Le grand détournement
Il est bien des lectures de la Bible. Comme du Coran d'ailleurs. Chaque texte dit sacré a une fâcheuse tendance à être utilisé, récupéré, instrumentalisé, pouvant justifier toutes sortes de causes, parfois les plus éloignées des idéaux proclamés, parfois les plus intéressées, voire des plus guerrières: des interminables Croisades jusqu'au Gott mit uns du Reich, aux aventures moyen-orientales de Bush contre l'Axe du Mal, en passant par la bénédiction du Cardinal Spellman aux armées US en partance pour le Vietman. La diversité des religions ou sectes issue de l'antique tradition chrétienne en témoigne. Mais peu de religions échappent à ce tropisme de l'utilisation du sacré à des fins de pouvoir ou de conquêtes. Dieu a les visages qu'on lui prête, l'anthropomorphisme aidant. Comme il est silencieux, on peut lui faire dire ce que l'on veut...Tout religion, surtout monothéiste, est un facteur de cohésion, plus ou moins fort et provisoire, un facteur de divisions aussi, voire d'affrontements. L'histoire le montre abondamment... ___ Dieu vient au secours du trumpisme, son fidèle allié, selon la parole du Maître de la Maison Blanche et des gourous qui l'entourent et le conseillent, essentiellement évangélistes de tous crins, utilisant la Bible à des fins de manipulations, comme arme de combat. Au point que Trump et la Bible se confondent, comme le répète le principal intéressé, toujours à l'affût d'une nouvelle croisade, surtout économico-politique, en bon apôtre intéressé et mégalomane. C'est le Christ ou le chaos...Il faut de nouveau sauver l'Amérique. Trump est le nouveau Moïse...Le Messie est parmi nous! On trouve dans les textes sacrés de quoi alimenter les combats, même si les interprétations peuvent diverger à l'infini. Les plus sombres périodes bibliques semblent revenir en écho, un peu partout. Dramatiquement...Josué s'y reconnaîtrait, surtout dans le nouveau Proche Orient où Trump veut s'ériger en sauveur, en faiseur de rois. Le suprémacisme exulte, d'un côté comme de l'autre. Sur le traces de la conquête de la Terre sacrée...
...« Josué battit tout le pays (…) il ne laissa aucun survivant. Il frappa d’anathème tout ce qui respirait », et le clou est d’autant plus enfoncé par l’affirmation « comme l’avait ordonné le Seigneur, le Dieu d’Israël » (Jos 10:40). Le Pentateuque dépeint en termes durs la manière dont Dieu va, ou Israël doit, traiter les nations en Canaan. Elles seront effacées (khd Ex 23:23), chassées (grs Ex 23:28-31; Dt 7:1), expulsées (nsl Dt 7:1), repoussées (hdp Dt 9:4), retranchées (krt Dt 12:29), détruites (smd Dt 12:29), ou dépossédées (yrs Dt 9:5, 12:29)1. Le verbe le plus dur est heherîm (hrm) d’où est dérivé le nom herem. Deux lois deutéronomiques prescrivent cette sanction pour les sept nations de Canaan: « Tu les voueras à l’interdit » ou, traduit autrement, « tu les frapperas d’anathème » (Dt 7:2, 20:17)2. C’est d’abord en Transjordanie, selon les récits de guerre en Deutéronome 2 et 3, et puis en Cisjordanie, d’après Josué 6 à 12, où l’anathème est appliqué3. La politique d’anathème, selon les sommaires des campagnes militaires majeures (Jos 10:40, 11:20), semble s’étendre sur la majorité sinon toutes les villes dont les Israélites ont pu s’emparer. Dans les récapitulatifs de batailles individuelles où le herem a été appliqué se trouvent également les expressions dures comme « ils les passèrent au fil de l’épée », ou « il ne resta rien de ce qui respirait », rendues parfois plus poignantes par le rajout « hommes, femmes et enfants » (Dt 2:34, 3:6; Jos 6:21, 10:40, 11:11, 14, 12:40). Comment donc ne pas tirer la conclusion qu’Israël était bénéficiaire d’un pays donné en héritage découlant de lait et de miel au prix du sang coulé des populations vaincues? Quel meilleur mot choisir pour qualifier ces impressions si ce n’est le génocide? Et ne peut-on pas, comme A. de Pury, sérieusement se demander: « Si le dieu d’Israël est vraiment… un dieu sanguinaire qui appelle son peuple au combat et qui ordonne des massacres, comment confesser que ce dieu est le même que le dieu du NT, le Père de Jésus-Christ? »4Croire en l’extermination des Cananéens sur l’ordre de Dieu pose un problème de taille d’ordre éthique et théologique..." _____________________
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire