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samedi 15 janvier 2022

Numérique et énergie

 Il n'y a pas de neutralité carbone numérique

                                         On le pense parfois; le développement du numérique serait une voie royale pour accéder à des économies d'énergie significatives. Il va falloir réviser nos jugements : si un clic coûte très peu, l'ensemble des activités de tous les ordinateurs du monde engendre une consommation non négligeable d'électricité, ce que l'on ne soupçonne guère en général.  Rien que pour la simple gestion (fonctionnement et refroidissement) des data center en France, la consommation moyenne d'électricité équivaut à celle d'un ville comme Bordeaux, dans l'état actuel des choses.                                                                 _____L' écosystème numérique, l'ensemble des activités des appareils qui gravitent autour de cette fonction ne sont pas impact sur la consommation générale de l'électricité, de l'énergie en général. Et nous ne sommes qu'au début d'un processus:    "...L’écosystème numérique mondial est à l’origine de 2 % à 4 % – selon les études – des émissions de gaz à effet de serre sur la planète, soit jusqu’à deux fois plus que le transport aérien. Rien qu’en France, un rapport du Sénat donne 15 millions de tonnes équivalent dioxyde de carbone (CO2) par an, soit 2% du total des émissions dans l’Hexagone en 2019. Après le sentiment d’« avihonte » d’origine suédoise, le scrupule à « liker » naîtra-t-il en France, où pas moins de trois lois « anticarbone » ciblant le numérique sont entrées en vigueur le 1er janvier 2022 ?    Ce nouvel arsenal réglementaire permet de demander des comptes aux entreprises du numérique sur leur empreinte carbone. « Pour un courriel lesté d’une pièce jointe lourde, ce sont 20 grammes de CO2 qui sont émis, soit autant que 150 mètres parcourus en voiture », indique Guillaume Pitron, auteur de L’Enfer numérique. Voyage au bout d’un like (Les liens qui libèrent, 2021). Avec 10 milliards de messages électroniques envoyés par heure dans le monde, cela équivaut à 50 gigawatts, soit la production électrique horaire de quinze centrales nucléaires ! La pollution numérique provient actuellement pour les trois quarts de la fabrication de terminaux tels que – dans l’ordre de leur empreinte carbone – les téléviseurs, les ordinateurs portables, les smartphones, les box Internet, les écrans et les consoles de jeux. Contenant une cinquantaine de métaux, un smartphone ne pèse pas 150 grammes, mais 150 kilos – ce que M. Pitron appelle « le sac à dos écologique ». ..."                                                                               Nous ne sommes qu'au début d'un processus massif et mondial: la généralisation de la numérisation des sociétés, dans des domaines de plus en plus variés et élargis: de la communication privée aux plus complexes, administratives ou industrielles. La formule papier régresse inexorablement pour communiquer avec son percepteur, voire son médecin. Nous allons à marche forcée vers un monde que l'on dit de plus en plus "dématérialisé". Et la 5 G laisse entrevoir des dimensions nouvelles. Il n'y aura pas de réversibilité, on s'en doute, malgré les défaillances parfois problématiques: on le voit quand un hôpital est paralysé par un piratage inattendu, quand un service ne répond plus suite à une panne massive de réseau. S'est mis en place un système certes performant mais fragile et énergétivore, quelles que soient les précautions et les rustines.


      Mise à part cette fragilité, il y a un aspect ignoré que l'on peut appeler la "pollution numérique", car ce que nous considérons comme "'immatériel" est tout à fait matériel, avec des impacts non négligeables sur l'environnement. Le bilan carbone n'est pas neutre, loin de là, que ce soit dans l'extraction des matières nécessaires ou dans l'énergie croissante que nécessite son fonctionnement. Certains l'avaient déjà noté depuis un moment;   G. Pitron étudie le problème sous toutes ses facettes, après un travail minutieux de recherche, comme il l'avait déjà fait avec la question du "tout électrique" dans le domaine automobile, jugé déraisonnable si l'on y regarde de près. Nous allons à grands pas vers une "obésité numérique", dont nous ne sommes guère conscients, une fuite en avant inscrite dans le processus en cours, qui connaîtra, certes, des mutations, mais qui ne changera pas de nature. De ce point de vue, l'avenir peut paraître hallucinant. Le problème est que nous pourrons de moins en moins envisager un retour en arrière, ni même des inflexions significatives. Du moins avec les perspectives d'aujourd'hui. "Pour un selfie de plus..." comme note l'auteur, un like envoyé, multiplié des milliards de fois, des masses de messages et des photos envoyés à la vitesse de la lumière, nous contribuons à renforcer l'impact écologique que nous souhaitons réduire par ailleurs. Notre ignorance sur la question est savamment entretenue surtout par ceux qui vivent de ces flux numériques toujours plus importants.  ...Autant de questions que les utilisateurs d’outils connectés en tout genre ne se posent pas.                                            _____Et     Pourtant, la légèreté du net pourrait bien s’avérer insoutenable. Trois ans après sa formidable enquête sur les dessous des énergies vertes, "La guerre des métaux rares" (plus de 70.000 exemplaires toutes éditions confondues, traduit en plus de 10 langues) , Guillaume Pitron nous propose une enquête fascinante qui interroge le coût matériel du virtuel...."                                                         _ Sommes-nous au bord d'une prise de conscience sur les véritables coûts du développement incontrôlé des géants du net auquel nous participons allégrement, aveugles à la face cachée du système? Il y a beaucoup à apprendre sur les toujours croissantes consommations électriques de data center, etc...Plus de 10 % de la consommation mondiale électrique serait actuellement affecté à leur fonctionnement.


       "Les chiffres sont édifiants....« Lorsque j’ai découvert les chiffres de cette pollution, je me suis dit : “Comment est-ce possible ?” », se rappelle Françoise Berthoud, ingénieure de recherche en informatique. Les dommages causés à l’environnement découlent d’abord des milliards d’interfaces (tablettes, ordinateurs, smartphones) qui nous ouvrent la porte d’Internet. Ils proviennent également des données que nous produisons à chaque instant : transportées, stockées, traitées dans de vastes infrastructures consommatrices de ressources et d’énergie, ces informations permettront de créer de nouveaux contenus digitaux pour lesquels il faudra… toujours plus d’interfaces.  Pour réaliser des actions aussi impalpables qu’envoyer un courriel sur Gmail, un message sur WhatsApp, une émoticône sur Facebook, une vidéo sur TikTok ou des photos de chatons sur Snapchat, nous avons donc édifié, selon Greenpeace, une infrastructure qui, bientôt, « sera probablement la chose la plus vaste construite par l’espèce humaine  ».    Les chiffres sont édifiants : l’industrie numérique mondiale consomme tant d’eau, de matériaux et d’énergie que son empreinte représente trois fois celle d’un pays comme la France ou le Royaume-Uni. Les technologies digitales mobilisent aujourd’hui 10 % de l’électricité produite dans le monde et rejetteraient près de 4 % des émissions globales de dioxyde de carbone (CO2), soit un peu moins du double du secteur civil aérien mondial. « Si les entreprises du numérique se révèlent plus puissantes que les pouvoirs de régulation qui s’exercent sur elles, le risque existe que nous ne soyons plus en mesure de contrôler leur impact écologique », avertit M. Jaan Tallinn, le fondateur de Skype et du Future of Life Institute, qui travaille sur l’éthique des technologies ...."   _____[Souligné par moi]__________

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