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mercredi 16 juin 2021

Fin de vie

 Seule compte la vie

                                   La mort n'est "rien" pour nous, comme disait Epicure, qui y voyait le retour à un néant absolu, à une nature qui prend et recycle tout ce qu'elle produit. C'est pourtant "quelque chose", car dans le parcours d'une vie humaine, elle vient inéluctablement mettre un terme à une aventure singulière, à une expérience subjective, existentielle, dont le point final pose toujours problème pour soi et pour les proches. Rien ne vaut la vie, comme chante Souchon, mais il est des cas où la prolonger inconditionnellement peut faire problème, parfois cruellement. Lorsque la médecine a échoué sur tous les plans, lorsque la souffrance, parfois extrême, prend le dessus en permanence, quand les accompagnements ne sont plus d'aucune utilité ou n'existent pas, il devrait être accepté, dans le cadre d'une législation ouverte quoique rigoureuse, de pouvoir mettre un terme, par sa propre décision autaut que possible, à une vie qui en vérité n'en est plus une....      Mais en France, contrairement à beaucoup de pays voisins même de tradition catholique, les lois restent restrictives et ambiguës, malgré les nombreuses et anciennes campagnes d'information, comme à l'AMD, un partie du corps législatif et des organismes d'Etat, s'enferme dans un conservatisme parfois aveugle, organisant une résistance qui, on le sait, ne pourra durer.                                                                                                                   L'exemple récent de Alain Cocq devrait pourtant interpeller, après tant d'autres; "...Il voulait mourir depuis plusieurs années – revendication qu’il avait par ailleurs médiatisée en 2020 – et réclamait le droit à l’euthanasie. Militant français de la fin de vie « digne », Alain Cocq, 58 ans, est mort mardi 15 juin par suicide assisté en Suisse, geste ultime mettant fin à des décennies de souffrance, qu’il a accompagné d’un dernier message fustigeant « le manque de courage » de la classe politique...."

       Mourir "dans la dignité".  Autant qu'il est possible.   Seule vaut la vie, mais quelle vie? 

                     Le débat est à nouveau sur la sellette, aujourd'hui à l'Assemblée. Avec beaucoup de résistances, comme si le sujet était encore tabou, après tant d'années de non dits et d'offensives de milieux conservateurs, souvent ignorants des pratiques réelles sur le terrain, surtout dans le contexte de la grande vieillesse et du milieu hospitalier. Après plusieurs pays d'Europe, dont le très catholique Portugal et l'Espagne . En France, les élus tergiversent, renvoient à la loi Léonetti, qui a montré ses limites, évoquent les soins palliatifs, toujours insuffisants. La proscratination est encore de mise. Beaucoup de confusions , parfois entretenues, règnent encore sur le sujet, malgré les choix et les exemples récents, comme pour Anne Bert ou Paulette. La loi doit s'exercer, non pour imposer quoi que soit, mais pour garantir des conditions de fin de vie qui ne soient pas des calvaires sans fin. C'est au sujet de décider, dans le cadre des conseils médicaux et sous le contrôle de la loi, celle justement qu'il faut changer pour encadrer une pratique souvent clandestine. Houellebeq se trompe. Il ne s'agit pas de fin sur commande. Il s'agit d'une assistance dans certains cas bien particuliers, le sujet état lui-même autant que possible demandeur..  Le terme d'euthanasie prête souvent à confusion.  Pour une mort acceptable     Vieillir:personne ne peut prétendre pouvoir y échapper, sinon en imagination.  Mourir est la seule chose dont nous pouvons être sûrs et fait partie naturellement du cycle de  la vie. Bien vieillir ne dépend pas que de nous.    Ce que nous pouvons parfois choisir, ce sont les conditions de nos derniers instants, les modalités de notre fin programmée.

Une réflexion sans dogme

               Si celle-ci devient une caricature de vie, s'accompagne de souffrances insupportables, de dégradations profondes et irréversibles, l'euthanasie, quand elle peut être choisie, reste une solution permettant de garder une certaine maîtrise  du passage que nous pouvons lucidement assumer.      Mais il peut se faire que l'on décide à notre place si nos instants ultimes sont jugés marqués de trop de dégradations irréversibles, de douleurs insoutenables, de conscience diminuée, les efforts pour la réduire étant vains, les soins palliatifs jugés inutiles ou défaillants.
    L'euthanasie est une chose trop sérieuse pour être laissée aux seuls soignants, elle ne peut se réduire à un acte technique.
                On sort là de la simple expertise médicale et les médecins sont partagés sur un domaine où l'on touche à des notions subjectives délicates de morale et parfois d'options religieuses, qui n'ont pas fini de faire débat.
         La  fin de vie en France n'est pas ce qu'on croyait.
Les conditions de la mort à l'hpital notamment ont changé et la loi Leonetti n'est plus suffisante ou est mal appliqûée
   En France, près de la moitié des décès (48 % en 2010) a été précédée d'une décision médicale ayant pu hâter la mort du patient. Mais des médicaments ont été donnés pour mettre délibérément fin à la vie dans seulement moins de 1 % des cas. Les décisions prises s'appuient dans leur grande majorité sur les dispositions de la loi Leonetti qui permet sous certaines conditions de limiter ou d'arrêter un traitement, ou d'administrer des médicaments afin de soulager les souffrances du patient, qui peuvent avoir pour effet d'avancer la survenue de la mort. Toutefois, les prescriptions légales encadrant ces décisions ne sont pas encore totalement connues ou respectées : les décisions de fin de vie ne sont pas toujours discutées avec les patients et les équipes soignantes ; la rédaction par les patients de directives anticipées, proposée par la loi Leonetti pour que les soignants prennent en compte leurs souhaits, reste en pratique très rare.
      Des règles s'imposent pour encadrer une pratique souvent tue et des dérives toujours possibles, dans des situations toujours diverses, dans lesquelles le personnel soignant se trouve souvent seul, sans prescription ni garde-fou, seulement livré à sa propre conscience et à des errances possibles. La compassion n'est pas un guide sûr et la décision collective peut aider à la  modération, la décision plus éclairée.
   La réflexion évolue dans les pays européens, où les législations sont assez diverses.
En Belgique, l'euthanasie représente un droit strictement réglementé.
     Le rapport Sicard entrouvre la porte au suicide assisté, définissant que l'assistance pourrait  être envisagée dans certains cas exceptionnels, sans céder au calcul économique , aux intérêts collectifs ou familiaux, au désarroi passager du malade ou aux pressions douteuses des familles.
  Des gardes-fous peuvent être mieux précisés, non pas tant pour prescrire ce qu'il faut faire, mais plutôt pour délimiter le périmètre des conditions d'intervention réfléchies, acceptables, humaines, au cas par cas.
  Droit de mourir dans la dignité, oui, mais à condition que l'on s'entende sur le sens que l'on donne à la notion équivoque de "dignité"...
   Le rapport de 2012 représente un pas important permettant d'affiner le jugement de tous sur ces questions et d'inspirer la réflexion et la pratique médicale, parfois isolée et désemparée.
      On ne meurt plus comme autrefois, on vit plus vieux, à la merci de plus de risques de santé, au sein de structures hospitalières et de soins dont le personnel doit être éclairé, soutenu et déculpabilisé.
             Comme le précise M.Winckler à propos du rapport Sicard , "Dans son rapport, le professeur Sicard porte un regard sévère sur une médecine sourde aux attentes des patients. "Chaque jour voit croître dans notre société une revendication très largement majoritaire (entre 80 % et 90 % selon les sondages d’opinion) de personnes répondant positivement à une demande de légalisation d’euthanasie, lit-on dans le rapport. Il ne s’agit pas de revendications simplistes ou naïves de personnes qui n’auraient pas compris la question. Il s’agit d’une demande profonde des personnes interrogées, de ne pas être soumises dans cette période d’extrême vulnérabilité de la fin de vie à une médecine sans âme." Des débats organisés dans plusieurs villes de France, la mission a ainsi retenu "le malaise, voire la colère" et surtout "la hantise [des Français] de basculer dans une situation de fin de vie insupportable, de souffrir ou de voir souffrir leurs proches".
   Mieux vaut une loi imparfaite et provisoire qu'une pratique secrète et solitaire soumise aux aléas de la subjectivité
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