Le MILLION de visites est atteint. Merci de vos visites et de votre indulgence. En route pour la suite...si Dieu me prête vie!

mardi 7 janvier 2025

Macdonaldisation du monde

  Mais où va-t-on?  [Bis repetita]

                             Il est temps de sonner la sonnette d'alarme. La malbouffe gagne toujours plus de terrain. Manger US est devenu tendance. [les moins jeunes s'y mettent. Venez comme vous êtes, qu'ils disent...Sans chichi. Vite fait, bien fait. De Chicago à Shangaï. Même Rome n'est plus dans Rome.     La ville sacrée est envahie peu à peu par les barbares de la malbouffeDe Florence jusqu'au Vatican, c'est le déferlement. Faisant fi de la qualité de la cuisine italienne, variée et succulente.  Certains affairistes n'y voient pas d'inconvénients.

    Habemus McDo, disent-ils. Mais place St Pierre gronde une sainte colère
        De ce satanique projet, la Curie n'a cure. Vade retro!  McDo  ne passera pas! disent les autres ensoutanés. Il faut chasser les marchands du temple!   
   Quoique...ça peut rapporter gros. Les saintes finances ne sont pas bonnes et la sacrée banque est au bord de la crise..Pas très catholique...
            La tentation est grande... 
    Dans l'enceinte sacrée, les cardinaux  voient rouge.
     François, lui, aimerait de temps en temps sortir, avec les copains, sans chichi ni soutane, pour manger une bonne pizza, arrosé d'un Lacryma Christi..
      Il sait en donner autour de lui, surtout aux pauvres. Un vrai papa pizza! Lui, il préfère la napolitaine. 
             Mais l'Argentin ne cracherait pas sur un Big Mac au boeuf de la pampa.
   L'envie lui vient souvent de faire le mur,  murmure-t-on,  pour en déguster un.
                                                   Ce pape nous étonnera toujours. Il ne fait rien comme les autres (papes).
                                       C'est un pape-à-part. 
Pour faire le ménage dans la maison, il lui faut manger, et du bon.
     Il fut un temps où François (mieux connu comme Pancho le fouteux, fan de San Lorenzo, condamnant le foot-business, et le capîtalisme- du bout de ses lèvres pies était un fervent des stades et un croqueur de fugazzetas.
       Fait divers révélateur. le mal s'étend partout.                                       Un mal qui répand la rondeur... et l'uniformité. Comme j'aime n'est pas passé par là.
                                                                             La McDonaldisation poursuit son expansion programmée et  sa domination (presque ) sans partage, dans la fasfoodisation du monde.
 D'Orlando à Stockholm, de Buenos Aires à Manille. 
         La voilà maintenant qui a franchi la Grande Muraille, où s'arrêtaient les Barbares, à la conquête de la Chine (même si là-bas le célèbre Big Mac de McDonald coûte quatre fois plus cher qu'un bol de nouilles.)
        La  Nefast-food gagne du terrain chaque jourbouleversant les habitudes alimentaires locales, suivant la voie tracée par la mondialisation galopante, l'américanisation des affaires, des moeurs comme des goûts, brisant les résistances par sa modernité provocante, favorisant une consommation effrénée de bidoche et un avenir en XXL...
     Qu'est-ce qui ressemble plus à un Mc Do? Un autre Mc Do...
Même forme, mêmes produits, même composition (à quelques variantes locales près). Cela va jusqu'au calibrage des frites.
La répétition planétaire d'un même truc-à-manger. Vite.
   Standardisation, taylorisation de la production, homogénéisation, rapidité....ça se passe comme ça chez McD!  Comme ça aussi...
Produit qui ne pouvait venir que d'un pays sans histoire culinaire, où la gastronomie était inconnue, où la "fordisation" du travail comme des comportements poussaient à la vitesse, à l'efficacité, à la production de masse.
    Phénomène mimétique qui touche toute production aussi bien matérielle que culturelle (les jeux, les feuilletons télévisés...), modifie le goût, les modèles de vie, le sens esthétique...la vision du monde.
       La fast-food nation a conquis les papilles et les esprits. So fun, la bouffe-en-kit! Soft Power.
Le dé-goût s'installe sans en avoir l'air, dès l'enfance, par mimétisme inconscient de l'american way of life, même si certains font de la résistance à la junkfood.  
       C'est un grand agrément que la diversité.
       Nous sommes bien comme nous sommes.
       Donnez le même esprit aux hommes,
       Vous ôtez tout le sel de la société ;
       L'ennui naquit un jour de l'uniformité
.(  La Motte-Houdar)

                   Selon Wikipédia« McDonaldisation » est un terme employé par le sociologue américain George Ritzer dans son livre McDonaldization of Society (1991) pour désigner la prise d'une société des caractéristiques d'un restaurant rapide... Ritzer voit la restauration rapide comme devenu le paradigme de représentation contemporaine.
Alternativement, la « McDonaldisation » peut se rapporter au remplacement des restaurants traditionnels par des restaurants McDonald's.
 Ritzer détermine cinq composants principaux de la « McDonaldisation » :
            1)Efficience: trouver la méthode optimale pour accomplir une tâche (organisation scientifique du travail) ___2)Quantification: l''objectif doit être quantifiable (par exemple en termes de chiffre d'affaires) plutôt que subjectif ____    3)Contrôle: des employés « normalisés », et remplacement des employés par des technologies non-humaines _____4)Culture: dans le processus de standardisation, une hybridation culturelle se produit. Quand McDonald's s'installe dans un nouveau pays, les habitudes des consommateurs sont standardisées et, commençant par la chaine alimentaire, les cultures locales sont occidentalisées. Avec ces cinq processus, une stratégie apparemment raisonnable selon un point de vue peut mener à des résultats nocifs ou irrationnels. Ainsi, le processus de McDonaldisation peut être récapitulé comme suit : « Les principes du restaurant rapide parviennent à dominer de plus en plus de secteurs de la société américaine aussi bien que du reste du monde. »
      On peut voir la  McDonaldisation comme l'essence même du capitalisme
                     " Le processus d’américanisation défini par Georges Ritzer comme « la diffusion des idées, des coutumes, des habitudes sociales, de l’industrie et du capital américains dans le monde » voit dans la McDonaldisation son exemple le plus significatif. Pour le sociologue étatsunien, le principe du fast-food est amené à dominer des secteurs de plus en plus larges de la société, aux États-Unis et dans le reste du monde. C’est donc un processus profond et de grande envergure rendu possible par la reproductibilité des principes d’efficacité, de calculabilité, de prédictibilité et de contrôle. En ce sens, les machines tendent de plus en plus à remplacer l’être humain, et quand ce n’est pas possible, c’est l’homme lui-même, piégé par sa routine, qui peut devenir une machine. Cette métamorphose incarne l’essence du capitalisme : le passage du stade d’être vivant à celui de producteur, de consommateur et de marchandise. La déshumanisation signe, entre autres choses, la rupture définitive avec la planète, vue par les multinationales comme un énorme territoire à piller en vue d’accroître leurs propres richesses. L’équilibre terrestre, cette subtile et fragile harmonie, est ainsi régulièrement mis à mal par les intérêts financiers de quelques sociétés. La variété cède alors le pas à la globalisation, qui consiste à rendre les choses toujours plus égales à l’échelle mondiale
     La macdonaldisation est un impérialisme, soft mais efficace, une entreprise à dé-goûter, une machine à désapprendre ce qui est bon, varié, diversifié, sain...
       Le nivellement par le bas, le médiocre, continue...
 
___________________

lundi 6 janvier 2025

Dessiner quand même

            Dix ans après... Dies irae

                Certain(e)s s'en remettent difficilement.

                                La plume est plus forte que l'épée.


  _____________________________

Tout s'éclaire...

 Enfin! façon de parler.... [Bis repetita]

                                          C'est la jungle...  Jamais les débats sur l'énergie en Europe n'avaient pris une telle ampleur. L'affaire ukrainienne met à jour cruellement nos dépendances et nos fragilités et oblige à des reconversions, des obligations nouvelles, parfois divergentes par rapport aux options passées. C'est ainsi que douloureusement les écologistes radicaux révisent leur point de vue, même en Allemagne chez les Grünen, dans une situation d'urgence qui exige d'agir vite, même si c'est pour un provisoire qui peut durer. La période est aussi comme un révélateur d'options prises par le passé, qui montrent leurs limites et leurs inconséquences: le nucléaires, c'était mal: depuis presque quarante ans ce ne fut plus une priorité et les investissement furent réduits jusqu'à l'inconséquence, sans vision de l'avenir. Le réveil est brutal et il faut parer au plus pressé pour tenter un retour à une certaine souveraineté énergétique et des échanges européens efficaces et durables. Notre fragilité est aussi la conséquence de la libéralisation en vogue à Bruxelles, dans un domaine où la loi du marché a débouché sur des situations où l'absurdité le dispute à l'incohérence. Ce qui commence à être reconnu même des libéraux de chez nous...qui commencent à douter ou qui souhaiteraient urgemment de profondes réformes pour "sauver le marché"...Une situation ubuesque reconnue de plus en plus comme telle, où le métier s'est perdu (nous voilà réduits à embaucher des soudeurs américains ou canadiens), qu'il va falloir sauver au plus vite, quelles que soient ses options sur la nature du nucléaire. On n'a plus le choix. Le principe de réalité va s'imposer encore longtemps dans un domaine où la demande ne peut être que croissante. Des délestages semblent inéluctables, ce qui ne serait pas nouveau. Une véritable reprise en main s'impose d'urgence, au nom de l'intérêt général loin des courtes vues des opérations boursières, des intérêts privés vivant aux dépens de l'opérateur historique.      


                                                                                                                                              Nous voilà en Absurdistan, comme le souligne un analyste:  "..... (La situation) projette une lumière crue sur l’échec de la libéralisation du marché de l’électricité en France et, surtout, sur l’obstination des différents gouvernements à poursuivre cette politique quoi qu’il en coûte....e marché européen donne l’impression d’être au bout du modèle mis en place il y a vingt, vingt-cinq ans. » L’auteur de cette formule n’est ni encarté à La France insoumise (LFI), ni adhérent du syndicat contestataire Sud énergie. Président-directeur général (PDG) d’Électricité de France (EDF) de 2014 jusqu’à son récent remplacement, M. Jean-Bernard Lévy a dirigé plusieurs multinationales du CAC 40 : Vivendi, Thalès… Lors de sa dernière audition devant l’Assemblée nationale, le 14 septembre, ce polytechnicien distingué a enterré — sans doute un peu précipitamment — la libéralisation du marché de l’électricité. Programmée dès l’Acte unique européen de 1986 et mise en œuvre à partir de 1996, cette destruction dogmatique des monopoles publics, menée tambour battant au nom de la sacro-sainte concurrence par la Commission européenne avec la complicité des gouvernements nationaux, devait apporter efficience, innovation et prix bas. Comme l’avaient annoncé de rares analystes ayant développé une immunité au sectarisme libéral, le désastre est total. En dix ans, les tarifs sont passés de 120 à 190 euros par mégawattheure (1). Tendancielle, la hausse s’accentue depuis l’automne 2021 et plus encore après l’invasion de l’Ukraine par l’armée russe. « En Europe, les prix s’affolent sur le marché de l’électricité », titrait Le Monde daté du 26 août. « Les coûts pour livraison début 2023 ont culminé à près de 1 100 euros le mégawattheure en France, vendredi. Dix fois plus qu’il y a un an », détaillait le quotidien. La flambée frappe durement les plus pauvres, comme en témoigne le directeur général de Seine-Saint-Denis Habitat, M. Bertrand Prade : « La hausse des tarifs va représenter sur les charges pour les parties communes une augmentation de 600 %. Nous sommes plusieurs à devoir choisir, avant le 31 décembre, si nous signons un contrat avec des prix exorbitants parce que dépendant des prix du marché. Cela revient à envoyer les organismes HLM sur un marché boursier avec des cours qui s’envolent, une grande volatilité, pour des locataires particulièrement vulnérables. » Aucun des vingt-sept États de l’Union européenne ne remet pourtant en cause le dogme concurrentiel, et la Commission semble se mouvoir dans une dimension hermétique au monde réel. Tout en euphémismes, M. Lévy évoquait « un certain déni de la part des instances communautaires, au début de cette crise ».                                                         __ Pourquoi l’Union européenne s’obstine-t-elle à privilégier l’option concurrentielle, quoi qu’il en coûte ? Après tout, considérer l’énergie comme une marchandise et non comme un actif stratégique souverain a conduit l’Allemagne, et plus largement l’Europe, au bord du gouffre et promet aux 450 millions d’Européens au moins deux hivers difficiles. Mais peu importe aux eurocrates. « L’ouverture à la concurrence de ce marché permet de maintenir les prix les plus bas entre les différentes technologies en compétition », nous répond la Commission, arguant d’une situation « exceptionnelle » liée à la guerre en Ukraine. Face à pareil déni, on songe à la chanson de Paul Misraki Tout va très bien madame la marquise…Et tout va si bien qu’il n’est pas question de changer de cap. Armé de cette inébranlable conviction, le gouvernement français annonçait, le 19 juillet dernier, son intention de prendre le contrôle d’EDF à 100 %, moyennant 9,7 milliards d’euros. Racheter les 15,9 % du capital détenus par des actionnaires privés, sortir l’entreprise de la Bourse, la gaver de fonds publics puis la revendre à la découpe : le projet sent si fort la naphtaline libérale des années 1980 — socialisation des pertes, privatisation des bénéfices — qu’il a fallu un peu le ripoliner. D’après le ministère de l’économie, l’énergéticien aurait ainsi la « capacité de mener de manière accélérée plusieurs chantiers décisifs annoncés par le président de la République dans son discours de Belfort, notamment le programme de construction de six réacteurs [nucléaires] de technologie EPR2 d’ici 2050 ». Une fois propriétaire unique de l’entreprise, l’État pourra financer ses investissements à moindre coût sur les marchés, grâce à des taux d’intérêt réduits. Relayant la communication gouvernementale, les principaux médias français qualifient aussitôt l’opération de « nationalisation ». Secrétaire national de la Confédération française de l’encadrement - Confédération générale des cadres (CFE-CGC) chargé de l’énergie, M. Alexandre Grillat conteste cette terminologie : « L’État rachète les parts des actionnaires minoritaires, sans toucher au statut d’EDF. Si le gouvernement avait voulu redonner à la France une souveraineté énergétique, il aurait au moins transformé l’entreprise en EPIC [établissement public à caractère industriel et commercial].  » En fait de nationalisation, l’exécutif « étatise » l’énergéticien, souligne le secrétaire fédéral de la Fédération nationale des mines et de l’énergie (FNME) Confédération générale du travail (CGT), M. Fabrice Coudour : « Un EDF 100 % public, c’est bien sur le papier. Mais l’État aura désormais les mains libres pour démanteler le groupe sans être tenu de fournir le minimum d’information et de transparence exigé par le droit boursier. Il lui suffira par exemple de mettre en avant le niveau d’endettement du groupe (68 milliards d’euros) pour justifier une vente à la découpe. » Le spectre d’Hercule hante à nouveau EDF. Officieusement abandonné, le projet gouvernemental vise à éclater le groupe en plusieurs pôles. Ultradéficitaire, le nucléaire continuerait à être financé par le contribuable. Beaucoup plus rentables, la production éolienne et solaire, la commercialisation et la distribution seraient privatisées (2). Député socialiste de l’Eure, M. Philippe Brun a mené son enquête. Une note confidentielle du ministère de l’économie révèle le plan gouvernemental de « cession d’environ 30 % des activités liées à la transition énergétique ». Selon ce document, « le lancement à court terme d’une opération de sortie de cote permet d’éviter de débuter par une réorganisation du groupe [qui] enverrait un signal négatif aux organisations syndicales [lesquelles] ne manqueraient pas de se mobiliser fortement comme elles l’avaient fait lors des projets Hercule -Grand EDF (3)  ». Des évolutions jugées « compatibles avec les attentes de la Commission européenne »…Intronisé en octobre, le nouveau PDG Luc Rémont présente un profil idoine pour privatiser EDF. N’a-t-il pas notamment supervisé la fusion de Gaz de France (GDF) avec Suez, lorsqu’il conseillait le ministre de l’économie Thierry Breton (4) ? Au premier semestre 2022, EDF affichait un résultat négatif de 5,3 milliards d’euros. Ses principaux concurrents privés se portent à merveille, eux. Total-Energies a cumulé 10,4 milliards d’euros de bénéfices sur la même période ; Engie a engrangé 5 milliards d’euros. En février dernier, le Parlement français prolongeait de dix-huit ans la concession hydroélectrique du Rhône, sans appel d’offres, au profit d’une filiale du groupe Engie. À l’unanimité des groupes parlementaires, avec l’approbation du gouvernement français et de la Commission européenne, mais pas forcément au bénéfice des usagers. « La part majoritaire de la rente a été captée par l’État, sous forme de redevance et d’impôt sur les sociétés, le solde a été conservé par la société concessionnaire et ses actionnaires, de sorte que l’efficacité des barrages du Rhône ne bénéficie plus aux consommateurs à travers des tarifs reflétant les coûts de production », relève la Cour des comptes. D’ordinaire férus de consommation et autres « bons plans », les médias n’ont guère relayé les conclusions peu flatteuses de ce rapport…Ces mastodontes du capitalisme français peuvent remercier la « mamma étatique ». Promulguée en 2010, une loi contraint EDF à céder à prix coûtant un quart de sa production électrique nucléaire aux « fournisseurs alternatifs », au premier rang desquels Total et Engie. Au début de l’année, M. Emmanuel Macron décidait d’attribuer 20 térawattheures (TWh, 1 milliard de kilowattheures) supplémentaires d’électricité à prix cassé, qui s’ajoutent aux 100 TWh octroyés aux mêmes conditions depuis plus de dix ans. Objectif de ce dispositif, appelé accès régulé à l’électricité nucléaire historique (Arenh) : faire baisser les prix. Autrement dit, corriger les effets haussiers du marché ! Le 9 août, EDF réclamait à l’État une « demande indemnitaire » d’un montant de 8,34 milliards d’euros pour compenser le préjudice lié à l’Arenh. La nature même de l’accès au nucléaire historique favorise des détournements spéculatifs. « Un aspect curieux de la réglementation est que le droit à l’Arenh qu’obtient l’opérateur alternatif en décembre 2021 pour l’année 2022 peut être revendu sur le marché de gros au premier trimestre 2022 », souligne l’association de défense des consommateurs CLCV (consommation, logement et cadre de vie) (5). Certains fournisseurs réservent auprès d’EDF un volume d’électricité à 42 euros le mégawattheure et le revendraient quatre à dix fois plus cher, en toute illégalité. Comment ? L’entreprise annonce un nombre de clients pour justifier d’une réservation d’Arenh (à bon prix). Mais plutôt que de servir ceux-ci, comme il s’engage à le faire, le fournisseur se débarrasse d’une partie de cette électricité pour la vendre au prix fort sur le marché de gros. Et réaliser une juteuse plus-value. C’est ainsi que Mint Énergie conseille à ses clients de passer chez EDF, en leur promettant une économie de « 218 euros par an » (6) par ailleurs réelle ! La Commission de régulation de l’énergie (CRE) affirme que « certains fournisseurs font l’objet d’investigations en cours, en particulier s’agissant d’agissements susceptibles de constituer un abus d’Arenh ». Une enquête cible Ohm Énergie. C’est la première fois que la Commission ouvre une instruction pour ce motif. Délégué général de la CLCV, M. François Carlier met en doute la détermination de l’autorité dite indépendante : « Depuis plus de dix ans, la CRE n’a pas souhaité connaître les effets d’aubaine face à l’Arenh. Elle soutient idéologiquement la logique de concurrence. » Il épingle aussi le manque d’allant de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), rattachée à Bercy. « L’ouverture à la concurrence a été une catastrophe totale à tous points de vue. Elle a nui à la sécurité de l’approvisionnement énergétique et n’a rien apporté. Les fournisseurs proposent les mêmes prix à 1 % près, pour une qualité de service identique », tranche M. Frank Roubanovitch, président du Cleee, une association de grandes entreprises industrielles et tertiaires qui représentent 10 % de la consommation totale d’électricité en France, particuliers et professionnels confondus. Ses adhérents ont vu leur facture augmenter en moyenne de 50 % entre 2021 et 2022. S’il défend l’Arenh comme un moindre mal, M. Roubanovitch demande le rétablissement des tarifs réglementés de vente, supprimés en 2015. Une mesure incompatible avec les règles du marché européen, rétorque la Commission européenne. Fausse nationalisation, interventions de l’État destinées à contrer les effets aberrants de la libéralisation : les dandinements technico-bureaucratiques destinés à contourner la seule solution qui fonctionne, celle du monopole public, ont atteint un raffinement extrême. Trois économistes libéraux préconisent la « création d’une agence nationale indépendante chargée d’acheter la totalité de l’électricité de gros aux producteurs et de la revendre aux distributeurs, de façon à stabiliser les prix tout en garantissant à la filière des horizons d’investissement (7)  ». En vigueur notamment dans le très capitaliste État canadien de l’Ontario, l’« acheteur unique » combine planification à long terme et marché. « Discuté en amont de l’ouverture des marchés, ce modèle n’avait pas été retenu par les États membres de l’Union », rappelle M. Guy Lecerf, président de l’Association française indépendante de l’électricité et du gaz (Afieg), qui regroupe de grands fournisseurs alternatifs, dont Total. Il n’est pas davantage envisagé aujourd’hui. En revanche, les tarifs réglementés du gaz prendront fin comme prévu le 30 juin 2023, pour les particuliers et les copropriétés. De quoi « mettre le droit français en conformité avec le droit européen, à la suite d’une décision du Conseil d’État de 2017 », entérine le ministère de la transition énergétique. Touchés mais pas coulés, les aficionados de la logique concurrentielle serrent les rangs. Le journal Les Échos pousse même ce cri du cœur : « Électricité : réinventer le marché pour le sauver (8) ». Que le quotidien de M. Bernard Arnault se rassure : parce qu’il profite en définitive à l’État néolibéral — interventionniste, mais prioritairement en faveur des entreprises — comme aux multinationales, ainsi qu’aux hauts fonctionnaires qui passent de l’un aux autres, le modèle énergétique concurrentiel a sans doute de beaux jours devant lui."  ( Merci à David Garcia)

_______  (1Lire Aurélien Bernier, « Prix de l’énergie, une folie organisée », Le Monde diplomatique, novembre 2021.

(2Lire Anne Debrégeas et David Garcia, « Qui veut la mort d’EDF ? », Le Monde diplomatique, février 2021.

(4Marc Endeweld, « Nationalisation ? : Luc Rémont nommé PDG d’EDF… pour mieux le démanteler ? », Marianne, Paris, 26 octobre 2022.

(7Étienne Beeker, Dominique Finon et Jacques Percebois, « Électricité : Une solution efficace combinant planification et marché existe », Le Monde, 24 mai 2022.      ___________________________