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lundi 8 avril 2024

De Paris à Kigali

Enfin

         Une visite bien tardive et symbolique, bien que nécessaire

           Sur la base d'un solide rapport d'historiens,  mais souvent incomplet.   Mais sans un mot d' d'excuses

            Longtemps les responsabilités ont été niées ou détournées. Depuis longtemps déjà, les rapports étaient accablants. Des décennies après, cela reste une terrible énigme, mettant en évidence l'ambivalence de l'humanité. Toute la lumière n'est pas faite sur cette tragédie absolue, non spontanée, où le mittérandisme s'égara.  Une  histoire française .     Une renaissance qui ne peut pas ne pas laisser de traces, dans une histoire compliquée.





Responsabilité de la  France

"...Les compromissions françaises avec le régime génocidaire du Rwanda, avant, pendant et après les massacres commis à partir d’avril 1994, ont fait l’objet depuis trois décennies d’innombrables articles, de livres, de documentaires et d’un rapport officiel d’historiens, qui avait conclu, en 2021, aux « responsabilités lourdes et accablantes » de la France. Mais jamais d’une condamnation devant la justice pénale, qui n’a pas été en mesure de documenter une « complicité » de la France, même par abstention, au sens juridique du terme.    L’Élysée a fait savoir de son côté, jeudi 4 avril, que selon Emmanuel Macron, « la France aurait pu arrêter le génocide avec ses alliés occidentaux et africains », mais « n’en a pas eu la volonté ». Le président de la République devrait s’exprimer publiquement sur le sujet, ce dimanche 7 avril, date anniversaire de la tragédie rwandaise.    Dans leur requête de 115 pages déposée devant la justice administrative, les plaignants parlent, eux, du « dévoiement historique » de la France au Rwanda, qui a été « le fait d’une administration et de fonctionnaires », au premier rang desquels de nombreux responsables militaires français. Ils réclament une indemnisation de 500 millions d’euros« L’État français a commis des fautes justifiant que sa responsabilité soit engagée », observent les requérants, qui rappellent que la France « a apporté son aide, et maintenu son soutien, de diverses manières, au gouvernement rwandais génocidaire […] sans chercher à faire cesser le génocide ». Ils pointent notamment l’existence d’un accord d’assistance militaire entre les deux pays qui « n’a jamais été dénoncé » et à l’ombre duquel le projet génocidaire a mûri pendant des années. ____Il ne s’agit pas, selon les plaignants, de rechercher la faute individuelle de militaires de haut rang, de grands soldats pour la plupart dont la carrière est faite, mais la sanction collective d’un État qui a failli. « Il n’est pas nécessaire de partager l’idéologie génocidaire pour que la complicité de génocide soit reconnue. Et on peut présumer qu’aucun des militaires français engagés au Rwanda, ni avant ni pendant le génocide, n’ont partagé l’idéologie génocidaire. Il n’en demeure pas moins que leur action, résultant d’un traité de coopération technique jamais dénoncé, a eu pour effet et destination de soutenir un gouvernement génocidaire », peut-on lire dans la requête.____   Plusieurs faits sont visés pour démontrer que « le dysfonctionnement a été érigé en mode de fonctionnement » au sein de l’administration française, dont l’« insertion dans les rouages décisionnels du régime [rwandais] » était notoirement importante. Parmi ces faits : les alertes de génocide ignorées, la formation du gouvernement génocidaire en partie dans les locaux de l’ambassade de France, l’évacuation de certains responsables de la frange la plus fanatique du régime, puis l’exfiltration par la France de génocidaires en dépit de demandes d’arrestation, des livraisons d’armes malgré un embargo…                            _____  Et, enfin, l’affaire de Bisesero : ou comment l’armée française, alors déployée au Rwanda avec l’opération Turquoise, a été alertée fin juin 1994 de massacres en cours sur les collines de Bisesero mais a mis trois jours à intervenir, laissant mille personnes se faire tuer entretemps. « Juridiquement, il y a non-assistance à personne en danger et abstention de secours à l’état chimiquement pur », notent les requérants, qui parlent de « faillite morale et juridique ».___En définitive, le juriste Philippe Raphaël, qui a porté la requête, explique à Mediapart : « L’enjeu de ce contentieux, c’est que soit établie la faute de l’État pour que le droit soit rendu au regard de l’exigence de répression des génocides qui est un pilier de l’ordre international. »____En réponse, la direction des affaires juridiques du ministère des armées a adressé, mi-février, à la présidence du tribunal administratif de Paris un mémoire de sept pages, pas une de plus. « La responsabilité de l’État français n’est pas engagée », y estime sa directrice, après avoir précisé que ses écritures « n’ont évidemment pas pour vocation de nier l’horreur ni l’ampleur des actes commis au Rwanda au cours de l’année 1994 ».____Pour parer à toute perspective de condamnation, le ministère invoque une « théorie-bouclier », une sorte de totem d’immunité : les « actes de gouvernement ». Ceux-ci relèvent d’une très vielle jurisprudence du Conseil d’État (de 1822, puis 1875), selon laquelle les actes relevant d’une décision politique ne pouvaient pas être contrôlés par la justice administrative, et sont donc non condamnables. C’est la raison pour laquelle, dans l’affaire rwandaise, le ministère des armées demande au tribunal de décliner sa compétence, les faits susceptibles de lui être reprochés s’inscrivant, selon lui, « dans le cadre de relations diplomatiques que la France entretenait avec le Rwanda ».                                                                                                                                                                    Prudent, le ministère des armées plaide de manière subsidiaire l’« irresponsabilité de la puissance publique » si le tribunal devait ne pas retenir son raisonnement sur les « actes de gouvernement ». Il estime en effet qu’en tout état de cause, une condamnation est impossible, les agissements de la France entrant dans la « catégorie des actes de guerre ». L’affirmation fait bondir le chef d’état-major des armées pendant le génocide, l’amiral Jacques Lanxade, qui est pourtant un défenseur du rôle de la France au Rwanda : « On n’était pas en guerre. Je ne vois pas comment on peut dire cela », affirme-t-il à Mediapart.....  « La France s’est néanmoins longuement investie au côté d’un régime qui encourageait des massacres racistes. Elle est demeurée aveugle face à la préparation d’un génocide par les éléments les plus radicaux de ce régime […]. Au moment du génocide, elle a tardé à rompre avec le gouvernement intérimaire qui le réalisait et a continué à placer la menace du FPR [la force politique et armée tutsie – ndlr] au sommet de ses préoccupations. Elle a réagi tardivement avec l’opération Turquoise qui a permis de sauver de nombreuses vies, mais non celles de la très grande majorité des Tutsi du Rwanda exterminés dans les premières semaines du génocide », écrit la commission.  Les responsabilités pointées par la commission Duclert sont de trois ordres : politique, institutionnelle (civile et militaire) et intellectuelle, « qui, cumulées, font système et témoignent d’une défaite de la pensée ».    Sur le terrain du politique, le rapport met en cause l’« aveuglement continu » des autorités françaises dans « leur soutien à un régime raciste, corrompu et violent, pourtant conçu comme un laboratoire d’une nouvelle politique française en Afrique ».  (Fabrice Arfi_   Merci à Mediapart)      _____________________________

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