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mercredi 20 septembre 2017

Globish(s) à tout faire

Il y a l'anglais et il y a le globish.
            Ou plutôt des globishs, plus ou moins jargonnant.
     Celui de la rue et celui de l'ingénieur ou du pilote de ligne, celui du touriste ou celui du fonctionnaire de Bruxelles.
     Celui qui peut être occasionnellement utile, à l'heure de la mondialisation, et celui qui sert surtout à frimer ou à "faire moderne", celui du faste foude ou du hairdresseur de mon coin.
      L'influence d'Outre-Manche , le soft power des USA est passé par là et a conquis les esprits au delà du raisonnable. Et le phénomène s'accentue very quickly dans des domaines de plus en plus étendus de la vie commerciale, technique, publicitaire... Dans certaines grandes entreprises comme dans les banques, même dans les relations internes, le globish  tend à devenir le new langage de la com', comme si la langue de Malherbe était devenue le  patois d'un autre temps. Cette frénésie peut aller, dans certains milieux  jusqu'à un certain mépris de la langue de nos pères.
     Comme disait Churchill, qui connaissait la richesse de sa langue, «l’anglais est une langue facile à parler mal»
     Un peu de globish, ça va...trop de jargon pseudo-anglo-américain, bonjour le délire.
  D'autant que l'anglais est un monde linguistique multiforme: du Pakistan à l'Arkansas, en passant par Canberra, il n'est pas sûr que l'on se comprenne.
    Et si on en venait à la langue de Molière, plein de ressources, qu'on parle souvent mieux à Dakar qu'à Aubervillers?
   Pour les laudateurs inconditionnels de ce sous-produit linguistique international, c'est le nouvel espéranto de demain, Dans la rue de ma PVP (petite ville de province), fleurissent de plus en plus des enseignes en pseudo-shakespearien. Le coiffeur s'y met aussi ainsi que des artisans ayant jargon sur rue.
  Une étonnante novlangue envahit nos revues, nos avenues et même nos campagnes.
       Le tout-anglais à l'école, le plus tôt possible, comme le préconisait le très moderne Luc Chatel, quand la langue française s'est réduite à ce point, c'est de la folie et un échec programmé.
   Brexit ou pas, il serait temps d'entrer en résistance contre cette voie absurde, quand on sait qu'on apprend vite et bien une langue étrangère quand on maîtrise bien la sienne. Pourquoi ne pas commencer au berceau et confier une nouvelle mission éducative aux baby-sitters gardiennes d'enfants? Histoire de mieux préparer l'entrée à l'université...
     Défendre le français, comme nos amis du Québec, n''est pas honteux. La langue n'est pas qu'on outil, mais un véhicule de la pensée qui se forme et se forge en parlant.
  L'anglomanie gagne les hautes sphères. A Bruxelles, la dérive est évidente, comme le déplore un journaliste habitué des lieux:
                  Le monolinguisme, l’un des traits les plus significatifs de la « Bulle européenne »:Par négligence et lâcheté, les dirigeants de l’Union et les fonctionnaires de Bruxelles ont laissé choir le multilinguisme et n’usent pratiquement plus que d’un seul idiome… L’anglais ? Que nenni. « À Bruxelles, c’est le globish qui règne en maître, une forme appauvrie à l’extrême de la langue de Shakespeare qui permet tout le monde de communiquer sans problème » (p. 155). Cet idiome est semé de néologismes propres à la Commission au point qu’il a fallu publier un dictionnaire des correspondances entre le mot anglais et sa traduction en globish bruxellois (comme for example au lieu de for instance).____Il ne s’agit pas d’un trait secondaire ! « La langue n’est pas neutre, rappelle Jean Quatremer. Elle véhicule des valeurs et des concepts et, surtout, seule la langue de naissance permet de communiquer au plus près de sa pensée : ce n’est pas un hasard si un Américain, un Chinois ou un Japonais ne négocie jamais dans une autre langue que la sienne » 
        L'usage inconsidéré du globish n'est pas neutre
           L'anglais oui, mais l'anglomanie généralisée, galopante, déjà décriée au 19°s. est une erreur. Une bêtise.
    Ce n’est pas l’anglais qui nous menace, langue belle et difficile au demeurant, c’est l’anglo-folie généralisée, le globish imposé, qui est aussi une américanolâtrie naïve, dont se moquent nos amis anglophones.
   Même le  New-York Times s'étonnait de  "ce phénomène d’anglomanie qui semble se généraliser dans toute la France" 
      "Cette discussion sur la place de l’anglais par rapport aux autres langues est assez vaine. Si l’anglais est dominant dans le monde, c’est parce que les Anglo-saxons forment la plus grande puissance, tout simplement. Du temps de Napoléon, toute l’élite européenne parlait le français. C’est l’histoire qui détermine la diffusion d’une langue, c’est-à-dire de la culture de la puissance dominante du moment.
 Le véritable danger du globish est sa simplicité. Il s’agit de la novlangue d’Orwell. La simplification signifie que la langue devient essentiellement utilitaire et qu’il est malaisé de manier les concepts. En d’autres termes, le débat d’idées devient quasi impossible dans un idiome réduit à la syntaxe sommaire....
        -"L'Anglais est la langue du vainqueur", disait le général Jean Béca.
                         -« L’anglais est l’avenir de la francophonie », osait B.Kouchner.
    Demain, c'est le  "team building" des députés macroniens. Qu'on se le dise! 
          Je vous laisse, j’ai un focus group sur le workflow et c’est plutôt touchy.

                                 Hey guys, lose the frogtalk and speak a real language!       

   Fuir le ridicule, qui ne tue plus, retrouver le bon sens, le plaisir de sa langue, ne serait pas superflu.

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