Le MILLION de visites est atteint. Merci de vos visites et de votre indulgence. En route pour la suite...si Dieu me prête vie!

lundi 25 juillet 2022

Point d'histoire

 Qui se souvient de Thomas Sankara? [ Brefs rappels pour approfondissements]  

      Il passa si vite et si tragiquement au pouvoir que sa mémoire s'efface vite, du moins dans conscience d'hommes blancs.

            Arrivé comme un météorite dans le ciel africain, il repartit tragiquement, un peu comme Lubumba dans son pays. Il gênait trop, surtout en externe. Dans cette époque troublée, il tenta d'introduire un certain nombre de valeurs, dans son pays, rongé comme beaucoup par la corruption et les soubresauts de la période post-coloniale. Son parcours est édifiant, gagnant assez vite en prises de conscience sociales et exigences politiques.     "...Durant ses études à Madagascar, il assiste en  à la révolution qui conduit à la fin du régime de Philibert Tsiranana. Cela l'amène à concevoir l'idée d'une « révolution démocratique et populaire ». De retour en Haute-Volta en  avec le grade de sous-lieutenant, il est affecté à la formation des jeunes recrues. Il s'y fait remarquer par sa conception de la formation militaire dans laquelle il inclut un enseignement sur les droits et les devoirs du citoyen, insistant sur la formation politique des soldats : « sans formation politique patriotique, un militaire n'est qu'un criminel en puissance », a-t-il coutume de dire..."  Il se prononce ouvertement pour la rupture du rapport « néocolonial » qui lie la Haute-Volta à la France : « Lorsque le peuple se met debout, l’impérialisme tremble. L’impérialisme qui nous regarde est inquiet. Il tremble. L’impérialisme se demande comment il pourra rompre le lien qui existe entre le CSP [le gouvernement] et le peuple. L’impérialisme tremble. Il tremble parce qu'ici à Ouagadougou, nous allons l'enterrer »                                                                                                               Ce radicalisme, ce souci de rompre les liens avec les séquelles du colonialisme, les injustices sociales, certains pouvoirs locaux traditionnels, son socialisme déclaré firent de lui une figure contestée, dont l'action et les projets, dans le contexte de l'époque, firent de lui un homme à abattre car risquant d'être trop influent dans la sphère africaine. Sa fin tragique, à laquelle il s'attendait, reste encore à élucider. Certains services de la France et la diabolisation qu'il subit jouèrent un rôle certainement décisif pour rendre le pays plus "raisonnable".                                                     On n'a pas fini de revenir sur ce dossier, au coeur d'une Afrique encore agitée par les luttes intestines et les influences étrangères. Sankara aura eu raison trop tôt...Comme à sa manière Patrice Lubumba.                                                                                                                  France culture a fait un bilan récent de la pensée et de l'action de Thomas, l'homme seul...           On n'a pas fini d'en parler..... ___ Le site. _____

           _____ *   Bruno Jaffré : Thomas Sankara : La liberté contre le destin, discours rassemblés et présentés par Bruno Jaffré, éditions Sylepse, 2017__Daniel Tranchant : Sankara, les fauves l’ont dévoré, éditions Elytis, 2017___Saïd Bouamama : Figures de la révolution africaine, de Kenyatta à Sankara, La Découverte, 2017___Armelle Faure : Révolution et sorcellerie, une ethnologue au Burkina Faso, Elytis, 2020___Achille Mbembe : Sortir de la grande nuit, essai sur l’Afrique décolonisée, La Découverte, 2010___Marc Ferro : Le Livre noir du colonialisme, Robert Laffont, 2003___Pierre Péan : Carnages, guerres secrètes des grandes puissances en Afrique, Fayard, 2010 .                                ______________________

dimanche 24 juillet 2022

Billet du dimanche

__ Evidemment!

__ Pas conforme

__ Passoire fiscale

__ Clim et productivité      

__ En mode furtif                      

__ A la bonne heure!

 __ Evergrande: la chute.

__ Proust et la physique

__ L'Espagne taxe les banques.

              ____ * En marge...     _________________

samedi 23 juillet 2022

Tourisme toxique

Un problème qui revient en force

                                                       La sur-fréquentation  de certains lieux, en cette période de rebond touristique (re)commence à poser problème, Des édiles s'alarment même des effets à long terme de cette manne qu'ils ont souvent stimulée pendant des années pour redorer leurs blasons. Après certains grands sites, c'est le tour maintenant de villes plus modestes qui s'affligent des conséquences perverses, notamment dans l'immobilier, dont la population modeste paie les frais. Après une période de recul, la frénésie touristique a repris ses droits, même si les plus conscients perçoivent la nature des injonctions contradictoires de leur soif d'évasion.                                                                                                         L'épisode que nous vivons, avec sa paralysie des transports longues distances, sa contestation de certains de nos loisirs de masse, est assez propice à une mise en question des modes de déplacement à des fins de découvertes de nouveaux horizons, de plus en plus nombreux et inter continentaux, supposés nouveaux et attractifs, vendus sur catalogues au papier glacé. D'exceptionnel qu'il était, le voyage est passé dans le registre des biens de consommation ordinaires, pour une masse de plus grande de personnes de tous continents.

      Il s'est généralisé, banalisé. low-costé. Partir n'est plus partir.
  Il est devenu un produit d' appel, certains pays jouant sur le tourisme  pour gonfler leur PIB. Pas toujours avec discernement.
   Au risque de réduire le tourisme à des déplacements de foules grégaires qui ne voient rien ou presque, qui ne retiendront que quelques pixels embarqués ou quelques selfies, pour témoigner qu'"on y était".
   Voyage normalisé, voyages-spectacle, voyage banalisé, vite oublié, avant de préparer le suivant sur catalogue au papier glacé.
    Le low-cost et la guerre des voyagistes  a encouragé la tendance, comme le fast food a banalisé et dénaturé la nourriture. Tant qu'il y aura du pétrole....
     Le voyage de découvertes, lent, peu programmé, dans des lieux non courus, qui laissent des traces indélébiles, est devenu de plus en plus rare .
     Faire l'éloge du dépaysement vrai, de la découverte authentique, des rencontres non programmées est devenu de moins en moins fréquent. Ce dépaysement qui change en profondeur l'intériorité et renouvelle le regard.
      Un peu de tourisme, ça va....Mais on semble avoir dépassé le seuil de la déraison touristique.
          Mais les déferlantes touristiques dans les mêmes lieux en même temps vont tuer le tourisme.
 Et les incidences de ce phénomènes sur le milieu, urbain et/ou naturel, commencent à poser bien des problèmes, même au Machu Pichu, où l'on parle de contingenter la fréquentation, dans certains villes où le problème de l'eau devient crucial, dans d'autres, où l'hyper-fréquentation, festive ou non, perturbe fortement la vie locale, modifie le prix du foncier, entraîne indirectement  l' "exode" de populations, comme à Barcelone , à Venise ou à Dubrovnik. A  Amsterdam, c'est les "festivités" nocturnes qui gâchent tout.
   Si, dans une certaine mesure, il peut être bénéfique économiquement, comme en Tunisie, il peut aussi se révéler catastrophique très rapidement. Les cohortes de visiteurs pressés sortis en rang des bateaux de croisière, sans discontinuer les jours d'été, auront-elles raison des plus beaux sites de Santorin, dont les rues principales sont investies à prix d'or par les marchands de produits de luxe?...
       Il faut réapprendre à voyager, non comme hier, mais selon des formules à réinventer.
   Retrouver le plaisir durable et profond de la découverte, loin de la saturation des tours-operators vendeurs de produits finis, où la surprise doit être bannie, où le confort doit être assuré, où l'on achète d'abord "un prix". Low cost, low plaisir...
   Le Routard ne fait même plus rêver.
        Comment retrouver, à contre-sens des tendances frénétiquement consommatrices, le sens du voyage rare et de qualité. 
  Il ne s'agit plus de suivre les injonctions du voyager pas cher, mais de retrouver le sens de l'étonnement et de la découverte. Avec désir et lenteur. Parcimonieusement.
    Des voyages qui forment à la vie et ouvrent à soi-même, comme disait le vieux Montaigne qui a parcouru une partie de l'Europe... à cheval.

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vendredi 22 juillet 2022

VARIA

___ Quelle "refondation?"

___ "Confiance" relative

___ Inflation ambigüe

___ Retricotage                                    


___ Déglobalisation productive

___ Population mondiale: le point

___ Le Pentagone et Hollywood

___ Chaleurs d'hier 

         Chicago 1995

___ Vrais chiffres des aides sociales aux immigrés

___  Jupiter et Uber: petits arrangements:   _ Indignation devant les faits:

                "...Il y a les manoeuvre purement commerciales  de la plate-forme tentaculaire et il y a les complicités et les aides politiques, le lobbying secret. Notre Président donna un appui discret mais finalement reconnu à Uber, malgré les oppositions qu'il suscitait en plus haut lieu. Un dossier sulfureux, que nie bien sûr l'intéressé..."                                            ___________________________

jeudi 21 juillet 2022

Heureusement qu'il y a la clim'!

 Eh ben non! Pas si simple...

      Il s'en est vendu de ces appareils, depuis la première phase de la canicule! Et bien avant déjà, suivant une mode américaine apparue bien plus tôt, comme expression de la modernité.     C'est le rush sur les appareils magiques, plus souvent à petits prix.   Mais est-ce, objectivement une bonne idée, au delà de nos points de vue myopes ou à court terme? Surtout à l'heure où de redoutables problèmes énergétiques vont se poser crûment.   La clim a fait des "miracles" depuis qu'elle est devenue d'abord une mode américaine, introduite pas seulement pour des raisons de confort, mais de productivité, dans la plus grande insouciance des années 50. 


                                                                                                                                                             "...À chaque nouvelle vague de chaleur, les grandes surfaces commentent à l’envi l’explosion des ventes de clim, dont presque un million d’exemplaires ont été commercialisés en 2021 – 840 000 climatiseurs fixes, selon 60 millions de consommateurs, sans compter, donc, les équipements mobiles. Jusqu’en 2019, il s’en vendait environ 350 000 par an, soit moins de la moitié, selon l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe). En 2005, seuls 5 % des logements étaient équipés en climatiseurs. En 2020, un quart des ménages en avaient fait l’acquisition, toujours selon l’Ademe.  Pourtant, ces équipements de froid sont de grosses machines à fabriquer du chaud. Comme dans un frigo, le climatiseur pompe les calories dans l’air, qu'elle refroidit par un fluide réfrigérant, et rejette la chaleur vers l’extérieur. Résultat : il réchauffe la température extérieure et contribue en ville au phénomène d’îlot de chaleur urbain – le fait qu’il fasse plus chaud dans une agglomération dense que dans sa périphérie plus végétalisée.   Des chercheurs avaient calculé, en 2013, qu’un doublement de l’équipement en climatisation à Paris pourrait augmenter la température locale de 2 °C, essentiellement la nuit. D’autres scientifiques ont fait tourner des modèles et estimé que si Paris connaissait une vague de chaleur de neuf jours, et que les habitant·es s’en protégeaient en utilisant massivement la climatisation, cette consommation d’électricité représenterait 81 % de toute la demande d’électricité des bureaux et des logements (environ 105 gigawatts-heure par jour).                                     La climatisation est aujourd’hui responsable de près de 5 % des émissions d’équivalent CO2 du secteur du bâtiment, selon l’Ademe. Ce sont les fluides frigorigènes présents dans les équipements qui contribuent le plus fortement aux émissions de gaz à effet de serre, lors de leur fabrication ou à cause des fuites pendant la durée d’utilisation. Les gaz qu’ils émettent sont particulièrement réchauffants.         Ce bilan carbone de la climatisation est aggravé par les difficultés actuelles du parc nucléaire : en manque d’électricité pour répondre à sa demande, la France importe du courant de ses voisins européens – ce fut notamment le cas hier, lundi 18 juillet. Or « toute consommation supplémentaire appelle sur le réseau une centrale à charbon ou au gaz », explique Éric Vidalenc, directeur régional adjoint à l’Ademe dans les Hauts-de-France. « Tout kilowattheure de climatisation est un kilowattheure de gaz (de Russie notamment) importé en plus. Il est crucial de maîtriser les usages de climatisation. »                            Mais il insiste aussi sur une perspective rassurante, le développement de l’énergie solaire, « particulièrement adaptée à l’usage de la climatisation », puisque les panneaux photovoltaïques produisent le plus d’énergie quand ils reçoivent le plus d’ensoleillement.      Derrière les chiffres des usages apparaît une forte question éthique et politique : la climatisation bénéficie à certaines personnes, au détriment de toutes et tous. Plus des bureaux et des galeries commerciales sont réfrigérées, plus l’air extérieur se réchauffe. C’est un vrai enjeu de justice environnementale. Pour Éric Vidalenc, « avec la climatisation, on utilise l’air comme une décharge. On rend l’air public encore plus insupportable. Si vous marchez dans une rue où les bâtiments sont blindés de clim aux fenêtres, vous recevez de l’air chaud en continu ». Le confort privé de certain·es s’obtient aux dépens de tout le monde.       Or bien des personnes doivent subir les canicules sans moyen de s’en protéger : travailleurs en extérieur, qu’ils soient balayeurs de rue, éboueurs ou employés sur des chantiers. Mais aussi toutes les personnes à la rue. Ou encore celles habitant des logements non ou mal isolés. Vivre dans un quartier plus chaud multiplie par deux le risque de décès, selon l’Institut de veille sanitaire. La perte d’autonomie pourrait multiplier le risque de décès par un facteur de 4 à 10, et le fait de dormir dans une chambre sous des toits mal isolés par quatre.    Le profil des usagers et usagères de la climatisation est assez marqué socialement, comme nous l’apprend une étude de l’Ademe : plutôt des propriétaires de maisons individuelles (31 %) que des ménages en logement collectif (20 %). Plutôt des professions libérales, cadres et professions intellectuelles supérieures (37 %) que des ménages dont la personne de référence est sans emploi ou inactive (19 %). Et dans le secteur tertiaire, seuls 7 % des bâtiments d’enseignement sont climatisés, contre 64 % au sein des activités de bureau. Quant aux centres commerciaux, ils le sont quasiment tous.    Faut-il en finir avec la clim ? Il est peut-être trop tard pour se poser la question. Les températures augmentent si vite à notre stade de dérèglements climatiques, qu’il risque d’être difficile de se passer de sa puissance de rafraîchissement. Or, face à des chaleurs extrêmes, les plus vulnérables ont besoin d’être au frais pour ne pas succomber aux températures. Des chercheurs ont calculé qu’en cumulant la création massive de parcs et d’espaces verts, en améliorant fortement l’isolation des bâtiments, en les dotant de surfaces réfléchissantes, et en utilisant sobrement la climatisation (pas moins de 28 °C chez soi), la température à Paris la nuit lors d’une canicule pourrait baisser de 4,2 °C..."  (Merci à Jade Lindgaard)           _____________________

mercredi 20 juillet 2022

Hommes à com

Un monde d'influence. .

              On en reparle....Ils sont partout. Là où il y a de gros intérêts à défendre, de l'argent à gagner, des causes à faire valoir. On leur demande de prêter leurs plume pour assurer la promotion ou la défense d'une idée, fût-elle indéfendable objectivement. Semer le doute, gagner les esprits, quelle que soit la cause, ils participent au lobbysme général, quel que soit leur avis personnel. Des tâcherons plus ou moins zélés.Il faut bien gagner sa vie.... Mais il peut y avoir des failles: certains, écoeurés, lâchent le morceau. Comme un certain Julien.                                                                                                             Une affaire qui n'est pas si récente dans le monde des influenceurs patentés. Avisa Partners  joue un rôle clé.  Il s'agit d'une société française qui brille dans le domaine du lobbying et de la désinformation, sous des dehors de respectabilité. Une affaire plus que bizarre. Crapuleuse. On en débattait récemment sur France-Inter.  On croit rêver.                                                                                           "...On y apprend que  que les espaces collaboratifs des grands médias français (Le Club de Mediapart, les espaces débat du Huffington Post, du Point, de l’Express ou du site d’information libéral Contrepoints) sont infiltrés pour servir des luttes d’influence entre États et des querelles de concurrence dans le monde des affaires. L'affaire a été révélée par le journal Fakir et l'enquête reprise par Mediapart. Un journaliste raconte comment il a écrit des centaines d’articles sur des sujets politiquement inflammables et des tribunes destinées à lustrer des images de marque, voire à les écorner. Son employeur, anonyme, est une société privée d’intelligence économique qui travaille pour le compte d’États étrangers, de multinationales et d’institutions publiques. Sa production a été publiée dans les blogs et autres espaces collaboratifs de grands journaux français. Vous pouvez trouver les détails de l’affaire sur Mediapart, qui repose sur le témoignage de son protagoniste principal, le journaliste Julien Fomenta Rosat, et retrouver les premiers éléments dans le journal Fakir le 19 mai (l’article a depuis été mis en accès libre). .."                   Une société tentaculaire et insidieuse, politiquement compromise, parfois au plus haut niveau:                                                                                                                                            "...La société Avisa Partners s’est notamment spécialisée dans la vente d’influence médiatique et numérique à ses clients. Parmi eux, on trouve de très riches particuliers, des institutions publiques, de grandes entreprises et des régimes étrangers. Matthieu Creux et Arnaud Dassier dirigent Avisa Partners. © Illustration Justine Vernier / Mediapart En 2020, le fondateur d’Avisa, Matthieu Creux, détaillait au magazine Causeur une partie de son impressionnante clientèle : Interpol, le Ghana, la Côte d’Ivoire, Saint-Marin, le Togo, la Commission européenne, le ministère des armées, BNP Paribas, la Société générale, le Crédit agricole, la Banque Palatine, Axa, CNP Assurances, Engie, EDF, Total, L’Oréal, LVMH, Chanel, Carrefour, Casino, etc.  Des documents internes à Avisa, obtenus par Mediapart, montrent aujourd’hui une palette plus vaste encore de « clients étatiques », dont certains pays qui sentent le soufre. Cela concerne par exemple l’« e-réputation » (réputation sur Internet) de la présidence du Congo-Brazzaville, dirigé depuis des décennies d’une main de fer par le dictateur Denis Sassou Nguesso, l’autocratie du Kazakhstan, en Asie centrale, pour l’organisation d’une exposition internationale, la pétromonarchie du Qatar pour la promotion de ses investissements en Europe et du Mondial 2022, le Tchad pour la valorisation des réformes économiques du dictateur Idriss Déby, la société nationale pétrolière du Venezuela contre les sanctions américaines qui la visent. Mais aussi le géant russe de l’aluminium Rusal pour diverses opérations de lobbying, la multinationale pharmaceutique et agrochimique Bayer pour la publication de contenus sur les réseaux sociaux afin de « contrer l’activisme anti-OGM » ou l’avionneur Airbus. Pour certains de ces clients, auxquels ils proposent du « online advocacy » (comprendre de l’influence numérique), Avisa et ses partenaires ont une stratégie très particulière : l’infiltration, sous de fausses identités, d’espaces de discussion participatifs sur des sites de médias plus ou moins réputés – les pages débats de L’Express, du Huffington Post, les sites Agoravox et Contrepoints –, mais aussi Le Club de Mediapart, dans le but d’en faire des lieux de propagande qui ne disent pas leur nom..... "                 Rien que ça! 

                                                        __________On peut lire le détail dans Mediapart, sans que personne ne démente des pratiques de manipulation dans l'information:   "...Pendant six ans, Julien* a travaillé dans la plus grande confidentialité. Il n’a jamais vu ses supérieurs, tous anonymes. Lui-même se cachait derrière une dizaine de pseudonymes pour ne pas être identifié. Mais le jeu en valait la peine, dit-il : il y avait pas mal d’argent facile à se faire, et rapidement. Julien n’était ni un narcotrafiquant ni un vendeur d’armes...."                                                                                                                                                ___Il manipulait des informations. On peut lire le détail dans Médiapart:      ".....Dans les colonnes du trimestriel Fakir, Julien a expliqué par le menu, début juin, les coulisses édifiantes de sa mission. La raison ? L’entreprise pour laquelle il travaillait lui a demandé d’écrire sur le journal du député François Ruffin (La France insoumise – LFI), dans lequel, hasard, Julien compte un ami cher.    C’en était trop. Il décide de tout arrêter, de dénoncer les pratiques de son employeur et d’aider la presse à enquêter. Son récit, enrichi d’autres témoignages et de nombreux documents recueillis par Mediapart, permet aujourd’hui de révéler l’une des plus grandes entreprises de manipulation de l’information intervenue en France ces dernières années.     Derrière ces pratiques se trouve une société d’intelligence économique et de cybersécurité inconnue du grand public, baptisée Avisa Partners, mais l’une des plus réputées de la place de Paris. Elle rachète à tour de bras des acteurs phares du secteur et valorise son activité à près de 150 millions d’euros.    Co-organisatrice avec la gendarmerie nationale du Forum international de la cybersécurité (FIC), le principal événement européen sur les questions de la sécurité et de confiance numérique, Avisa Partners rassemble – ou a rassemblé – en son sein des figures du renseignement, du monde des affaires, de la politique ou de la diplomatie : l’ancien chef des services secrets intérieurs Patrick Calvar, l’ex-numéro 2 du Quai d’Orsay Maurice Gourdault-Montagne, l’actuelle porte-parole du gouvernement Olivia Grégoire ou l’ancienne plume d’Emmanuel Macron à l’Élysée Sylvain Fort (voir leurs réactions en fin d’article)...    Codirigée par un proche de Sarkozy et de Zemmour, Arnaud Dassier, et le fils d’un ancien directeur d’un service de renseignement militaire, Matthieu Creux, la société Avisa Partners s’est notamment spécialisée dans la vente d’influence médiatique et numérique à ses clients. Parmi eux, on trouve de très riches particuliers, des institutions publiques, de grandes entreprises et des régimes étrangers...."                                                                                 _____    "Un article du dernier numéro du journal Fakir a été mis en accès libre récemment. Nous vous en conseillons la lecture, car l’histoire est édifiante : celle de Julien Fomenta Rosat, journaliste pigiste qui a rédigé pendant des années des articles complaisants envers les clients fortunés d’une entreprise de communication."        La méthode est d’une simplicité extrême : un client (le plus souvent une entreprise multinationale peu scrupuleuse ou un État autoritaire) souhaite revaloriser son image, soit pour engranger davantage de profits, ou bien assurer sa pérennité, ou simplement pour son bon plaisir puisqu’il en a les moyens. Le client (au hasard, le multimilliardaire Bernard Arnault) va donc payer un article flatteur ou, au contraire, un brûlot contre ses détracteurs (au pif, François Ruffin, le député auteur du film “Merci patron”, en plus d’être directeur du journal Fakir).                                          L’article est rédigé par un indépendant, puis est vendu comme prêt à publier à des journaux souvent considérés comme “sérieux”, gavés de subventions publiques comme Le Point. L’article est publié sous un nom de journaliste souvent inventé, que l’on fait passer pour spécialiste de la question. La ficelle est trop grosse ? Cela fait pourtant des années que ça dure !                          L’auteur réel n’est qu’une plume sélectionnée pour sa capacité à convaincre, mais la recherche journalistique n’est nulle part présente. C’est la réalité qui doit s’adapter à la commande et non l’article qui doit raconter une vérité. On savait déjà que les journaux et sites internet commerciaux d’informations étaient des torchons bourrés de publicités, mais on passe désormais dans une nouvelle dimension : CE SONT des publicités. Des pubs grassement rémunérées par et pour les puissants de ce monde, qui paient pour que l’on chante leurs louanges.           Lors du rachat de Twitter par Elon Musk, ce dernier considérait qu’il fallait lever toute forme de modération du réseau social car elle s’apparenterait à de la censure. Elon Musk, l’homme le plus riche du monde, puissant parmi les puissants, favoriserait-il la circulation des informations et la mise en place de contre-pouvoirs ? Rien n’est moins sûr.          Diffuser tous les contenus, relativiser toutes les informations, noyer le poisson. Une sorte de mithridatisation de l’information : le roi Mithridate, qui régnait sur le Bosphore dans l’Antiquité, consommait régulièrement de petites doses de poison pour être immunisé en cas d’empoisonnement. Au lieu de censurer les informations qui pourraient bousculer l’ordre bourgeois et risquer un “effet Streisand” (populariser une information en cherchant à la faire disparaître), il vaut mieux laisser l’information circuler en étant diluée dans un flot ininterrompu et inintéressant d’informations insipides et inoffensives pour le pouvoir en place.                            Ce flot, ce sont les articles payés par Avisa Partners. Et par une étonnante coïncidence, Olivia Grégoire, actuelle porte parole du gouvernement, a été directrice associée d’Avisa Partners ! Les médias mainstream nous abreuvent ainsi à longueur de journée d’analyses réacs et complaisantes, mais surtout d’informations diverses dont on ne peut tirer aucune analyse politique qui permette de penser la subversion. Info en continu et divertissement partout, révolution nulle part sur des médias détenus, dans leur très grande majorité, par ce que le Monde Diplomatique appelle le Parti de la Presse et de l’Argent.       Pire, non contents de saturer l’espace médiatique de fausses informations, d’articles orientés en leur faveur, ces puissants cherchent à semer le trouble sur la pertinence de vraies enquêtes journalistiques. Le terme de “fake news”, utilisé à tord et à travers, est trop souvent adressé contre des enquêtes journalistiques sérieuses et sourcées, mais qui lèvent des lièvres trop gros pour être dilués par BFM. Les milliardaires ont encore de beaux jours devant eux si on ne leur tord pas le poignet, si on ne les contraint pas à libérer l’information. La dernière fois que la bourgeoisie a perdu la main sur les médias, c’est lorsque le Conseil National de la Résistance a interdit aux capitaux industriels de financer les grands titres de presse. Le principe était simple : l’information doit être au service de la population et pas de quelques riches collabos.  ...  "                         _____________________

mardi 19 juillet 2022

Où il est encore question d'Uber

                 Il y a les manoeuvres purement commerciales  de la plate-forme tentaculaire et il y a les complicités et les aides politiques, le lobbying secret. Notre Président donna un appui discret mais finalement reconnu à Uber, malgré les oppositions qu'il suscitait en plus haut lieu. Un dossier sulfureux, que nie bien sûr l'intéressé.               "...Les Uber files  montrent que l'entreprise prenait des libertés avec la loi. Le modèle initial d'Uber –des citoyens conduisant d'autres citoyens dans leurs voitures privées sans permis ni licence d'aucune sorte– se situait juridiquement dans une zone grise. Dans des courriels, des cadres ont même plaisanté sur le fait qu'ils étaient des «pirates» et que le modèle de l'entreprise était «tout simplement illégal», lorsqu'ils se heurtaient à une opposition juridique pour aborder de nouveaux marchés.   Les documents divulgués révèlent également le rôle que le lobbying et les relations amicales avec des politiciens ont joué dans le succès d'Uber. La société a engagé de puissants lobbyistes, dont beaucoup étaient d'anciens membres ou associés de gouvernements nationaux qui avaient notamment promis de mettre fin au «copinage» entre politique et industrie. Parmi les rencontres avec les politiciens figuraient des personnalités telles que Emmanuel Macron (alors ministre français de l'Économie) et le maire de Hambourg de l'époque (aujourd'hui chancelier d'Allemagne) Olaf Scholz...."

                   Ubérisez-vous! disent certains, adeptes d'une nouvelle foi s'appuyant sir les  possibilités offertes par les diverses nouvelles technologies numériques. 

   En dehors du problème des transports par taxis -qui créent des tensions en France comme ailleurs-, l'ubérisation est une tendance lourde, un peu fourre-tout, qui a prétention à vouloir affecter en profondeur un grand nombre de secteurs de l'économie et des services.
      Que ce soit dans le domaine de la consommation ou de l' économie collaboratives, on voit éclore une foule de projets et de débuts de réalisation qui ne manquent pas toujours d'intérêt  à première analyse, mais qui suscitent un grand nombre de réactions hostiles de tous bords, dans de nombreux pays.
    Mais est-ce une bataille déjà perdue? Pas seulement dans les transports ou l'hôtellerie. 
Bien que ce soit encore un  phénomène mal perçu, il fait déjà apparaître un certain nombre de problèmes de fond;
  Pour E.Morozov, l'uberisation est le miroir de l'impuissance publique face aux géants, notamment de de la Silicon Valley et des forces financières qui les appuient. (*)
   Il exprime aussi un rapport particulier à la loi.
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___    (*)...(sa) la politique du « low cost » trouve aussi une explication plus triviale : grâce aux énormes capitaux de ses investisseurs, la compagnie peut se permettre de brûler des milliards dans le seul but d’éliminer toute concurrence, celle des taxis de la vieille époque aussi bien que celle des petites start-ups ingénieuses comme Kutsuplus.
  Dans un article récent, The Information, un site Internet spécialisé dans les nouvelles technologies, indiquait que durant les neuf premiers mois de 2015 les pertes d’Uber s’élevaient à 1,7 milliard de dollars, contre seulement 1,2 milliard de recettes. La compagnie est assise sur une montagne d’argent si colossale que, dans certaines villes des États-Unis, elle propose des courses à un prix qui ne couvre même pas le coût du carburant et de l’usure du véhicule.
    Sa stratégie est simple : faire exploser la demande en abaissant les prix à un niveau tellement attractif qu’il finit par vaincre les réticences de ceux qui préfèrent normalement prendre leur voiture personnelle ou les transports publics. Aucune dépense n’est trop fastueuse pour atteindre cet objectif. Au passage, Uber se taille aussi des parts grandissantes sur les marchés adjacents, comme le transport de biens de consommation ou la livraison de colis...
     Une question se pose alors inévitablement, même si elle est rarement posée : de qui Uber consume-t-il ainsi l’argent ? D’investisseurs tels que Google, d’Amazon, de Goldman Sachs. Uber fournit l’exemple parfait d’une compagnie dont l’expansion planétaire fulgurante est redevable en grande partie à l’incapacité des gouvernements de taxer les profits des géants de la finance et des technologies.
     Pour le dire plus crûment : si Uber peut jongler avec tous ces milliards, c’est parce que les Etats ne le peuvent plus. Au lieu d’alimenter les caisses publiques, cet argent s’entasse sur les comptes offshore de la Silicon Valley et de Wall Street. Ses propriétaires ne s’en cachent même pas. Apple a annoncé récemment qu’elle trônait sur un magot de 200 milliards de dollars soustraits à toute ponction fiscale, tandis que Facebook se vante d’un bénéfice record de 3,69 milliards de dollars pour 2015....
     La leçon à retenir, c’est que la politique menée par un pays en matière de nouvelles technologies dépend directement de sa politique économique. La première ne peut fonctionner qu’avec le concours de la seconde. Des décennies de choix fiscaux laxistes, cumulées à une stricte adhésion aux canons de l’austérité, ont réduit à néant les ressources publiques nécessaires à l’expérimentation de nouvelles manière de fournir des services collectifs, notamment dans le domaine des transports.
Il en résulte que les gros industriels nourris à l’évitement fiscal et les fonds de placement spéculatifs — qui envisagent la vie quotidienne comme un terrain de prédation entrepreneuriale — ont le champ libre pour s’accaparer les projets de ce type. Ce n’est pas une surprise si plus d’un a commencé comme Kutsuplus pour finir comme Uber : le fait de s’en remettre à des investisseurs qui attendent des retours exorbitants conduit fatalement à ces métamorphoses....
                    __... Les principaux faits reprochés se sont déroulés en 2014 et 2015 et concernent UberPop. La justice vise la mise en relation, via la plateforme UberPop, de clients avec des particuliers s’improvisant taxis. La pratique commerciale trompeuse cible trois spots diffusés sur Radio Nova à Bordeaux invitant les auditeurs à devenir chauffeurs pour gagner un peu d’argent. La dernière série de délits concerne tous les services Uber, et vise la loi Informatique et liberté. Le parquet reproche à l’entreprise d’avoir conservé des données personnelles de clients au-delà du délai légal, d’avoir numérisé et conservé des permis de conduire et cartes d’identité sans l’avoir suffisamment déclaré à la Cnil, et d’avoir constitué des fichiers comportant des informations sur les chauffeurs, notamment sur leur casier judiciaire.
    Ce sont ces fichiers, contenus dans des disques durs collectés lors d’une perquisition au siège de l’entreprise mi-2015, qui avaient conduit à reporter le procès après sa première audience, le 30 septembre dernier : la défense ne s’était pas vu transmettre le contenu des disques durs, et la présidente du tribunal, Cécile Louis-Loyant, lui avait accordé le droit de les explorer en profondeur avant de reprendre l'audience cette fin de semaine...

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dimanche 10 juillet 2022

A bientôt!...

     
    Reflets d'Islande

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Petit billet

__ C'est sûr

__  EDF: vers le pire?

__  Ruineux Capgémini

__ Aipac et Républicains           

__ L'Ukraine a bon dos

__ Prix électricité

__ Merci Danone!

__ Deliveroo nous du mal..

__ Aéroport: causes du chaos

__ La main dans le sac

__ Internet: histoire politique.

                                   _______ * Revue de presse.         ___________________

samedi 9 juillet 2022

EDF (suite) Pour un bilan

 "Faire crever la bête"?...

                               Dans ce dossier complexe et urgent, un autre éclairage n'est pas superflu:                                                  "...C’était un scénario catastrophe, jugé impossible par beaucoup il y a encore quelques années. Il est en passe de devenir réalité : EDF est au bord de l’effondrement financier. La situation est si inquiétante que le conseil social et économique central du groupe a déclenché un droit d’alerte à la mi-juin« EDF ne passera pas l’année », a-t-il prévenu.      De son côté, l’agence de notation S&P s’apprêtait à dégrader à nouveau la notation de l’électricien public dans les semaines à venir. « C’est sans aucun doute un des éléments qui ont poussé le gouvernement à accélérer sur le dossier. Une nouvelle dégradation aurait compliqué le financement du groupe et compromis les projets nucléaires présidentiels », analyse un financier.      « On a volontairement fait crever la bête », s’indigne Héloïse, cadre du groupe, dénonçant pêle-mêle l’absurde déréglementation du marché de l’énergie au seul bénéfice de fournisseurs alternatifs qui n’apportent rien, l’arrogance et l’incompétence de l’État actionnaire, la médiocrité des présidents successifs. Sans aller aussi loin dans l’expression, beaucoup de salariés mais aussi de connaisseurs du monde de l’énergie partagent l’analyse.   « Tout ce qui arrive était prévisible, écrit à l’avance. Depuis plus de dix ans, on assiste à une succession de décisions communautaires, gouvernementales, qui ont mis à sac EDF. Avec la crise de l’énergie, la guerre en Ukraine, on découvre aujourd’hui l’ampleur du dogmatisme de la Commission européenne, de la croyance au marché : nous n’avons ni stratégie ni sécurité énergétique. Et EDF, qui était le champion européen, est à terre. Quel bilan ! », s’indigne un connaisseur du dossier.     


                               ___Une accumulation de facteurs exceptionnels est venue faire dérailler le groupe. Mais certains auraient pu être évités, si le gouvernement avait fait d’autres choix. Sa responsabilité dans la façon dont il a conçu le bouclier tarifaire est totale.   Cyniquement, le gouvernement a demandé à EDF d’assumer l’essentiel du bouclier tarifaire, limitant la hausse des prix de l’électricité à 4 % à partir de février, en vue de protéger le pouvoir d’achat des ménages. Selon ce dispositif, l’accès à l’électricité nucléaire au coût historique (ARENH), qui est déjà une mesure sans équivalent pour financer les concurrents du groupe public, a encore été élargi.    EDF, qui fournit déjà 100 TWh aux fournisseurs alternatifs, est obligé de leur céder 20 TWh supplémentaires au prix de 42 euros/MWh (prix fixé pour l’électricité nucléaire historique). N’ayant pas de production suffisante à disposition, le groupe se retrouve dans l’obligation d’acquérir cette production au prix fort sur le marché (300 euros le MWh actuellement) pour le revendre à perte à ses concurrents.                  Lors de son annonce, la direction d’EDF avait chiffré le coût de cette mesure à 8 milliards d’euros d’impact négatif sur son Ebidta. Depuis, l’addition a été réévaluée : le coût estimé est de 10,2 milliards d’euros. Elle va encore s’alourdir : le gouvernement a annoncé la prolongation du bouclier tarifaire au moins jusqu’à la fin de l’année, en mettant toujours EDF à contribution.     « Tout cela aurait pu être évité si le gouvernement avait pris d’autres décisions. S’il avait décidé, comme l’a fait l’Espagne, de sortir du marché européen de l’électricité, s’il avait baissé la TVA sur l’énergie pour la ramener à 5,5 %, s’il avait retravaillé les tarifs de l’électricité, cela aurait été beaucoup plus efficace pour le maintien du pouvoir d’achat. Au lieu de cela, il a préféré qu’EDF continue à engraisser ses concurrents », dit Sébastien Menesplier, secrétaire général de la FNME-CGT.                                             ___La critique est d’autant plus justifiée que c’est à partir d’une méthodologie contestée, comme nous l’avons raconté, que tout cela a été élaboré. La commission de régulation de l’énergie (CRE) a établi fin janvier que les prix des tarifs réglementés de l’électricité devaient augmenter de 44 %, provoquant l’affolement du gouvernement puis la mise en place du bouclier tarifaire sur l’électricité. « Si la CRE avait décidé de changer de période de référence, de lisser l’évolution des prix sur une plus longue période, l’augmentation des prix de l’électricité aurait été au maximum de 10 %. Ce qui aurait pu être facilement supportable pour une grande partie des ménages. Mais la CRE a préféré la politique du pire, au détriment d’EDF et des finances publiques, et enrichir les traders », analyse un connaisseur du marché de l’électricité.                ___  Dans son récent rapport sur le marché de l’électricité, la Cour des comptes ne dit pas autre chose, soulignant que la méthode employée par la CRE « aboutit à des niveaux de prix excédant largement les prix » de marché. Le gouvernement ne tient manifestement pas rigueur à la CRE de cette « erreur » : son président, Jean-François Carenco, a été promu ministre délégué aux outre-mer.          Si le coût du bouclier tarifaire est si élevé pour le groupe public, c’est qu’il doit en même temps faire face à un accident industriel sans précédent, dont le gouvernement n’a tenu aucun compte : neuf de ses réacteurs nucléaires sont à l’arrêt, à la suite de la découverte par l’Autorité de sûreté nucléaire de fissures et de corrosion sur les tuyauteries des réacteurs.    À ces arrêts imprévus s’ajoutent les chantiers de révision, de maintenance déjà programmés. Sur les 56 réacteurs installés, EDF ne peut compter que sur la production d’une petite trentaine depuis le début de l’année. Sa production nucléaire devrait tomber de 350-380 TWh à environ 280 à 300 TWh au mieux en 2022, le PDG du groupe, Jean-Bernard Lévy, ayant annoncé de possibles chutes de production encore au second semestre.                               Les conséquences de cet accident industriel sont déjà immenses. À ce stade, le groupe les évalue à 18,5 milliards d’euros de pertes sur son Ebidta. Ce n’est qu’une estimation provisoire : EDF se trouvant désormais dépendant du marché électrique européen pour assurer une partie de ses approvisionnements.     Même si ces arrêts ont un caractère exceptionnel, ils n’en posent pas moins la question de la gestion du parc nucléaire français, des choix passés. La Belgique, qui exploite des réacteurs comparables, ne rencontre pas les mêmes problèmes que la France. Certains, jusqu’au gouvernement, sont tentés de l’expliquer par la grande rigueur de l’Autorité de sureté nucléaire.                                                                                                          Dans son discours de politique générale, la première ministre, Élisabeth Borne, a annoncé mercredi 6 juillet l’étatisation de fait de l’électricien. Dans la foulée, Jean-Bernard Lévy a officialisé le fait qu’il abandonnait par anticipation son poste de PDG, sans avoir à assumer son bilan.    Même si beaucoup prévoyaient de graves difficultés pour EDF, personne sans doute n’imaginait qu’elles atteindraient une telle ampleur. Selon nos informations, le groupe anticipe un Ebidta (excédent brut d’exploitation) négatif à la fin de l’année, compte tenu d’une succession d’éléments exceptionnels.    La perte pourrait être de l’ordre de 10 à 15 milliards d’euros, selon certaines sources. L’endettement du groupe dépasserait 60 milliards d’euros et pourrait même atteindre 70 milliards à la fin de l’année (contre 48 fin 2021). Même si des cessions et des ajustements comptables peuvent venir un peu alléger la note, d’autres charges financières et provisions sont aussi à prendre en compte. À la moitié de l’année, EDF se prépare à afficher des milliards d’euros de pertes fin 2022.    Et ce ne sont que des estimations provisoires. La crise de l’énergie qui sévit en Europe depuis l’été 2021 et qui s’est aggravée depuis la guerre en Ukraine nourrit une flambée des prix de l’électricité, qui pourraient atteindre des niveaux stratosphériques si la menace de pénurie de gaz, qui sert de référence pour l’établissement des prix de l’électricité sur le marché de gros européen, se concrétise. EDF risque alors d’être touché de plein fouet.       Mais au sein du groupe, beaucoup mettent plutôt l’accent sur le changement de culture des directions successives, devenues beaucoup plus préoccupées par le rendement à court terme, les dividendes toujours plus élevés exigés par l’État actionnaire, les opérations financières censées être prestigieuses mais s’avérant ruineuses, plutôt que de produire de l’électricité dans les meilleures conditions. Cela s’est traduit par une chute des investissements à partir des années 2000, la suppression des maintenances préventives, le recours accru à la sous-traitance. Ces économies à court terme se paient au prix fort aujourd’hui.    « Il y a une paupérisation des compétences, une perte de la culture industrielle dans l’entreprise. Les anciens qui ont fait cette maison sont partis. Et la culture est partie avec eux. Ils n’ont pas été remplacés », ajoute un ancien responsable du groupe. « Ce n’est pas vrai qu’EDF a perdu ses savoir-faire industriels. Enfin pas partout. Il y a des directions, des divisions où ces préoccupations dominent. Au comité exécutif, au sommet, c’est autre chose », nuance Nicolas* , salarié du groupe.                              ___ Cette perte de compétences, d’expertise se traduit sur les chantiers de l’EPR. Comme cela était prévisible et annoncé, Hinkley Point (au Royaume-Uni) suit les traces de Flamanville. Avant le lancement du projet, tout le groupe, des ingénieurs aux syndicats, en passant par certains directeurs, s’était mobilisé contre ce programme, jugé dangereux pour l’avenir. Le directeur financier d’EDF, Thomas Piquemal, avait même démissionné avec fracas pour s’y opposer. Jean-Bernard Lévy avait décidé de passer outre et d’imposer ce contrat, voulu par Emmanuel Macron, alors ministre de l’économie.       Toutes les craintes de l’époque étaient fondées : le chantier de Hinkley Point se révèle irréalisable dans les délais et les prix annoncés au moment de la signature du contrat. Alors que le réacteur devait entrer en fonctionnement fin 2022, début 2023, la direction d’EDF a annoncé de nouveaux retards. La mise en service de la première tranche est reportée à fin juin 2027. Au mieux. Ces nouveaux retards se traduisent par un surenchérissement de 3 milliards de livres (3,5 milliards d’euros). Estimé au départ à quelque 19 milliards de livres, le projet est chiffré désormais à 26 milliards de livres.       Des chiffres qui donnent le vertige à beaucoup. Alors qu’Emmanuel Macron annonce la construction de six EPR, et peut-être même de 14, tous redoutent de voir le groupe sombrer corps et biens dans un gouffre industriel et financier.                              Alors que le groupe se débat face à des équations financières insolubles, beaucoup se demandent comment va s’écrire la suite. « Avec le contrôle total du capital par l’État, cela risque d’être encore pire », note Charles*, cadre chez EDF. C’est peu dire que l’annonce d’Élisabeth Borne du rachat des actionnaires minoritaires d’EDF et de la sortie du groupe de la bourse ne suscite guère d’enthousiasme chez les salariés de l’électricien. Beaucoup insistent pour parler d’étatisation et non de nationalisation du groupe.     Un mot que d’ailleurs Élisabeth Borne s’est bien gardée d’employer. « Il n’y a pas de transformation de statut. EDF reste une société anonyme (SA) et ne redevient pas un EPIC (établissement public industriel et commercial). Demain, ils pourront faire ce qu’ils veulent », constate Sébastien Menesplier.    « Je suis pour le maintien des actionnaires minoritaires au capital. C’est une protection pour EDF. Avec 100 % du capital, l’État va avoir les mains libres. Cela signifie moins de transparence, moins d’informations financières, encore moins d’autonomie et de marges de manœuvre pour diriger ce groupe », renchérit Nicolas*. Celui-ci redoute que l’État ne profite de l’affaiblissement d’EDF pour réimposer d’une façon ou d’une autre le projet Hercule, conduisant au démantèlement du groupe.       Beaucoup de salariés entretiennent la même crainte. Emmanuel Macron n’a jamais caché combien il tient à ce projet conçu dès 2016. Et le président n’a pas caché non plus son mécontentement après s’être heurté à une opposition forte à la fois au sein de l’entreprise et à la Commission européenne. Convaincu de la pertinence de « son projet » sans jamais l’avoir expliqué, même lors de la campagne présidentielle, il semble décidé à le reprendre.      À ce stade, le gouvernement, au-delà de l’étatisation d’EDF, n’a rien dit de ce qu’il entendait faire. Et manifestement il compte dévoiler ses cartes au dernier moment afin de prendre de court toutes les oppositions. « Il n’y aura pas de débat parlementaire sur la prise de contrôle de l’intégralité du capital d’EDF », a déjà prévenu le ministre des finances, Bruno Le Maire.                                    Au-delà de l’engagement financier que cela représente – le rachat des minoritaires d’EDF pourrait s'élever à 12,7 milliards d’euros –, comment le gouvernement peut-il envisager une seule seconde de ne pas s’expliquer sur ses intentions devant le Parlement, devant les Français ? L’électricité est un bien de première nécessité, un élément déterminant pour l’économie française. EDF n’est pas une entreprise d’État mais un service public au service de la nation, un bien commun partagé entre tous. Et le gouvernement n’aurait aucune explication à fournir, ni sur les échecs passés qui ont conduit à cet effondrement, ni sur ce qu’il entend faire à l’avenir ? « Il serait temps qu’on donne la parole au public, qu’on le consulte sur ce qui se passe et ce qu’il veut, insiste François Carlier, directeur de l’association CLCV (Consommation, logement et cadre de vie). Depuis le milieu des années 1990, l’ouverture du marché de l’énergie s’est faite sans jamais l’interroger. On devine assez pourquoi : 75 % des gens sont encore inscrits aux tarifs réglementés de l’électricité. Cette consultation ne peut plus être différée. »      Le gouvernement espère encore feinter. Mais il ne pourra pas continuer très longtemps sans que le public ne lui demande des comptes. Certes, il peut encore espérer masquer l’effondrement d’EDF un moment, avec son opération capitalistique. Mais il ne le pourra plus quand viendra le temps des pénuries, des rationnements et des coupures.       Car nous en sommes là ! Dès cet été, il n’est pas assuré que la Corse ne souffre pas de coupures d’électricité. Cet hiver, la menace de coupures arbitraires pourrait toucher tout le territoire. Le gouvernement, d’ailleurs, s’y prépare. Selon nos informations, un décret est en cours de rédaction pour permettre des coupures d’électricité et mesures de délestage chez les particuliers, sans que celles-ci donnent lieu à indemnisation, à la différence de ce qui est fait pour les entreprises...." [ Merci à Martine Orange. ___ Souligné par moi] ______________________