Seigneur, délivrez-nous des paradis!
Des niches, il y en a de petites, bien légales, et d'autres, plus grandes, plus conséquentes, loin des yeux de Bercy, pour échapper à l'impôt.
Des niches magiques...
Les paradis, eux, c'est normal, sont toujours luxuriants, mais discrets.
Une richesse cachée, bien à l'ombre, qui ne s'investit pas, qui ne crée pas de croissance mais au contraire spécule dangereusement, qui appauvrit les Etats et les moins favorisés, en développant une rente stérile. Niches et paradis se confondent souvent.
Un secret bien gardé.
Elle ne devaient plus exister, avait-on dit ...
Plus jamais ça!...avait-il dit. «Des trous noirs comme les centres
offshore ne doivent plus exister, et leur disparition doit préluder à
une refondation du système financier international» (F.Fillon)
(On est prié de ne pas rire!)
Les paradis sont nichés partout, pas seulement sous les cocotiers des Caraïbes. Juste à côté...
On imagine à peine: quelque 350 milliards d'avoirs français coulent des jours heureux dans des paradis divers, souvent à deux pas de nos frontières.
"Malgré toutes les annonces de réforme, toutes les promesses de
transparence et de coopération, qui battent leur plein depuis quelques
années ( ici), l’analyse de Gabriel Zucman est sans pitié : « Il n'y a jamais eu autant d'argent qu'en 2013 dans les paradis fiscaux, explique-t-il à Mediapart. Selon
mes calculs, 8 % du patrimoine financier mondial des ménages y est
logé, et échappe à tout impôt. Soit une fortune de 5 800 milliards
d'euros, dont 350 milliards appartenant à des Français. C’est 25 % de
plus qu’en avril 2009, quand le G20 de Londres avait annoncé la “fin du secret bancaire”. ..
Selon lui, la fraude permise par le secret bancaire représente 130
milliards d'euros de perte d'impôts au niveau mondial, dont 17 milliards
rien que pour la France [ Certains font des estimations plus hautes, comme Antoine Peillon _ndlr].
À court terme, il estime que l’Hexagone
pourrait récupérer 10 milliards d’euros par an s’il luttait de façon
efficace contre la fraude. Et sans l'évasion fiscale, la dette publique
française ne s’élèverait pas à 95 % du PIB, mais à 70 %....
Tout en haut de la pyramide, la Confédération helvétique, qui gère 1 800
milliards d’euros de fortunes étrangères, dont 1 000 milliards de fonds
appartenant à des Européens. « C’est l’équivalent de 6 % du patrimoine financier des ménages de l’Union européenne, son plus haut niveau historique »,
souligne Gabriel Zucman. L’argent est déposé directement en Suisse ou
dans les filiales de ses banques nationales à Hong Kong, Singapour,
Jersey ou autres....
L’argent est ensuite investi aux deux tiers dans des fonds de placement,
dont beaucoup sont hébergés au Luxembourg : au total, un tiers des
fortunes gérées en Suisse sont investies dans des fonds
d’investissements luxembourgeois (non taxés par le Grand-Duché). Un état
de fait reconnu tout récemment par l'OCDE, qui a désigné pour la première fois
le Luxembourg comme un paradis fiscal. Et afin de le rendre intraçable
par les fiscs nationaux, les banquiers prennent soin, avant d’investir
cet argent, de dresser un ou plusieurs paravents, en le confiant
virtuellement à des sociétés écrans, basées aux îles Vierges (ou à
Panama), et censées en être les propriétaires. Aujourd’hui, plus de 60 %
des comptes en Suisse sont détenus par l’intermédiaire de sociétés
écrans sises au Panama, de trusts enregistrés aux îles Vierges
britanniques, de fondations domiciliées au Liechtenstein, etc.
Certes, Bercy peut se féliciter des 4 300 dossiers déposés depuis
fin juin par des contribuables souhaitant régulariser des avoirs non
déclarés. Mais selon les estimations, on compte au moins 80 000 comptes
de Français non déclarés en Suisse ! La plupart sont protégés par des
sociétés écrans, et resteront indétectables un bon moment, car une
entreprise basée aux îles Vierges n’est pas assimilée à un particulier
fraudant le fisc…
« La lutte commence tout juste. Des progrès importants ont été
faits, je ne le nie pas, mais l’écart entre les proclamations d’une part
et les actes et les chiffres d’autre part, est assez considérable, constate Gabriel Zucman. Les
gouvernants et les technocrates qui réfléchissent à ces questions
sous-estiment la progression de l’opacité financière. Ils pensent
qu’avec des traités d’échange d’informations, à la demande ou
automatiques, on va résoudre le problème du jour au lendemain, ce qui
est très loin d’être le cas....»
On risque d'être découragé face à une telle organisation, de telles sommes détournées et de tels ravages.. G. Zucman estime cependant que, même s'il faudra du temps, lutter contre l’évasion fiscale n’est pas une utopie.
Du temps et des volontés politiques concertées et déterminées.
On est loin de compte...
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