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dimanche 15 mars 2009

Enfant-roi ou parents infantilisés ?


L'enfant ne naît pas une personne , il le devient

Aimer un enfant ne signifie pas lui donner un place centrale
Le socialiser, lui faire abandonner son narcissisme primaire, exige qu'on lui impose des limites, dans le seul but de structurer sa vie affective et de le rendre capable de supporter les frustrations dues à la vie en commun, donc de créer les conditions de sa liberté, qui ne pourra jamais être que relative
.Les contraintes font grandir

-"On doit confronter l'enfant aux rigueurs de la vie et de l'environnement. Ne pas trop le protéger pour le préparer à surmonter les difficultés à venir. Mais il faut aussi en même temps adapter cet environnement à sa relative fragilité, à ses limites et à son niveau de développement. L'affectif, c'est de l'amour pour aujourd'hui. Mais le normatif, c'est de l'amour pour demain." (M.N.)

" Une violente répression d'instincts puissants exercée de l'extérieur n'apporte jamais pour résultat l'extinction ou la domination de ceux-ci, mais occasionne un refoulement qui installe la propension à entrer ultérieurement dans la névrose. La psychanalyse a souvent eu l'occasion d'apprendre à quel point la sévérité indubitablement sans discernement de l'éducation participe à la production de la maladie nerveuse, ou au prix de quel préjudice de la capacité d'agir et de la capacité de jouir la normalité exigée est acquise. Elle peut aussi enseigner quelle précieuse contribution à la formation du caractère fournissent ces instincts associaux et pervers de l'enfant, s'ils ne sont pas soumis au refoulement, mais sont écartés par le processus dénommé sublimation de leurs buts primitifs vers des buts plus précieux. Nos meilleures vertus sont nées comme formations réactionnelles et sublimations sur l'humus de nos plus mauvaises dispositions. L'éducation devrait se garder soigneusement de combler ces sources de forces fécondes et se borner à favoriser les processus par lesquels ces énergies sont conduites vers le bon chemin. " (Freud)

-Avatars et désarrois de l'enfant-roi:

"...Penser que d'emblée "l'enfant est une personne", pour reprendre l'aphorisme bien connu de Françoise Dolto, veut dire qu'il y a en chaque enfant la potentialité d'un désir en devenir à respecter, mais cela ne veut nullement dire qu'il faut prendre ses voeux pour ses désirs, ni qu'il faut lui demander son avis à propos de décisions qui ne sont pas de son ressort. Encore une fois, dire qu'un enfant est un "sujet désirant" veut donc dire qu'il a cette potentialité désirante en lui, mais non qu'il soit d'emblée désirant effectivement. Pour paraphraser un autre aphorisme célèbre : on ne naît pas sujet désirant, on le devient !-Car, paradoxalement, en donnant cette place centrale à l'enfant, c'est son trajet propre d'enfant qu'on lui vole. En effet, à le considérer d'emblée comme un sujet à part entière, on lui permet de faire l'impasse sur le fait d'assumer son "aliénation" aux autres dont il dépend, et d'avoir ensuite à s'en séparer. Mais de plus et surtout, nous nous dérobons alors à la tâche de soutenir cette confrontation, autrement dit d'être et de rester des interlocuteurs pour l'enfant, en un mot nous nous déresponsabilisons de ce que nous avons à transmettre.-Prenons un simple exemple : aujourd'hui, il ne faut pas être dans une famille particulièrement aisée pour qu'un enfant ait un téléviseur dans sa chambre. Nul doute que l'introduction de cet objet dans la famille permet une pacification. Désormais, plus besoin de se confronter au sein de la famille pour savoir quel programme choisir, pas de conflits inutiles à propos d'une décision où il faudrait finir par trancher, pas de frustration ni de frottement à l'altérité de l'autre. Tout peut dès lors se passer comme si, très judicieusement, on était ainsi parvenu à éviter tant l'autorité que la violence. Mais, à y regarder de plus près, n'est-ce pas plutôt une occasion spécifique du travail de maturation qui est ainsi manquée ? Et le parent, de son côté, n'a-t-il pu ainsi, en toute légitimité apparente, s'éclipser de sa tâche..."

-De l’enfant-roi à l’enfant-proie:
"...Au-delà des « parts de marché » qu’ils représentent à court terme, les enfants sont pour les firmes de futurs clients à fidéliser à tout prix : « Vos parts de marché grandissent avec lui », claironnent à l’adresse des annonceurs les spécialistes du « baby marketing », photo de bébé à l’appui, émaillée de la légende : « Votre meilleur vendeur . » Mais surtout, la dimension de ce conditionnement pavlovien dépasse largement les stratégies commerciales prises isolément. La visée profonde du « système-pub » est d’inculquer aux futurs citoyens l’idéologie de la consommation, cette autre face indispensable de la « marchandisation du monde ».-Conduites de consommation, styles de vie, modes de pensée : c’est un modèle uniforme d’individus illusoirement libres que façonnent chez les petits et grands enfants ces publicités qui rythment l’espace médiatique. Dressage du sujet-consommateur, focalisé sur le mythe du produit salvateur, qui doit doper son existence de jouissance et de puissance. Schéma d’absorption des choses de la vie et du monde, qu’il faut « croquer à pleines dents », à commencer par les fleurons de l’industrie audiovisuelle (films, feuilletons, émissions « grand public », albums, stars à la mode, etc.). Légitimation d’une violence des pulsions, nommées « envies », et bientôt érigées en « droits de consommer » que de jeunes tyrans imposeront à leurs proches (l’Association des instituts de rééducation dénonce déjà « les publicités dans lesquelles les enfants sont mis en position de toute-puissance à l’égard de leurs parents »). Impératif d’une permanente exhibition de soi, l’« identité » ne consistant plus qu’en des signes extérieurs – publicitaires, sportifs ou religieux – par lesquels chacun croit distinguer son « moi je » des autres. Modèle enfin d’un devenir sans cesse en mutation, impossible à maîtriser au sein d’un « monde qui bouge », qui oblige à « changer pour changer » au gré des modes et des événements médiatiques, et engendre une soumission chronique au groupe (jeune ou moins jeune), supposé lui-même toujours en mouvement..."
-La poupée Barbie:
"...Avec la poupée Barbie, la fonction de parent disparaît ; l'enfant qui joue n'est pas censée jouer à la mère, et dans la vaste « famille » qui entoure Barbie les parents sont totalement absents..."

- Enfant tyran, la famille en souffrance:
"... Geneviève Platteau reprend le questionnement (des auteurs précédents) en se demandant si l’absence de limites ou d’autorité verticale signifierait que les parents n’ont plus rien à transmettre. Évoquant ce que sont devenus le couple et la famille dans le monde actuel, elle stigmatise le « laisser faire » trop présent dans l’éducation des enfants, qui occulte les différences de génération et insécurise l’enfant en le mettant prématurément dans une position d’adulte. En même temps, elle pointe la déshumanisation de la société actuelle où la compétitivité est à l’avant-plan ; dès lors, le seul refuge devient le foyer et les attentes de réparation envers ses membres deviennent excessives.
Geneviève Platteau regrette la disparition des liens verticaux tracés par la loi des anciens qui, en imposant des places et des rôles définis, favorisait chez l’individu et dans le groupe des sentiments de stabilité et de sécurité..."

-Ma semaine allemande: au pays des enfants-tyrans:
"...La roue tourne au cœur de la citadelle du pédagogisme. L’un des bestsellers de l’année 2008 en Allemagne a été le livre de Michael Winterhoff, pédopsychiatre, intitulé « Pourquoi nos enfants deviennent des tyrans » (Warum unsere Kinder Tyrannen werden). L’auteur y remet en cause toutes les certitudes de la pédagogie du XXè siècle en Allemagne, largement antiautoritaire. Winterhoff s’insurge contre les parents qui instaurent une cogestion éducative permanente avec leurs enfants ou ceux qui, phénomène encore plus grave, discutent de leurs propres soucis avec leurs enfants. Il montre les ravages d’une pédagogie participative appliquée sans discrimination à l’école, avec des parents qui font de la surenchère et partent du principe que les professeurs traitent toujours injustement leurs enfants. Le tableau est peut-être poussé trop systématiquement mais l’auteur a raison d’identifier dans ce qu’on appellera ironiquement la cogestion éducative (curieusement poussée à l’excès par les soixante-huitards au moment même où ils détruisaient la cogestion légitime, entre adultes, dans les relations de travail) l’une des causes du déclin du prestige social des enseignants, toujours plus méprisés par les parents des enseignés. (Nicolas Sarkozy, en France, vogue allègrement sur cette vague quand il manipule le populisme anti-profs).
Le lecteur français du livre a le droit de sourire. On entend si souvent les Allemands critiquer l’éducation des parents français, trop rigide, bridant la spontanéité de l‘enfant. (Je renvoie à la belle étude de Béatrice Durand, Cousins par alliance, coll. Autrement). On ajoutera cependant que beaucoup de ce qui est décrit dans le livre pourrait s’appliquer à la France. La « cogestion éducative » n’est pas une spécificité allemande. Un point peut-être reste spécifique: une qualité de l’éducation allemande, qui a mal tourné dans un cadre antiautoritaire: la capacité des parents allemands à se mettre à la place de leurs enfants - qui devient souvent aujourd’hui un instrument de destruction de la personnalité des enfants qui ne rencontrent plus aucun obstacle sur leur route. Ce qui est spécifiquement allemand, c’est l’idéologie de l’enfant-roi poussée au point de dissuader les parents d’en avoir un deuxième; et les enfants-rois eux-mêmes d’en avoir du tout..."
-Questions sur la violence adolescente et ce qu’elle révèle de nos sociétés

-Nos enfants ne doivent pas devenir des tyrans:
"...C’est un «déplacement de niveaux» qui se produit et même des petits enfants, même des nourrissons, peuvent prendre la direction et éduquer dans un certain sens leurs parents. Avec le refus et d’autres particularités, ils tiennent souvent en haleine toute la famille. Winterhoff dit que «les enfants sont devenus les éducateurs de leurs parents et ils peuvent les conduire selon leurs envies», sans rencontrer de limites. Ils se fâchent lorsqu’on leur montre des limites et qu’ils ne peuvent pas imposer leur volonté. Ils insultent leurs parents, font des crises de rage en en venant aux mains, ils battent leurs parents et leur donnent des coups de pieds. Avec la relation de partenariat, l’enfant est souvent impliqué dans les affaires des adultes – par exemple des problèmes du couple ou problèmes financiers – qu’il ne peut pas comprendre à son âge. On lui vole donc son enfance.
Dans la projection, c’est un autre déplacement de nivaux entre adultes et enfants. Les parents ou d’autres personnes éduca­trices – aussi des jardinières d’enfants et instituteurs – se placent à un niveau au-dessous de l’enfant. Ils deviennent dépendants de l’enfant. Leur propre humeur et leur estime de soi oscillent d’après les humeurs de l’enfant, ses prestations, son comportement. Ils vivent de bons résultats ou un bon comportement comme leur propre succès et comme une confirmation. Les fautes de l’enfant deviennent leur propre défaite. Ils ont quitté leur place d’éducateur et dépendent de la confirmation par l’enfant. Les éducateurs se trouvant dans la projection ne voient plus dans leurs actions l’enfant qui dépend d’eux, mais seulement eux-mêmes. Ils font tout pour contenter l’enfant parce qu’ils ne supportent pas qu’il soit mécontent. Ils ont peur qu’il ne les aime plus. L’enfant devient l’écran des projections de leurs propres déficits, ils ont besoin de l’enfant pour satisfaire leurs besoins souvent inconscients, par exemple la reconnaissance..."

-_DireOuiDireNonANosJeunesEnfants
- La fin de l'enfant roi ?
-Les adolescents: Adolescence, violence et passion
-Face à des enfants tyrans, parents et enseignants cherchent de nouveaux repères éducatifs.
-Educateur: un métier impossible
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-Le capitalisme nous prend pour des enfants… que nous sommes devenus:
"...les nouveaux « sophistes du marketing » jugent que pour faire régner le capitalisme consumériste, il faut rendre les consommateurs enfantins. Il résulte de ces dynamiques une infantilisation des adultes et une transformation des enfants en consommateurs en culottes courtes.
Caractéristiques constantes de cet éthos infantilisant : l’émotion domine la pensée, l’égoïsme prime sur l’altruisme, le privé sur le public et le rapide sur le lent. La culture adolescente l’emporte bientôt sur toutes les autres. Les fast food, jeux vidéos et autre succès de films comme Shrek le montrent : la culture consumériste est bien souvent celle de la régression.
En conséquence de quoi le « moi » qui se consacre à la satisfaction de ses plaisirs a tendance à occulter le « moi » citoyen. L’auteur alerte sur le risque qu’il y a à traiter la liberté comme une affaire pleinement privée : « elle scinde le moi qui choisit en deux fragments antagoniques, et, en dernière analyse, elle nie la légitimité du fragment que nous appelons « citoyen » ou « public ». En somme quand le « je veux » se substitue au « nous voulons », c’est la citoyenneté qui disparaît..."
Consommateurs ou/et citoyens

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