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jeudi 24 novembre 2011

La gauche? Quelle gauche?..

A la recherche d'une idée perdue

(Re)construire la gauche ?

__La gauche existe-t-elle (encore)? Et quelle gauche?
Dans le maquis sémantique et les pièges conceptuels que soulève cette notion à l'histoire déjà longue, à l'heure où se brouillent les repères, où les valeurs néolibérales commencent à s'effriter, comment y voir plus clair?

La notion de
socialisme ne manque pas d'ambiguïtés, variant selon les contextes historiques, les perceptions de la réalité sociale, les choix moraux et politiques, même si la notion de justice sociale, de primauté de l'intérêt général sur les intérêts privés, de contrôle de l'Etat démocratique sur la sphère économique, est au fondement de tout mouvement s'en réclamant, avec des variantes nombreuses. Il y a bien des chemins à inventer, après l'échec de certains. Toute une histoire..

Quelle boussole pour s'orienter, alors que le Nord semble aujourd'hui perdu, que la faillite d'un certain ordre capitaliste destructeur de richesses et de valeurs est si patente? La crise majeure que nous affrontons nous oblige à clarifier cette notion de gauche. On n'en prend pas le chemin. La gauche européenne semble désarmée. Le désarroi est grand.
Des militants du PS eux-mêmes déplorent que l'actuel candidat à la présidentielle fait beaucoup d'efforts pour apparaître comme un bon gestionnaire, sans programme alternatif consistant et crédible. Ils ne veulent pas d'un Sarko II, version light. Que peut encore signifier ce label politique hic et nunc?
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Benoît Hamon lui-même, porte-parole du PS, fait ce constat, dans son dernier livre:
...« Au sein de l’Union européenne, le Parti socialiste européen (PSE) est historiquement associé, par le compromis qui le lie à la démocratie chrétienne, à la stratégie de libéralisation du marché intérieur et à ses conséquences sur les droits sociaux et les services publics. Ce sont des gouvernements socialistes qui ont négocié les plans d’austérité voulus par l’Union européenne et le Fonds monétaire international [FMI]. En Espagne, au Portugal et en Grèce bien sûr, la contestation des plans d’austérité prend pour cible le FMI et la Commission européenne, mais aussi les gouvernements socialistes nationaux. (…) Une partie de la gauche européenne ne conteste plus qu’il faille, à l’instar de la droite européenne, sacrifier l’Etat-providence pour rétablir l’équilibre budgétaire et flatter les marchés. (…) Nous avons été en plusieurs lieux du globe un obstacle à la marche du progrès. Je ne m’y résigne pas..."
___Il y a quelques années, Eric Dupin analysait les transformations de fond des orientations politiques du PS depuis une trentaine d'années, son glissement vers une certaine américanisation, et appelait à sortir la gauche du coma.
"Pour la mouvance socialiste, il n’y a plus aucune alternative au capitalisme. Le débat ne porte plus que sur la question de savoir jusqu’où et par quels moyens on doit régir et réguler le capitalisme". répétait Anthony Giddens, gourou intellectuel du Premier Ministre britannique et chef du Parti travailliste, Tony Blair, promoteur de la troisième voie (The Third Way, titre du livre de Giddens)".
__Le débat semblait clos et les admirateurs de cette mythique troisième voie étaient convaincus que le socialisme pouvait se ramener à agir à la marge du capitalisme libéral, réparer les dégâts de ses excès, en faisant du social, de la remédiation. Dès 1983, le virage mitterandien ouvre la voie à la doxa néolibérale et à ses dogmes: ouverture à une mondialisation sans règles, acceptation d'une certaine désindustrialisation, confiance naïve accordée à la valeur des marchés financiers, engagement dans les privatisations au nom d'une certaine culte de l'entreprise et du "progrès", qui semblait aller de soi après la chute du Mur. Au nom d'une certaine Europe, la gauche renonçait.
_____Jean-Pierre Le Goff remarquait les efforts pathétiques de la gauche pour « maintenir ensemble les morceaux d’une identité éclatée », oscillant sans cesse entre ses conceptions traditionnelles et « une fuite en avant moderniste » censée lui attirer les bonnes grâces des couches sociales montantes.
"L'effondrement du bloc communiste a pratiquement anéanti l'idée d'une autre voie que celle de l'économie de marché. Les transformations du capitalisme financiarisation, transnationalisation) et celle du salariat ont compliqué la question.Mais la professionalisation de l'activité politique, accompagné d'une sélection sociale, a également joué un rôle..." (L.Bonnelli)
__Le PS assiste, impuissant, au creusement des inégalités, sans anticiper sur les orages qui se préparaient. La crise elle-même n'est pas analysée en profondeur, ses causes proches et lointaines sont éludées par les "présidentiables" du PS, et les recettes envisagées risquent fort de faire durer le mal. L'absence de projet, le vide des idées ont été propices à la montée de la guerre des chefs, aux querelles tribales très médiatisées...
Les "modernistes" du PS donnèrent le ton...


___Jean-Pierre Chevènement fut un des rares à dénoncer
très tôt les dérives d'une social-démocratie agenouillée devant la loi des marchés.
La gauche s’est ralliée au néolibéralisme, à la désindustrialisation et à l’euro fort et a signé ainsi la fin de sa spécificité.
"Cet idéal d’émancipation culturelle et morale de l’individu a fini par détrôner dans les années 1980, tant dans l’esprit des dirigeants de la gauche que dans les aspirations du cœur de son électorat, les considérations économiques et sociales traditionnelles rapidement devenues « archaïques » à l’heure des restructurations industrielles et de la dérégulation de l’économie. Des demandes non plus sociales mais « sociétales » se sont alors rapidement déployées dans les programmes politiques des partis de gauche des années 1980-90 : nouveaux droits, respect de la « différence », valorisation de la diversité… L’horizon des luttes s’est peu à peu déplacé. C’est désormais l’individu dans ses identités multiples qui doit être émancipé, et non plus le travailleur ou le salarié dans son rapport à la production. Ainsi, par exemple, le triptyque du Parti socialiste français des années 1970 (« nationalisation, planification, autogestion ») qui résumait bien son époque a-t-il été remplacé dans les années 1980-90, par un autre, implicite mais omniprésent : « individu, minorités, diversité ».
Au-delà de cet aspect culturel, le socialisme européen s’est plus généralement engagé tête baissée dans l’impasse libérale en abandonnant, soit qu’il l’a cru irréalisable soit qu’il l’a cru réalisé, son projet historique. Illusion encore renforcée au lendemain de la chute du Mur de Berlin en 1989 avec la disparition du vieil ennemi communiste. La social-démocratie aurait finalement épuisé son destin historique, la voie particulière qu’elle a historiquement incarnée ayant triomphé. Le réformisme comme méthode (plutôt que la révolution), la régulation de l’économie de marché comme programme (plutôt que l’appropriation collective des moyens de production) et la démocratie politique comme cadre d’exercice du pouvoir (plutôt que la dictature du prolétariat) s’imposant définitivement à gauche.

Mais ce faisant, le socialisme n’a pas su résister aux sirènes du libéralisme ; il en a même parfois volontairement épousé les contours, dans le cas du social-libéralisme. Il a adopté si ce n’est l’idée libérale, qu’il continue à dénoncer avec virulence, du moins son contenu matérialiste et consumériste, voué au culte de la croissance pour elle-même à coup de dérégulation, de flexibilité et de privatisation, mais aussi son projet culturel tout entier forgé autour de l’individu et de ses droits sans cesse étendus, et bien évidemment son programme politique qui privilégie les formes institutionnelles de la représentation et de la préservation des intérêts individuels au détriment d’une ouverture plus collective, plus égalitaire, plus démocratique (participative dirait-on aujourd’hui) du champ politique et social.

De la sorte, les socialistes, sociaux-démocrates et autres travaillistes européens ont largement ignoré la question, pourtant constitutive de leur
ethos, de la répartition des richesses et de l’équilibre entre capital et travail. Ils ont littéralement abandonné le terrain de la lutte pour l’égalité au profit d’une promotion de la « diversité » qu’ils ont érigée en valeur. Ils ont aussi délaissé la notion fondamentale de solidarité en autorisant une politique généreuse d’accès à l’Etat social à de nouveaux ayants droit sans toujours exiger un quelconque devoir en retour de leur part. En négligeant de repenser le rôle de l’Etat pour l’adapter à son temps, ils ont laissé le slogan authentiquement néolibéral de Ronald Reagan, « l’Etat comme problème plutôt que comme solution », devenir le principe directeur de la réforme des politiques publiques. Ils ont oublié que le but de la vie sociale ne pouvait se résumer à un pur matérialisme, de la même manière qu’ils ont laissé faire les libéraux lorsque ceux-ci ont vu dans les nouvelles aspirations démocratiques et les nouvelles formes de la participation à la vie politique une menace plutôt qu’une chance pour les sociétés contemporaines. Bref, ils ont capitulé.
.."

__Constante dans l'erreur depuis si longtemps, la gauche est -elle condamnée à se répéter?... Comment repartir du pied gauche?

1 commentaire:

Anonyme a dit…

aprés avoir avalé trop de couleuvres pendant trop d'années, et plutot que de voter blanc ou d'aller a la peche, je voterais pour le candidat du NPA, meme s'il n'a aucune chance, je le sais bien. Et je crois qu'il merite a etre connu, malgrés ou a cause de son passage chez Ruquier:

http://2ccr.unblog.fr/2011/11/02/un-candidat-sans-artifice/