliens de vivre protégés, en toute liberté et en toute sécurité. Cela implique de mettre fin au siège imposé par Israël – un système d’occupation et d’apartheid qui a rendu l’existence des Palestiniens complètement invivable....____ Je ne pense pas qu’une réponse militaire puisse s’attaquer à la racine de ce qui a conduit à ces attaques. Je pense qu’Israël crée chaque jour davantage de « terroristes ». J’étais à Gaza en 2008. J’ai rencontré beaucoup de petits enfants dans les ruines. J’ai rencontré des enfants dont les corps avaient été brûlés par du phosphore blanc. Ce sont les jeunes gens d’aujourd’hui. J’ai vu la même chose en Irak après l’invasion. Je pense que les Palestiniens ont un droit – que les peuples sous occupation ont un droit – le droit à la résistance armée, tant que les civils ne sont pas pris pour cible, parce que cela viole les Conventions de Genève, qui sont l’héritage de la Seconde Guerre mondiale. Je ne pense pas qu’une réponse militaire puisse s’attaquer de quelque manière que ce soit à la racine de ce qui a conduit à ces attaques. Nous disposons d’une législation internationale qui est l’un des héritages de l’Holocauste et des autres horreurs de la Seconde Guerre mondiale. Or, à l’heure actuelle, les responsables israéliens passent à la télévision et balaient tout cela d’un haussement d’épaules. On ne peut pas ignorer le droit international le matin et l’invoquer l’après-midi lorsque c’est Israël qui viole le droit international. Je parle toute la journée des crimes de guerre commis par Israël. Mais le problème avec les crimes de guerre, c’est qu’il faut appliquer les normes, quelle que soit la personne qui les viole. Il ne s’agit pas de dire : « De mon côté tout va bien. Et de ton côté ça ne va pas. » Ce n’est pas comme cela que ça marche.  Nous vivons une période vraiment périlleuse. Mais aujourd’hui, nous regrettons tous notre réaction aux attentats du 11 septembre, n’est-ce pas ? Car, en fin de compte, il s’agissait d’actes criminels auxquels nous aurions pu répondre simplement en les considérant comme des actes criminels et non en menant ces guerres massives qui n’en finissent pas, même si nos gouvernements refusent encore de l’admettre.   Je pense que nous sommes en train de répéter les mêmes erreurs. Je pense aussi qu’à l’instar du 11 septembre, alors que certains membres de l’administration de George W. Bush avaient un projet complet pour redessiner la carte du Moyen-Orient, ils ont saisi leur chance. Nous devons nous en souvenir et penser à des gens comme Benjamin Netanyahu, qui dirige un gouvernement d’extrême droite, qui a ouvertement épousé des principes génocidaires et qui a dit qu’il ne voulait plus s’occuper de Gaza. En fait, ils appellent à un nettoyage ethnique. Ils veulent s’emparer de toute la Cisjordanie, et c’est le moment ou jamais.....De nombreux membres du Congrès m’ont dit aujourd’hui qu’un « cessez-le-feu » était désormais considéré comme toxique. Il est considéré comme une absence de « soutien à Israël ». Et j’ai vu beaucoup de pancartes dans les couloirs qui disaient « Soutenez Israël », ce qui est synonyme de chèque en blanc. Les États-Unis ont fait la même chose après le 11 septembre. Soit vous êtes avec nous, soit vous êtes avec les terroristes ! C’est tout simplement un pur test de loyauté.   C’est scandaleux, car ces membres du Congrès américain ne devraient pas soutenir Israël si cela veut dire qu’il n’est mis aucune condition quant aux armes utilisées ou à l’aide éventuelle. Ils devraient se ranger du côté du droit international. La question est donc de savoir comment cela a pu se produire si rapidement.   Je pense que ce que le gouvernement israélien a fait très habilement et très rapidement, c’est de prendre un crime de guerre et de le décrire systématiquement et dès le départ comme un crime de haine, comme étant l’attaque la plus meurtrière contre les Juifs depuis l’Holocauste et les pogroms.  Il ne s’agit pas de minimiser. Je pense que les crimes de guerre sont extrêmement graves. Je pense que les massacres sont extrêmement graves. Mais ce n’est pas ainsi qu’ils ont été décrits. On les a sortis de tout contexte géopolitique et on les a intégré dans un narratif de traumatisme juif fondamental et d’antisémitisme dans le cadre duquel il est impossible, par nature, de raisonner. Je ne vois pas d’autre explication au fait que les gens ont si peur de ne pas se ranger du côté d’Israël. Et ça, c’est de la communication intelligente.                                              Je voudrais juste ajouter un autre élément qui, selon moi, joue un rôle, à savoir que les territoires occupés sont un laboratoire pour ce qu’Israël appelle « la sécurité sans la paix ». C’est la raison d’être des murs, des points de contrôle et du siège. En gros, il s’agit de dire : « Nous n’avons pas besoin de paix quand nous pouvons endiguer ».  Lorsque le Hamas franchit un poste de contrôle arabe, franchit un mur et inflige un tel nombre de pertes civiles, c’est tout le modèle qui échoue. Mais il ne s’agit pas seulement du modèle israélien. Toutes les puissances occidentales, et on peut y ajouter l’Inde, veulent la sécurité sans la paix. Que pensez-vous qu’il se passe à nos frontières ? Nous vivons dans un monde incroyablement inégal qui devient de plus en plus militarisé, de plus en plus surveillé – et une grande partie de cet arsenal, nous l’achetons à Israël. Je pense que cela explique aussi en partie la rapidité avec laquelle toutes les puissances occidentales sont venues affirmer que nous protégerions le dôme de fer. Nous sommes inquiets pour nos propres dômes de fer. Et il est utile d’élargir le débat au-delà d’Israël et de la Palestine.           _____Omar Baddar : Je pense que le deuxième aspect de la question réside dans la manière dont les Républicains utilisent constamment Israël comme un sujet de clivage pour contrer les Démocrates. Ces derniers ne cessent d’essayer de dire : « Non, non, non, nous ne sommes pas anti-Israël. » Les deux partis, dans l’ensemble, soutiennent massivement Israël, au point de dire : « Soutien inconditionnel, faites ce que vous voulez. » On est face à une situation qui a vu la politique israélienne s’orienter de plus en plus vers la droite. Elle est devenue de plus en plus extrême. On pourrait penser que cela briserait naturellement la dynamique aux États-Unis, mais ce n’est pas le cas.  Si les Nations unies tentent de voter contre [Israël], nous interviendrons et mettrons notre veto à chaque fois. Si les Palestiniens s’adressent à la Cour pénale internationale pour tenter d’obtenir que les responsables rendent des comptes, nous exercerons une pression énorme sur la Cour pénale pour qu’elle n’engage pas de poursuites contre les crimes de guerre israéliens. Ils ont fermé toutes les voies politiques pacifiques possibles qui auraient permis aux Palestiniens de revendiquer leur liberté, nous poussant vers un contexte de violence, tandis que la rhétorique politique israélienne est devenue de plus en plus droitière, brutalement anti-palestinienne – et pourtant les Démocrates ne cessent d’être eux aussi poussés de plus en plus vers la droite.  Et puis, quand un incident comme celui-ci se produit, ce n’est pas vraiment une surprise si nous nous retrouvons dans un climat politique dans lequel tout le monde va s’aligner. Même face à une rhétorique littéralement génocidaire et alors même que observons que des actions génocidaires ont commencé à Gaza, nous sommes coincés. Il est franchement exaspérant de s’apercevoir que la conscience politique américaine ne s’éveille pas à un moment comme celui-ci pour dire : « Ralentissez, nous comprenons bien que c’est quelque chose d’énorme. C’est vraiment horrible. Mais priver un million d’enfants de nourriture, de carburant et d’eau n’est pas acceptable. » Cela devrait être un principe incontournable, or il semble bien faire défaut à notre establishment politique.  Je pense que le climat est extrêmement inquiétant et je suis très reconnaissante à des groupes comme If Not Now et Jewish Voice for Peace qui ont donné une voix à ceux qui n’en ont pas et qui sont intervenus. Ce sont des juifs américains progressistes qui disent : « N’instrumentalisez pas notre douleur pour la transformer en arme pour commettre des crimes contre d’autres populations. » C’est ce message qui, je l’espère, réveillera l’establishment politique américain et l’amènera à comprendre que la trajectoire actuelle est profondément moche et inquiétante et qu’elle nous mènera à un désastre total....."   [Souligné par moi]

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