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lundi 6 mars 2017

Problématiques sondages

Sondagite, pas morte.
                                      Les voici revenus avec les premiers signes du printemps, se bousculant mutuellement, dans le cours d'une (pré)campagne électorale atypique, amplifiant la confusion ambiante, polarisant les opinions incertaines, prétendant éclairer des choix ondoyants et divers, une opinion flottante ou en recherche, souvent ignorante des enjeux  ou largement conformiste.
        Nouvelles pythies non brevetées, au service d'organes de presse soucieuse de faire du chiffre, parfois instrumentalisés, voire manipulés, les sondages, peu critiqués dans leur fabrication et leurs visées,  ne sont pas sans perturber l'opinion, sous prétexte de l'orienter,  plus ou moins subtilement, en anesthésiant son recul critique et ses possibles choix  rationnels.
     On le voit clairement avec l'effet Maquerron actuel, dont la montée rapide (mais peut-être provisoire) dans les intentions de vote apparaît clairement comme un artifice dont s'emparent une certaine presse et des groupes de pressions habilement masqués.
    Les sondages politiques sont redevenus le pain quotidien, envahissant, contradictoire de notre PPF, survalorisant les chevaux de tête désignés ou autodésignés, escamotant les minoritaires.  Ils submergent le débat politique de fond, brouillent ou escamotent les enjeux, nous détournent de la réflexion critique personnelle et renforcent l' aspect de  la politique telle qu'elle est trop souvent devenue: un spectacle. Mais un spectacle non innocent.
    Un sondage chasse l'autre à la vitesse grand V, contribuant au renforcement des relativismes, à la montée de la précarité des points de vue, sans remettre en causse leur logique interne.
     La question mérite encore d'être posée, même si les effets ne sont pas toujours mesurables:  pourquoi des sondages?:
        Comme disait Pierre Bourdieu, "La soit-disant ''opinion publique" n'est qu'un instrument politique, un étandard-caméleon que brandissent les groupes d'intérêts (partis politiques, médias, corporations) en donnant l'impression qu'ils s'y soumettent alors qu'ils participent de façon non négligeable à sa construction dans l'élaboration des questionnaires, le traitement des réponses, et l'exploitation médiatique des "résultats". 
        Voilà bien le fond du problème. C'est clair pour les pseudo-sondages commerciaux, fabriqués de toutes pièces au service de la seule venté.  c'est plus compliquer à analyser au sujet des sondages d'opinions. quand celles-ci sont ondoyantes et parfois contredites par les pronostics jugés pourtant les plus fiables.
    L'opacité des sondages sont rarement analysés et on oublie vite ceux qui se sont magistralement égarés.
       Comme le souligne P.Champagne, "Avant de s’interroger sur le fait de savoir si tel(le) candidat(e) a de bonnes chances d’être élu(e), il serait peut-être bon de savoir pour faire quoi. Et on peut même se demander s’il ne faudrait pas oublier totalement les sondages préélectoraux et les petits calculs plus ou moins cyniques et manipulateurs qu’ils encouragent afin d’en revenir plus classiquement à une logique inverse de celle qui tend à s’imposer aujourd’hui, à savoir que chaque parti construise d’abord un vrai projet de société en réunissant, pour l’élaborer, militants, experts, spécialistes et ensuite, mais seulement ensuite, voir qui peut, dans chaque parti, le défendre devant les citoyens avec quelques chances de succès..." (P.Campagne)
      Le bon sens même.
         Les égarements de la coyance politique n'ont plus à être soulignés, qui peuvent dans certains cas être tragiques, dans certaines circonstances.
      Les effets pervers de certains sondages, au faux aspects scientifiques, n'ont pas fini de se manifester. L'exemple américain récent vient de le monter récemment.
    Certes, il y a sondage et sondage, mais les procédures devraient être revues et les sondages de dernière minute interdits.
          Que Marine Le Pen gagne dans l'opinion, il n'est pas besoin d'être un fin analyste politique ou un professionnel des medias pour s'en rendre compte...
 Tout concourt, pour l'instant, à lui donner une certaine crédibilité par défaut, étant donné le vide politique qui s'est installé autour d'elle, les peurs ambiantes, les problèmes économiques réels de "la France d'à côté", les fantasmes entretenus, l'Europe défaillante. Le système sarkoziste aura bien alimenté sa montée, tout en prétendant la phagocyter.
  Son récent lifting récupérateur, son ripolinage de façade, son large ratissage, son habile séduction, lui confèrent une aura provisoire qui pour l'instant contribue à son ascension dans de nouvelles couches de la population, fragilisées à tort ou à raison.

      Ce phénomène sociologique et politique, une certaine presse s'en empare pour en faire ses choux gras, dans des conditions douteuses. La presse, malade, a besoin de se booster. L'l'institut Harris, d'autres demain, utilise des méthodes singulières pour stimuler les sondés et fait silence sur ses méthodes pour prétendre tester l'"opinion" à un moment donné.
_       Une opinio
n "qui n'existe pas" (Bourdieu), au sens où elle n'a nulle stabilité, nulle indépendance, nul caractère sacré . Elle est toujours mouvante, en train de se constituer, pouvant demain se modifier profondément à la faveur d'un événement majeur ou d'une renversement de situations.
__Bien sûr, il y a des tendances , provisoires, repérables (mesurables?), mais un traitement statistiques sera toujours sujet à caution. C'est plutôt rassurant...
   Mais les sondages d'opinion ont un effet pervers: ils donnent à croire à beaucoup que l'anticipation vaut la conclusion, que les intentions seraient les élections, comme si les sondés étaient déjà dans le contexte électoral projeté, comme si le "montage" des sondeurs était innocent et sans défaut...Surtout, ne pas parler de politique...
   Il y a une vérité que les instituts de sondages préfèrent ne pas crier sur les toits.
      On n'évoquera pas la guerre qu'ils se livrent entre eux.

_De plus, le "thermomètre" devient vite thermostat, finissant par réguler l'opinion elle-même, l'enfermant dans des résultats provisoires et discutables: effet feed-back pervers d'une pratique dont une démocratie peut et doit se passer. Les méthodes de marketing ne valent que dans un domaine. 
   Du moins faudrait-il, dans un premier temps réguler (enfin) les sondeurs.
A quand des règles claires ?

« [l’]injection quotidienne de sondages [...] participe à l’enterrement des débats de fond et de l’analyse des programmes. » "
     Illusion, manipulation et affaires
Comme le disait naguère Patrick Champagne, Les déconvenues des politiques, les erreurs d’analyse commises par les spécialistes présents dans tous les grands partis comme les « plantages » des instituts de sondage, loin de conduire à une plus grande prudence dans l’appréciation des résultats bruts produits par ces enquêtes semblent être à peine pris en compte par les milieux politique et journalistique puisque à chaque nouvelle élection, tout le monde a apparemment oublié de tirer les leçons de ce qui s’est passé quelques années auparavant lors des élections précédentes. ...
       Il reste que l’omniprésence des sondages dans les débats publics, dans la presse ou dans les conversations privées des uns et des autres trahit la place majeure qu’ils occupent en réalité. C’est pourquoi une critique de la pratique actuelle des sondages, pour avoir quelques chances d’être efficace, ne doit pas seulement en montrer les limites d’un point de vue scientifique mais doit également rendre compte des raisons sociologiques de l’engouement largement magique et irrationnel qu’ils suscitent.
                                                          ____   Pour aller plus loin..
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