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lundi 26 août 2019

Congés (non payés)


Chiffres en question

De la relativité des sondages
                                                  Quantité et qualité.
                                                                            L'utilisation des mathématiques, notamment statistiques, dans les sciences humaines, est souvent sujette à caution.
    Surtout dans le domaine de l'économie, où les données ne sont pas neutres, les paramètres sont souvent partiels ou biaisés , et parfois les intentions frôlent la distorsion, quand l'objet d'étude est particulièrement sensible, mettant en question des choix politico-économiques..
  C'est ainsi que la notion de taux de chômage est régulièrement débattue, ne faisant pas l'unanimité, loin de là, n'étant pas forcément un indicateur pertinent de la bonne santé de l'économie.

    Quand on parle de l'emploi et des variations du taux de chômage, on se trouve sur un terrain sensible, parfois miné, où domine la langue de bois, les parti-pris et parfois les manipulations. Pour des raisons souvent évidentes d'auto-justification. Les données officielles, à un moment donné, sont rarement fiables. Quand on évoque le petit nombre de chômeurs aux USA ou en Allemagne, on omet souvent de dire quel type d'emploi on évoque.
            _______________L'économiste R.Godin nous invite à la prudence dans le maniement des données statistiques concernant le chômage:
      " D'après la publication par l’Insee la semaine passée du taux du chômage pour le deuxième trimestre 2019, le gouvernement et ses partisans se sont accordé un satisfecit appuyé. L’institut de Montrouge a annoncé le 14 août un taux de chômage moyen de 8,5 % entre avril et juin, soit 0,4 point de moins qu’il y a un an pour le même trimestre de 2018. En France métropolitaine, le taux atteint 8,2 %, soit 0,2 point de moins qu’au premier trimestre et 66 000 chômeurs de moins. Les défenseurs de la politique gouvernementale de flexibilisation du marché du travail et de baisse de son coût ont alors crié à la preuve du succès de ces mesures. La ministre de l’emploi, Muriel Pénicaud, s’est même fendue en pleins congés du gouvernement d’un communiqué pour se féliciter des résultats de « l’action résolue et cohérente du gouvernement, et notamment des transformations du code du travail, de l’apprentissage et de la formation professionnelle ». L’économiste-conseiller d’Emmanuel Macron Gilbert Cette a proclamé que désormais la France pouvait voir son taux de chômage baisser avec une croissance assez faible et qu’il fallait y voir un effet des réformes.
    Pourtant, les choses pourraient être beaucoup moins simples qu’il n’y paraît. L’éditorialiste d’Alternatives économiques Guillaume Duval a ainsi souligné avec justesse que la baisse du deuxième trimestre était en réalité due à un recul du taux d’activité, qui est passé de 72,2 % à 72 % de l’ensemble de la population des 15-64 ans. Autrement dit, il y a moins de chômeurs parce que de plus en plus de personnes renoncent à chercher un emploi et basculent dans l’inactivité. Voilà qui, effectivement, relativise le « succès ». Non sans raison, d’autres ont aussi mis en avant le fait qu’une baisse du chômage accompagnée d’une faible croissance est le signe inquiétant à moyen et long terme d’une dégradation de la productivité de l’économie. Certains, enfin, pouvaient pointer la progression du « halo du chômage », autrement dit du nombre de personnes qui ne sont pas intégrées dans les statistiques du chômage parce qu’officiellement inactives mais qui cherchent néanmoins un emploi : 63 000 de plus, soit autant que la baisse officielle du nombre de demandeurs d’emploi.
        Certes, on pourrait s’interroger sur une forme de mauvaise foi liée à ces contestations. Lorsque le thermomètre ne donne pas une mesure satisfaisante, on peut être tenté de le briser ou de le relativiser par d’autres types de mesures. Mais en réalité, ces contestations mettent bien en évidence le fait que le taux de chômage pourrait ne plus être le bon instrument, ou du moins ne plus être le seul, pour mesurer la réalité du marché du travail. Rappelons que ce taux mesure la proportion dans la population active du nombre de personnes sans emploi, immédiatement disponibles pour occuper un poste et qui recherchent activement un emploi. Au sens du Bureau international du travail (BIT), être « sans emploi » signifie ne pas avoir travaillé une heure par semaine.Les mutations du travail dans le contexte néolibéral tendent progressivement à rendre la réalité décrite par ce « taux de chômage » très incomplète pour évaluer tant l’activité économique que la situation sociale d’un pays.
            Au reste, la question n’est pas que française. Depuis une dizaine d’années, le chômage a beaucoup baissé dans bien des pays occidentaux, notamment dans trois grandes économies : les États-Unis, l’Allemagne et le Royaume-Uni. Pourtant, ces baisses s’expliquent moins par des performances économiques exceptionnelles, puisque, globalement, les taux de croissance sont restés plutôt modérés, que par des modifications majeures du marché du travail lui-même.
     Le cas de l’Allemagne est de ce point de vue intéressant. En septembre 2017, une étude de l’économiste Michael Burda de l’université Humboldt de Berlin attribuait le « miracle de l’emploi » allemand à deux phénomènes : le développement du temps partiel qui a permis une réduction de facto du temps de travail et la modération salariale. Autrement dit : le taux de chômage a baissé parce que les travailleurs allemands ont travaillé moins pour moins cher. Entre 2008 et 2018, selon les données de l’institut IAB de Nuremberg, le volume global d’heures travaillées a ainsi progressé de 8,8 %, mais le nombre de personnes en emploi a, lui, crû de 11,7 % et le taux de chômage a, de son côté, reculé de 8,1 % à 3,5 %. Autrement dit, l’évolution du taux de chômage a donné une vision déformée de la performance globale de l’économie allemande. Pour ne rien dire de la situation sociale : avec un taux de chômage près de trois fois moins élevé, l’Allemagne affiche un taux de personnes en risque de pauvreté selon Eurostat plus fort que la France (16,1 % contre 13,7 % pour la France en 2017). Mieux même : ce taux a progressé à mesure que le chômage baissait…
       Aux États-Unis, le taux de chômage a aussi reculé spectaculairement, passant de 10 % en octobre 2009 à 3,6 % actuellement. Là encore, l’apparence du plein emploi est complète. Sauf que, en regardant de plus près, on constate que le nombre d’employés de 15 à 64 ans n’a progressé en dix ans que de 1,15 million de personnes alors même que la population des 15-24 ans a progressé de 9,1 millions d’individus ! Difficile dans ce cadre de parler comme on l’entend souvent de « plein emploi » outre-Atlantique. Autrement dit, le taux de chômage ne reflète que très imparfaitement ici aussi la performance économique et sociale du pays. Pire même, il est le reflet de la très faible croissance de la productivité américaine depuis la crise. Les exemples de ce type pourraient être multipliés. Progressivement, le taux de chômage peine de plus en plus à remplir son rôle d’outil de mesure de l’efficacité d’une économie.
      Voilà trente ans, un taux de chômage bas signifiait presque à coup sûr que l’économie tournait à plein régime et pouvait ainsi créer des emplois. Il était aussi une forme de mesure du bien-être car l’emploi se traduisait par une sécurité financière accrue. La raison en était simple : l’emploi créé l’était alors à temps plein, il était protégé, et à durée indéterminée. Le taux de chômage était donc une mesure de prospérité et de bien-être. Désormais, l’emploi étant plus flexible et précaire, le taux de chômage tel que défini par le BIT n’a plus la même signification. Un travailleur à temps partiel ou qui a travaillé quelques jours peut cesser d’être statistiquement chômeur alors qu’il est toujours à la recherche d’un emploi et qu’il dispose de faibles revenus. Le plein emploi statistique ne dit alors plus forcément grand-chose de l’état de l’économie.
          C’est dans ce contexte que s’inscrit un des principaux débats qui secoue aujourd’hui la science économique autour de la « courbe de Phillips » et du taux de chômage naturel. En 1958, l’économiste néo-zélandais William Phillips avait établi à partir des données britanniques une courbe qui porte depuis son nom et qui décrit une relation inverse entre chômage et inflation. Plus le chômage est bas, plus l’inflation augmente via les salaires. Plus il est élevé, plus les prix tendent à rester sages. Cette courbe a connu de nombreuses interprétations, mais le consensus utilisé par les banques centrales depuis les années 1980 était que l’on devait faire un choix, en conséquence, entre l’inflation et le chômage. Or, sous l’influence des monétaristes, on a donné la priorité à la lutte contre l’inflation en cherchant par la politique monétaire à parvenir à un taux de chômage « naturel » appelé « NAIRU » (« non-accelerating inflation rate of unemployment »). À ce niveau (théorique) de chômage, l’inflation n’est plus censée accélérer parce que le marché du travail a trouvé son équilibre. Mais ce NAIRU n’est pas le plein emploi : pour que les deux notions coïncident, il faut, selon les économistes, réaliser des « réformes structurelles » pour permettre un fonctionnement du marché du travail parfait et donc un équilibre optimal.
      Depuis quarante ans, ces deux notions sont l’alpha et l’oméga des politiques économiques et monétaires. Les réformes défendues par Emmanuel Macron n’ont pas d’autres ambitions que l’application de cette théorie. Puisque le taux de chômage français est élevé, il faut abaisser le taux d’équilibre par des réformes, ce qui revient à faire jouer davantage l’offre et la demande. D’où la flexibilisation du marché du travail qui, selon cette théorie, permettra de faire baisser le taux de chômage et, donc, en parallèle, à mesure que l’on se rapproche du taux d’équilibre, de renforcer les revendications salariales des individus. Aussi Muriel Pénicaud peut-elle se réjouir de la baisse du taux de chômage qui serait bien une mesure du bien-être puisque l’emploi serait alors plus abondant et mieux rémunéré. Mais tout ceci est théorique. Car, dans les faits, on peine à identifier la courbe de Phillips et le NAIRU. On ne compte plus, en effet, les études sur la « mort » de la courbe de Phillips, pour la nier ou l’avancer. Une chose semble cependant certaine : l’exemple étasunien ou allemand laisse perplexe.
    Car, dans ces pays, le plein emploi ne s’est pas accompagné de pressions salariales fortes. Loin de là. Aux États-Unis, le taux d’inflation a reculé pendant les cinq premières années de la baisse du chômage. Il est ensuite resté très modéré. Le taux d’inflation actuel est de 1,8 % pour un taux de chômage de 3,6 %, alors même qu’en 2008 avec un taux de chômage de 4,5 %, la hausse des prix dépassait 3 %. Le phénomène est encore plus frappant en Allemagne, où on ne constate aucune accélération de l’inflation au cours des dix ans qui ont conduit le pays au plein emploi. Après une rapide envolée en 2016, la croissance des salaires réels allemands s’est stabilisée autour de 1 % et tend même à s’affaiblir. Fin 2018, le taux de chômage allemand a atteint son niveau de 1980, 3,3 %. Mais en 1980, l’inflation hors énergie et alimentation (celle donc qui peut être attribuée aux salaires) était de 5,3 % contre 1,2 % en 2018…
...Le taux de chômage classique ne semble donc plus réellement pertinent. Il n’est qu’un moyen très imparfait de définir l’état d’une économie et, encore plus, un bien-être social. Un plein emploi statistique acquis à coups de modération salariale, de précarisation de l’emploi et de réduction du temps rémunéré de travail est en réalité une machine à creuser les inégalités. Là encore, les exemples allemand, américain et britannique le montrent assez clairement. Il y a alors un paradoxe : plus le taux de chômage est bas, plus le risque de mécontentement social peut être important. Dans une tribune récente publiée dans Le Monde, la sociologue Dominique Méda rappelle que « les mauvais emplois ont un coût social » et politique. Or les réformes néolibérales font le choix du plein emploi statistique au détriment de cette qualité de l’emploi. Tout est bon, tant qu’on a un travail, même précaire, même mal payé. Et, pour enfoncer le clou, on réduit les indemnisations chômage afin que cette vérité soit vérifiée. La pierre angulaire des réformes Hartz en Allemagne était précisément la réduction de la durée d’indemnisation et le renforcement de l’obligation de prendre un emploi pour les chômeurs de longue durée. C'est la voie suivie avec la réforme du chômage par le gouvernement français. Mais ce chemin est des plus dangereux. On comprend aisément pourquoi : le mécontentement ne peut que naître du contraste entre une situation présentée comme idéale, le plein emploi, et la réalité sociale vécue.
    Il serait donc urgent de relativiser le taux de chômage et de cesser de le voir comme un indicateur de performance économique et de bien-être. Il est, au contraire, utile de le compléter par d’autres données : taux d’activité, salaires, mesures des inégalités, qualité des emplois. Mais la pratique politique est bien loin d’une telle nuance. L’obsession du taux de chômage, la promesse que les délices de la prospérité accompagnent sa baisse, tout cela est, il est vrai, politiquement plus vendeur. Cela permet aussi de mieux « vendre » la poursuite des réformes néolibérales qui pourraient pourtant bien être à l’origine de l’inefficacité du taux de chômage… Il y a donc fort à parier que le gouvernement continuera à n’avoir comme objectif que la baisse de ce taux. Quel qu’en soit le risque."
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dimanche 25 août 2019

Ressources humaines


Silence, on licencie
                              Ressources humaines en question.
     On se souvient du film de Laurent Cantet qui mettait en évidence au coeur d'une entreprise les ravages de l'idéologie managériale telle qu'elle s'est installée dans les grands groupes industriels surtout depuis les années 1980, dans le contexte de la financiarisation progressive des entreprises soumises à la loi de la mondialisation, d'une concurrence exacerbée, de rachats de secteurs de production dans l'intérêt privilégié des actionnaires grands et petits.    (*)
      Hier, ce sont les pratiques inavouables des grands groupes qui sont dénoncées par un ancien DRH, à partir de son expérience personnelle.
   L'auteur met en avant le caractère inhumain de certaines gestions du personnel (comme on disait autrefois), à seule fin de procéder à une sélection le plus souvent éliminatoire, où le dégraissage prime sur le reste, dans une logique qui est souvent, paradoxalement, loin de l'intérêt bien compris de l'entreprise. "Certaines méthodes deviennent même contre-productives, telles que la sous-notation forcée, qui établit un quota de personnes à licencier, même si c’est dommageable pour la bonne marche de l’entreprise. Il faut immoler pour contenter le dieu Chiffre. Cette pratique, le forced ranking, venue des États-Unis, a été condamnée par la justice en France en 2013. Illégale, elle est donc inavouable, mais reste encore pratiquée, permettant notamment départs volontaires et gains de compétitivité.
  Didier Bille lâche le morceau et avoue avoir licencié plus de 1.000 salariés, décrivant un véritable délitement du lien social en entreprise, reflet ce qui se passe dans nos sociétés. Les hommes ne sont plus au centre du système.
   Il sont devenus des ressources Au terme usuel de « ressources humaines », relativement impersonnel, on revient aux sources de ce qui constitue l’individu, en suggérant que l’on ne gère pas des « ressources humaines » (interchangeables, par nature), mais des « hommes », des êtres uniques dotés chacun d’attentes, d’aspirations, de leur personnalité propre et de leurs qualités intrinsèques, qui attendent d’être valorisées et de trouver leur place et leur plein épanouissement au sein de la structure d’accueil."
       Une  folle dérive, qui ne vise que le quantifiable, au sein d'une logique souvent arbitraire et inhumaine.
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     (*)    Une gestion barbare mais à visage humain. "... Ressources humaines constitue une illustration parfaite de quelques ouvrages récents dénonçant les dégâts de l'idéologie managériale, à l'oeuvre depuis le début des années 80. Le sociologue Jean-Pierre Le Goff parle ainsi de «barbarie douce» (1). «La barbarie telle qu'on l'entend aujourd'hui implique une violence et une cruauté qui s'appliquent à des régimes totalitaires et dictatoriaux. Celle qui sévit dans notre société apparaît aux antipodes. Elle ne laisse guère apparaître les signes d'une agressivité première, n'agit pas par la contrainte externe et la domination. ["] L'"autonomie, la "transparence et la "convivialité sont ses thèmes de prédilection. Elle s'adresse à chacun en ayant de cesse de rechercher sa participation, et ceux qui la pratiquent affichent souvent une bonne volonté et un sourire désarmants.» Résultat: «l'entreprise individualisée», comme la nomme Jean-Pierre Le Goff, est peuplée d'employés parfaitement «autonomes», qui, parce qu'ils sont «consultés», «responsabilisés» pensent que ce qui est bon pour l'entreprise est bon pour eux. Le Goff rend responsable de cet état de fait «la gauche moderniste» issue de 1968 qui, en réhabilitant l'entreprise et en stimulant les valeurs d'autonomie, de créativité, bref des «ressources humaines», a accru (à son insu?) la violence molle et le brouillage des cartes. Le jeune héros du film incarne en cela un digne héritier désarmé des doctrines du business cool. Il met en oeuvre une consultation, donc il croit bien faire, mais celle-ci révèle plus tard qu'elle cache un plan de licenciement.
     Cette rupture du «contrat social» (et moral) le fait basculer dans la défiance. Le «miroir aux alouettes» entrepreneurial qu'on lui avait tendu pendant si longtemps (son père en premier) se révèle une belle entourloupe. Les sociologues Luc Boltanski et Eve Chiapello en développent certains aspects dans le Nouvel esprit du capitalisme . «Les situations de travail en entreprise aujourd'hui sont de fait particulièrement susceptibles de faire l'objet d'accusation de "manipulation, expliquent-ils. En effet, si le management consiste toujours à "faire faire quelque chose à quelqu'un, la manipulation et le soupçon de manipulation se développent quand il devient difficile de recourir aux formes classiques de commandement, consistant à donner des ordres ["] Or, les vingt dernières années ont plutôt été marquées par l'affaiblissement des ordres conventionnels et des relations hiérarchiques ["] Dans un tel contexte, on est amené à substituer au commandement hiérarchique dans le plus grand nombre de cas possibles des pratiques visant à amener les gens à "faire d'eux-mêmes, et comme sous l'effet d'une décision volontaire et autonome, ce qu'on désire "leur voir faire.»
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samedi 24 août 2019

Rentrée de toutes les incertitudes?

Sur de nombreux plans.
                            Voilà une rentrée qui laisse perplexe.
                                     Le moins que l'on puisse dire est que l'horizon est assombri. Même les économistes perdent pied.
  Aucune ligne de lecture claire du proche avenir ne peut être dégagée.
   Que ce soit à Washington, à Pékin, à Londres, à Rome, voire même à Berlin, le climat a bien changé, et chez nous les turbulences peuvent revenir rapidement. L'irrationnel domine, quand ce n'est pas une forme de "folie" inquiétante.
  Vivons-nous une crise inédite des institutions internationales et des relations d'après-guerre froide?
   Vers quelles formes de redistribution du pouvoir à l'échelle de la planète nous acheminons-nous?
   Parler d'un tournant de l'histoire serait sans doute abusif, mais comme Diogène, on cherche une voie...
   Les incertitudes au niveau des finances mondiales se ravivent. L'affolement des marchés financiers n'est qu'un indicateur de risque, accentué par la masse des capitaux erratiques et les tendances baissières des intérêts, nullement rassurantes.
  Elles sont accentuées par ce qu'on appelle la crise du multilatéralisme, ce qui n'est pas en tous points négatif à terme. De nouvelles formes de collaborations reste à trouver pour dépasser une mondialisation aveugle et un système financier potentiellement explosif.
  Mais rien n'indique qu'on en prenne rapidement le chemin, au vu des turbulences annoncées.
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vendredi 23 août 2019

Gendarme du monde

La loi de Washington      (bis repetita)
                                    C'est plus que jamais l'occasion de le rappeler..
                                                Malgré les apparences et les déclarations officiellement atlantistes ou e circonstances,, beaucoup de chefs d'Etat ont ou ont eu parfois la dent dure envers la politique de Washington, qui ne ménage pas les coups bas commerciaux et politiques.
         A commencer par le Général de Gaule, clairvoyant sur les ambitions impériales des USA de l'après-guerre et plus tard les déclarations de Mitterrand concernant les ingérences de certains services américains dans l'Etat français:      Au crépuscule de son ultime mandat, il confiait à Georges-Marc Benhamou une observation que le journaliste retranscrirait dans son livre Le dernier Mitterrand«La France ne le sait pas, mais nous sommes en guerre avec l’Amérique. Oui, une guerre permanente, une guerre vitale, une guerre économique, une guerre sans mort apparemment. Oui, ils sont très durs les Américains, ils sont voraces, ils veulent un pouvoir sans partage sur le monde. C’est une guerre inconnue, une guerre permanente, sans mort apparemment et pourtant une guerre à mort.» Bien que le premier président socialiste de la Ve République ait toujours traîné une réputation d’atlantiste, des missiles Pershing en Europe à l’engagement français dans la guerre du Golfe, il a souvent eu la dent assez dure pour mordre en plein dans la politique américaine. En 1983, énervé par la flambée du dollar et la hausse des taux d’intérêts américains, il s’en prend à la Maison-Blanche:  «Les États-Unis nous font payer leur chômage et leur déficit. C’est nous qui permettons à Reagan de continuer une politique qui nous écrase »
       Aujourd'hui, les menaces à peins voilées concernant les pays continuant à commercer avec l"'ennemi déclaré", l'Iran diabolisé, qu'il faut affaiblir un peu plus par un embargo encore plus dur, se font avec Trump plus pressantes et plus cyniques. Pires que celle de Bush, qui avant la malheureuse aventure irakienne, s'était acharne à ruiner le pays par un embargo mené avec la complaisance de Tony Blair.
   La puissance économico-militaire de Washington depuis 1945 s'est imposée, grâce à la suprématie du dollar, la monnaie du vainqueur devenue monnaie mondiale. C'est notre monnaie, c'est votre problème, disait-on à la Maison Blanche.
      Le gendarme du monde s'imposait sur tous les plans, dans le contexte d'une guerre froide, qui facilitait ses intérêts. En 2006, la population américaine franchit le cap des 300 millions d'habitants. Toujours première puissance économique du monde, le pays est toutefois devenu de plus en plus dépendant de capitaux étrangers, notamment chinois, pour financer son économie. Profondément ébranlé par le 11 septembre, il a adopté des lois anti-terroristes qui entachent son image de pays des libertés. Après un « siècle américain », le XXIe siècle s'ouvre, non comme une phase de déclin, mais plutôt de repositionnement des États-Unis.
      La menace est claire, passant outre les souverainetés nationales: Washington donne de 3 à 6 mois à Renault, PSA et aux autres entreprises françaises pour "sortir" d'Iran. L'Allemagne est aussi visée.
...Toute entreprise qui continuera à commercer avec Téhéran sera passible de sanctions. « Ceux qui font des affaires en Iran auront un délai pour pouvoir défaire leurs engagements. Ceux qui n’auront pas renoncé à leurs activités impliquant l’Iran à la fin de ce délai s’exposeront à de graves conséquences », a indiqué la Maison Blanche. L’ambassadeur américain Richard Grenell en Allemagne, tout juste installé à Berlin, a été encore plus clair : « Comme Donald Trump l’a indiqué, les sanctions américaines viseront les secteurs essentiels de l’économie iranienne. Les groupes allemands qui font du business en Iran doivent suspendre leurs activités immédiatement », prévient-il dans un tweet....
  Les fidèles alliés risquent une nouvelle fois de se plier aux oukases impériaux.
      L'exterritorialité des lois américaines jouent une nouvelle fois à plein. Le droit du commerce se décide Outre-Atlantique.  Même Pïerre Lellouche est assez clair: ....nous sommes devant un mur de législations américaines extrêmement touffues, avec une intention précise qui est d’utiliser le droit à des fins d’imperium économique et politique dans l’idée d’obtenir des avantages économiques et stratégiques. » Ce 5 octobre 2016, le député Les Républicains Pierre Lellouche ne mâche pas ses mots devant les commissions des affaires étrangères et des finances de l’Assemblée nationale, à Paris. Il y présente le rapport de la mission d’information sur l’extraterritorialité du droit américain (1). Un rapport dont la lecture « fait froid dans le dos », selon les termes du député socialiste Christophe Premat.
    Ces sanctions extrateritoriales ont "en quelques années" coûté 16 milliards de dollars à des entreprises européennes ayant violé des embargos américains contre certains pays, et 6 milliards de dollars à celles jugées coupables de corruption, hors du territoire américain....
        Dans cette guerre économique, l'impuissance des Etats européens est patente. On a pu le vérifier récemment en France dans l'affaire Alstom.
       Mais la situation va forcément atteindre un jour un point de rupture. La montée de la puissance de la Chine et sa volonté de donner au yuan toute sa place dans les échanges internationaux risquent de changer la donne assez vite, non sans quelques soubresauts.
     Que fera l'Europe divisée? Cette crise risque de ne pas suffire à mettre hors la loi le système inique qui la pénalise._____
          Note Point de vue:

        EXTRA-TERRITORIALITE DU DROIT AMERICAIN :  ETUDE D’HERVE JUVIN

Dernièrement, un patron de PME française – qui rentre tout juste de Téhéran – est convoqué à l’ambassade des Etats-Unis à Paris. Il s’y voit signifier qu’il ne doit pas dépasser un certain niveau d’investissement en Iran sous peine de se voir interdire le marché américain… A peine sorti du 2, avenue Gabriel, ce dernier alerte aussitôt le Quai d’Orsay qui… ne lui a jamais accordé de rendez-vous…
Il y a quelques années : Total, Siemens, PPR, Alcatel, Bolloré parmi tant d’autres ; en 2015 : BNP Paribas, Alstom et le Crédit Agricole ; en 2016 : Sanofi et Airbus ; demain, Mercedes, Renault, DCNS, Vinci, Safran, Veolia sommés de répondre aux convocations de la justice américaine !
Une banque européenne vient de décider de clore toutes ses opérations dans 18 pays et a mis sous surveillance ses activités dans 12 autres. Deux banques françaises considèrent qu’il est judicieux de réduire au minimum leurs relations avec une quarantaine de pays, dont plusieurs pays d’Afrique francophone, d’Asie ou d’Amérique latine ; leur contrôleur américain pourrait y trouver à redire. Les entreprises françaises qui veulent travailler avec ces pays sont priées de passer par les banques américaines. Plusieurs centaines de sous-traitants d’une entreprise industrielle européenne majeure ont fait l’objet d’enquêtes de la justice américaine et se sont vus contraintes de remettre tous les documents commerciaux et techniques relatifs à leurs relations avec leurs clients.
Sur le site du Department of Justice (DOJ), qui la tient scrupuleusement à jour, la liste des procédures engagées contre des entreprises non américaines s’allonge. Et le bras armé du procureur américain frappe désormais à peu près partout dans le monde, dès lors que le dollar, un serveur américain, une puce électronique ou un satellite de télécommunication, lui donne matière à poursuivre – fonde sa compétence universelle.
Hervé Juvin : « l’application extra-territoriale du droit américain a détruit des entreprises françaises (Alcatel et Alstom notamment), elle a permis d’extorquer des milliards d’euros à des entreprises européennes. Elle s’apprête à attaquer Sanofi, Airbus, Safran et bien d’autres. Elle a pour prétexte la lutte anti-corruption, le respect des embargos américains, le combat anti-terroriste, pour objectif affiché l’efficacité économique, la moralisation des affaires, l’établissement des conditions d’une concurrence libre, ouverte et équitable partout dans le monde. Tout cela à l’appui d’un impérialisme juridique grandissant, tout cela au bénéfice de l’intérêt national américain. L’extra-territorialité du droit américain se propage à la faveur de l’abandon du droit international, de la faiblesse du régalien et de la négation de la puissance de mise en Europe. Elle constitue un élément majeur de la stratégie de « Global Constraint » – « contrainte globale » – qui renouvelle la stratégie de l’empire américain ».
La brutalité du procureur américain, la dureté des inculpations et des sanctions, les campagnes d’intimidation résultent moins des textes que de l’extrême résolution avec laquelle ils sont mobilisés au service, moins d’intérêts particuliers, que d’une vision du monde. Le droit américain reflète une conception de l’ordre social fondé sur la concurrence darwinienne pour la survie qui élimine les plus faibles, sur un modèle scientiste et néo-rationaliste en vertu duquel la technique et la croissance résoudront tous les problèmes posés par la technique et la croissance. Ce modèle est totalement opposé au modèle républicain de solidarité et de mutualité qui emprunte le meilleur de ses principes aux systèmes de régulation complexes des organismes vivants2.
Ce dispositif à prétention universel s’accompagne d’un affichage moral, toujours précédé de campagnes de presse appuyées par des Fondations et des ONGs mobilisées dans un but de légitimation. Le premier effet des poursuites et des sanctions américaines contre les banques suisses, accusées de favoriser l’évasion fiscale, est que les banques suisses conseillent désormais à leurs clients de déposer leurs fonds aux Etats-Unis, d’ouvrir des sociétés au Delaware ou au Nevada, aujourd’hui parmi les premiers des paradis fiscaux du monde. Quant aux récalcitrants, ils se verront attaqués par la presse et les ONGs. Dernièrement, le quotidien parisien Le Monde nous a servi un étrange scoop accusant le cimentier Lafarge d’entretenir des complicités avec des groupes jihadistes… Il n’a pas fallu attendre 48 heures pour voir surgir les chevaliers blancs de plusieurs ONGs lançant pétitions et autres actions à l’encontre du cimentier !
Ces opérations sont le fait de diverses officines, disposant pour certaines de moyens étendus, pour la plupart d’une influence fondée sur le présupposé naïf que tout est mieux chez les autres, pour quelques unes du projet explicite de soumission de la France aux intérêts étrangers. Au nom de l’éthique des affaires ou de la bonne gouvernance, des associations, des médias, des groupes exercent une pression plus ou moins directe sur les entreprises françaises pour qu’elles se conforment aux pratiques et aux intérêts américains ou à ceux de leurs alliés – combien de séminaires, de sessions de formation dans ce but ! – et, d’abord, pour qu’elles financent elles-mêmes des actions qui leurs sont contraires ! Ces officines donnent une nouvelle ampleur au trafic de réputation et d’influence. A coup d’indicateur biaisés, de classements tendancieux, d’enquêtes bricolées, elles accréditent des procédures et des méthodes de gestion étrangères à la culture européenne des affaires, comme « la bonne gouvernance », « la mise en conformité », « les administrateurs indépendants », etc. l’ensemble revêt une certaine puissance en raison des relais que constituent cabinets d’avocats américains, auditeurs et comptables anglo-américains, banques d’affaires et fonds d’investissements, qui ont intérêt à agir, a produire de la norme, à relayer et manipuler certaines méthodes comptables.
Ainsi par conformisme, sinon par colonialisme intellectuel, combien de sociétés françaises ont-elles sciemment introduite le loup dans leur propre bergerie ? Combien d’entreprises françaises et européennes ont-elles confié des audits et autres analyses opérationnelles et stratégiques à des sociétés d’audit anglo-saxonnes ? Lorsqu’on sait, par exemple, que le plan « Vision-2030 » – censé diversifier et moderniser l’économie saoudienne – a été concocté par la société McKinsey… nous voilà rassuré et grandement assuré que les princes wahhabites ne financeront plus l’islam radical dans le monde !
Alors que faire ? Travailler à se désexposer à la justice américaine, à se décrocher du dollar. Les outils disponibles sont déjà là : ne plus travailler qu’avec les marchés de cotation des matières premières hors dollar, tels que la Chine en a ouvert en novembre 2015 (le premier portant sur l’or) ; refuser d’avoir affaire avec tout prestataire de services hébergé aux Etats-Unis, filiale d’une entreprise américaine , ou relevant d’une manière ou d’une autre de la justice américaine ; exiger que la totalité des données de l’entreprise soit traitée, hébergée et préservée dans des centres informatiques localisés en France ; imposer une autre monnaie que le dollar pour toute transaction internationale (comme l’impose l’Iran pour son pétrole et son gaz) ; éliminer de ses appels d’offre toute banque, toute institution financière américaine, ou filiale d’un établissement américain ; ne communiquer aucune information , ne diffuser aucune opinion, d’une organisation, ONG, association, Fondation ou institution internationale, sous la dépendance de financements américains3.
Hervé Juin de conclure : «  pourquoi ne pas utiliser WeChat, entièrement chinois, plutôt que les sites de relations américains ? Pourquoi ne pas prévenir tous les utilisateurs de Cloud Computing et autres Big Data, comme de progiciels américains, que le nouveau pouvoir US utilise les prestataires de services pour acquérir toutes données utiles de la part des utilisateurs naïfs ? Pourquoi ne pas tenir en alerte toutes les entreprises contre le recours à des logiciels américains qui comportent tous les algorithmes pour suivre, déceler, dénoncer les opérations non-conformes à l’intérêt national US ? Après, c’est trop tard. Quand l’entreprise emploie, laisse pénétrer ses fonctions vitales, laisse les prestataires américains la conseiller, auditer ses comptes, assister ses politiques commerciales, gérer ses flux de factures ou de capitaux, c’en est fini de son indépendance stratégique. Quand elle accepte de subordonner ses relations internationales au regard des Etats-Unis ou de leurs alliés, c’est fini. Il faut organiser la grande séparation d’avec l’occupation américaine, il faut faire tomber le nouveau mur qui nous aliène. Qu’il passe dans nos têtes plus que dans la rue, qu’il se compose de droit, de finance, d’audit et de conformité, ne le rend que plus présent. Il s’insinue partout, il nous coupe de nos traditions, de notre histoire, il nous rend insensible à notre intérêt propre, et voilà que la France ne peut même plus préférer les Français, l’Europe préférer les Européens ! Nous avons le monde devant nous. Il vaut tellement plus que l’illusion de l’alliance américaine ! »      
Désormais, nous devons regarder la réalité en face. Au nom de la lutte contre la corruption, au nom du combat légitime contre les pratiques abusives, c’est la lutte contre la diversité humaine et contre la liberté des peuples à décider de leurs lois et de leurs principes qui franchit s’impose et se généralise. C’est une colonisation américaine d’un nouveau type – soft et smart colonisation – qui s’affirme au fur et à mesure que la croissance signifie moins apporter une utilité augmentée que l’obsession de tuer ses concurrents par tous les moyens.
De toute urgence : contre l’extra-territorialité du droit américain, il faut lire, diffuser et citer l’étude d’Hervé Juvin.
Richard Labévière
8 août 2016

1 Hervé Juvin : La guerre du droit pénal américain aura-t-elle lieu ? Cap sur le nouveau système de corruption mondialisé. Editions de l’Observatoire EUROGROUP-CONSULTING, mai 2016. 
2 Dominique Dron : Pour une régulation éco-sytémique de la finance ? Annales des Mines, février 2015. Note pour l’Institut Veblen, octobre 2015. Disponible sur :http///www.veblen-institute.org/IMG/pdf/pour_une_regulation_ecosystemique.pdf/ 
3 Xavier Raufer : « La face noire de la mondialisation », in Le Nouvel Economiste, 10 février 2016.
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jeudi 22 août 2019

C'est la fête...

...Pour les actionnaires
                                 En France, où c'est le jackpot, mais pas seulement.
              Au dépends des salaires et des investissements.
   Une grosse entreprise a besoin de salariés et d'actionnaires.
         Mais de manière équilibrée.
   Or le divorce s'accentue entre les deux, surtout depuis la libéralisation dans la finance dans les années 80 sous l'effet des doctrines hayekienne et friedmanienne.
  Comme le reconnaît un rapport du Sénat
                  Les richesses produites par les grandes firmes du fameux CAC 40 donnent parfois le vertige.
   Le problème qui est posé n'est pas celui de leur ampleur, toujours le plus souvent bienvenue, mais de leur répartition.
     En fait, au lieu d'une répartition selon la règle des trois tiers, telle que rappelée par Sarkozy (un tiers pour les actionnaires, un tiers pour les salariés, un tiers pour l'investissement), la réalité est toute autre, surtout en France.
  Ce sont les actionnaires, les gros, qui se taillent la part du  lion. Et pas qu'un peu. Surtout en France.
    On le savait depuis quelques années, mais la tendance s'accentue. Dans l'économie à dominante financière dans laquelle nous sommes, des rapports récents convergent pour dénoncer ce déséquilibre grandissant dans la répartition.des richesses produites, aux dépends de l'investissement d'avenir et des producteurs, sans lesquels    aucune richesse ne verrait le jour.
     Un économie de rente s'installe et de super-profits pour les managers. ..Actionnaires, qui ne sont pas ou peu des particuliers. ... Près de la moitié de ces dividendes partent vers l'étranger. 55% seulement restent en effet en France, tandis que 20% prennent la direction de la zone euro et 16% celle des Etats-Unis. En France, les particuliers ne détiennent finalement que 9% de CAC40 et leur part a été divisée par quatre en trente ans. Ce sont des sociétés d'investissement ou des fonds de pension qui possèdent la quasi-totalité des entreprises cotées
  Ce sont les actionnaires qui font la loi, impulsant ainsi des tendances plus spéculatives que productives. Le rendement à court terme est privilégié par rapport à l'investissement à long terme, ce qui est un facteur de risques et de crises. ...En 2016, les entreprises du CAC 40 ont distribué plus de 66% de leurs bénéfices aux actionnaires, contre 30% dans les années 2000. Une exception française, car en Europe continentale les entreprises du CAC 40 sont de loin celles qui versent le plus d'argent à leurs actionnaires. On est loin de la règle des trois tiers prônés par Nicolas Sarkozy. "Ça fait bien longtemps que je pense que la règle des trois tiers est une bonne règle. Sur 100 de bénéfices, il devrait y en avoir 33 qui reviennent aux salariés, 33 qui vont directement dans la poche de l'actionnaire et 33 qui servent à être réinvestis dans l'entreprise. Parce qu'une entreprise doit investir pour continuer à être compétitive", déclarait-il le 5 février 2009...déclaration de bon sens, mais qui a fait long feu.

      La France est championne du monde des dividendes reversés aux actionnaires:...Les richesses n'ont jamais été aussi mal partagées depuis la crise au sein des grands groupes, qui choisissent délibérément une course aux résultats de court terme pour conforter les actionnaires et les grands patrons au détriment des salariés et de l'investissement", a dénoncé Manon Aubry, porte-parole d'Oxfam France, citée dans le communiqué.
   Par exemple, ...le sidérurgiste ArcelorMittal, l'énergéticien Engie et le leader mondial de la gestion de l'eau Veolia sont, dans l'ordre, ceux ayant les taux les plus élevés de redistribution des bénéfices en dividendes aux actionnaires, soulignent les deux ONG.
  Les organisations Oxfam et Basic, notamment, dans le sillage de nombre d'économistes dénonçant les dérives financières d'un capitalisme ....appellent le gouvernement "à reprendre la main sur cette économie déboussolée avec des mesures de régulation ambitieuses", "en préservant la capacité d'investissement et en interdisant que la part des bénéfices reversée aux actionnaires dépasse celle qui est reversée aux salariés".
      Ce partage déséquilibré des bénéfices n'est pas seulement un facteur de risques dans une économie mondialisée mais constitue aussi une menace pour le développement.
    Cette machine à dividendes… et à inégalités, cette tendance aux « profits sans partage » contribue à anesthésier le risque entrepreneurial et à créer et favoriser les conditions d'une précarisation des emplois.
      L'actionnariat a changé de nature comme la gestion des entreprises, avec toutes les conséquences visibles ou invisibles, notamment les nouvelles formes de management brutal et la souffrance au travail.

                         ___ Un début de prise de conscience en cours?...
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mercredi 21 août 2019

Bétonnons, bétonnons...

Europacity:démesure et folie des grandeurs
                           Toujours plus grand, toujours plus cher, toujours plus bétonné, toujours plus dévoreur d'espace agricole.
    Et non-sens économique.
       Le béton gagne de plus en plus de terrain, avec les conséquences connues.
    Après Euro-Disneyland fort discuté en son temps, où l'Etat s'est amplement impliqué dans les infrastructures, voici venir:
   Europacity, projet pharaonique du Grand-Paris, pour le plus grand profit de la maison Auchan, au milieu de champs fertiles, destinés à être bétonnés à jamais.
     Il est prévu un complexe commercial et ludique sur 80 hectares de terres agricoles. Un grand terrain de jeu pour Parisiens en mal de nouveautés. Comme à Happy Valley.
   Mais, malgré l'agrément de l'Etat, le projet semble menacé
        Ce n'est pas une opportunité économique mais une aberration écologique.
   La ville du Grand-Paris ira jusqu'à Gonesse, où le shopping y sera roi.

    Ce méga-projet franco-chinois avec son ambition d'artificialisation des loisirs clés en main est déjà contesté et n' aura sans doute pas les "bienfaits" escomptés par les concepteurs hors-sol..
  Ce projet d'eldorado, cette nouvelle folie  des grandeurs ira-t-il plus loin que ND des Landes?
       Mais comment faire marche arrière maintenant?
           Le bêtisier d'Auchan ne renonce pas pour l'instant.
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