Le MILLION de visites est atteint. Merci de vos visites et de votre indulgence. En route pour la suite...si Dieu me prête vie!
Affichage des articles triés par pertinence pour la requête amazon. Trier par date Afficher tous les articles
Affichage des articles triés par pertinence pour la requête amazon. Trier par date Afficher tous les articles

samedi 22 juin 2024

Ruses amazoniennes

 Le patron d'Amazon n'est pas un patron comme les autres.

              Jeff Bezos n'est pas un amateur. Il n'a pas hésité à perdre parfois beaucoup pour écraser ses partenaires- concurrents. "... Amazon, en vendant de plus en plus de jouets en ligne, va collecter peu à peu toutes les données dont il a besoin pour dominer ce secteur : les contacts des clients, bien sûr, mais aussi des indications sur les produits qui se vendent le mieux, la saisonnalité, les occasions d’achat, les arguments de vente, l’efficacité de telle promotion. Il fourbit les armes qui lui permettront un jour de se passer de son partenaire. Pour couronner le tout, Bezos fait entrer des dizaines d’autres fabricants de jouets sur la marketplace, car le contrat qu’il a signé ne l’interdit pas !   En 2004, Toys “R” Us comprend que c’était un marché de dupes : il a perdu sur tous les tableaux. Il dénonce l’accord, attaque Amazon, et obtient… 51 millions de dollars de réparation. C’est-à-dire rien. Il reprend son indépendance et tente de développer son site internet, mais il est trop tard : en 2009, Amazon vend deux fois plus de jouets que lui !   La leçon de cette histoire ? C’est qu’une anomalie concurrentielle rend la firme de Jeff Bezos irrésistible : Amazon est juge et partie ! A la fois marketplace, c’est-à-dire plateforme de marché pour les revendeurs extérieurs, et vendeur lui-même, en direct. Des centaines de revendeurs qui ont fait confiance à Amazon se sont ainsi fait court-circuiter lorsqu’un de leurs produits se vendait très bien : le site géant contactait leur fournisseur et le vendait en direct, à leur place. Bien sûr, l’Europe est intervenue, elle a pris des sanctions. Le groupe a fait l’objet de trois enquêtes anti-trust, et Amazon a préféré conclure un accord avec l’UE en décembre 2022 pour éviter une pénalité qui aurait pu atteindre 10 % de son chiffre d’affaires mondial (plus de 500 milliards de dollars en 2022) ! Mais entretemps, Toy’s R Us et beaucoup d’autres, moins connus, ont disparu, victimes des pratiques d’Amazon...."                                                                                                                                                   C'est malin...La logique marchande -prédatrice a fait son chemin et d'autres ont suivi l'exemple. Malgré des sanctions tardives et symboliques.   Au delà du droit:

                     ____  La "guerre" du dernier kilomètre: Le plus décisif et le plus problématique. L'empire ne cesse de créer des métastases partout dans le monde, La crise sanitaire a accéléré le processus et a encore enrichi un peu plus le méga-vendeur polyvalent. Mais qui arrêtera l'appétit sans limites de Jeff Bezos, dont le quasi-monopole en matière de distribution ne cesse de croître, jusqu'à interroger des Etats sur un possible démantèlement du géant?  Ce n'est pas la décision de la France d'abolir la gratuité de l'envoi des livres, pour concurrence déloyale, qui va changer la donne. Tant qu'il n'y aura pas d'accord international pour démanteler le trust (comme certains autres, pour d'autres raisons), on en restera aux bonnes intentionS, à la schizophrénie de tous ceux qui critiquent les tares et les nuisances du système tout en en profitant.    Les Etats souvent sont dans le déni et la contradiction: ils dénoncent et aident en même temps, au nom de l'emploi. Ils en profitent rarement fiscalement, à part  le Luxembourg, le grand refuge de la firme. Le mastodonte  avance à grands pas, qu'elles que soient les conditions de travail des petites mains algorithmées qui s'agitent pour assurer les livraisons en temps et en heure.  Chaque seconde compte. Time is money...

                 En Allemagne,  l’entreprise réorganise sa logistique. Le droit du travail et la dignité ne jouent aucun rôle. «Machine, je suis une machine», dit le conducteur de la camionnette blanche. «Douze heures, tous les jours, pendant quatre ans. Mais si je ne travaille pas, je ne suis pas payé.» Cet homme livre des colis pour Amazon, le numéro un mondial de la vente en ligne. Chaque matin, il fait la queue avec son camion de livraison devant le centre de distribution d’Amazon de Francfort-sur-le-Main.    Mais en cette matinée de fin d’été, début septembre 2021, quelque chose est différent: un petit groupe de syndicalistes distribue des tracts en plusieurs langues aux conducteurs. Ils entament rapidement une conversation. Les histoires se ressemblent: les chauffeurs racontent des journées de dix ou douze heures, la pression du travail, les tournées quotidiennes avec 250 livraisons. A la fin du mois ils reçoivent 1000 à 1200 euros, souvent en retard. Il y a parfois des déductions, par exemple pour un rétroviseur cassé ou des rayures sur le véhicule.   Si l’on y regarde de plus près, on constate qu’une grande partie de ces mesures violent le droit du travail allemand. Mais: «là où il n’y a pas de plaignant, il n’y a pas de juge». Les conducteurs ne connaissent souvent pas leurs droits. Beaucoup viennent d’Europe de l’Est, certains du Moyen-Orient. Pour survivre, ils dépendent de cet emploi. Le courage pour s’attaquer à leur employeur est difficile à réunir.    L’action à Francfort était organisée par le syndicat du secteur des services, Verdi, et le réseau d’aide du DGB (Deutscher Gewerkschaftsbund) «Faire Mobilität». Une centaine de personnes réparties en petites équipes distribuent du matériel d’information à plus de 8000 chauffeurs qui circulent pour Amazon afin d’effectuer des livraisons de colis sur le «dernier kilomètre»  ou dans le transport par camion. Cependant, aucun d’entre eux n’est employé par Amazon. Depuis le début, l’entreprise a externalisé son risque entrepreneurial en matière de livraison à un réseau de petits sous-traitants qui se font concurrence et transfèrent la pression à leurs travailleurs.                                                                               Amazon exploite 14 grands entrepôts d’expédition en Allemagne, entre Hambourg et Munich. Les grèves existent depuis des années dans beaucoup d’entre eux. Mais outre la vente par correspondance, l’entreprise développe également d’autres domaines stratégiques. L’un d’entre eux est la logistique. Amazon s’est lancé dans le transport de conteneurs et exploite sa propre compagnie aérienne de fret [Amazon a acheté des avions à Delta Airlines, à WestJet ; Amazon Air annonce l’objectif de 200 avions d’ici six à sept ans], qui se situe désormais à la quatrième place. L’automne 2020, la société a inauguré sa propre plate-forme de fret aérien à l’aéroport de Halle-Leipzig. En plein milieu de la crise de coronavirus, qui n’était pas une crise pour Amazon; elle a suscité le plus grand boom jamais connu pour la firme.                                                                          La partie la plus critique de la chaîne logistique est le «dernier kilomètre». C’est au moment où le colis arrive chez le client final que les choses peuvent le plus mal tourner. Les véhicules de livraison sont coincés dans les embouteillages ou ne trouvent pas de place de stationnement, les destinataires ne sont pas chez eux, les adresses ne sont pas claires, les transporteurs de colis doivent se rendre à la porte d’entrée au cinquième étage du deuxième bâtiment se situant en deuxième rangée ou passer devant des chiens agressifs. Et, plus important encore pour Amazon, 50% des coûts sont encourus dans le dernier kilomètre.         Il n’est pas surprenant qu’Amazon essaie de prendre le contrôle du «dernier kilomètre» depuis environ cinq ans. Avec sa division Amazon Logistics, l’entreprise met en place son propre service de livraison et se rend de plus en plus indépendante de sociétés comme Deutsche Post DHL et Hermes Logistik Gruppe Deutschland. Il s’agit d’un autre facteur de précarisation dans un secteur qui subit déjà une énorme pression concurrentielle. «Delivery Service Partners» (DSP) est le nom du réseau de sous-traitants spécialement créé par Amazon. En outre, ces derniers expérimentent un modèle d’emploi basé sur une plateforme, du type Uber ou d’autres entreprises de la gig economy: les «livreurs indépendants» peuvent s’inscrire via l’application «Amazon Flex» et livrer des colis avec leur propre voiture. En contrepartie, ils reçoivent 25 euros par heure, avec lesquels ils doivent non seulement payer les frais médicaux, mais aussi leurs frais de fonctionnement et la sécurité sociale.                                              La charge principale de l’activité de livraison repose toutefois sur les «DSP», de petites entreprises possédant cinq à dix, voire 25 véhicules, qui font la queue tous les matins devant les centres de distribution de marchandises conjointement aux chauffeurs d’autres entreprises de même taille. Amazon a désormais mis en place une cinquantaine de ces centres régionaux communs de distribution en Allemagne. C’est ici que sont planifiées les tournées de livraison et que les colis sont chargés dans les camions de livraison. Amazon n’a pas inventé le système de sous-traitance dans la livraison de colis – Hermes, DPD (du groupe français La Poste), GLS (General Logistics Systems, néerlandais) l’utilisent également; et c’est le cas de plus en plus de DHL. Mais beaucoup plus systématiquement que tous ses concurrents, Amazon combine les avantages commerciaux de cette externalisation avec un suivi numérique, un contrôle par les algorithmes et l’IA (intelligence artificielle).              Tina Morgenroth, du Centre de conseil de Thuringe «Faire Mobilität», a examiné le centre de distribution ouvert à Erfurt-Stotternheim fin 2019, à titre d’exemple. Non pas parce qu’elle s’en prenait à Amazon, mais parce que de plus en plus de travailleurs des sous-traitants d’Amazon se présentaient à son centre de conseil avec des problèmes – ils sont désormais environ 150 à avoir demandé un appui. Ils signalent des conditions de travail qui ne devraient pas exister selon le droit du travail actuel. Des durées de travail de dix à douze heures, six jours par semaine, pas d’indemnités de maladie, un salaire inférieur au salaire minimum légal, une pression de travail qui empêche de prendre les pauses légalement requises. Néanmoins, les temps de pause sont automatiquement déduits – l’IA vous envoie ses «salutations».      Les contrôles effectués par les autorités compétentes en matière de protection du travail n’ont pas encore constitué une menace sérieuse pour Amazon. Il est difficile de tenir l’entreprise Amazon responsable des conditions de travail de ses sous-traitants. De plus, les sous-traitants sont souvent difficiles à être soumis à une procédure. Par exemple, à la mi-juillet, l’autorité de protection du travail de la Thuringe a constaté des violations chez 21 sous-traitants de colis Amazon. Cependant, comme 20 de ces entreprises ont leur siège en dehors de la Thuringe, elles ne sont pas légalement responsables. La santé et la sécurité au travail sont une affaire des Länder. Toutefois, le problème – le système Amazon – est mondial! " (Article publié par l’hebdomadaire Der Freitag, en date du 4 octobre 2021; traduction rédaction A l’Encontre)....     ________________________

vendredi 8 octobre 2021

Ça se passe comme ça chez Amazon

    Au delà du droit.  

                       La "guerre" du dernier kilomètre: Le plus décisif et le plus problématique. L'empire ne cesse de créer des métastases partout dans le monde, La crise sanitaire a accéléré le processus et a encore enrichi un peu plus le méga-vendeur polyvalent. Mais qui arrêtera l'appétit sans limites de Jeff Bezos, dont le quasi-monopole en matière de distribution ne cesse de croître, jusqu'à interroger des Etats sur un possible démantèlement du géant?  Ce n'est pas la décision de la France d'abolir la gratuité de l'envoi des livres, pour concurrence déloyale, qui va changer la donne. Tant qu'il n'y aura pas d'accord international pour démanteler le trust (comme certains autres, pour d'autres raisons), on en restera aux bonnes intentionS, à la schizophrénie de tous ceux qui critiquent les tares et les nuisances du système tout en en profitant.    Les Etats souvent sont dans le déni et la contradiction: ils dénoncent et aident en même temps, au nom de l'emploi. Ils en profitent rarement fiscalement, à part  le Luxembourg, le grand refuge de la firme. Le mastodonte  avance à grands pas, qu'elles que soient les conditions de travail des petites mains algorithmées qui s'agitent pour assurer les livraisons en temps et en heure.  Chaque seconde compte. Time is money...

                 En Allemagne,  l’entreprise réorganise sa logistique. Le droit du travail et la dignité ne jouent aucun rôle. «Machine, je suis une machine», dit le conducteur de la camionnette blanche. «Douze heures, tous les jours, pendant quatre ans. Mais si je ne travaille pas, je ne suis pas payé.» Cet homme livre des colis pour Amazon, le numéro un mondial de la vente en ligne. Chaque matin, il fait la queue avec son camion de livraison devant le centre de distribution d’Amazon de Francfort-sur-le-Main.    Mais en cette matinée de fin d’été, début septembre 2021, quelque chose est différent: un petit groupe de syndicalistes distribue des tracts en plusieurs langues aux conducteurs. Ils entament rapidement une conversation. Les histoires se ressemblent: les chauffeurs racontent des journées de dix ou douze heures, la pression du travail, les tournées quotidiennes avec 250 livraisons. A la fin du mois ils reçoivent 1000 à 1200 euros, souvent en retard. Il y a parfois des déductions, par exemple pour un rétroviseur cassé ou des rayures sur le véhicule.   Si l’on y regarde de plus près, on constate qu’une grande partie de ces mesures violent le droit du travail allemand. Mais: «là où il n’y a pas de plaignant, il n’y a pas de juge». Les conducteurs ne connaissent souvent pas leurs droits. Beaucoup viennent d’Europe de l’Est, certains du Moyen-Orient. Pour survivre, ils dépendent de cet emploi. Le courage pour s’attaquer à leur employeur est difficile à réunir.    L’action à Francfort était organisée par le syndicat du secteur des services, Verdi, et le réseau d’aide du DGB (Deutscher Gewerkschaftsbund) «Faire Mobilität». Une centaine de personnes réparties en petites équipes distribuent du matériel d’information à plus de 8000 chauffeurs qui circulent pour Amazon afin d’effectuer des livraisons de colis sur le «dernier kilomètre»  ou dans le transport par camion. Cependant, aucun d’entre eux n’est employé par Amazon. Depuis le début, l’entreprise a externalisé son risque entrepreneurial en matière de livraison à un réseau de petits sous-traitants qui se font concurrence et transfèrent la pression à leurs travailleurs.                                                                               Amazon exploite 14 grands entrepôts d’expédition en Allemagne, entre Hambourg et Munich. Les grèves existent depuis des années dans beaucoup d’entre eux. Mais outre la vente par correspondance, l’entreprise développe également d’autres domaines stratégiques. L’un d’entre eux est la logistique. Amazon s’est lancé dans le transport de conteneurs et exploite sa propre compagnie aérienne de fret [Amazon a acheté des avions à Delta Airlines, à WestJet ; Amazon Air annonce l’objectif de 200 avions d’ici six à sept ans], qui se situe désormais à la quatrième place. L’automne 2020, la société a inauguré sa propre plate-forme de fret aérien à l’aéroport de Halle-Leipzig. En plein milieu de la crise de coronavirus, qui n’était pas une crise pour Amazon; elle a suscité le plus grand boom jamais connu pour la firme.                                                                          La partie la plus critique de la chaîne logistique est le «dernier kilomètre». C’est au moment où le colis arrive chez le client final que les choses peuvent le plus mal tourner. Les véhicules de livraison sont coincés dans les embouteillages ou ne trouvent pas de place de stationnement, les destinataires ne sont pas chez eux, les adresses ne sont pas claires, les transporteurs de colis doivent se rendre à la porte d’entrée au cinquième étage du deuxième bâtiment se situant en deuxième rangée ou passer devant des chiens agressifs. Et, plus important encore pour Amazon, 50% des coûts sont encourus dans le dernier kilomètre.         Il n’est pas surprenant qu’Amazon essaie de prendre le contrôle du «dernier kilomètre» depuis environ cinq ans. Avec sa division Amazon Logistics, l’entreprise met en place son propre service de livraison et se rend de plus en plus indépendante de sociétés comme Deutsche Post DHL et Hermes Logistik Gruppe Deutschland. Il s’agit d’un autre facteur de précarisation dans un secteur qui subit déjà une énorme pression concurrentielle. «Delivery Service Partners» (DSP) est le nom du réseau de sous-traitants spécialement créé par Amazon. En outre, ces derniers expérimentent un modèle d’emploi basé sur une plateforme, du type Uber ou d’autres entreprises de la gig economy: les «livreurs indépendants» peuvent s’inscrire via l’application «Amazon Flex» et livrer des colis avec leur propre voiture. En contrepartie, ils reçoivent 25 euros par heure, avec lesquels ils doivent non seulement payer les frais médicaux, mais aussi leurs frais de fonctionnement et la sécurité sociale.                                              La charge principale de l’activité de livraison repose toutefois sur les «DSP», de petites entreprises possédant cinq à dix, voire 25 véhicules, qui font la queue tous les matins devant les centres de distribution de marchandises conjointement aux chauffeurs d’autres entreprises de même taille. Amazon a désormais mis en place une cinquantaine de ces centres régionaux communs de distribution en Allemagne. C’est ici que sont planifiées les tournées de livraison et que les colis sont chargés dans les camions de livraison. Amazon n’a pas inventé le système de sous-traitance dans la livraison de colis – Hermes, DPD (du groupe français La Poste), GLS (General Logistics Systems, néerlandais) l’utilisent également; et c’est le cas de plus en plus de DHL. Mais beaucoup plus systématiquement que tous ses concurrents, Amazon combine les avantages commerciaux de cette externalisation avec un suivi numérique, un contrôle par les algorithmes et l’IA (intelligence artificielle).              Tina Morgenroth, du Centre de conseil de Thuringe «Faire Mobilität», a examiné le centre de distribution ouvert à Erfurt-Stotternheim fin 2019, à titre d’exemple. Non pas parce qu’elle s’en prenait à Amazon, mais parce que de plus en plus de travailleurs des sous-traitants d’Amazon se présentaient à son centre de conseil avec des problèmes – ils sont désormais environ 150 à avoir demandé un appui. Ils signalent des conditions de travail qui ne devraient pas exister selon le droit du travail actuel. Des durées de travail de dix à douze heures, six jours par semaine, pas d’indemnités de maladie, un salaire inférieur au salaire minimum légal, une pression de travail qui empêche de prendre les pauses légalement requises. Néanmoins, les temps de pause sont automatiquement déduits – l’IA vous envoie ses «salutations».      Les contrôles effectués par les autorités compétentes en matière de protection du travail n’ont pas encore constitué une menace sérieuse pour Amazon. Il est difficile de tenir l’entreprise Amazon responsable des conditions de travail de ses sous-traitants. De plus, les sous-traitants sont souvent difficiles à être soumis à une procédure. Par exemple, à la mi-juillet, l’autorité de protection du travail de la Thuringe a constaté des violations chez 21 sous-traitants de colis Amazon. Cependant, comme 20 de ces entreprises ont leur siège en dehors de la Thuringe, elles ne sont pas légalement responsables. La santé et la sécurité au travail sont une affaire des Länder. Toutefois, le problème – le système Amazon – est mondial! " (Article publié par l’hebdomadaire Der Freitag, en date du 4 octobre 2021; traduction rédaction A l’Encontre)....     _________________________

mercredi 4 juillet 2012

Amazon, par l'aide publique alléché...

___________Succès pour Montebourg, mais menaces pour le livre...
________________________________________________"Défendre la librairie indépendante est plus qu’un choix de société, c’est un choix de civilisation. Il s’agit de choisir entre l’âme et le commerce, entre l’intelligence et la vacuité, entre la pensée et les marchands du Temple." (Vincent Monadé)
_____________________
 ___ Amazon vend de tout, même des livres.
Beaucoup de livres. Toujours plus de livres.
La firme américaine grignote rapidement des parts de marchés de plus en plus importantes au quatre coins du monde.
Commode Amazon! A domicile, vous pouvez commander ce que vous voulez, le dernier ouvrage paru, et télécharger à la vitesse de la lumière sur votre  Kindle l'ouvrage ou le journal qui vous intéresse. C'est pratique et avantageux (pour l'instant), mais c'est à double tranchant.
Un vrai service dans la durée ou un piège?
__A vrai dire, la firme de Seattle n'est pas une oeuvre caritative, ni un service public, ni particulièrement soucieuse de culture, ni vraiment exemplaire
Pourquoi son siège européen est-il fixé au Luxembourg? Bonne question...
 _Même si sa marge est pour l'instant réduite au regard de ses investissements, on peut voir la firme comme un prédateur rampant, qui commence à déstabiliser l'industrie du livre et qui risque de se trouver en situation de monopole ou de quasi monopole, finissant par dicter sa loi aux éditeurs, peser sur les ventes et orienter le choix des lecteurs. Logique marchande imparable...
Mais le livre est-il une marchandise comme une autre?
Amazon avance ses pions, sans se presser, tendu vers un avenir sans doute prometteur.
On parlait de risque de googelisation. Faut-il évoquer le danger d'amazonisation?
______________Arnaud Montebourg est satisfait dans sa nouvelle fonction et de cette aubaine régionale en termes d'emplois:" L’implantation de cette plate-forme logistique de 40 000 m2 doit permettre la création de 500 à 1000 emplois dans la région, dont 400 contrats à durée déterminée maximum et 600 emplois d'intérimaires."
Mais ce n'est pas gratuit: " Le montant de l'aide publique versée pour chaque emploi créé sera d'environ 20 000 euros. « Aujourd’hui la Saône-et-Loire conforte son industrie et investi aussi dans l’économie de loisirs et la culture. Après la tempête voici le printemps et le renouveau, » a déclaré le ministre du redressement productif.
 Vraiment productif à long terme, sans compter les cadeaux?...
_" Le développement croissant des activités d’Amazon en France n’augure rien de bon pour l’emploi et « la culture », chers à Arnaud Montebourg. Car, derrière les emplois crées par Amazon qui, rappelons-le, bénéficiera d’aides publiques en échange de sa bienveillance, il y a la face cachée. Celle d’une entreprise que rien n’arrête dans sa course à l’hégémonie.... son activité principale demeure la vente de livres en ligne. Et à ce jeu là, Amazon écrase tout sur son passage. Aux Etats-Unis, où le premier site est mis en ligne en 1995, les acteurs de l’industrie du livre savent de quoi il retourne. A titre d’exemple, la grande chaîne américaine Borders a fermé plus de 200 grandes surfaces en 2010 avant de faire faillite. En France, c’est la librairie en ligne française Bibliosurf qui a jeté l’éponge, cinq ans après son lancement, fin 2011. En cause : les prix pratiqués par Amazon.
Désormais, ce sont les libraires qui se sentent menacés. Ce sentiment tient à un constat simple : les librairies en ligne se sont emparées de plus de 11 % du marché du livre français en 2010 et s'imposent de plus en plus dans le circuit de l'occasion; or les professionnels considèrent qu'Amazon totalise 80% au moins du chiffre d'affaires de la vente en ligne. En intégrant les frais de livraison dans le prix de vente et en proposant à ses clients systématiquement des livres d'occasion à prix cassés  Amazon pratique selon eux une concurrence déloyale. Beaucoup de librairies ont ainsi dû mettre la clé sous la porte ces dernières années, comme le laisse entendre Vincent Monadé, président du MOTif, dans une tribune publiée en 2011, intitulée « Amazon m’a tuer »
 Il y aurait danger à ce que les librairies disparaissent les unes après les autres de nos villes car, en effet, celles-ci sont indispensables à la diffusion du livre et participent à faire découvrir de nouveaux auteurs ainsi qu'une littérature exigeante, soigneusement selectionnée par les libraires eux-mêmes."
___Heureusement, pour l'instant, Amazon se plie au prix fixé par l'éditeur, même pour son Kindle, au prix garanti, évitant une concurrence sauvage. Il n'a d'ailleurs pas le choix. Le vrai livre résiste encore. Mais pour combien de temps, surtout quand on connaît la fragilité du marché du livre, si particulier, et les tentations locales d'aider à tous prix les entreprises qui promettent beaucoup sans toujours respecter leur contrat?
Amazon pourrait bouleverser l'édition et lui dicter sa loi.
 Créer  1000 emplois, c'est bien, mais combien d'autres détruits en contre-partie?
_Toujours revient, en logique néo-libérale, le problème de la faiblesse des  politiques face aux pouvoirs exorbitants de groupes financiers, aux dépens de l'intérêt général à long terme.
_____________________
- Amazon dicte sa loi et asphyxie les petits éditeurs
- Comment Amazon menace l'édition française
- Les libraires contre Amazon 
- La machine Amazon

mercredi 12 décembre 2018

Bon à savoir

Plongée amazonienne
                       (Point de vue d'un repenti)
                                          Hier soir, Arte après d'autres, nous a amenés dans les coulisses du géant de Seattle, en dépassant les apparences, l'idéologie officielle et le discours convenu.
     L'obsession de la croissance de la firme, beaucoup aidée par les pouvoirs publics, stupéfie et inquiète  ceux qui se penchent, derrière le discours lénifiant et parfois délirant de J.Bezos, sur les véritables pouvoirs présents et à venir de la multinationale à prétention universelle.
     Présenté comme le meilleur des mondes de l'e-commerce, le pouvoir tentaculaire de la multinationale poursuit son irrésistible ascension dans presque tous les domaines, avec l'ambition affichée de rester en situation de monopole, quelles que soient les conditions de travail des petites mains qui oeuvrent de par le monde dans les immenses entrepôts et sur les routes de livraison.
    Tout, vous trouverez tout sur Amazon. D'un clic, la carte bleue fait des miracles. Dans deux jours, vous avez à la maison, à un prix défiant toutes concurrences, tout ce que vous désirez, de la lampe de poche à la bineuse de jardin, du stylo au vélo. Pas de perte de temps. C'est la clé du succès. Demain, la médecine sera un domaine juteux et d'autres services encore...
    Oui, mais le géant contribue au démantèlement des commerces de proximité mais aussi à la baisse des salaires, en faisant pression sur les fabricants et à celui de la précarité de beaucoup de salariés mal payés et "robotisés"
     Le document de Arte nous fait aussi entrevoir les incidences insoupçonnées du pouvoir de Amazon sur la souveraineté personnelle et collective.
   Le voyage en Amazonie se révèle plein de surprises pour qui veut bien être un peu curieux.
       Comment résister au monstre tentaculaire aux vastes ambitions, qui défie le pouvoir des Etats, qui brasse un capital qui dépasse parfois celui de plusieurs pays réunis? Qui pourrait acheter demain Carrefour et Auchan...
      Pour l'instant, c'est surtout une complicité que rencontre J.Bezos dans son ascension, lui qui fait miroiter les créations de main d'oeuvre pour gagner toujours plus de terrain...et de subventions. Pour défier le fisc dans les pays d'accueil. Le chantage fonctionne assez bien jusqu'ici et l'Europe réagit mollement. Il faut dire que le pays du Président de la Commission accueille chez lui la maison-mère européenne, les taxes y étant ridicules...
  Amazon sait y faire en matière d'aides généreuses, de salaires et d'impôts.
       Question de savoir-faire...jouant sur le faiblesse des Etats.
         Quitte à ne pas faire de bénéfices pendant un certain temps, du moins sur certains produits.
   C'est ainsi qu'on tue l'adversaire, même des géants de la distribution aux USA.
     Le monopole est l'objectif.
          Le rouleau compresseur continue sa course
               L'Amazon-power est en question. Qui l'arrêtera?
                                  Non seulement Amazon a aujourd’hui un pouvoir économique considérable, mais aussi une influence de plus en plus grande sur la vie intellectuelle notamment aux Etats-Unis. Selon une étude réalisée par le Codex Group et publiée en mars, Amazon contrôle 67% du marché du livre électronique américain et 41% de la vente des livres neufs à la fois papier et électronique. 
     Pour Franklin Foer, il n’y a plus qu’une seule solution briser par une action publique utilisant les lois antitrust le monopole d’Amazon tout comme en 1911 la compagnie pétrolière américaine Standard Oil avait été divisée en 34 entités.
«Mais nous devons d’abord réaliser que nous sommes complices d’Amazon. Nous avons tous été séduits par les remises importantes, les livraisons automatiques mensuelles de couches, les films gratuits, les paquets cadeaux, les livraisons gratuites en deux jours, la possibilité d’acheter des chaussures ou des livres ou des haricots ou du papier toilette au même endroit…» 
     Un modèle de gestion à la Big-Brother.
                          Un front anti-Amazon s’organise
                                           Mais avec quel succès?...
    [ Vous pouvez acheter le livre de J.B.Mallet chez Amazon votre libraire le plus proche (s'il en reste...)]
__________________

jeudi 25 mars 2021

Silence, on espionne!

        Curiosité illégale.     

                        Chez Ikea- France, on n'y va pas par quatre chemins. On s'instaure surveillant de la main d'oeuvre. On se sait jamais. Mais ce n'est pas anecdotique et ce n'est pas nouveau, même si les moyens on changé et se sont sophistiqués. Aujourd'hui, on peut être observé et suivi sans même le savoir. On n'arrête pas le progrès....Mais c'est verboten: espionner les salariés peut  coûter cher, quelle que soit la manière, quels que soient les moyens. Les droits patronaux ne sont pas illimités. L'information sur la personne salariée ne peut s'exercer que dans certaines limites bien définies.

           Chez IKEA, on a des principes, mais...."Plus de neuf ans après le scandale d’espionnage qui a mis dans la tourmente la filiale française du géant suédois du meuble en kit, un procès s’ouvre ce lundi 22 mars au tribunal judiciaire de Versailles. L’entreprise, mais aussi deux anciens P.-D.G., sont jugés aux côtés de douze autres prévenus, tous accusés d’avoir soumis, à différents degrés, des salariés d’Ikea France, mais aussi des clients et des candidats à l’embauche, à une vaste opération de surveillance illégale entre 2009 et février 2012. Ces cibles auraient été épiées, leurs antécédents judiciaires illégalement épluchés, avec l’aide d’un réseau de détectives privés et de policiers..."                                                                 _____Chez AMAZON aussi , la colère ouvrière gronde dans plusieurs pays contre le géant de la distribution, ses conditions de travail et sa "curiosité" concernant son personnel, notamment en Alabama:   "...Depuis plusieurs mois, les membres du syndicat des travailleurs de la distribution RWDSU (Retail, Wholesale and Department Store Union) se relaient à ce croisement, qui mène au parking du gigantesque centre de distribution « BHM1 » d’Amazon, quelques dizaines de mètres plus loin.  Armés de pancartes, ils encouragent les 5 800 employés qui défilent en voiture toute la journée, à voter pour la création d’un syndicat dans le cadre du référendum interne en cours depuis début février. Ces derniers ont jusqu’au 29 mars pour remettre leur bulletin de vote. S’il voit le jour, ce syndicat serait le premier à naître au sein d’un entrepôt d’Amazon aux États-Unis, toutes les autres tentatives ayant échoué jusqu’à présent....Inquiète du risque de contagion syndicale parmi ses 800 000 employés aux États-Unis, l’entreprise a demandé aux autorités locales de raccourcir la durée du feu rouge au carrefour pour éviter que ses employés ne discutent trop longtemps avec les équipes de la RWDSU – Amazon assure que le changement a été fait pour éviter les embouteillages à la sortie du parking. « C’est la plus grosse campagne de l’histoire de notre syndicat », résume Stuart Appelbaum, le président de la RWDSU, fondée en 1937. Ouvert en mars 2020 pour faire face au boom des commandes pendant la pandémie, le centre de distribution de Bessemer est une aubaine économique pour cette région du « Deep South » des États-Unis, pauvre et noire, scarifiée par le déclin de l’industrie et le manque de protections sociales hérité de l’esclavage. Rapidement, il est aussi devenu le symbole des dérives du système Amazon. Face au refus de la direction d’augmenter ses employés, composés à 80 % d’Afro-Américains, en pleine pandémie, une poignée d’employés de « BHM1 » ont rencontré en secret les syndicalistes de la RWDSU l’été dernier pour leur demander de les aider à monter un syndicat. En décembre, quelque 2 000 employés avaient manifesté leur soutien au projet. Le référendum a démarré deux mois plus tard.  Depuis, la campagne bat son plein devant et derrière les murs du bâtiment, où quatre grandes banderoles « Vote » ont été installées sur la façade. Côté Amazon, un consultant anti-syndical a été recruté à prix d’or pour dissuader les employés de voter pour le syndicat – une pratique nommée union busting répandue dans les grandes entreprises américaines.....« Beaucoup des travailleurs d’Amazon ont deux emplois. Ils travaillent 10 heures au centre et ont un autre emploi le week-end car ils ne peuvent pas faire face au coût de la vie. Amazon pense qu’ils leur font une fleur en les payant 15 dollars de l’heure, mais c’est loin d’être suffisant », dit-il, surtout pour les parents qui élèvent leurs enfants seuls.... Pour sa part, Perry Connelly, un employé de « BHM1 » impliqué dans la campagne, dénonce des conditions de travail « déshumanisantes ». Recruté par Amazon en avril, cet Afro-Américain de 58 ans est « water spider » (« araignée d’eau »), un employé chargé de s’assurer que les commandes sont réparties entre les différentes stations de travail pour être traitées. Rencontré dans le local syndical à Birmingham, la grande ville à côté de Bessemer, il évoque le système informatique « ToT » (« Time off Tasks »), qui mesure la productivité des employés..."                                                                                                                        A plus grande échelle et pour des raisons plus stratégiques, Les USA espionnent les grands groupes français en toute impunité, au nom du principe d'exterritorialité qu'ils se sont arrogés unilatéralement. Faut pas se gêner...     _________________________

vendredi 12 janvier 2018

Aventures amazoniennes

Jeff, tel qu'en lui-même.
                              Qui arrêtera le roi du e-commerce dans son irrésistible ascension?
     Jeff Bezos, devenu l'homme le plus riche du monde, défié par Alibaba, la deuxième fortune chinoise, paraît-il, transhumaniste à ses heures, n'est pas un e-commerçant comme un autre.
   C'est aussi un prophète libertarien, annonçant un e-avenir radieux, grand donateur du think tank libertarien Reason Foundation.
   Le killer des petits libraires, surtout aux USA, mais pas seulement. suit un chemin favorisé par les exceptions fiscales qu'on lui accorde, au Luxembourg ou ailleurs.
   Plus il monte dans le firmament des plus grands , plus il veut monter, en visant maintenant le monde des grands distributeurs de la planète. Le livre, c'est devenu annexe.
     Mondialisation oblige. Les Etats ne pèsent pas lourds, hésitant à limiter les ambitions du mastodonte. Il faut dire qu'il crée de l'emploi, même s'il robotise à grande vitesse. Et il a les faveurs des consommateurs-rois, qui veulent des produits toujours moins chers et toujours plus vite livrés.
    De l'autre côté du décor, c'est un management sans pitié, la loi de la jungleÀ l'ère du travail rare, des diplômés surqualifiés et déclassés, les candidats se bousculent. Le turn-over n'est pas un problème. En outre, à lire l'article du NYT, les amazoniens semblent plutôt contents de leur sort. Certes, confie cet ancien « leader », "j'ai vu pleurer à leur bureau presque tous mes collègues", mais il ressort de tout cela que, pour la plupart des cadres, "Amazon reste le meilleur endroit où ils ont détesté travailler". 
    Paradoxe de la servitude volontaire, qui dessine un avenir inquiétant.
Mais le serial investisseur Jeff Bezos est sans état d'âme sur l'avenir de l'information, sur laquelle il a quelques ambitions.
   Ses stratégies sont claires pour construire un empire toujours plus grand.
       Un management implacable, pas seulement à l'égard du personnel. (*)
  Certains sont admiratifs, d'autres n'ont pas envie de rire, face à cette politique de dumping tous azimuts de la terre brûlée, sous couvert de modernisme marchand. Le monopole est l'objectif, négation du capitalisme lui-même.
  C'est le NYTimes lui-même qui met le doigt là où ça fait mal.
               Mais les arbres ne montent pas jusqu'au ciel...
________
  (*)  "Amazon n'est pas une simple multinationale, c'est un modèle de société liberticide:...la véritable spécificité d'Amazon n'est pas la pénibilité du travail dans ses usines – beaucoup d'usines ou de chantiers ont des conditions de travail terribles et Amazon n'est pas un cas isolé. La spécificité d'Amazon, c'est son organisation interne impitoyable pour l'humain, élaborée à partir de son infrastructure informatique, avec ses bornes wi-fi disséminées partout, ses caméras de surveillance, son contrôle total de l'individu, de la productivité ainsi que son paternalisme maison très idéologique. La spécificité d'Amazon, c'est que son infrastructure informatique complexe a pour objectif d'exploiter à outrance la machine qui réalise les opérations les plus complexes des entrepôts : l'être humain. Beaucoup bavardent à propos de la robotisation future d'Amazon. Seulement pour l'heure, l'exploitation d'intérimaires est beaucoup, beaucoup plus rentable. D'autant qu'à la différence d'un robot, un intérimaire ne se remplace pas quand il est cassé. Amazon le congédie et il est immédiatement remplacé par un autre chômeur...."
_________________


lundi 14 décembre 2020

Faire payer Amazon?

S'agit-il bien de cela essentiellement?

         Imposer davantage le mastodonte de Seattle paraîtrait la moindre des choses, à conditions que tous les pays où il prospère le fassent de manière unanime et concertée. Ce qui est un peu rêver. Le problème majeur est celui du développement sans fin de cette transnationale, qui dit créer des emplois , mais qui en détruit beaucoup plus, dans divers secteurs et qui en précarise un grand nombre.     Des initiatives internationales se manifestent contre celui qui prend trop et ne rend pas assez. Mais ce ne sont pas des initiatives dispersées qui changeront fondamentalement les choses. Les autorités de Bruxelles commencent à se rendre enfin compte de l'ampleur du problème et de la concurrence déloyale à laquelle se livre la multinationale. Mais il faut encore passer aux actes et dans tous les pays, malgré les promesses de la firme.                _____Amazon joue sur nos contradictions, surtout en ces temps de covid où il redouble d'activité. Le piège commercial a bien fonctionné, avec notre "complicité" inconsciente: "... Amazon est devenu le porte-drapeau de notre dilemme contemporain, celui qui nous fait balancer entre contempteur et profiteur de l’ubérisation croissante de nos sociétés. Succomber ou résister ? Telle est bien l’alternative à laquelle nous confronte un acteur qui traite près de 50 colis par seconde dans ses entrepôts et est utilisé par près d’un Français sur deux. En partant de la vente en ligne de livres, Amazon a tissé en vingt-cinq ans une toile quasi infinie, vendant tout ou presque, de la vis à tête fraisée au chocolat fourré, achetés en quelques clics et livrés à domicile en un temps record. Essaimant ses entrepôts sur tout le territoire, il est devenu tout à la fois indispensable à nombre de nos concitoyens éloignés des villes et parfois la porte d’accès quasi unique à la consommation pour des urbains actifs et pressés..."                                        _________  Pour le super-géant du e-commerce, la crise lui profite.                                              C'est la fête à Amazon. Comme à tous les e-commerces en général. Click and collect wait! c'est le mot d'ordre du moment.          Mais à Seattle, c'est à une échelle jamais encore vue. On comprend que des collectifs disent stop. Il est temps. Sinon c'est un monde  pire qu'avant qui nous attend: "... un monde d’après pire qu’avant. Celui d’un capitalisme sécuritaire dominé par les GAFA, ces géants de l’e-commerce et de la vie numérique. Celui d’une multinationale en train d’asseoir son monopole dans la vente de milliards de produits en détruisant la vie sociale locale, une multinationale qui détruit 4,5 emplois lorsqu’elle en crée un, qui remplace progressivement ses salariés par des robots et qui a recours à des milliers de travailleurs précaires pour livrer ses produits. »      Il faut « contraindre Amazon à payer sa part de fiscalité au bien commun », de préférence via une imposition de ses bénéfices..."

           Mais les protestations individuelles et collectives ne suffisent pas tant qu'elles ne s'exercent pas au niveau le plus élevé, au moins européen. On ne peut compter sur les USA, avec leurs lois particulières privilégiant le droit léonin des multinationales. Le grand exterminateur du petit commerce, pas seulement des libraires, risque d'avoir encore de beaux jours devant lui, car le piège s'est refermé pour longtemps, séducteur au début, mais écrasant les prix des producteurs de biens ou d'oeuvres diverses, culturelles ou non. Il a joué habilement sur la séduction des consommateurs qui ne voient pas au delà de l'horizon de leur porte-monnaie, aveugles aux surcoûts et les conditions de travail générés par la firme.                                    Les petits grincements occasionnels n'y feront rien pour réguler un tel mastodonte, rebelle aux critiques internes ou externes. Résultat: un emploi créé,  deux emplois perdus. Sans parler du gaspillage. Parfois on critique, même en haut lieu, mais on en profite. Tant que durera l'ambiguïté et le double langage, Amazon fructifiera. Il y a ce qu'on sait mieux et ce qu'on sait moins.... Comme le projet qui sous-tend l'extension de la firme: 

              Jeff Bezos possède le Washington Post, qui donne le ton aux médias d’information américains en matière de soutien et de promotion presque totale du néoconservatisme, de l’impérialisme américain et des guerres. Cela embrasse les sanctions, les coups d’État et les invasions militaires contre des pays sur lesquels les milliardaires américains veulent exercer une mainmise qu’ils n’ont pas encore – tels que le Venezuela, la Syrie, l’Iran, la Russie, la Libye ou la Chine.
       Il s’agit de guerres d’agression contre des pays qui n’ont jamais agressé les États-Unis. Elles ne sont absolument pas défensives, bien au contraire. Ce n’est pas nécessairement la guerre sans fin (même Hitler n’avait pas ça dans ses plans), mais la guerre jusqu’à ce que la planète entière soit passée sous le contrôle du gouvernement des États-Unis, lui-même dirigé par les milliardaires américains qui financent le néoconservatisme et de l’impérialisme – au sein des deux principaux partis politiques américains, des think tanks, des journaux, des réseaux TV, etc.
    Bezos joue un rôle crucial dans le néoconservatisme, depuis que, lors de la réunion du groupe Bilderberg du 6 au 9 juin 2013, il a passé un accord avec Donald Graham, propriétaire du Washington Postpour lui acheter son journal moyennant 250 millions de dollars. Bezos avait déjà négocié en mars de la même année, avec John Brennan, le directeur néoconservateur de la CIA, un contrat de 600 millions de dollars sur dix ans pour des services informatiques décentralisés (cloud computing), contrat qui a transformé Amazon Corporation, qui au départ était en déficit constant, en une entreprise assurée de faire des profits.
    Le patrimoine de Bezos a donc augmenté encore davantage (et à un rythme plus rapide) qu’il ne le faisait quand Amazon perdait de l’argent. Il est devenu le vendeur le plus influent non seulement de livres, mais aussi [de services] pour la CIA et pour des méga-entreprises comme Lockheed Martin [première entreprise américaine et mondiale de défense et de sécurité NdT]. L’impérialisme amplifie son patrimoine, mais n’en est pas la seule cause. Bezos est peut-être l’homme d’affaires-prédateur le plus doué de la planète.
     Certains des milliardaires américains n’accordent pas la même importance que lui à la conquête internationale, mais tous sont des soutiens – plus ou moins fervents – du néoconservatisme. Aucun d’entre eux, par exemple, n’a fondé d’organisation anti-impérialiste, ni accordé de financements importants à celles qui existent. Aucun milliardaire américain ne s’implique pour mettre fin au règne du néoconservatisme, ni même n’apporte de soutien à la lutte pour y mettre fin, ou du moins pour en finir avec son emprise sur le gouvernement américain. Aucun. Pas un seul.
   Mais beaucoup d’entre eux créent et financent largement des organisations néoconservatrices, ou dirigent des médias néoconservateurs comme le Washington Post. Ils sont comma ça, les milliardaires, du moins aux États-Unis. Tous sont impérialistes. Ils apportent un soutien financier à l’impérialisme. Ils en assurent la promotion et embauchent des gens le font également ; ils mettent au placard ou se débarrassent de ceux qui y rechignent. L’expansion d’un empire est extrêmement profitable pour ses aristocrates, et l’a toujours été, même avant l’Empire romain.
     Bezos veut privatiser tout ce qui peut l’être partout dans le monde, comme l’éducation, les autoroutes, la santé et les régimes de retraite. Plus les milliardaires exercent de contrôle sur ces secteurs, moins le reste du monde n’en exerce ; empêcher leur contrôle par le public est un moyen pour les milliardaires de se mettre à l’abri d’une démocratie qui augmenterait leurs impôts et d’une réglementation qui réduirait leurs profits en augmentant les coûts de leurs sociétés. Ainsi, la mainmise des milliardaires sur le gouvernement leur permet d’augmenter les prélèvements qu’ils opèrent sur la population.  
    Au moyen du Washington Post qui assure la promotion de la guerre, Bezos est l’un des meilleurs vendeurs du monde auprès du complexe militaro-industriel américain. Il contrôle et est actionnaire principal d‘Amazon, dont la division Services Web fournit tous les services de cloud-computing du Pentagone, de la CIA et de la NSA. (Il mène aussi la charge pour la technologie de reconnaissance faciale la plus avancée.)
    On a pu voir en gros titre, en avril, « La CIA évalue le contrat du Cloud à plusieurs dizaines de milliards », un contrat qui pourrait faire grimper la fortune personnelle de Bezos plus haut encore dans la stratosphère, surtout s’il emporte la totalité du marché (comme précédemment).
   Il domine également à l’échelle mondiale – domination qui ne cesse de s’étendre – la promotion et la vente de livres et de films, parce que son Amazon est le plus grand détaillant au monde (et désormais aussi l’un des plus grands éditeurs, producteurs et      distributeurs). Cette situation aussi, peut avoir un fort impact indirect sur la politique et le gouvernement, en mettant en avant les travaux les plus néoconservateurs, contribuant ainsi à façonner le discours intellectuel (et les votes des électeurs) dans le pays.
     Bezos écrase des millions de détaillants par son génie inégalé à prendre le contrôle des marchés, les uns après les autres, soit sous l’étiquette Amazon, soit en se positionnant en intermédiaire incontournable – voire même souvent en rachetant les détaillants concurrents d’Amazon.
    Bezos croit fermement au « libre marché », qu’il maîtrise peut-être mieux que quiconque. Cela signifie qu’il est favorable au pouvoir sans frein des milliardaires et à ce qu’ils puissent, par le biais de leur argent, contrôler et finalement absorber tous ceux qui sont moins puissants qu’eux.
   Parce qu’il est si doué lui-même pour amasser des richesses, il a d’ores et déjà réussi à se hisser au sommet mondial, en étant l’un des individus les plus puissants du monde. Le plus riche de tous est le roi Salmane, propriétaire de l’Arabie saoudite, dont Aramco (la plus grande compagnie pétrolière du monde) vaut, à elle seule, plus de mille milliards de dollars. (Forbes et Bloomberg excluent les monarques de leur classement.)
    En fait, Bloomberg, tout à sa malhonnêteté à ce sujet, est allé jusqu’à produire ce gros titre le 10 août dernier : « Les 25 dynasties les plus riches de la planète contrôlent 1 400 milliards de dollars », rompant ainsi avec sa tradition en incluant dans leur liste un monarque, le roi Salmane, qu’ils ont classé au quatrième rang avec seulement 100 milliards de dollars, une ‘estimation’ ridiculement basse qui, sans vergogne, ne tient compte ni d’Aramco, ni surtout de la richesse de l’Arabie saoudite.
   Bloomberg n’a même pas essayé de justifier sa méthodologie farfelue, mais a simplement présumé ses lecteurs assez crédules pour l’accepter. Ce roi est donc a minima sept fois plus riche que Bezos. Il est peut-être aussi puissant que Bezos. L’héritier suprême est beaucoup plus riche même que le milliardaire suprême qui s’est fait tout seul, l’« entrepreneur ».
     Certes, les deux hommes comptent au nombre des géants qui dominent le monde à notre époque. Et les deux hommes sont des libertariens – des champions de la croyance selon laquelle la propriété privée (dont les milliardaires ont tant) est la base de tous les droits – ils pensent donc que les personnes les plus fortunées possèdent plus de droits que les autres, et que les plus pauvres en ont moins, et que tous les gens qui ont un patrimoine net négatif (en ayant plus de dettes que de biens) ne possèdent aucun droit à l’exception de ceux que les plus riches peuvent leur donner ou plutôt leur concéder, que ce soit par bonté ou pour une autre raison (comme les liens familiaux).
     C’est cela le libertarianisme : la privatisation de tout ; la valeur d’une personne se résume à son « patrimoine net » et à rien d’autre. Cette croyance est du pur libertarianisme. C’est une croyance très répandue chez beaucoup voire chez tous les milliardaires. Les milliardaires sont impérialistes en ce qu’ils cherchent à maximiser la liberté des super-riches ; peu importe si cela signifie ponctionner plus, et finalement appauvrir tous ceux qui ne sont pas super-riches. Leur idéologie est cohérente. Elle est basée sur la fortune. Mais ce à quoi le public croit, c’est plutôt aux belles histoires dont les milliardaires autorisent la diffusion.
    Bezos et les autres milliardaires emploient et fidélisent des salariés et autres mandataires pour obéir à leur volonté. C’est leur pouvoir direct. Mais les milliardaires possèdent aussi un pouvoir indirect considérable grâce à leurs liens d’interdépendance, car chaque grande société est liée par contrat à d’autres sociétés, en particulier à de grandes sociétés comme les leurs ; par conséquent, le pouvoir que possède un milliardaire donné est en fait un pouvoir partagé avec les autres (l’accord conclu par Bezos avec Graham en est un exemple.)
    Collectivement, ils travaillent en réseau, même parfois sans s’être rencontrés en personne, seulement par l’intermédiaire de leurs représentants et même avec leurs principaux concurrents sur les marchés. Il s’agit d’un pouvoir collectif que les milliardaires possèdent au-delà de leur pouvoir individuel en tant qu’employeur de salariés et autres prestataires.
      Ce pouvoir collectif est incarné par Bezos mais il pourrait l’être par d’autres milliardaire comme Bill Gates, Warren Buffett, Larry Ellison, Mark Zuckerberg, Charles Koch, Sergey Brin, Michael Bloomberg, George Soros ou Jack Dorsey. Ils sont concurrents les uns des autres donc n’ont pas les mêmes attentes vis-à-vis du gouvernement américain, cependant ils s’accordent tous pour l’essentiel sur ce que le gouvernement « devrait » faire (en particulier sur le fait que l’armée américaine devrait être renforcée, aux frais des contribuables, bien sûr, pas aux leurs)
     Fondamentalement, Big Brother, dans le monde réel, est remarquablement cohérent et soudé – bien plus que ne l’est la population – et c’est l’une des raisons pour lesquelles ils contrôlent le gouvernement, en court-circuitant la population.
  Voici comment tout cela se déroule, sous l’action des serviteurs de Bezos :
     Son Amazon paie peu ou pas d’impôts fédéraux parce que le gouvernement fédéral a écrit les lois fiscales pour inciter les entreprises à faire le genre de choses que Bezos a toujours voulu qu’Amazon fasse.
    Le gouvernement américain encourage donc les méga-sociétés, par la fiscalité et la réglementation, à écraser les petites entreprises en entravant leur croissance. Cela verrouille d’une certaine manière l’aristocratie en place, qui sera moins constituée de nouveaux venus (comme Bezos l’était lui-même, mais comme ses enfants ne le seront pas).
   Les élus appuient massivement ces positions parce que la plupart de leurs financements de campagnes électorales émanent de personnes super-riches, de leurs employés et autres fondés de pouvoir. C’est un système qui se renforce lui-même. La super-richesse contrôle le gouvernement, qui, à son tour, avec les super-riches et leurs sociétés, exerce le contrôle de la population en réduisant ses opportunités économiques. Le résultat final est un renforcement, par l’institution même, de l’extrême inégalité de patrimoines, qui ne cesse de croître.
    Les milliardaires sont les vrais Big Brothers. Et Bezos est le plus grand de tous._______________