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mardi 30 avril 2019

Travailler plus...

Qui travaille plus?
                           Travailler plus: on connait le slogan, qui depuis Sarkozy hante certains discours officiels.
     La situation de notre pays, globalement moins favorable que d'autres au niveau de l'emploi et de l'investissement viendrait d'un déficit de quantité de travail moyen, qu'il suffirait d'augmenter pour se hisser au niveau des pays apparemment plus favorisés.

      Nous sommes là devant un grand flou, parfois dénoncé par certains économistes, qui souhaiteraient qu'on utilise d'autres lunettes et d'autres intruments de mesure, la situation de chaque pays étant spécifique, surtout après la crise violente de 2008
     Comparaison n'est pas raison. Si on en reste au niveau du PIB, sept des dix pays ayant le plus haut PIB sont aussi classés parmi ceux travaillant le plus faible nombre d'heures. En plus de la Norvège et du Luxembourg, on y compte la Suisse, les Pays-Bas, l'Allemagne et la Suède.
    On sait que ces pays bénéficient en particulier soit d'une population réduite, soit de pratiques d'optimisation fiscale très favorable, d'un système éducatif plus performant, d'un chômage réduit ou masqué, de conditions de salaires plus ou moins encadrées (comme l'Allemagne fonctionnant sur ce point à deux vitesses), etc...
     Définir un temps moyen travaillé (avec quelle productivité?) dans une période donnée, dans une société donnée, avec tel mode de production est une opération des plus complexes qui soit. Tout juste peut-on donner des approximations, sachant que les situations économiques sont évolutives.
   Que sera la prétendue faiblesse du chômage de l'UK, à la productivité si peu flamboyante, après le Brexit? En Allemagne, colosse au pieds d'argile, si les marchés exportateurs continuent de se rétrécir?
    Que prétend-on mesurer? Le quantitatif n'étant ni suffisant ni déterminant en matière sociale.
   Sur le papier, on voit assez bien de quoi on parle, mais on renvoie à une multitude d'autres dimensions associées.
      Déclarer que la France travaille beaucoup moins que ses voisins relève de la désinvolture politique, de l'affirmation gratuite.
        Elle est plutôt au-dessus de la moyenne européenne.
  Et l'on ne tient pas compte de tous les aspects, parfois masqués, du travail.
       Bref, il importe de démystifier les chiffres lancés sans précaution ni analyse, de sortir des slogans, en tenant compte des contextes spécifiques. 
    Les Français seraient-ils donc paresseux?                                   
                                                    Selon l'économiste Jean GADREYl’idée qu’un pays est d’autant plus riche que ses habitants travaillent plus en quantité d’heures pour 1000 habitants (ou pour 1000 habitant de 15 à 64 ans selon les cas) a deux grandes limites. La première est purement économique : si la valeur produite par heure de travail (la productivité en valeur) est supérieure dans un pays A, le volume de travail peut y être inférieur à celui de B alors que la richesse économique totale de A reste supérieure. Or la France figure parmi les pays développés où cette productivité est la plus élevée.
  La seconde limite est bien plus sérieuse : la vraie richesse des nations n’est pas dans leur PIB ou PIB par habitant. Peu m’importe que le PIB par habitant des Etats-Unis soit supérieur de 35 % à celui de la France, comme résultat, notamment, d’un volume de travail (par personne de 15 à 64 ans) supérieur de 30 %, si je sais par ailleurs que l’espérance de vie est très inférieure aux Etats-Unis, que les inégalités, la pauvreté, les violences et les homicides y atteignent des proportions sans commune mesure avec ce que nous connaissons en France (où pourtant…), et que les émissions de gaz à effet de serre par habitant y sont TROIS FOIS supérieures !
Je termine en citant deux très bonnes critiques du slogan « En France on travaille moins que partout ailleurs »...
  La première critique, par les « décodeurs » du Monde (18 septembre 2014), s’intitule « La France, pays où l’on travaille le moins ? » et elle désintègre proprement cette idée avancée imprudemment par Hervé Mariton : « On est le pays où l’on travaille le moins dans la semaine, dans l’année et dans la vie ».
La seconde est celle de Guillaume Duval. Elle date du 13 janvier 2012 et s’intitule : « Temps de travail : faux scoop et vraies erreurs ». 
            Je recommande vivement la lecture de ces deux exercices salutaires, loin de la propagande du MEDEF relayée par les Rivaton, Godet et consorts....
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