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mercredi 27 mai 2020

Bêtise managériale

Il y a management et management...
                                                         Il n'y a pas si longtemps que l'on parle de management,  mot emprunté aux pratiques anglo-saxonnes, qui dérive lui-même d'un vieux mot français, issu du mot main.    Il y a bien des façons de prendre les hommes en main. Ici, dans leurs tâches productives. L'idée était là avant le mot, dès les premières formes d'organisation industrielle, puis s'est étendu à d'autres champs d'activité, tertiaires notamment.
       La notion de management a connu bien des aléas et des variations jusqu'à devenir aujourd'hui un terme à la mode, parfois abusivement utilisé, souvent miroir aux alouettes. Si la direction des hommes s'est toujours imposée, parfois de manière rigide et très hiérarchique, elle tend à prendre aujourd'hui un sens généralisé, attractif, un peu enchanté, recouvrant une pratique devenue souvent insidieusement anxiogène, où l'individu tend à s'impliquer pleinement dans ses tâches en pensant se réaliser dans un système qui le dépasse et le contraint intérieurement.
     Nous avons hérité du nouvel esprit du capitalisme anglo-saxon, qui a introduit un peu partout, même dans les hôpitaux les méthodes de nouvelles formes d'organisation et d'évaluation, qui ont leur logique propre dans le système, celles du new public management.
    La standardisation des tâches et les nouvelles exigences de rentabilité, dans un système de production mondialisé, à produit ce que certains appellent les petits soldats du nouveau management:
     ...Ils s'appellent Bernard, Philippe, Céline, Eric ou Laurence. Leur mission ? Implanter dans un hôpital un progiciel à destination du personnel soignant supposé saisir à l'intérieur chaque acte effectué, développer le self-scanning dans un hypermarché pour éviter les gestes inutiles, envoyer à des chefs de service des lettres d'objectif et des tableaux de bord... Dans des cabinets de conseil et d'audit, ils élaborent des dispositifs standardisés pour améliorer la rentabilité des grandes entreprises privées comme des institutions publiques.
    Le lean management (le management «sans gras») qui vise à supprimer les temps morts et les tâches superfétatoires, c'est eux. Le benchmarking qui repose sur des indicateurs de performance permettant de classer les établissements et les services et de déterminer les budgets affectés à chacun, encore eux. Ces acteurs de l'ombre sont au cœur de l'ouvrage de la sociologue Marie-Anne Dujarier. Le Management désincarné réalise en effet une surprenante plongée dans les lieux où se fabriquent les prescriptions qui s'imposent aujourd'hui aux cadres d'entreprise comme aux employés administratifs, aux médecins comme aux infirmiers, aux informaticiens comme aux universitaires, aux policiers comme aux assistantes sociales. Il braque le projecteur sur la main invisible de ceux qui œuvrent, dans de lointains bureaux, à la propagation d'outils de gestion qui rythment le quotidien de nombreux salariés, sans épargner les dirigeants de proximité chargés de les faire appliquer....
       De nouvelles règles qui, sous prétexte d'efficacité, sont souvent sources de tensions, de concurrence exacerbée, de perte de temps, de stratégies absurdes  et contre performantes...
   Quand l'efficacité devient une fin en soi, c'est la qualité du travail ainsi que ses résultats, les relations dans le travail qui en souffrent. Beaucoup de formes de souffrance au travail en sont issues.
    Le lean management s'installe même au coeur de certains services publics, masquant les objectifs économiques sous-jacents.


                                  ______L'hôpital n'a pas échappé à cette tendance pour une grande partie de ses tâches, de plus en plus victime d'une dérive déjà dénoncée par Molière autrefois et par Grimaldi aujourd'hui, dans le domaine qu'il connaît bien, qui s'est engouffré dans une gestion étroite et purement comptable, dont nous payons le prix aujourd'hui. 
   Le bon sens hospitalier, oui, mais pas à en devenir technocratique et oublieux des approches humaines en même temps que sanitaires.
   Des économies oui, mais pas à tout prix, le lean managemnt peut-être générateur d'aberrations et la perte de sens n'est pas loin...
     Remettre le patient au centre du système: du simple bons sens..en évitant le souffrance au travail issue d'un gestion devenue parfois absurde.
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