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lundi 19 avril 2021

Le Président et Amazon (1)

Les cents jours

                        Ils sont décisifs, dit-on. Pour tout nouveau gouvernement voulant réformer vite et bien. L'erreur d'Obama est d'avoir trop tardé et de s'être fait piéger, malgré ses promesses, par de puissants intérêts financiers et ceux du Pentagone, en en restant trop souvent à des discours humanistes.    Biden sait qu'il ne se représentera pas, donc il n'a rien à perdre, sans souci de gagner les futures élections. C'est son avantage. Outre que les événements et le désir de rendre aux classes moyennes laminées toute leur place, il s'engage dans un New deal qui n'a pas l'ampleur ni l'audace de celui de Roosevelt, mais qui peut redresser la barre de manière significative et ouvrir de nouvelles voies.                                  ___ "Joe l'endormi", selon l'expression trumpienne, se réveille avec un ensemble de mesures significatives, même si l'on peut avoir des doutes sur sa ligne actuelle en politique étrangère. Il ne va pas sauver le monde ni transformer le système, mais il peut amorcer un certain retour à une époque pré-reaganienne, sans faire plier la finance et la remettre à une place plus contrôlée.           ___Un coup bien senti à l'égard de Amazon et de sa politique délibérément anti-syndicale. Mais ira-t-il plus loin en revoyant les pratiques des Gafas en général, sur lesquels pleuvent les critiques, pas seulement en Europe. Rossevelt a osé démanteler certains intérêts puissants à son époque, nuisibles à l'intérêt général, et on avait pratiqué la suppression des monopoles bien avant lui. Les admonestations ne suffisent pas.                                         __________Ce n'est pas le "grand soir" à la Maison Blanche, et il y a la crise migratoire, mais des semi-ruptures qui ne pourront aller jusqu'à des réformes de fond demandés par la gauche du parti démocrate. On le voit déjà avec le problème des armes, fléau américain: le poids des lobbies et celui du Congrès ont toute chance de ne pas faire aboutir les voeux présidentiels. Taxer les plus riches n'est plus une obscénité, mais juste une mesure imposée par les circonstances, même si on ne reviendra pas de si tôt aux années d'après-guerre, même si le FMI semble avoir changé de ton....   Affaire  à suivre...Encore un effort Joe!   

             * Points de vue:                                 "...Les premiers pas de la présidence Biden sur le plan économique, s’ils ne laissent pas indifférent, posent un certain nombre de questions sans réponse. Quelque chose a bougé outre-Atlantique. Mais la nature de ce mouvement reste imprécise : est-on à l’aube d’un dépassement du néolibéralisme et de la naissance d’une nouvelle voie keynésienne et sociale-démocrate ? Ou s’agit-il avant tout, comme l’écrit l’économiste de l’université de Genève Bruno Amable dans Libération, d’une simple « correction des excès de la libéralisation néolibérale et une tentative de revenir à un capitalisme un peu moins prédateur » ?     Se poser la question, c’est aussi poser celle des ambitions et des limites de la politique Biden. La réponse ne peut qu’être partielle, dans la mesure où l’on ignore comment cette politique va évoluer et comment elle va sortir du débat au Congrès. Mais certains éléments permettent déjà de définir des lignes fortes de rupture avec les réflexes néolibéraux. Et des limites.   La première ligne de rupture, c’est la logique économique même du plan Biden. L’administration états-unienne n’a pas écouté les critiques et les mises en garde des économistes néokeynésiens qui, traditionnellement, conseillaient les démocrates au pouvoir. Larry Summers, ancien secrétaire au Trésor de Clinton et concepteur du plan de relance Obama, et Olivier Blanchard, chef de file de cette école, ne cessent depuis des semaines de pousser des cris d’orfraie sur le risque de surchauffe qu’induiraient les dépenses du plan Biden. Encore ce lundi 12 avril, dans les colonnes du Financial Times, Larry Summers se disait très inquiet des effets de ce plan sur le retour d’une inflation « jamais vue depuis des décennies ». Mais le fait même que ces économistes en soient réduits à protester continuellement signifie précisément qu’ils sont demeurés à la porte de la Maison Blanche.    Et pour cause : la vision économique du plan Biden est inverse de la leur. Elle part des besoins. C’est la volonté d’améliorer les infrastructures, l’éducation, la santé, le logement social qui prime. Dans cette vision, c’est le sous-investissement chronique dans ces domaines qui bloque la croissance des États-Unis. C’est ici où les néokeynésiens ne sont pas écoutés : ces derniers considèrent, en conformité avec le consensus néolibéral, que ces dépenses ne peuvent relever la croissance potentielle, car les États-Unis sont proches du niveau de production et d’emploi maximum. Si des besoins sont insatisfaits, ils ne peuvent pas être satisfaits par l’État, ou bien on s’expose au risque d’inflation. Il faut donc soutenir l’offre productive et la concurrence pour les satisfaire.....Or Joe Biden, lui, décide de relever au même moment l’impôt sur les sociétés pour précisément « socialiser » une partie des profits du privé et les mettre à disposition de ces besoins collectifs. La dette et l’inflation ne sont plus présentées comme des contraintes indépassables pour l’action à long terme de l’État. C’est là encore une vision qui tranche avec la doxa néolibérale du « ruissellement », y compris par l’investissement privé, qui est encore défendue en Europe en général et en France en particulier.     Pour l’économiste Éloi Laurent, qui défend l’idée d’une « sortie de la croissance » (lire ses entretiens dans Mediapart ici et ), ce plan est une « rupture majeure » avec l’ère Clinton-Obama de la gauche états-unienne. Pour lui, donner la priorité aux infrastructures sur les questions de dette publique, d’inflation ou de déficits, c’est prendre conscience de la nécessité de « reconstruire un pays qui menace de s’effondrer ». Et de rappeler le risque d’effondrement démocratique que la prise du Capitole en janvier a mis en lumière, mais aussi l’effondrement écologique qui est devenu patent avec la vague de froid qui a frappé le Texas.    Dans ce cadre, ce plan est, pour Éloi Laurent, celui de la « refondation ». La refondation d’infrastructures globalement dans un état avancé de décrépitude : l’association des ingénieurs des États-Unis vient de leur donner une note globale de C- (l’équivalent de 8 sur 20). On peine souvent à prendre conscience de leur état de délabrement, des routes au chemin de fer, en passant par les réseaux d’eau ou d’électricité. Le plan Biden prend en compte cet état et l’urgence de la remise à niveau.      Mais c’est aussi la refondation démocratique, avec un travail sur les inégalités, qui est engagée par le premier plan, avec la distribution de chèques aux plus modestes, avec des investissements sociaux et le relèvement des impôts sur les plus grandes fortunes. Enfin, c’est une refondation écologique qui est engagée puisque les dépenses liées au changement climatique représentent la moitié du plan d’investissements.    Bien sûr, reconnaît Éloi Laurent, Joe Biden ne sort pas d’une logique de croissance, mais il remet, selon lui, les choses dans l’ordre ; il faut d’abord travailler sur les fondations et refonder l’économie dans un cadre social et environnemental sain. « La croissance peut être le résultat de cette refondation, mais ce n’est pas son objectif fondamental », conclut Éloi Laurent, pour qui Joe Biden « réinvente l’économie du XXIe siècle comme économie des fondations ». C’est pour cette raison qu’il définit les « infrastructures » dans un sens bien plus large que les économistes mainstream : il y inclut tous les éléments de cette refondation. En cela, la rupture avec la macroéconomie à la Summers est, encore une fois, profonde.     L’économiste de l’université de Los Angeles (UCLA) François Geerolf estime lui aussi que « l’immense changement, c’est que les économistes néokeynésiens, qui avaient un rôle prépondérant dans les administrations Clinton et Obama, sont beaucoup moins écoutés et que leur rôle est beaucoup moins important que sous les derniers mandats démocrates ». À la différence de ces derniers, pour qui l’État doit avant tout intervenir pour « réparer » les déviations du marché et uniquement à court terme, le plan Biden « envisage un État qui va être présent au long cours », relève François Geerolf....."        ________________

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