Le MILLION de visites est atteint. Merci de vos visites et de votre indulgence. En route pour la suite...si Dieu me prête vie!

mardi 22 septembre 2009

Coaching à la F.-Télécom


De si gentils managers...

«Certains n'arriveront jamais au bout»

-Les ravages de l'idéologie managariale-
__Discutable coaching
-Stage France Telecom : "courbe du deuil" et casse du salarié

-"On a laissé les managers gérer les conséquences psychologiques de l'organisation du travail en méconnaissant qu'elles pouvaient être sources de passage à l'acte. Or toute entreprise, publique ou privée, est tenue par le code du travail (article L4121-2, ex 230-2) à une obligation de résultat concernant la santé physique et mentale des salarié. France Télécom ne peut s'en exonérer. Il me semble que ces documents pourraient intéresser un juge. Je ne comprends pas pourquoi dans cette entreprise personne n'a rien dit. Pourquoi ni le CHSCT, ni les syndicats, ni les médecins du travail ne se sont emparés de ces documents! Ça nous donne la mesure de la peur et du climat qui régne dans cette entreprise... Pour diffuser et observer ces modes de management, il faut que les managers soient dans un état effrayant de soumission, de docilité et d'adhésion à l'idéologie managériale... " (Marie Pezé-psychologue-)

_______________"...Au début de chaque année, les médecins du travail de France Télécom (ils sont 80) remettent un rapport d'activité. Ces documents sont compilés par un médecin coordonnateur, puis largement diffusés dans l'entreprise, notamment aux élus du personnel. Mediapart s'est procuré le rapport du docteur Catherine Korba pour l'année 2008 (cliquer pour l'afficher). Ce médecin du travail, salariée de France Télécom, exerçait à Nice et Toulon. En 2008, elle a vu près de 1300 salariés.Catherine Korba a démissionné au début de l'été et, depuis, changé de région. Comme elle, huit médecins du travail ont démissionné de France Télécom depuis le début de l'année, signe d'un malaise grandissant. Avant de quitter Orange, elle avait présenté ce rapport au printemps au sein d'un comité d'entreprise où elle n'avait pas hésité à dire tout ce qu'elle avait sur le cœur, racontent plusieurs témoins..."(Mediapart)

_________________________________

-Comment France Télécom a formé ses cadres à l'art du dégraissage | Mediapart:
"Depuis dix ans, France Télécom est en restructuration permanente. En 1998, elle était encore une administration publique. Depuis, elle est une société privée, cotée en bourse, détenue seulement à 27% par l'Etat, ballottée par la féroce compétition internationale que se livrent les opérateurs télécoms. Les nouvelles technologies (Internet, le mobile, les fibres optiques) ont encore accéléré les changements.-En 2006, l'entreprise lance le programme Next. Objectif : 22.000 départs (les plus âgés ou, par exemple, les mères de trois enfants), 6.000 recrutements dans les secteurs de pointe et 10.000 «mobilités» (des changements de poste et de service) vers des secteurs en manque de bras : les boutiques et les centres d'appel, les réseaux informatiques, le multimédia. Le programme s'est terminé fin 2008, l'objectif atteint. -Mi-2006, France Télécom avait demandé à 4000 cadres dirigeants de suivre un module de formation (dix jours au total, répartis sur plusieurs mois) pour accompagner cette vaste restructuration. Objectif : faire des chefs d'équipe des relais du changement permanent et de la «mobilité». En clair, les aider à présenter à leurs équipes les réorganisations de service sous un jour positif. Pas évident. «Lors de ce séminaire dont l'essentiel des cours se tenait à Paris, se rappelle un cadre qui a suivi le cursus de formation, 80% des managers présents avaient eux-mêmes été changés de service ou de région.»-Pour cela, ils étaient invités à participer à des jeux de rôle ou à se laisser évaluer par leurs chefs et leurs collaborateurs (l'évaluation à 360°). Mediapart publie l'intégralité des modules de ce séminaire. Ces dix jours de formation pour 4000 cadres, s'ils ont peut-être permis d'éviter à certains managers de se montrer trop brutaux lors de l'annonce des restructurations, n'ont malheureusement pas porté les fruits attendus: très récemment, deux salariés, Michel D. à Marseille, et Stéphanie, une jeune femme de 32 ans à Paris, ont explicitement relié dans des courriers leur suicide aux conditions de travail.
["S'approprier Next" (cliquer ici pour le télécharger en pdf): en 61 pages, les principes du programme Next (réduction d'effectifs, mobilités...) sont présentés. ]«Votre leadership, notre futur», proclame ce texte. L'objectif est écrit noir sur blanc : les managers doivent «développer leur leadership et piloter la transformation» de l'entreprise. Le mouvement est impératif, assène-t-on encore aux cadres: «Notre productivité, en régression constante, reste une des plus dégradées des opérateurs européens.» Malheur au manager qui travaille dans les services d'assistance technique, s'occupe du réseau téléphonique ou travaille au service finance : son activité est marquée d'une croix descendante, symbole de métier en déclin. Le voilà prévenu : son service sera massivement restructuré.
["Réussir Act" (pour le pdf, cliquez là) ]: quelques semaines plus tard... Cette fois, voilà notre manager plongé dans le vif du sujet : la restructuration. Il s'agit en réalité d'un module assez général sur l'écoute, la façon d'évaluer le travail d'un collaborateur (sa «valeur professionnelle» et son «employabilité»). La présentation n'en fait pas mystère : c'est au manager que reviendra la lourde tâche d'aider celui qui devra quitter son service, sa région, ou tout simplement France Télécom à réaliser le «deuil» de son poste.... L'entretien avec le collaborateur (de 10 minutes) est méthodiquement découpé en séquences que les managers sont invités à respecter.
Un saisissant guide de 6 pages résume les bonnes attitudes à adopter. Intitulé Guide pratique : accompagner un collaborateur en processus de changement (cliquer ici pour l'afficher), c'est le viatique indispensable d'une restructuration en douceur. Il explique au responsable d'unité comment gérer les réactions suscitées par l'annonce d'un changement de poste. Par exemple, si le salarié trépigne de rage dans le bureau de son chef : «Si la personne manifeste de la colère ou de la déception, laisser le temps nécessaire à l'expression de cette émotion.»-Le guide fournit d'autres conseils. «Ne pas avoir peur des silences, dans les échanges avec le collaborateur ; il faut accepter ces temps de respiration.» Rappeler, une fois de plus, le mot d'ordre de l'entreprise : «L’insécurité, dans un environnement changeant, serait, pour nous tous, de ne pas bouger.» Redire que tous dans l'entreprise sont confrontés de la même façon au changement, rendu inéluctable : «Insister sur le fait que la mobilisation concerne tout le monde, y compris le manager.» Et gare à ne pas se laisser berner par la rage de son collaborateur : «Le niveau d’"énergie" exprimé n’est pas toujours représentatif du niveau de résistance réel !»Le «schéma des phases de deuil» (ci-dessous : il faut le lire du centre vers la gauche, puis de la gauche vers la droite) aidera avantageusement le cadre à savoir où en est son subordonné sur la longue route de l'acceptation de son changement de poste...
Les cadres doivent encore assister à un module de formation de deux jours, toujours dispensé à l'Ecole du management, en Ile-de-France. Séance concoctée par les cabinets Lesire Partners (qui compte parmi ses clients, selon son site internet, le géant de l'aluminium Alcan ou Leroy-Merlin) et Insep Consulting (spécialiste du développement de la «performance managériale» qui revendique 500 clients «issus du secteur privé et des principales administrations publiques»).-Dans un jargon bourré d'anglicismes (coach, feed-back, leadership, etc.) et d'épithètes ronflantes («l'écoute active», le «questionnement efficient»), les consultants donnent les derniers conseils. lls rappellent aux managers leur rôle : «Écouter et mobiliser» (objet du premier module d'une journée), puis: «S'engager et faire s'engager». On ne leur cache pas que leur mission sera difficile : face à un changement, «les collaborateurs se sentent mal à l'aise et inquiets, rappellent-ils. Ils pensent d'abord à ce qu'ils vont perdre, ils se sentent seuls (...) ils ne peuvent pas supporter trop de changement», etc. Pourtant, pas question de lâcher la bride! «Si on arrête le mouvement et retire la pression, les collaborateurs ont tendance à revenir à leurs anciennes habitudes et comportements> [Pour télécharger les deux modules, cliquez ici (le premier) et(le second)]

C'est en suivant tous ces préceptes que le manager et ses ouailles traverseront sans encombre la «vallée du changement»» (sic!). Sans encombre? Pas totalement. Page 24 du module numéro 2, on trouve une phrase extrêmement troublante :
"Certains n'arriveront jamais jusqu'au bout"Par son caractère définitif, cette phrase alors couchée noir sur blanc par les consultants ès management résonne aujourd'hui tragiquement..."


-Le stress censuré sur l'intranet de France Télécom
-Un cadre de France Télécom : "On a tous été robotisés"
-Didier Lombard aux salariés d'Orange : «La pêche aux moules, c'est fini» | Mediapart
_______________________
- Fait(s)divers: souffrance au travail

lundi 21 septembre 2009

Images trompeuses


Sous les images, la propagande?
-A propos d'Apocalypse-

Les images semblent porter en elles-mêmes leur propre vérité, mais on peut leur faire dire n'importe quoi.
_________Arrêt sur images

Au lieu de réchauffer des images, il s'agirait d'abord de les penser

"Plus les images jouent la naïveté, plus elles sont mensongères" (L Hansen Love)
_________________

-Les images d’archives peuvent-elles mentir ?:
"Plans sibyllins de la révolution d’octobre 1917 ou, plus spectaculaires, des événements de Mai 1968, vues charbonneuses de la Grande Dépression ou images en couleur des années Pompidou, plans silencieux de la Première Guerre mondiale, ou sonores de la Seconde, qu’évoque Isabelle Clarke dans les six épisodes d'Apocalypse diffusés sur France 2 depuis le 8 septembre… La prodigieuse masse d’archives tournées depuis plus de cent ans par les opérateurs d’actualités, les reporters du monde entier et les propagandistes de tous bords, est une véritable manne pour les documentaires historiques consacrés aux événements d’un siècle qui fut aussi celui du cinéma.
Nombreux sont les programmes abordant l’histoire contemporaine qui exploitent cette matière audiovisuelle sans prendre en compte les intentions à l’œuvre dans les archives, leur teneur idéologique, leur part de subjectivité. « Bien des documentaires de montage se contentent de remonter (sans se poser de question) les images de propagande d’hier en les commentant avec la propagande d’aujourd’hui ; comme si ces vues étaient porteuses du plein sens de l’histoire, souligne le philosophe François Niney dans Le Documentaire et ses faux-semblants (Klincksieck, 2009). Or, il n’y a pas plus de raisons de voir dans ces actualités d’hier la vérité d’alors nous sauter aux yeux que de croire la vérité d’aujourd’hui révélée dans nos actualités quotidiennes ! Même s’il est indéniable que ces images-là (tout comme celles-ci) portent bien une empreinte de la réalité de leur temps, leur sens ne relève pas de l’évidence. » François Niney cite l’historien Marc Ferro, pour qui « tous les documents doivent être analysés comme des documents de propagande ».
Peu de documentaires s’imposent une telle discipline. Généralement, les archives sont juste là pour animer le cadre, abandonnant au commentaire le soin de porter le propos du film. Leur valeur de document s’y trouve détrônée par une fonction illustrative, qui privilégie leur caractère spectaculaire. Et les détournements d’images sont fréquents, comme le soulignent les documentalistes Anne Connan et Valérie Combard, familières de cette mémoire audiovisuelle qu’elles explorent à longueur de journée. « Les seules vues aériennes de camps nazis que l’on connaisse ont été tournées à Auschwitz. Or, elles sont fréquemment utilisées pour figurer d’autres camps », relève la première. La seconde se souvient notamment d’« une archive utilisée en tant qu’image de la Shoah, alors qu’elle datait de 1947 et représentait des passagers d’un train ayant vainement cherché à émigrer en Palestine ». Une simple phrase de commentaire suffit à transformer Auschwitz en Treblinka ou à changer du tout au tout la perspective d’un voyage ferroviaire. C’est dire la fragilité sémantique de l’image…
Dans Lettre de Sibérie, Chris Marker s'ingénia en 1958 à plaquer sur le même assemblage de plans de la ville de Iakoutsk trois commentaires très différents – l’un farouchement pro-soviétique, l’autre furieusement anti, le troisième affectant l’objectivité –, produisant trois versions également convaincantes. Preuve éclatante que « les archives sont muettes », comme le répète Patrick Barbéris, dont certains films (Roman Karmen, un cinéaste au service de la révolution ou Vietnam, la trahison des médias) décryptent justement les rapports de l’image à l’histoire. « Comme l’historien interprète un cahier de doléances sans jamais prendre ce qu’il y trouve pour des vérités révélées, le documentariste doit interpréter les archives et ne pas entretenir avec elles un rapport de consommation. » On ajoutera qu’en exploitant ces vues sans en extraire le sens on accoutume le spectateur à les gober sans les penser.

Dans son solide ouvrage sur La Grande Guerre au cinéma (Ramsay, 2008), l’historien Laurent Véray déplore que les archives soient devenues « des marchandises comme les autres, qui doivent être consommées. L’exigence de facilité, de formatage des programmes destinés à un large public, pousse de plus en plus à “actualiser” le passé, à lui donner un autre statut médiatique, (…) en conformant les images qui subsistent aux modalités de la perception actuelle ». L’un des moyens est la représentation colorée de périodes historiques liées au noir et blanc dans la mémoire du spectateur. C’est ainsi que fleurissent, depuis bientôt dix ans, des documentaires à base d’images tournées sur pellicule couleur : La Guerre en couleurs, L’Empire britannique en couleurs, Ils ont filmé la guerre en couleurs, Ils ont filmé la Libération en couleurs… En assujettissant l’élaboration de leur récit à cette condition formelle, les auteurs de ces fresques s’exposent à des lacunes historiques inhérentes à l’absence de certaines images.

La diffusion sur M6 de Quand l’Algérie était française, 1830-1962, de Serge de Sampigny, inspira ainsi à Benjamin Stora une tribune cinglante : « La fabrique d’une fausse Algérie » (Libération du 31 mai 2006), dans laquelle l’historien s’en prenait notamment à l’utilisation, par ce programme, d’images d’amateurs. « Il fallait être bien fortuné [dans les années 1940 et 1950] pour tourner de petits films en couleurs, et rares étaient les familles algériennes d’Algérie pouvant se permettre de telles pratiques. (…) Le téléspectateur voit donc surtout de riches Européens faire du ski en Kabylie, se promener au Sahara ou assister aux courses de chevaux à Alger. Ce qui ne manque pas de surprendre quand on connaît le niveau de vie des familles européennes de cette époque… bien inférieur à ceux des habitants de métropole. »
La rareté des archives en couleurs, alliée aux succès engendrés par cette forme d’« actualisation » du passé, incite certains réalisateurs à colorier numériquement les images noir et blanc. Celles de la Grande Guerre (14-18, le bruit et la fureur, sur France 2), de l’Italie mussolinienne (Le Fascisme italien en couleurs, sur Arte), de la Russie de 1917 ou de l’URSS (La Révolution russe en couleurs, sur Arte, Staline, le tyran rouge, sur M6), comme bientôt celles du Front populaire et de la crise de 1929 (sur France 2). « Pourquoi pas, si c’est pour faire du spectacle, admet en souriant le documentariste Serge Viallet, qui interroge scrupuleusement les documents audiovisuels dans sa série Mystères d’archives, diffusée tout l’été sur Arte. Voilà cent ans, la société Pathé employait des centaines de femmes à colorier quotidiennement des films noir et blanc, afin qu’ils soient vendus quatre fois plus cher et attirent un plus large public. Aujourd’hui, la colorisation remplit toujours le même office. »
Pionniers en la matière, les réalisateurs Daniel Costelle et Isabelle Clarke affirment que ce traitement de l’image vise moins à séduire qu’à se rapprocher du réel, n’hésitant pas à qualifier le noir et blanc d’« amputation » et préférant au terme de « colorisation » celui de « restitution des couleurs » ! « Les événements ont été vécus en couleurs, rappelle le « restitueur de couleurs » François Montpellier, qui travaille avec eux depuis Les Ailes des héros (en 2003). S’ils nous ont été transmis en noir et blanc, c’est uniquement pour des raisons d’insuffisance technique… que l’on est aujourd’hui capable de corriger ! » Une telle confusion entre le réel et l’archive, l’histoire et ses représentations, se double dans Apocalypse, d’Isabelle Clarke, d’une volonté revendiquée de réactiver l’impact émotionnel des événements eux-mêmes. « La couleur rend une proximité à des images qui peuvent sembler très lointaines à des jeunes », explique Louis Vaudeville, qui a produit cette série dont France 2 diffuse mardi 22 les deux derniers volets. Mais chercher à rendre proche ce qui est lointain en le conformant aux standards du flux télévisuel, c’est aussi sacrifier au « présentisme » dénoncé par l’historien François Hartog dans Régimes d'historicité. Présentisme et expérience du temps (Le Seuil, 2003) – cette propension très actuelle à rapprocher l’hier de l’aujourd’hui.
D’autres traitements des archives participent pareillement de cette double logique d’actualisation et de standardisation. Tel le bruitage de vues souvent muettes, auquel recourt abondamment Apocalypse ; et la mise au format 16/9 de documents généralement tournés en 4/3 – autrement dit, plus carrés. Le résultat ? « Une image amputée d’un tiers environ, réparti en haut et en bas de l’image. Et, à la diffusion, pour bien remplir l’écran tout neuf que vous venez d’acquérir, une image gonflée, granuleuse, sale, floue », relève sur son blog le documentariste Patrick Jeudy (Marilyn, dernières séances, Eliot Ness contre Al Capone…). Serge Viallet ajoute à ces deux formes de dégradation « la recomposition de l’image, qui lui fait perdre de sa force et la déséquilibre ». D’autres professionnels s’élèvent aujourd’hui contre la banalisation d’un tel procédé, devenu monnaie courante à la télévision.
« La plupart des grandes chaînes dans le monde exigent le format 16/9, se défend Patricia Boutinard-Rouelle, directrice de l’unité documentaires et magazines de France 2. A France Télévisions, cette norme existe depuis environ un an. Il est donc souhaitable que les films utilisant des archives 4/3 soient pensés pour une diffusion à cette norme, afin de ne pas se fermer le marché international. Mais aucune directive n’a été donnée aux réalisateurs quant au choix ou non du recadrage. »
Si certains réalisateurs défendent la possibilité d’insérer dans un documentaire en 16/9 des archives au format 4/3 (en les plaçant entre deux barres noires verticales), d’autres préfèrent éviter les changements de format incessants en étant prêts à rogner les archives. C’est le cas de Michaël Prazan, auteur du mémorable Einsatzgruppen, les commandos de la mort ,« Recadrer les archives représente le plus souvent un sacrifice, avoue-t-il cependant. Cela demande beaucoup de soin, beaucoup de temps, mais cela peut aussi présenter quelques avantages. En créant un mouvement dans l’image, on peut la faire vivre autrement. »
Et si la pertinence de tels procédés (colorisation, sonorisation, changement de format) appliqués aux archives dépendait avant tout de leur application ? Que l’on songe à la façon dont Serge Viallet pratique le recadrage pour isoler l’élément d’un plan ou dont Yves Jeuland use de la couleur jaune dans le générique de Comme un juif en France...Les possibilités de traitement des archives sont vastes, pourvu que l’on affirme une liberté esthétique aux antipodes du « relookage-ripolinage » des images du passé. Qu’au lieu de réchauffer les archives, on se décide à les penser.
"

-Ambiguité des images (L.H-Love)
-Cinéma et propagande pendant la guerre froide
-Cinéma, histoire et propagande
-Quand des soldats chinois se déguisent en moines tibétains...
-Propagande - Wikipédia

dimanche 20 septembre 2009

Retraites:aubaine de la privatisation



Que seront demain nos retraites ?

-La finance veut transférer tous les risques vers les salariés
_________________

-Comment les libéraux font main basse sur vos retraites - AgoraVox:
"Bernard Teper, économiste, membre du Conseil scientifique d’Attac et Secrétaire national de l’Union de familles laïques (Ufal), signe une remarquable contribution au débat sur l’avenir des retraites, obscurci par de noirs nuages gouvernementaux : "L’ensemble de la protection sociale est impacté par le processus de marchandisation et de privatisation de celle-ci. Pour des actionnaires, cela est compréhensible : la protection sociale est le premier budget humain (environ 540 milliards d’euros soit près de 30% du PIB et bien plus que le budget de l’Etat tous ministère confondus) qui jusqu’aux années 70 était largement dégagée des pressions capitalistes. (...) les attaques sont lancées sur toutes les composantes de la protection sociale (santé et assurance-maladie, famille, retraites, assurance-chômage, dépendance, etc.). L’attaque contre les retraites solidaires est donc une partie de l’ensemble du mouvement de prédation contre la protection sociale solidaire. 1995 a été la première année de l’accélération de ce processus. Depuis, la loi Fillon de 2003 a prévu des rendez-vous quadriennaux pour ajuster les principaux paramètres de l’équilibre des régimes, essentiellement la durée de cotisation. Cette loi s’appuie sur un premier dogme à savoir que tout gain d’espérance de vie devra se partager de la façon suivante : 2/3 pour l’allongement de la durée d’activité et 1/3 pour l’allongement de la période de retraite ! 2008 a confirmé le passage à 41 annuités et le Conseil d’orientation des retraites (COR) 2007 propose une future augmentation à 41,5 annuités à l’horizon 2020 ! Il est à noter que pour en arriver là, un deuxième dogme a fonctionné : il ne fallait pas, paraît-il, augmenter les cotisations patronales, par ce que cela rentrerait dans les prélèvements obligatoires ! Et puis le troisième dogme, implicite celui-là : on ne doit pas toucher à la répartition des richesses ! La déformation du partage de la valeur ajoutée des années 80 au profit des profits et donc au détriment des revenus du travail est considérée comme naturelle et donc ne doit pas être touchée ! Si on regarde le différentiel entre 1982 et 2007, le déport est de 9,3 points de PIB (environ 170 milliards d’euros) (...). Excusez du peu ! Et conformément à la ligne stratégique dévoilée par Denis Kessler dans la revue Challenges, cette attaque se fait par un patchwork de mesures qui semblent détachées l’une de l’autre mais qui, en fait, font partie d’un plan concerté bien que non explicité aux assurés sociaux." La suite de l’article est à lire sur le site de l’Ufal.
-Rappelons les propos exactement tenus en octobre 2007 dans Challenges par Denis Kessler, ancien vice-président exécutif du Medef, auquel Bernard Teper fait allusion : "Les annonces successives des différentes réformes par le gouvernement peuvent donner une impression de patchwork, tant elles paraissent variées, d’importance inégale, et de portées diverses : statut de la fonction publique, régimes spéciaux de retraite, refonte de la Sécurité sociale, paritarisme... A y regarder de plus près, on constate qu’il y a une profonde unité à ce programme ambitieux. La liste des réformes ? C’est simple, prenez tout ce qui a été mis en place entre 1944 et 1952, sans exception. Elle est là. Il s’agit aujourd’hui de sortir de 1945, et de défaire méthodiquement le programme du Conseil national de la Résistance ! A l’époque se forge un pacte politique entre les gaullistes et les communistes. Ce programme est un compromis qui a permis aux premiers que la France ne devienne pas une démocratie populaire, et aux seconds d’obtenir des avancées - toujours qualifiées d’« historiques » - et de cristalliser dans des codes ou des statuts des positions politiques acquises. Ce compromis, forgé aune période très chaude et particulière de notre histoire contemporaine (où les chars russes étaient à deux étapes du Tour de France, comme aurait dit le Général), se traduit par la création des caisses de Sécurité sociale, le statut de la fonction publique, l’importance du secteur public productif et la consécration des grandes entreprises françaises qui viennent d’être nationalisées, le conventionnement du marché du travail, la représentativité syndicale, les régimes complémentaires de retraite, etc. Cette « architecture » singulière a tenu tant bien que mal pendant plus d’un demi-siècle. Elle a même été renforcée en 1981, à contresens de l’histoire, par le programme commun. Pourtant, elle est à l’évidence complètement dépassée, inefficace, datée. Elle ne permet plus à notre pays de s’adapter aux nouvelles exigences économiques, sociales, internationales. Elle se traduit par un décrochage de notre nation par rapport à pratiquement tous ses partenaires."...(O Bonnet)

-Diminuer le rôle de l'Etat : une philosophie hautement opérationnelle - AgoraVox
-Les fonds de pensions, pour quoi faire ?
_________________________
-Retraites demain...

samedi 19 septembre 2009

11/09: Débat impossible en France ?

"On dirait que c’est en France que ces attentats ont eu lieu."

Curieux pays où la remise en question de la version officielle de la Commission d'enquête, chapeautée par la Maison Blanche, ne peut se faire publiquement de manière apaisée, sereine

Beaucoup de zônes d'ombres affectent le compte rendu officiel de cette journée historique et de son contexte. De nombreux faits n'y trouvent pas une place cohérente , le contredisent ou ne sont pas évoqués
Aux USA, le débat ne tarit pas. Une partie des acteurs de la Commission elle-même commencent à évoquer les pressions qu'ils ont subies. En France quelques enquêtes, dont celles d'Eric Laurent explorent depuis longtemps des aspects troubles des événements
Certes, on est encore largement dans l'incertitude, étant donné la rétention des sources principales, ce qui donne lieu parfois à des scénarios fantaisistes, alimentés par cette classification des pièces essentielles et les tabous qui pèsent sur une parole entravée par le poids de la peur et des interdits politiques
D'où la nécessité de réouvrir le dossier et de remettre en chantier une enquête (volontairement?) bâclée.
-D'un 11 septembre à l'autre-
-Une « attaque surprise » ... pas si surprise que ça

-"...Personnellement, je suis un truther qui a du mal à admettre que 19 terroristes se soient emparés de quatre avions simultanément, armés de cutters, à 1 contre 10 ou plus passagers et membres d’équipage, et les ont précipité sur deux tours et 1 pentagone avec maestria, pour ne même pas le revendiquer ensuite, si ce n’est tardivement et du bout des lèvres. Je suis un sceptique qui a vu une administration illégitime se ruer dans la brèche et mettre au pas, non seulement ses citoyens, mais ceux de tous ses alliés. J’ai du mal à croire aux méchants terroristes isolés, et je ne me sens pas fantasquement allumé pour ça. Je ne crois ni en dieu, ni en diable, mais espère toujours en une enquête objective et dépassionnée autour d’un événement qui met à l’épreuve la qualité de notre démocratie.Enfin, la manipulation d’opinion via les medias fait depuis longtemps partie du paysage. Juste avant la première guerre du golfe, les télés nous montraient comment les troupes spéciales de Saddam s’entraînaient en déchirant vivant des petits animaux. Timisoara a « justifié » l’exécution précipitée des Ceaucescu, la cruauté des Serbes les frappes illégitimes de l’Otan, et ainsi de suite. Stratégie de la part des sources, souvent militaire, et mercantilisme des medias instantanés à la recherche de sensationnalisme. Apprendrons-nous de l’histoire ?"(Bluebeer sur Agoravox)

"...Personnellement, je n’ai aucune explication toute faite, aucun coupable nommément désigné, aucune « version » pour expliquer les évènements du 11 Septembre, contrairement à la version officielle ; je fais simplement partie de ceux qui relèvent les invraisemblances, les évènements non expliqués, les faits troublants qui vont à l’encontre de la VO, et qui demandent, légitimement, qu’une commission indépendante soit nommée, pour essayer de faire toute la vérité, s’appuyant sur les avis de nombreux architectes, urbanistes, ainsi que sur les témoignages de nombreuses personnes présentes (pompiers, notamment).Sans même avoir besoin de faire référence à toutes les « versions officielles » qui ne se sont avérées que des mensonges concernant un ensemble d’évènements (assassinat de(s) Kennedy, fiole « d’arme de destruction massive » exhibée à l’ONU par Colin Powell, forteresses volantes servant de chambres de tortures, etc....) auxquels ont été mêlés la CIA, et les sphères du pouvoir américain (comme russe ou chinois, ou français...), la nomination d’une commission indépendante avec tout pouvoir d’enquête, serait la meilleure façon de faire taire définitivement toute rumeur, et d’établir la réalité des faits...." (Sisyphe sur AV)


« Kassovitz, Faurisson du 11 septembre » : ils ont osé ! - AgoraVox

"Nous vivons vraiment dans un drôle de pays. Peut-être le seul au monde où il est interdit de réfléchir sur le 11-Septembre. Les Etats-Unis sont, de ce point de vue, infiniment plus ouverts à la discussion, jusque sur la très bushiste chaîne Fox News. Oui, oui, des débats y ont eu lieu, dans une ambiance un tantinet plus respirable qu’en France. Allez comprendre...
ce mercredi, celui de Mathieu Kassovitz, suite à son passage, mardi 15 septembre, dans l’émission de Frédéric Taddeï Ce soir ou jamais. Le débat a pour raison d’être la sortie du livre d’Eric Raynaud, qu’on ne songe pourtant pas à inviter... La question posée aux invités est : faut-il débattre à la télévision des zones d’ombre du 11-Septembre, ou laisser ces questions aux cloaques du Net ? Et Kassovitz a l’outrecuidance de répondre que oui, bien sûr, il faut en parler. Et il argumente quelque peu, dans le peu de temps qui lui est imparti, sur une poignée de points troublants. Et le voilà d’emblée assimilé à un "conspirationniste" par sa voisine, et bientôt un autre invité, Marin Karmitz, assène l’argument massue : tout questionnement sur le 11-Septembre nous mènerait tout droit au négationnisme touchant les chambres à gaz ! Mathieu Kassovitz répondra fort heureusement à cet amalgame sans fondement....
Mais le lynchage aura lieu le lendemain, dans la presse. Les snipers en chef : Renaud Revel de L’Express, et Jean-Marc Morandini d’Europe 1 et Direct 8. Commençons par le plus choquant et le scandaleux papier de Revel, qui fustige une "diatribe révisionniste" de la part de Kassovitz, constituant selon lui un dérapage, et qui conclut son papier sur ces mots, terribles : "Kassovitz en Faurisson du 11 septembre, il ne manquait plus que cela."
Faurisson nie l’existence des chambres à gaz durant la Seconde Guerre mondiale. Kassovitz, lui, prend acte des zones d’ombre du 11-Septembre (que tout le monde admet) et trouve justifié un questionnement sur cet événement, voire un soupçon sur l’administration Bush, dont l’attitude fut plus que trouble avant, pendant et après les attentats, et dont les mensonges sont avérés. Comment peut-on oser mettre en relation ces deux noms ? Kassovitz nie-t-il l’existence de quoi que ce soit ? Nie-t-il les morts ? les avions crashés ? Le héros du film Amen de Costa-Gavras est-il suspect d’antisémitisme ? Comment le rédacteur en chef d’un hebdomadaire de cette importance peut-il se laisser aller à pareille comparaison - surtout après la salutaire mise au point faite par Kassovitz lui-même durant l’émission ? Injurier en toute impunité : on nous avait fait croire que c’était l’apanage des blogueurs sans contrôle... Les journalistes seraient-ils devenus des blogueurs comme les autres ?..."


vendredi 18 septembre 2009

L'enfer des "jungles"


France, terre d'écueil ?

-Errances européennes-
__________Besson veut vider la «jungle» de Calais

- La Coordination française pour le droit d'asile, qui compte, entre autres, Amnesty international, la Cimade, Médecins du Monde, le Secours Catholique, la Ligue des droits de l'homme, et le Gisti, réagit à l'annonce d'Eric Besson : «Le ministre ne doit pas se leurrer : annoncer la «fermeture» de la ‘Jungle’ signifie simplement tenter de rendre invisible un problème qui perdurera, se renouvellera et se déplacera. L'incapacité des autorités françaises et européennes à appréhender correctement et de façon coordonnée cette situation aura un coût : les conditions indignes dans lesquelles sont contraints de vivre les migrants et demandeurs d'asile malgré l’aide au quotidien de nombreux bénévoles..."
________________________

-De Sangatte aux "jungles", "les migrants finissent toujours par revenir" :
"Sylvie Copyans en est convaincue : "Les mêmes causes produiront les mêmes effets." Pour cette membre active de l'association Salam d'aide aux étrangers, les migrants resteront malgré le démantèlement de la "jungle" de Calais annoncée, jeudi 17 septembre, par le ministre de l'immigration Eric Besson. Peu importe les déclarations des autorités, "il se produira la même chose qu'avec la fermeture de Sangatte". "Loin de diparaître, les exilés vont simplement se disperser", explique-t-elle.
Frontière de l'espace Schengen, le littoral français est un passage obligé pour les étrangers – Afghans, Irakiens, mais aussi Erythréens, Soudanais et Iraniens... – en partance pour l'Angleterre. D'après la Croix-Rouge, ils sont plus de 67 000 à avoir transité par le camp de Sangatte d'octobre 1999 à décembre 2002. Conçu pour accueillir 200 personnes, l'immense hangar échoué au bord de la mer en comptait 1 600 avant sa fermeture.Mais contrairement aux déclarations de Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'intérieur, la destruction du camp n'a pas "réglé" le problème des exilés. Ils ont essaimé à travers le Calaisis dans des camps de fortune situés à Dunkerque, Cherbourg, Dieppe ou à proximité des aires d'autoroutes de Norrent-Fontes et Grand-Synthe. "Ces endroits existaient déjà à l'époque de Sangatte, mais après 2002, ils se sont multipliés", explique Gérard Sadik, de la Cimade..."

-Avec les Afghans, dans la «jungle» du calaisis | Mediapart
-La fermeture de la "jungle" à Calais provoque la colère des bénévoles
-«Détruire la jungle renforce le pouvoir des passeurs»

jeudi 17 septembre 2009

EDF: privatisation en vue


Quand l'Europe libérale dicte sa loi

-Vers un démantèlement d'EDF et son entrée dans la sphère de la logique marchande
-

-Les effets attendus de la commission Champsaur: à la vente virtuelle de centrales nucléaires à des concurrents, EDF continuant juste à en assurer l'exploitation et les risques.
________________________

-"A l'avenir, EDF n'aura plus le monopole du nucléaire en France. Ce que Nicolas Sarkozy avait déjà laissé entendre en indiquant que Suez-GDF était tout à fait habilité à construire le troisième EPR en France. Sans parler d'E.On, qui demande aussi à construire des centrales nucléaires en France puisque cela lui est interdit en Allemagne.
La suite? C'est la Bourse qui donne en partie la réponse. Dès que le marché a appris l'intention du gouvernement, le cours d'EDF a flambé.
"(M.O.)

-"Il ne s’agit plus d’ouvrir la concurrence pour faire baisser les prix, mais d’élever les prix pour permettre la concurrence." (Marcel Boiteux, ex pdg d'EDF :Revue Futuribles de juin 2007)
_________L'Union européenne a décidé d'ouvrir le secteur de l'électricité à la concurrence et la dernière étape sera franchie en juillet 2007 en France. Mais la concurrence, qui est supposée entraîner une baisse des prix et une amélioration de la qualité des services, risque en l'espèce de n'entraîner aucun de ces bienfaits, affirme ici le président d'honneur d'Électricité de France (EDF).-D'abord, parce que les prix d'EDF étaient déjà très en-deçà des autres prix en vigueur en Europe grâce à la gestion très rigoureuse qui a été celle de l'entreprise depuis toujours, ce facteur jouant bien plus que celui tenant à la rente dont EDF bénéficierait, aux yeux de certains, en raison de son parc nucléaire. Ensuite, parce que la concurrence inévitablement rencontre des limites en raison, par exemple, des « monopoles naturels » que constituent les réseaux.
Finalement, Marcel Boiteux, en s'appuyant sur l'expérience d'EDF, nous met en garde contre la foi trop aveugle accordée en l'espèce au libéralisme par les autorités de Bruxelles. Il montre, en effet ici, exemples à l'appui, combien il est naïf d'imaginer qu'en tout domaine l'optimum est spontanément atteint par l'économie pure de marché. Au passage, au demeurant, il s'explique sur le choix nucléaire fait par la France, les investissements consentis en la matière, rappelant que si EDF a bénéficié d'un certain soutien financier de l'État, la réciproque fut bien plus importante.

___________________

-EDF: le travail de sape de Matignon | Mediapart:
" La complexité technique risque d'occulter le débat politique. Pourtant, ce que le gouvernement prépare n'est rien de moins que l'affaiblissement voire le démantèlement d'EDF. Sans discussion préalable, sans débat public, Matignon vient d'annoncer ce mardi 15 septembre une grande réforme du marché de l'électricité, qu'il souhaite voir mise en œuvre dès le 1er juillet 2010. Le projet doit être discuté au préalable au parlement, mais le gouvernement a déjà donné toutes les orientations.
Reprenant les conclusions du rapport Champsaur remis au printemps qui visait à préparer le terrain, le projet de Matignon prévoit la fin des tarifs réglementés pour les grands clients à partir de 2015, mais leur maintien pour les particuliers et les petites entreprises. Une façon de rassurer une opinion publique et des parlementaires de plus en plus inquiets sur l'évolution des prix et sur le maintien des services publics.
Ces assurances, cependant, risquent de se révéler des faux semblants. Car en parallèle, le projet gouvernemental, reprenant les recommandations du rapport Champsaur, prévoit que tous les fournisseurs d'électricité en France pourront s'approvisionner auprès d'EDF. En clair, les électriciens privés, qui n'ont consenti aucun investissement, pourront bénéficier des efforts financiers qu'ont consentis les Français depuis trois décennies et auront leur part de la rente nucléaire.
Cette grande idée s'impose, selon le gouvernement, pour mettre un terme aux contentieux entre la France et Bruxelles. Depuis des années, EDF est une des bêtes noires de la Commission européenne. Ce monopole public, capable de produire de l'électricité à un des prix les moins élevés d'Europe, est une hérésie par rapport à sa vision de la concurrence. Au nom de la libéralisation du marché de l'énergie donc, la commission européenne ne cesse d'exiger de nouvelles concessions de la part d'EDF. Il y a d'abord eu l'ouverture du marché français. Pour donner le change, EDF a soutenu certains petits acteurs comme Poweo. Il a renoncé à tout projet de rapprochement avec GDF, comme Bruxelles le lui avait interdit, alors que l'allemand E.ON en position aussi dominante en Allemagne a obtenu de racheter le distributeur historique Ruhrgaz, l'équivalent de GDF.
Mais tout cela ne suffit pas aux yeux de la Commission. Pour elle, la concurrence est insuffisante sur le marché de l'électricité. Les concurrents n'arrivant pas à s'implanter sur le marché français compte tenu de l'avantage historique dont dispose EDF – curieusement, GDF qui est dans la même situation ne se voit plus adresser ce genre de reproches depuis sa privatisation – du fait de la rente nucléaire. Il fallait donc casser cela.

Tout en tenant un discours volontariste sur l'avantage immense que procure un actif comme EDF, en mettant en avant la réussite française dans le nucléaire vantée à chaque voyage présidentiel, le gouvernement a accepté sans discuter les injonctions de Bruxelles. Des milliards d'amende étaient en jeu, a-t-il expliqué. Surtout, en dépit des discours tenus pendant la crise, il partage en tous points les vues libérales de la Commission.

La France propose donc de partager la rente nucléaire avec les concurrents privés. L'argument laisse rêveurs certains experts: «Au nom de quoi prive-t-on un groupe d'avantages concurrentiels qu'il a financés pendant des années et dont il a fait bénéficier ses clients?», s'étonne l'un d'entre eux. «D'autant qu'il n'est même pas sûr que les concurrents d'EDF retournent l'avantage à leurs clients», relève un autre. Pareille mésaventure est arrivée à France Télécom. Bruxelles avait imposé au groupe, au nom de sa position d'opérateur historique, une très forte diminution des coûts de re-routage des liaisons téléphoniques. Les clients n'ont jamais vu la couleur de ces rabais, les autres opérateurs préférant conserver la marge pour eux.

«La France n'a jamais voulu tenir un discours politique face à la commission. Elle ne répond à chaque fois que par des arguments de marché. Cette fois encore, elle cède sans vision sur l'avenir d'EDF, sans prendre en compte ce qui pourrait être une politique énergétique de long terme, se préoccupant des problèmes de développement durable», explique Philippe Pesteil, administrateur représentant la CFDT au conseil d'administration d'EDF. Dès la publication du rapport Champsaur, la CFDT avait d'ailleurs demandé une nouvelle concertation.
Même écho du côté de la CGT qui avait dénoncé une privatisation qui ne dit pas son nom: «C'est le hold-up du siècle. Les centrales nucléaires appartiennent aux Français. Ce sont eux qui les ont payées. Comme le gouvernement n'a pas osé vendre le parc nucléaire par appartement, il en organise une vente virtuelle, laissant à EDF toutes les charges. C'est une fonction très puissante de la destruction de référence au tarif», s'indignait dès mai Claude Pommery, responsable de la fédération Mines Energie CGT.
Le hold-up risque même de prendre des proportions inconnues. D'abord, EDF, au nom de la transparence du marché, risque de perdre la maîtrise de son parc nucléaire. «A terme, cela porte en germe l'éclatement d'EDF. La production pourrait être placée sous la responsabilité d'un super RTE, qui assurait le partage pour tous», redoute Philippe Pesteil.Mais les coûts eux resteront bien à la charge d'EDF. Dans son communiqué, Matignon indique que les concurrents pourront bénéficier de l'électricité «aux conditions économiques du parc nucléaire historique». Toute la difficulté va consister à déterminer ce prix: va-t-on prendre en compte les frais financiers passés, les coûts de gestion, les coûts futurs de gestion de déchets et de démantèlement des centrales? Pas sûr.
Une chose est claire en tout cas: le coût du renouvellement du parc ne sera pas inclus. Ce choix a une portée politique non négligeable: à l'avenir, EDF n'aura plus le monopole du nucléaire en France. Ce que Nicolas Sarkozy avait déjà laissé entendre en indiquant que Suez-GDF était tout à fait habilité à construire le troisième EPR en France. Sans parler d'E.On, qui demande aussi à construire des centrales nucléaires en France puisque cela lui est interdit en Allemagne.
La suite? C'est la Bourse qui donne en partie la réponse. Dès que le marché a appris l'intention du gouvernement, le cours d'EDF a flambé. En une séance, il a gagné 6,72% pour s'inscrire au-dessus des 40 euros. Car les financiers spéculent sur un avenir prévisible: pris dans l'écheveau des dettes et des contradictions imposées par le gouvernement, le groupe va vite être rattrapé par la réalité économique et financière et sera contraint d'évoluer. EDF tombera comme un fruit mûr dans les mains du marché. La rente nucléaire deviendra alors financière.
" (M.Orange)

___________________

-EDF :déréglementations
-Privatisation EDF : le courant ne passe plus

mercredi 16 septembre 2009

Aveux d'économistes         


Dérives de la pensée économique

La plupart des économistes ont versé dans un formalisme mathématique effréné, sur les conseils de Milton Friedman et ses collègues monétaristes.

-Greenspan, un des acteurs de la crise, que Milton Friedman, père du monétarisme, considérait comme le meilleur gouverneur de la Fed , déclarait naïvement(?) a propos des causes de la crise:"C'est la nature humaine: à moins qu'on ne trouve un moyen de la changer, nous aurons une nouvelle crise."
_________________

-Krugman fustige "la cécité de la profession sur la possibilité de défaillances catastrophiques dans une économie de marché".

"Durant l’âge d’or, les économistes financiers en vinrent à croire que les marchés étaient fondamentalement stables - que les actions et autres actifs étaient toujours cotés à leur juste prix"

-En octobre de l’année dernière M. Greenspan avouait qu’il était dans un état d’ « incrédulité choquée » car « l’ensemble de l’édifice intellectuel » s’était « effondré ». Cet effondrement de l’édifice intellectuel étant aussi un effondrement du monde réel de marchés, le résultat s’est traduit par une grave récession"( P.K.)

Lorsque dans un pays le développement du capital devient un sous-produit de l’activité d’un casino, le travail est susceptible d’être bâclé. » (Keynes)
_________________________________
-Economie : nous nous sommes tant trompés, par Paul Krugman :
"« Rien dans les modèles dominants ne suggérait l’éventualité d’un effondrement du type de ce qui s’est déroulé l’an dernier, » se désole Krugman. Comment la profession dans son immense majorité a-t-elle pu s’égarer au point d’estimer avec Robert Lucas que le « problème central de la dépression - celui de sa prévention - a été résolu » ? Krugman attribue cette cécité au travers consistant à confondre la « beauté » de formalismes mathématiques avec leur pertinence - sans omettre de mentionner également l’attrait de quelques incitations sonnantes et trébuchantes - et retrace les étapes de cette dérive. Une fois estompé le souvenir de la crise de 1929, dit-il, ses leçons ont été oubliées et la discipline s’est auto-persuadée que ses modèles, où d’improbables agents rationnels interagissent sur des marchés parfaits, forcément parfaits, pouvaient décrire le réel. Ainsi, afin de préserver l’élégance et la force de leurs démonstrations, les économistes se sont autorisés puis accoutumés à se désencombrer de quelques infimes scories du monde, d’insignifiants détails tels l’aveuglement, la vanité et la déraison qu’engendrent une cupidité sans borne, le sentiment de toute puissance et les comportements moutonniers. Le réveil est rude.
_________Bien que cela soit difficile à croire aujourd’hui, hier encore les économistes se félicitaient des succès de leur discipline. Ces succès - du moins le pensaient-ils - à la fois théoriques et pratiques, conduisaient la profession vers un âge d’or. Sur le plan théorique, ils pensaient avoir résolu leurs divergences. Ainsi, dans un document publié en 2008 intitulé « La situation de la macro » (c’est à dire de la macroéconomie, l’étude des grands problèmes tels les récessions), Olivier Blanchard, du MIT et aujourd’hui économiste en chef du Fonds Monétaire International, écrivait que « la situation de la macro est satisfaisante ». Les batailles d’antan sont terminées, notait-il, et une « large convergence des points de vue » s’est opérée. En ce qui concerne le monde réel, les économistes pensaient avoir la situation sous contrôle : le « problème central de la dépression - celui de sa prévention - a été résolu », déclarait Robert Lucas, de l’Université de Chicago en 2003, à l’occasion d’un discours devant l’Association Américaine d’Economie. En 2004, Ben Bernanke, l’ancien professeur de Princeton aujourd’hui président de la Federal Reserve, célébrait la « Grande Modération » - les performances économiques au cours des deux dernières décennies - qu’il attribuait en partie aux progrès de la politique économique.L’an dernier, tout s’est effondré.
Peu d’économistes ont vu venir la crise actuelle, mais cet échec de la prévision est le moindre des problèmes de la discipline. Le plus important était celui de la cécité de la profession sur la possibilité de défaillances catastrophiques dans une économie de marché. Durant l’âge d’or, les économistes financiers en vinrent à croire que les marchés étaient fondamentalement stables - que les actions et autres actifs étaient toujours cotés à leur juste prix. Rien dans les modèles dominants ne suggérait l’éventualité d’un effondrement du type de ce qui s’est déroulé l’an dernier. A l’époque, les macro-économistes étaient divisés. Mais la principale divergence se situait entre ceux qui insistaient sur le fait que les économies de marchés ne déraillent jamais et ceux qui estimaient que l’économie peut déraper ici où là, mais que tout écart important hors de la voie de la prospérité pourrait et devrait être corrigé par la toute-puissante Fed. Aucun des deux camps n’était préparé à faire face à une économie qui sortirait de ses rails en dépit des plus grands efforts de la Fed.
....es économistes se sont égarés, car ils ont, en tant que groupe, confondu la beauté - revêtue d’imposants atours mathématiques - avec la vérité. Jusqu’à la Grande Dépression, la plupart des économistes s’accrochaient à une vision du capitalisme perçu comme un système parfait ou presque. Cette vision devint indéfendable face à un chômage de masse, mais lorsque le souvenir de la Crise s’est estompé, les économistes sont revenus à leurs anciennes amours, avec une vision idéalisée d’une économie dans laquelle des individus rationnels interagissent dans des marchés parfaits, vision cette fois habillée d’équations sophistiquées. Cette nouvelle romance avec le marché a été idéalisée, il est vrai, en partie en réponse à l’évolution des tendances politiques, en partie en réponse à des incitations financières..."
_______________________
-
Faillite des économistes...

mardi 15 septembre 2009

Scène volée au Vietnam l'année dernière (cliquez)

Merci au 50000° visiteur et aux autres !

Paroles d'Israël



Double langage comme méthode de gouvernement

« Finalement écrit Michel Bôle-Richard du Monde, Benyamin Nétanyahou veut bien d’un Etat palestinien mais à ses conditions, et celles-ci sont telles que les chances de voir cet Etat se créer sont infimes.

-La colonisation se poursuit en Cisjordanie.
On promet un jour de la suspendre, sans jamais vraiment l'arrêter

Un jeu ambigü avec les Etats-Unis
_________________

-"Israël n'entrave pas le processus de paix au Proche-Orient" (B.N.)

-Robert Gibbs, porte-parole de la Maison-Blanche: "les Etats-Unis n'acceptent pas la légitimité de la poursuite de l'expansion des colonies et exigent qu'elle cesse".

"Israël n’entrave pas le processus de paix". L’arrogance et le cynisme des extrêmistes au pouvoir en Israël est révoltante mais ceux-ci sont les hommes les plus isolés du monde ils ont tout le monde contre eux y compris l’administration américaine. Il y a donc un mystère: comment se fait-il que le Président Obama sacrifie une partie de son crédit pour ces hommes? La solution de l’énigme c’est que ce qui est livré au public n’est qu’un théâtre les choses sérieuses sont secrètes "(un lecteur de Monde:henrypmfay)
_______________________________

-Une organisation israélienne s'alarme de projets de colonisation en Cisjordanie:
"Israël entend poursuivre son programme de constructions dans les colonies de Cisjordanie, selon un rapport de l'organisation israélienne, La Paix maintenant, rendu public, lundi 2 mars. ce rapport s'appuie sur les projets du ministère de l'habitat. Un doublement du nombre de colons en Cisjordanie serait à l'étude pour faire passer le nombre de 300 000 actuellement à 600 000. Ces chiffres ne tiennent pas compte des quelque 200 000 colons installés à la périphérie-est de Jérusalem.
Selon La Paix maintenant, le ministère de l'habitat a en effet prévu de construire au moins 73 000 logements au cours des prochaines années sur le territoire occupé de la Cisjordanie. Sur ce total, 5 700 devraient être implantés à Jérusalem-Est, dans des quartiers conquis en 1967 puis annexés.Si la construction d'une partie des logements a d'ores et déjà commencé, pour 58 000 d'entre eux rien n'a encore été véritablement décidé. Mais les plans existent comme en témoignent les documents et les photos du ministère de l'habitat.Au ministère, on fait remarquer qu'il s'agit de "projets préliminaires", de "constructions potentielles" et que, "en pratique seulement, une partie d'entre elles sont mises en oeuvre". Toutefois, l'existence de ces projets n'a pas été officiellement démentie.
Les plans du ministère ne sont qu'une partie des constructions publiques qui, en fait, ne sont que la moitié de celles qui sont réalisées dans les territoires occupés. Nous n'avons que des informations partielles sur la totalité des projets, qu'ils soient publics ou privés, mais nous pouvons estimer qu'il y a des milliers d'unités de logements prévues dans les colonies dont certaines ont déjà été approuvées", mentionne le rapport.
Le document énumère dans le détail ce que les autorités israéliennes envisagent de faire en Cisjordanie. Ces extensions concernent autant les grands blocs de colonies que les points d'implantation moins importants qu'il s'agit d'étoffer.Pour l'association La Paix maintenant les plus préoccupants sont les plans concernant "au moins six colonies sauvages" (sur une centaine) qui risquent d'être pérennisées, et les projets de création de nouvelles extensions dans le secteur de Bethléem (17 000 logements) et de Maale Adumim à l'est de Jérusalem, où il est prévu de faire passer la population de 33 000 habitants à 104 000.Ce dernier secteur est particulièrement sensible, car la construction planifiée de milliers de logements permettrait de rattacher Maale Adumim à Jérusalem. Surtout, elle couperait la Cisjordanie en deux et fermerait complètement l'accès des Palestiniens à Jérusalem.Comme l'a indiqué, la semaine dernière, Rafik Husseini, le chef de cabinet du président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, "ce serait la fin de Jérusalem-Est comme capitale de la Palestine et la négation d'un Etat palestinien viable et continu".
Jusqu'à présent l'administration américaine a mis son veto à toute édification dans cette zone actuellement vierge de toute construction civile. Mais tout est prêt et le terrain viabilisé.Il ne manque plus que le feu vert des autorités. Plusieurs zones de construction sont déjà programmées, selon les plans fournis par l'Autorité palestinienne. Pour Rafik Husseini, le démarrage des travaux est une question de mois. Il signifierait "la mort de la solution de deux Etats"."Le gouvernement doit établir les priorités, fait remarquer La Paix maintenant. Soit il est intéressé à suivre le chemin de la paix ou alors il décide de poursuivre la colonisation et de continuer à occuper la Cisjordanie, ce qui va nous conduire à des violences et à un conflit perpétuel avec, à terme, un Etat binational."

-Proche-Orient : nouveaux efforts diplomatiques pour sauver le processus de paix
-Israël et la stratégie de victimisation
-Israël et le rapport Goldstone
-Israël confirme la construction de logements dans les colonies de Cisjordanie
-Le défi d'Israël
_________________________
-Etat palestinien compromis?
-Israël: pacifisme en recul
-Palestine:impuissance verbale
-Israël - Palestine : enlisement
-Palestine: silences d'Obama

lundi 14 septembre 2009

Plans sociaux opportunistes

Quand prime la logique financière

-Selon JP Raillard, directeur de la
Syndex, certaines entreprises profitent de la crise pour accélérer des projets de restructuration, selon une logique financière et actionnariale à court terme


-"La crise précipite les événements. C'est d'autant plus vrai quand il y a la pression de l'actionnaire, et cette pression est d'autant plus forte que le centre de décision est éloigné
...
La financiarisation de l'économie a un effet très pervers, elle met beaucoup l'accent sur les objectifs à court terme d'un ou deux ans"-
___________________________

Licenciements: «Un effet d'aubaine dans 40% des restructurations» | Mediapart:
"...S'il paraissait évident, au vu de cas comme Molex, que certaines entreprises profitaient du ralentissement économique pour licencier, il était jusqu'ici impossible de dresser un état des lieux précis. «Il existe un effet d'aubaine dans 40% des restructurations aujourd'hui menées en France», affirme maintenant Jean-Paul Raillard. Pour Mediapart, le directeur de Syndex décrit ces «restructurations qui sortent des cartons», ces plans sociaux opportunistes pour améliorer la rentabilité et satisfaire l'actionnaire, et parfois le «chantage au licenciement»... Un inventaire qui en dit long sur le marasme industriel et la mauvaise qualité du dialogue social en France.
Cet été, nous avons fait le bilan de nos interventions depuis le 1er septembre 2008 : c'est à ce moment-là que les entreprises ont commencé à ressentir le ralentissement. Depuis cette date, Syndex a conduit 200 actions directement liées à la crise, dans le cadre de droits d'alerte déclenchés par les syndicats, de restructurations ou de fusions. Dans cette base d'observation, nous avons constaté que, dans 40% des cas, il existe un effet d'aubaine, plus ou moins important. Nos missions ont l'avantage de concerner tous les secteurs d'activité, toutes les tailles d'entreprise, toutes les régions françaises. Si on extrapole nos constatations, on peut estimer qu'il y a un effet d'aubaine dans 40% des restructurations aujourd'hui menées en France. Pour les autres entreprises, les 60% restants, il s'agit plutôt d'une réponse à la crise, liée à la baisse d'activité ou aux évolutions sectorielles.
Vous avez d'abord les restructurations qui sortent des cartons. Dans notre panel, une quinzaine d'entreprises avaient des projets de restructuration en tête. Elles souhaitaient les mener dans les années à venir. Mais la crise a précipité les choses. Non pas que la société ou le groupe auquel elles appartiennent soit aux abois. Au contraire, elles ont même à leur disposition de nombreuses ressources qui leur auraient permis de passer de toutes façons le cap de la crise. Mais
elles profitent d'un moment socialement plus favorable pour faire passer un projet de restructuration. Elles savent que pendant la crise, alors que les plans sociaux sont nombreux, elles seront moins montrées du doigt. Ce qui est dommageable, c'est l'effet domino : ces stratégies pèsent sur le climat général et accélèrent le sentiment de crise. Ce genre de stratégie concerne plutôt des entités importantes, des grands groupes, par exemple dans la chimie ou la pharmacie...
La crise passant par là, l'activité se réduit. Des entreprises qui ne sont pas en danger immédiat vont en profiter pour améliorer leur rentabilité. A la différence des précédentes, elles n'avaient pas forcément planifié ces évolutions,
elles profitent simplement du contexte comme d'une opportunité pour faire évoluer leur outil industriel, fermer quelques entités, etc. Cela débouche sur des plans de départ volontaires, des fermetures d'entreprises. Dans ces cas, les raisons données aux représentants des salariés pour justifier la fermeture sont parfois très légères. Dans la filière agro-alimentaire, nous avons plusieurs exemples de sites restructurés ou fermés qui avaient fait la preuve de leur rentabilité, mais dont les dirigeants ont tout de même jugé qu'elle était trop faible. Il est aussi arrivé que les directions se contentent d'avancer comme justification des raisons purement conjoncturelles, comme la hausse des matières premières alimentaires du fait de la surproduction mondiale...
dans une quinzaine d'entreprises où nous sommes intervenus, la direction en a profité pour revenir sur un certain nombre d'accords sociaux, en particulier sur les accords de réduction du temps de travail. Il n'y a pas d'effets sur l'emploi, mais des effets sur le salaire qui peuvent être importants. Nous sommes ainsi intervenus dans une entreprise où, après un plan de départs volontaires, la direction a demandé aux salariés de travailler 4h33 de plus par semaine pour le même prix. Ils travaillent plus tout en gagnant autant!

La crise précipite les événements. C'est d'autant plus vrai quand il y a la pression de l'actionnaire, et cette pression est d'autant plus forte que le centre de décision est éloigné. Le cas célèbre d'un sous-traitant automobile qui défraie l'actualité [Molex, ndlr], où la direction n'a même pas essayé de se déguiser derrière une justification économique quelconque, en est un exemple caricatural. Sur place, les directions locales n'ont pas grand-chose à négocier, elles n'ont pas de grain à moudre, elles ne savent pas comment s'y prendre avec les ordres qu'elles reçoivent d'en haut. Les grandes orientations du groupe sont traitées très loin, très haut, et souvent à l'étranger. La financiarisation de l'économie a un effet très pervers, elle met beaucoup l'accent sur les objectifs à court terme d'un ou deux ans – ce qui correspond d'ailleurs en général à la durée du contrat de travail des directions locales!...
L'horizon de l'entreprise est borné à un, deux ans maximum, ce qui entraîne des décisions plus brutales, moins anticipées, moins préparées, et des salariés qui se retrouvent après un licenciement dans des conditions de mobilité plus difficiles. On passe de la création de valeur pour l'entreprise à la création de valeur actionnariale, la pression est telle sur les marchés financiers pour sortir des taux de rendement que les directions ont gratté tout ce qu'elles pouvaient gratter dans l'appareil économique. La financiarisation a souvent supprimé les réserves de fonds propres des entreprises, car il fallait pouvoir servir des dividendes en rapport avec ce que le marché exigeait. On se retrouve donc avec des sociétés fragilisées par rapport à la conjoncture : elles ont plus de mal à résister, à gérer les bas de cycle. C'est le cas dans les grands groupes, mais aussi chez les PME sous-traitantes : pour obtenir des rendements élevés, les groupes donneurs d'ordre ont évacué le risque sur l'ensemble de la filière."

-Des mauvais plans à la pelle
-Des licenciements chez Michelin