Ça va jazzer

https://www.jazzradio.fr/

jeudi 7 mai 2020

Corona fantaisie

On peut voir les choses comme ça...
                                   En ces temps d'exception, incertains, où une vague d'inquiétude, voire de pessimisme, tend à prendre le dessus, il est bon de prendre du recul, de relativiser et même parfois de faire preuve d'un peu de dérision. L'humour, même gris ou noir ,est parfois d'un précieux secours psychologique.
  Comme ici, défense et illustration...
               ".....Unanimité mondiale à condamner le coronavirus ! Cette union sacrée des démocraties, autocraties, théocraties et dictatures ordinaires, toutes religions confondues, est quelque chose de si rare dans l'Histoire que cela en devient suspect.
Comme tout accusé, le prisonnier Corona, matricule Covid-19, a droit à sa défense. Permettez-nous d'être son avocat, son porte-parole – d'autant plus que les virus ne parlent pas aux journalistes.
    Notre thèse est que notre client n'a fait qu'obéir aux ordres de ses supérieurs, dans le cadre d'un complot contre l'Humanité.
   Nous prouverons que Corona, tout en faisant son devoir, a su faire preuve de clémence.
 Nous prouverons que la tête pensante de ce complot n'est autre que Mère Nature. Car non seulement Corona est muet, mais il ne pense pas ! Allons-nous condamner un handicapé mental ?
    Considérons déjà son nom : a-t-on idée de lui donner le même nom qu'une marque de bière ? Ça ne fait pas sérieux. Imaginez un des cavaliers de l'Apocalypse s'arrêtant près de vous et lançant « Repentez-vous ! Tremblez, pécheurs ! Mon nom est Cassoulet ! » Non, ça le fait pas.
   Mère Nature, en le dotant d'une couronne, savait ce qu'elle faisait : elle n'a pas voulu qu'on le baptise « le virus de la mort » ou quelque chose dans ce goût-là. Elle a volontairement introduit dans le drame un peu de fantaisie. Force est de constater qu'On a voulu nous faire une grosse frayeur, mais point trop non plus.
   À preuve, alors que son cousin Ebola est un véritable psychopathe, Corona, lui, a fait preuve de retenue. Il s'en est pris essentiellement aux vieux et très vieux, et c'EHPAD'bol pour eux. Mais est-ce une coïncidence s'il a laissé vivantes, stressées mais vivantes, les forces vives du ­pays ?
   Et la date de la pandémie, du moins en France ? Est-ce une coïncidence s'il a épargné les sports de neige et les vacances d'été ?
   Car après nous avoir ­fait suer de peur, il semble bien qu'il nous laissera tremper le maillot à la fin de l'été – au pire en septembre.
    Il a supprimé des blocages de notre société : déjà il a libéré des places en maison de retraite - de façon un peu brutale, mais c'est le propre des hommes d'action, fussent-ils des virus.
   Les accidents de la route ont connu une baisse inouïe, inespérée. Des centaines de vies sauvées grâce à notre client ! Un bilan à faire honte à Bison fûté.
   (Avec, certes, quelques conséquences regrettables. Boire ou conduire, les Français n'ont pas eu le choix... Ils ont picolé ! Mais on ne peut reprocher à notre client l'intempérance de certains confinés.)
   Même la criminalité a baissé de 30% !
  Mais son action la plus remarquable est écologique : il a fait baisser la pollution d'une façon radicale, anticipée seulement par des romans apocalyptiques... Entrons un peu dans le détail.
    Il a rééquilibré villes et campagnes, comme des vases communicants : après l'exode ­rural, l'exode viral !
   Presque plus d'avions. Des routes tellement dégagées que nul ne se serait étonné de voir surgir un cheval sur la voie rapide ou une calèche sur le périph' parisien. Les enfants des mégalopoles se demandant pourquoi le ciel était devenu bleu, et pourquoi on éclaire la nuit avec plein de petits LEDs. À cause du bruit des oiseaux, ils ne pouvaient plus se concentrer sur leurs devoirs en ligne ! Quel calme ! Reconnaissons que le bilan carbone de notre client est sans commune mesure.
   Une heure de promenade par jour, ­jeux vidéos, télé et réseaux sociaux le reste du temps, ­bricolage - que demande le peuple ? On retrouve le goût du ­« farniente ». Certains ont même découvert à quoi servaient les fameux « livres » de ­leurs aïeux !
    Mais ce n'est pas tout. Devant la fermeture des temples de la malbouffe, délaissant les produits alimentaires transformés, des hommes et des jeunes de tous âges se sont mis à cuisiner, à préparer des produits frais, en circuit court.
   La consommation de savon a triplé...
    Oui, en à peine quelques mois, notre client a résolu des problèmes sur lesquels la société butait depuis un siècle !
     Quittons un instant le domaine technique et la froideur des chiffres. Sur le plan psychologique, l'apport de Corona est considérable.
    Il nous a fait éprouver la peur. En réaction, la créativité et le rire ont fleuri sur Internet. Les montagnes russes de l'émotion, la fête foraine à domicile ! Comme tous ceux qui ont frôlé la mort vous le diront, on apprécie d'autant mieux la vie après un rappel du destin. Quelles fiestas en perspective après le déconfinement !
   Mais ce n'est pas tout ! Grâce au confinement, de nombreux ­jeunes couples on pu tester leur compatibilité, d'autres moins ­jeunes éprouver la solidité du leur : si après un mois et demi ­cloîtrés à deux dans une petite surface de ville, avec quatre, cinq ou ­six enfants (non limitatif), un chien et/ou trois chats, vous n'avez ­pas cassé toute la vaisselle ni passé le chat par le balcon, ­vous pouvez considérer que votre couple a de bonnes chances de ­durer. « Je suis quand même vachement plus fiable que ­n'importe quel algorithme bidon d'agences de rencontre ! » ­nous a fièrement dit notre client.
   Les Français ont fait des progrès ­en géographie, beaucoup savent maintenant placer Wuhan sur une ­carte !
    Et quelle amélioration dans les relations sociales : fini les ­bises baveuses à tout bout ce champ. Votre espace vital est respecté et même agrandi à 1 mètre carré. Et quelle politesse ! Chacun modifie sa trajectoire et s'écarte poliment des autres.
    Mettons de côté quelques dénonciations, la solidarité aussi est une valeur en plein boum. Et, pour finir, au bout de l'ennui on a retrouvé le goût du travail.
      Alors oui, il y a des centaines de milliers de victimes. Ça en laisse quand même 7 milliards 600 millions et des poussières vivants ! Dois-je rappeler ici la mansuétude dont les nations font preuve pour les dégâts collatéraux causés par leurs dirigeants  ? Mon client ne réclame ni statue ni même un nom de rue, mais souhaite rappeler qu'avec lui, l'égalité républicaine n'est pas un vain mot : « puissant ou misérable », « tous étaient frappés », comme disait La Fontaine.
     Et puis, il nous a permis de constater un progrès de notre civilisation : contrairement à l'époque de la peste, nous n'avons accusé ni les Juifs ni les derniers immigrés d'être responsables de la pandémie ! Tout au plus Américains et Chinois s'accusent-ils mutuellement, tandis que quelques malveillants projettent leurs peurs sur les infirmières et les médecins.
   Solidarité, politesse, goût du travail, créativité, renouveau des valeurs de solidarité et d'écologie - mon client ne bénéficie-t-il pas de circonstances ­atténuantes ?
    Tout le monde l'a compris : Mère Nature nous a présenté l'addition. La maltraitance des niches écologiques a fait naître chez l'Homme, en quelques décennies, sept ou huit nouveaux virus. Corona ne fut qu'un simple exécutant, un soldat de base qui a agi selon ses ordres et sa nature profonde de virus. Il dit avoir de nombreux collègues pires ­que lui... Il y a dans cette épidémie quelque chose de calculé, comme un ultime avertissement avant extinction de l'espèce. Une prudence élémentaire devrait nous inciter à ménager dame Nature, des fois qu'elle ait appris de nous la funeste pratique de la vendetta..."   (Krokodilo)
                                                     ________________________________

Aucun commentaire: